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Histoire du Régime Ecossais Rectifié


Il semble difficile d’appréhender la doctrine Rectifiée sans préalablement faire mention de certaines étapes de son développement historique et de certaines structures comme: la Stricte Observance Templière.

Ce système créé entre 1751 et 1755 par le Baron de Hund, sous le nom de Maçonnerie Rectifiée, ne prit le nom de Stricte Observance qu’en 1764 lors du Convent d’Altenberg.

D’emblée, la Stricte Observance se démarqua par son originalité qui fut à la fois de revendiquer la succession des connaissances des templiers et de projeter la restauration de l’Ordre du Temple sur le plan institutionnel.

Composé par cinq grades maçonniques (Apprenti, Compagnon, Maître, Ecossais Rouge, Chevalier de l’Aigle Rose Croix, Ecossais Vert) et par trois grades chevaleresques (Ecuyer, Chevalier Bienfaisant, Chevalier Profès), la structure de la Stricte Observance Templière est celle d’un Ordre de Chevalerie greffé sur celui de la Franc-Maçonnerie.

Cette hiérarchie correspond en fait à l’idée que les membres de la Stricte Observance se font des relations historiques entre l’Ordre Templier et la Maçonnerie.
Selon eux, la Franc-Maçonnerie a été créée pour servir de vivier à l’Ordre du Temple qui survit dans le secret depuis l’exécution de son dernier Grand Maître : Jacques de Molay.

La Stricte Observance se dote ainsi d’une organisation géographique qui reproduit l’ancienne subdivision de l’Ordre des templiers en Provinces. Ces structures sont d’ailleurs conservées dans le Régime Ecossais Rectifié avec cette particularité qu’elles y recouvrent un contenu spirituel différent.

En 1772, la Stricte Observance s’étendit à toute l’Allemagne avant de gagner la Hollande, la Suisse, l’Italie et la France au sein de laquelle, elle fut l’objet d’une réforme qui allait donner naissance au Régime Ecossais Rectifié.

En effet, la Stricte Observance connut en Allemagne de sérieuses difficultés avec le développement d’autres rites templiers dont celui de Zinnendorf.

Soucieux d’éviter une multiplication des rites (Rite des Illuminés, Rite Suédois, Rite de Schröeder) qui aurait à son tour altéré la Maçonnerie Templière en France, Jean Baptiste Willermoz et Jean de Turkheim décidèrent alors de procéder à une rectification et à une restructuration du système de la Stricte Observance dans notre pays.

Ils convoquèrent le Grand Convent des Gaules en Octobre 1778 et commencèrent par réduire le nombre de grades de la Stricte Observance qui passa de 9 à 6 (Apprenti, Compagnon, Maître, Maître Ecossais de Saint André, Ecuyer Novice, Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte).

Dans un premier temps, hostile à la multiplicité des Hauts Grades, Willermoz concentra dans celui de Maître Ecossais de Saint André, la synthèse de ce qui lui parut valable dans le foisonnement des Hauts Grades de la Maçonnerie française du XVIII è me siècle.

Puis avec Jean De Turkheim, ils entérinèrent définitivement les rituels des divers grades au point que l’on peut affirmer aujourd’hui que depuis 1778, les rituels des loges rectifiées qui n’ont pas varié d’une virgule, sont les plus anciens rituels maçonniques d’Europe.

Le Convent des Gaules qui se tint à Lyon en Novembre et Décembre 1778 fut un convent national qui réunit les délégués des Trois Provinces françaises de Bourgogne, d’Auvergne et d’Occitanie. Ce fut une pleine réussite pour Willermoz et Jean de Turkheim qui parvinrent à faire accepter leur projet de réforme : la réforme de Lyon.

Le succès de Lyon fit grand bruit en Europe à tel point que la Stricte Observance adopta elle-même l’idée d’un nouveau Convent qui eut lieu à Wilhelmsbad en 1782. 

Grâce à l’appui et à l’expérience ésotérique des maçons lyonnais, le Convent général de Wilhelmsbad fut un succès diplomatique pour Willermoz, même si les effets concrets du Convent furent plutôt à porter au bénéfice des Illuminés de Bavière.

Bien que les décisions adoptées lors du Convent général n’eurent initialement en Allemagne que peu d’impact au niveau de la Stricte Observance, c’est néanmoins au décours du Convent de Wilhelmsbad et de ses directives, que le système du Régime Ecossais Rectifié, déjà sérieusement ébauché au Convent des Gaules, fut intégralement achevé. 

La Révolution Française va alors décimer les loges et obliger le Rite Rectifié à se replier en Savoie, en Suisse et dans les états germaniques. Celui-ci réapparaîtra en France une première fois au début du dix neuvième siècle mais il ne s’accordera pas avec la mentalité qui règne alors dans les loges reconstituées.

Cette attitude s’explique par le fait que les Maçons rectifiés sont avant tout des mystiques, attirés par les secrets de L’Univers et par ceux de la Divinité.
Le conflit que se livrent à cette époque le Grand Orient et le Suprême Conseil, l’introduction de la politique dans les loges et la course effrénée aux Hauts Grades les ennuient au point qu’ils se replieront de nouveau en Suisse.

En 1910 toutefois, le Rite Ecossais Rectifié traversera les Alpes et resurgira en France grâce à la Loge : Le Centre des Amis et à l’impulsion de frères de grande valeur comme Camille Savoire et Edouard de Ribeaucour.

Parmi les pères de la doctrine du Régime Ecossais Rectifié, il va sans dire que Jean Baptiste Willermoz occupe une place prépondérante. Jurassien, né en 1730 et initié en Maçonnerie en 1750, il fut l’un des principaux introducteurs de la Stricte Observance à Lyon, ville qui à l’époque demeurait un passage obligé pour les maçons les plus réputés tels Cagliostro ou Saint Germain.

En 1763, Jean Baptiste Willermoz y créé d’ailleurs un Chapitre rosicrucien : le Chapitre des Chevaliers de l’Aigle Noir Rose Croix où l’on y étudie l’Alchimie, la Kabbale et l’Arithmosophie (la science des nombres).

La Maçonnerie en France est alors dans un état catastrophique, le Comte de Clermont : Grand Maître de la Grande Loge de France, plus intéressé par les danseuses que par l’Art Royal, délègue en permanence sa charge à ses nombreux assesseurs.

Divisés en courants rivaux, les frères des loges en arrivent fréquemment aux mains, si bien qu’en Février 1767, le Comte de Clermont décrète l’arrêt total des travaux maçonniques dans toutes les loges du royaume.
Les lyonnais cependant continuent à travailler discrètement les grades mystérieux qu’ils découvrent sans cesse..

La même année, en effet, Jean Baptiste Willermoz fait la connaissance à Paris de Martinez de Pasqually qui le reçut dans son Ordre des Elus Cöens de l’Univers. Pendant cinq ans, jusqu’en Mai 1772, date du départ de Martinez pour Saint Domingue où ce dernier d’ailleurs devait décéder, Willermoz entretient avec son maître une correspondance suivie et reçoit régulièrement de celui-ci, des instructions qu’il partage avec les Elus Cöens.

En fait, Jean Baptiste Willermoz pense avoir trouvé dans l’enseignement de Martinez et dans l’Ordre des Elus Cöens de l’Univers, la vraie Maçonnerie, dont la pâle copie qu’il a jusqu’alors côtoyée à Lyon, ne représente pour lui qu’une forme décadente.

Willermoz tient Martinez pour un «…initié dans la haute science secrète de Moïse… » et rapporte que « Le Traité de Réintégration des Etres », l’œuvre doctrinal de Martinez de Pasqually a été « …dicté et dirigé par un agent invisible… ».

Fervent catholique, Willermoz ne semble pas avoir ressenti de difficulté à conjuguer les deux aspects de sa vie spirituelle, en dépit de l’existence dans la doctrine de Martinez de certaines notions dont l’orthodoxie catholique est discutable.

Ceci s’explique par le fait que chez Willermoz, l’attachement aux mystères et aux rites catholiques s’accompagne d’une indépendance d’esprit vis à vis du magistère ecclésiastique et d’une croyance en un Christianisme transcendant toutes les différences de confession et toutes les querelles dogmatiques.

C’est ce Christianisme « transcendental » que l’enseignement de Martinez lui parait expliciter. Ainsi, loin de contredire l’enseignement de l’Eglise, l’enseignement de Martinez, pour Willermoz, lui donne toute sa profondeur.

Parmi les autres relations de Jean Baptiste Willermoz, on trouve le Comte Joseph de Maistre.
Cet ancien élève des Pères Jésuites, grand défenseur du Pape et maçon né selon le concept anglais (il était en effet membre de la loge « les Trois Mortiers » à Chambéry ; loge rattachée à la Grande Loge d’Angleterre) devait rejoindre la Maçonnerie Rectifiée avant de devenir Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte puis Grand Profès.

Citons également Louis Claude de Saint Martin qui résida chez Willermoz au cours de l’année1773-1774, à l’époque même où la Stricte Observance s’implantait à Lyon.
Franc-maçon, martinézien et Rhéau-Croix depuis 1772, le « Philosophe Inconnu » rédigea à cette époque dans l’appartement même de Willermoz, son ouvrage « Des Erreurs et de la Vérité ».Reçu Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte, il abandonna cependant la Maçonnerie pour se tourner vers la Mystique à travers Jacob Böhme.

Comme nous le savons, la doctrine Rectifiée s’alimente à la Bible. Elle établit initialement une correspondance symbolique entre le Temple de l’homme et celui de l’Univers puis propose une projection spirituelle qui va de la Milice de la Terre Sainte à la Jérusalem Céleste à travers le modèle divin et éternel du Christ.

Le Rite Ecossais Rectifié est donc bien chrétien et sa doctrine que nous étudierons dans une seconde planche, apparaît si bien structurée qu’on peut affirmer qu’elle définit un « …Ordre… », c’est à dire : une « cohérence » digne des plus grandes éloges.

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