GLDF Loge : Amour et Spiritualité -  Orient de Gex 25/01/2005

Les Trois Fenêtres du Tableau

I) Introduction : Du symbolisme en général

Pratiquer le symbolisme, c’est regarder ce qui existe comme une grande écriture. C’est trouver un terreau commun, universellement reconnu par tous pour expliquer, définir, préciser mais aussi résumer, faire comprendre, rendre intelligible, un concept, une idée, une notion…

Le symboliste postule que le savoir objectif passe par le savoir subjectif. Le but du symbolisme est de reconnaître la réalité telle qu’elle est et pas comme on voudrait qu’elle soit. Spinoza disait : « Tu dis que tu as choisi une idée parce qu’elle est bonne, sache qu’en réalité tu dis qu’elle est bonne parce que tu l’as choisie ».

II) Les Trois fenêtres du Tableau de Loge d’Apprenti :

Des nombreux symboles qui sont figurés dans « Le Tableau de l’Apprenti » on trouve trois fenêtres.

C’est un symbole qui est souvent négligé, qui n’existe pas sur tous les tableaux de loge (on en trouve au REAA et au Rite Français), pas au Rite Ecossais Rectifié et au Rite Emulation. On considère souvent (= les auteurs maçonniques) ces fenêtres comme une survivance de la Maçonnerie opérative, leur attribuant simplement une fonction purement pratique.

Le plus ancien texte maçonnique connu qui fait référence à des fenêtres est le « Masonry Dissected » de Samuel PRITCHARD en 1730, qui parle des fenêtres du Tableau de Loge comme des « lumières immobiles ».

1) Interprétation « officielle » :

La première fenêtre est à l’orient, la seconde au midi et la troisième à l’occident. Il n’y a pas de fenêtre au septentrion (= nord). Ces trois fenêtres représentent selon PLANTAGENET (in « Causeries en loges d’apprentis », éditions Dervy) les trois portes du Temple de Salomon.
Cette idée pourrait paraître paradoxale en considérant le fait qu’un Atelier maçonnique est supposé être isolé du monde extérieur.

Selon Jules BOUCHET (in « La Symbolique Maçonnique », éditions Dervy) : Il n’en est rien car ces fenêtres sont protégées par un grillage, ce qui soustrait le travail des ouvriers à la vue du profane dont le regard ne sait pénétrer dans le Temple, mais il souligne que le regard du Maçon n’est pas arrêté lui par le même obstacle, ses perspectives étant différentes.

Le Maçon ne peut pas en effet « matériellement » regarder la vaine agitation de la rue puisque autour de lui tout est clos, mais il ne doit pas moins, « spirituellement », être capable de déterminer le mouvement du monde sensible vu du point de vue où il se trouve.

On sait par la Bible (1er Livre des Rois, VI, 4) que « Le Roi Salomon a bâtit une Maison et lui fit des fenêtres à cadres et à grilles fixes ».
On ignore tout du nombre et de la disposition et de la forme des fenêtres mais on sait par contre de façon certaine que le Temple s’ouvrait à l’Est et non à l’Ouest comme la plupart de nos cathédrales, il était ainsi éclairé par le soleil à son lever.

Il n’y pas de fenêtre au nord parce que le soleil n’y passe pas. Les fenêtres sont grillagées non pas pour interdire au profane de regarder dans le Temple car si celui-ci était éclairé intérieurement un simple grillage ne suffirait pas pour empêcher de voir ce qui s’y passe, mais bel et bien pour défendre l’accès au temple tout en lui conservant un contact avec le Monde qui l’entoure.

Selon Jean FERRE (in « Dictionnaire des symboles maçonniques », édition du Rocher) la forme de ces fenêtres varie : sur certains tableaux de loge en effet les fenêtres sont rectangulaires et présentent trois barreaux verticaux et trois barreaux horizontaux. Sur d’autres elles ont une forme en « anse de panier » avec un barreau vertical et deux barreaux horizontaux. Sur d’autres encore, elles sont en ogive avec un grillage très serré.

Les Maçons auraient donc laissé aller leur fantaisie au gré de leurs inspirations et des époques, n’ayant aucune indication, aucune précision dans la Bible quant à la forme des fenêtres et à l’aspect des grilles et des grillages.

On trouvera en détail des éléments très intéressants concernant la forme des fenêtres et leur cadre ainsi que les grilles et grillages qui les obstruent dans « Les Trois Fenêtres du Tableau de Loge » de Didier MICHAUD, aux éditions La Maison de Vie, et « La Symbolique Maçonnique du Troisième Millénaire » d’Irène MAINGUY.

La fenêtre de l’Orient (= est) apporte la douceur de l’aurore, son renouveau d’activité, la vie qui renaît chaque matin après l’apaisement de la nuit, le temps de la réflexion.

La fenêtre du Midi (= sud) apporte la force et la chaleur.

La fenêtre de l’Occident (= ouest) donne une lumière sans cesse faiblissante, qui incite au repos. C’est aussi le côté de la porte de sortie du temple, vers le monde profane, où le frère ira rayonner. C’es aussi l’accès vers la salle des banquets où les frères vont faire vivre et circuler le Verbe durant les agapes.

Le Septentrion (= nord), obscur, ne recevant aucune lumière, n’a pas besoin de fenêtre.

Les travaux des maçons commencent symboliquement à Midi, quand le soleil brille de toute sa force, rayonne au maximum, ce qui est propice au travail, à la réflexion, au partage… Les travaux se terminent symboliquement à Minuit, lorsque l’astre du jour s’est couché, est invitant à la détente, au repos, à la réflexion solitaire, à la décantation des idées développées durant la tenue.

Classiquement, et c’est l’explication la plus couramment admise, les trois fenêtres permettent ainsi aux ouvriers, les apprentis maçons, de recevoir la lumière dans le Temple avant, pendant et après les travaux de l’Atelier.

Les Apprentis sont placés au Septentrion (= nord) de l’Atelier, là où il n’y a pas de lumière, car ils ont bien entendus besoin d’être éclairés et ils reçoivent ainsi la pleine lumière de la fenêtre du Midi, l’intensité maximale propice à leur maturation. Selon certains auteurs les apprentis « sortent à peine des ténèbres » (= le cabinet de réflexion), ils sont encore dans le froid et l’obscurité, leur colonne n’est que faiblement éclairée par un croissant de lune.

Les Compagnons, placés au Midi, ont besoin de moins de lumière et l’ombre portée par le mur du temple les éclaire suffisamment, car ils ont déjà une certaine connaissance qui les illumine.

Les Maîtres ne reçoivent plus de lumière puisque par leur accession à la maîtrise ils deviennent eux-mêmes les lumières de l’Atelier.

Le Vénérable est ainsi à l’est, au début du jour, il ouvre la loge et met les ouvriers au travail. Par contre les Surveillants sont alertés dès l’Aurore par la lumière qui vient les frapper. Ils se tiennent donc à l’ouest, pour fermer la loge, renvoyer les ouvriers et les payer. La loge, à travers les symboles de son tableau tracé à chaque début de tenue et effacé à chaque fin de travail, assiste à la naissance permanente de la lumière.

Il est dit que le Temple est à l’image de l’univers. Selon Didier MICHAUD (in « Les Trois Fenêtres du Tableau de Loge », éditions La maison de Vie) qu’il est le « lieu sacré et couvert où la lumière naît d’elle même par la communion avec les symboles ».

La lumière vient du ciel qui est la Voûte Etoilée de la Loge et est transmise par le tableau qui est le cœur de la loge.

Si la Lumière naît d’elle même dans le temple, quel besoin y aurait-t-il de fenêtres pour l’éclairer ? Si le Temple est supposé représenter symboliquement l’univers, donc être un tout par lui-même, sur quoi des fenêtres sont-elles supposer l’ouvrir ? Avec quoi permettent-elles de communiquer ? D’où cette question étrange de prime abord : ces fenêtres sont-elle réellement des ouvertures ?

Si l’on a besoin d’un certain nombre de symboles pour célébrer le rituel maçonnique, la présence physique d’ouvertures dans les murs est tout à fait inutile, et pourrait même nuire à la parfaite « couverture » du Temple. Ce qui est fondamental en revanche c’est qu’elles soient présentes sur le tableau de Loge, là est leur véritable place.

Pour faire un parallèle avec les temples de l’ancienne Egypte il est intéressant de signaler que beaucoup de ceux-ci présentent des pièces, des salles largement ouvertes sur l’extérieur et d’autres qui pour certaines sont totalement closes, sans aucune ouverture ni porte.

On trouve ce type de salles totalement murées dans le temple d’Abydos et dans la pyramide de Meïdoum. De même on trouve aussi des fausses fenêtres sculptées en façade, a des fins décoratives et symboliques mais sans aucune vertu lumineuse, physique en tout cas (temple d’Hermopolis, église Saint Sernin de Toulouse car au moyen-âge nombreux sont les monuments qui intègrent ce type de symbolique à leur architecture).

Nul besoin concret de fenêtre, puisque c’est là que naît la Lumière initiatique, qui n’a plus rien à voir avec celle, physique et mesurable, visible au dehors.

Mais qu’est ce qu’une fenêtre ?

Le Dictionnaire Historique de la langue Française définit la fenêtre comme une ouverture pratiquée dans un mur. Il précise que son étymologie latine « fenestra » a été mise en relation avec le mot grec « phanein » qui signifie « venir à la lumière », « apparaître ».

Il est intéressant de noter également que le même dictionnaire nous apprend qu’à partir de 1690 on a appelé « fenêtre » une ouverture laissée libre dans un texte notarial ou un acte de justice pour le compléter ultérieurement en cas de besoin.

Ainsi, cette « ouverture », qu’elle soit dans un mur ou dans un texte transmute t-elle de l’espace en temps.

Les fenêtres du Tableau de Loge ouvrent le temple sur un temps : celui de la vie de la Lumière, apparaissant à l’orient et se revoilant à l’Occident.

Il y a analogie entre lumière spirituelle et lumière matérielle.

Toujours parmi les termes actuels qui relient l’espace et le temps on trouve la notion astronautique de « fenêtre de tir » qui délimite un espace temps disponible pour lancer un engin spatial. Cette « fenêtre de tir » existe aussi dans le temple pendant la Tenue pour nous permettre d’atteindre nos objectifs spirituels.

Dans une Loge la Lumière venant de l’Orient éclaire les Travaux et l’on peut dire que, avec ou sans fenêtre, la Lumière est bien dans le temple, et pourtant trois fenêtres sont tracées sur le Tableau de Loge à l’ouverture des travaux.

Sur quoi peuvent donc bien ouvrir les fenêtres ? Sont-elles d’ailleurs des ouvertures puisqu’elles sont équipées de grilles ?

Une fenêtre est un lieu de passage, elle implique donc un échange. Elle est le moyen pour passer d’une lumière secrète à une lumière révélée et réciproquement. Par les fenêtres ou les grilles, contrairement aux portes, qui sont aussi des ouvertures, seuls la lumière et l’air peuvent passer, ainsi que les sons.

Mais pas l’homme ! : ne passe que ce qu’il y a de plus sacré : rien d’humain…si ce n’est le regard et la voix. Mais dès lors que les fenêtres dont il est question ne sont pas des ouvertures dans les murs mais des symboles sur le Tableau de Loge, il convient de se demander de quelle lumière, de quel air, de quel regard, de quelle voix il s’agit.

C’est un auteur catholique, l’évêque-architecte Guillaume DURAND DE MENDE, au XIIIème siècle qui nous donne une certaine réponde à la question : (in « Les trois Fenêtres du tableau de Loge » de Didier MICHAUD, éditions La Maison de Vie) : « Les fenêtres de l’Eglise sont les Divines Ecritures qui repoussent le vent et la pluie, c’est à dire qui empêchent d’entrer dans l’église ce qui pourrait nuire à l’édifice et aux fidèles qui y sont rassemblés (= le Temple et les Frères). Tandis qu’elles livrent passage à la clarté du vrai soleil (= le Grand architecte de l’Univers) dans l’église, c’est à dire dans le cœur des fidèles, elles illuminent ceux qui habitent en son sein.

Les fenêtres représentent encore les cinq sens du corps : leur forme signifie qu’ils doivent être resserrés au-dehors, afin de ne pas attirer en eux les vanités en ce mondes et qu’ils doivent s’épanouir au-dedans pour recevoir plus largement et plus libéralement les dons spirituels ». (in « Manuel pour comprendre la signification symbolique des cathédrales et des églises » de Guillaume DURAND DE MENDE, rééditions aux éditions Fuveau.

Samuel PRICHARD, en 1730, dans le plus vieux texte maçonnique faisant référence aux fenêtres, associe celles-ci aux points cardinaux. Il y aurait donc une notion d’orientation. Mais alors pourquoi trois fenêtres et pas quatre ?Est-ce parce qu’on a besoin de représenter la Lumière sous une forme ternaire ?

L’homme n’étant pas orienté à sa naissance est, dès son initiation, orienté par la Lumière spirituelle du temple de l’orient à l’Occident en passant par le Midi. L’orientation dont il s’agit ici n’est pas matérielle, géographique, mais spirituelle et ésotérique. Ainsi l’Orient Eternel est-il l’axe communautaire permettant à chacun d’orienter sa vie, de recueillir l’Air lumineux, élément vital qui fait s’accomplir la fonction pour laquelle l’être est destiné. L’air orienté transporte la Lumière et le Verbe.

Les fenêtres seraient-elles faites pour entendre ?

Le Temple représente la totalité de l’univers, il est la grande demeure symbolique qui perçoit la nature de chaque chose au travers des symboles. Il est le foyer de lumière, point de convergence entre la Lumière « visible » dispensée par le soleil et la Lumière secrète qui naît dans le cœur mystérieux. Les murs du Temple ne sont pas la frontière entre le monde initiatique et le monde profane, mais la frontière de pierre entre le monde visible et l’invisible.

En accédant à la Lumière, le nouvel initié vit rituellement et symboliquement une naissance qui le conduit vert une mort.

Le Temple est donc un lieu de passage qui met en contact le temporel et l’intemporel, le monde dans lequel se déroule notre existence et celui de l’au delà, le monde de ceux qui ont vaincu une certaine forme de mort.

La lumière est souvent considérée comme la région de la conscience qui est une étape majeure de la connaissance.

Il faut remarquer que ce lieu où se trouvent les initiés passés à l’Orient Eternel est lui-même dépourvu de toute ouverture.

C’est avec ce « monde sans fenêtre » que permettent de communiquer les fenêtres du tableau de Loge, elles font entrer dans le Temple ce qui n’est pas « sorti » de l’Orient Eternel, mais ce qui est transmis.

Le Temple est une sorte de sas entre les mondes, les mettant en relation, par le biais des trois fenêtres, c’est le réceptacle de la Lumière spirituelle dont l’origine est céleste.

Les fenêtres mettrent en contact les frères avec la parole de ceux qui sont passés à l’Orient Eternel, permettant ainsi de prolonger la Tradition, de transmettre le Verbe. Elles sont un relais entre la bouche des Anciens et les oreilles des frères présents dans la Loge, selon une chaîne ininterrompue. Elles incarnent la Tradition initiatique. C’est ce que le Moyen Age a magistralement reformulé en plaçant sur les vitraux des églises les paroles imagées des Ecritures Saintes.

Le Verbe, langage sacré, est transmis par l’air de la Loge. N’était-il pas d’ailleurs au Moyen Age intitulé la « langue des oiseaux », ce qui rappelle sa nature aérienne ?

Les fenêtres en faisant entrer la lumière participent à la création d’une pénombre propice à la vision de la Lumière, pénombre qui par comparaison, permet de faire ressortir la Lumière. Les barreaux et les intervalles créent donc des jeux d’ombre et de lumière, mettant en œuvre de manière on ne peut plus simple la dualité créatrice.

La notion d’ombre est bien plus riche que le sens que l’on attribue habituellement à ce mot puisqu’elle est l’image projetée par la lumière en éclairant l’ensemble d’un être ou d’une chose. Sans ombre, sans contraste, la Lumière est totalement invisible.

L’ombre et la lumière font partie d’une même entité. D’ailleurs en égyptien hiéroglyphique les mots « lumière » et « ombre » sont formés sur la même racine. C’est le mot lumière « shou » qui sert de racine à « ombre » « shouyt».

La Lumière est ce vide entre ciel et terre, vide nécessaire car sans lui, la vie n’aurait pas d’espace où s’épanouir et s’accomplir.Ce vide est occupé par l’Air lumineux.

Les trois fenêtres orientent cet Air Lumineux dans la Loge et lui permettent de faire circuler le Verbe dans le Temple.

L’Air Lumineux sépare le ciel et la terre, c’est le prototype parfait du pilier unique soutenant le ciel. Certains auteurs maçonniques voient là une nouvelle cardinalisation du monde et même l’origine des trois Grands Piliers.

Dans les temples égyptiens, c’est par le haut, au niveau des architraves et des dalles de plafond qu’était assurée la solidité de l’édifice, le sol sablonneux étant meuble. C’est tout en haut, près du plafond que se trouvaient les fenêtres. Situées très haut, elles ne permettaient que la vision du ciel, et pas celle du paysage environnant, mais unissaient indissociablement la lumière céleste à l’ouvrage de pierre. Ainsi étaient reliés de façon stable Ciel et Terre.

Par ces fenêtres là, la Lumière trouve sa place sur terre et rend possible la perception du sens de la vie par la construction du Temple, ce temple qui est inaccessible au monde profane et ne s’ouvre en permanence que sur le ciel.

Tout temple maçonnique est le lieu de réunion du ciel et de la terre. Les fenêtres sont donc indispensables sur le Tableau de Loge, elles nous apportent symboliquement la Lumière que génère le ciel.

Une fenêtre au Septentrion (= au nord ?) :

Certains auteurs avancent, pour expliquer l’absence de fenêtre au nord, le fait que les loges des bâtisseurs médiévaux étaient adossées le plus souvent au mur sur des cathédrales, on comprendra aisément pourquoi (soleil).

Une fenêtre au nord de la loge aurait en fait directement donné sur contre ce mur, ce qui n’aurait pas eu beaucoup de sens ni d’utilité. Cela ne suffit pas à expliquer l’absence de fenêtre au septentrion sur notre tableau de Loger car il ne s’agit pas là d’un édifice et rien ne s’opposerait au fait qu’on y trace une fenêtre de ce côté si telle devait être sa place symbolique.

Mais les cathédrales et les temples antiques comportent des ouvertures et des fenêtres y compris au nord. C’est donc sur un autre plan que celui simplement architectural qu’il nous faut chercher cette absence de fenêtre septentrionale sur notre Tableau de Loge.

Mais cette quatrième fenêtre, est-elle vraiment absente ou seulement non matérialisée ?

Sur sa colonne sans fenêtre l’apprenti reçoit la lumière des trois autres, celle du mystère de la création.

Chaque grade de l’initiation passe par un certain chemin, obéit à certaines règles, passe par une certaine grille ou filtre qui pourrait très bien être symbolisé par cette fenêtre. Si l’apprenti ne passe pas par ces points obligés, s’il est arrêté par cette grille, il n’accédera pas à la Lumière de la première fenêtre.

Le Tableau de Loge est lui même la quatrième fenêtre, la fenêtre du nord. Ce Tableau, cette « fenêtre » porte conceptuellement l’ensemble du Temple et les outils de sa construction. Le Tableau de loge au centre du Temple, fenêtre du nord, ouvre sur trois fenêtres, trois grilles qui montrent ce qui ne variera jamais, tells des étoiles fixes à jamais dans le ciel autour du pôle du monde.

Au nord s’il n’y pas de fenêtre il y a au moins une porte, celle de l’entrée du temple, par où passe l’apprenti le jour de son initiation pour qu’après le retrait du bandeau lui soit donnée la Lumière qui va le féconder.

Il est absolument faux de dire qu’aucune lumière ne vient du nord. Tout au contraire, l’éclairage par le nord est très intéressant, car la lumière qui en provient est stable.

Par grand soleil elle ne subit pas en effet les variations des trois autres directions. C’est la raison pour laquelle les professions en rapport avec les couleurs préfèrent éclairer leurs ateliers par le nord, c’est le cas des peintres et des tailleurs de pierres précieuses qui ont besoin de pouvoir comparer les coeur des pierres avec une référence commune qui soit constante.

La fenêtre du nord est invisible parce que la lumière qu’elle reçoit l’est aussi. La Lumière du nord reste secrète.

A la différence des autres points cardinaux perçus facilement par le trajet apparent de l’astre solaire, il faut pour avoir une vision du nord, observer de nuit le mouvement céleste autour d’un point de fixité, l’étoile polaire.

L’apprenti est au nord et reçoit donc la lumière de la création, il est à l’origine de la perception de la parole du Grand Architecte de l’Univers, il vit le premier jour de la Genèse, celui où la lumière fut séparée des ténèbres.

Manque-t-il donc vraiment une fenêtre au nord ?

Les fenêtres ordonnent l’espace en faisant venir les paroles des Initiés passés à l’Orient Eternel. Le nord recèle une fenêtre qui n’a pas besoin d’être tracée comme les trois autres, car elle donne une parole qui appartient à la préparation, à la maturation, qui se traduit par un temps long. Cette parole toujours transmise semblable à elle-même est le silence.

2) Interprétation « officieuse », alternative :

Au delà de l’interprétation que l’on vient de présenter, il existe une explication différente de l’orientation des fenêtres du temple en fonction du placement des maçons suivant leur grade puisque ces fenêtres sont des ouvertures virtuelles et que le temple est éclairé intrinsèquement par lui même, par la lumière émise spirituellement par les frères qui composent l’Atelier et par le feu sacré qui l’anime et qu’on ranime à chaque début des travaux.

Il y a en effet une interprétation architecturale des fenêtres du Temple, qui serait en relation avec les impératifs du relief qui cerne la ville sainte de Jérusalem où s’implantait le Temple de Salomon à l’origine. Cette hypothèse est le fait de Jean FERRE (in « Le dictionnaire des symboles maçonniques, éditions du Rocher »). Cette interprétation ne remet pas en cause bien entendu le cycle solaire que l’on utilise pour nos travaux en loge mais évoque une possibilité d’expliquer la présence de ces fenêtres par une autre voie symbolique, dictée par l’implantation de la ville de Jérusalem et de son environnement immédiat.

On a fait référence à ces fenêtres du Temple en citant le 1er Livre des Rois, dans la Bible, au début de cet exposé. Ce serait d’ailleurs pour cela que l’orientation des Trois portes du temple de Salomon et celle des trois fenêtres ne correspondent pas. Il n’est en effet nullement question de trois fenêtres puisqu’on l’a dit en commençant ce rapport on ne connaît ni le nombre exact ni la forme de ces fenêtres.

Il est fort possible que ces trois fenêtres aient été choisies simplement pour des raisons d’ordre symbolique liées au ternaire.

Comme on l’a vus plus haut l’interprétation « officielle » est que les grilles des fenêtres sont là pour interdire au profanes de voir ce qui se passe dans le temple. On pourrait penser également que ces grilles sont là pour empêcher tout être non-initié de fouler un sol sacré, la porte d’occident étant gardée et défendue par le Frère Couvreur et son épée.

Revenons au Temple de Salomon et à la ville de Jérusalem :

L’auteur romain Tacite les a décrit situés en position difficile à conquérir. De part la présence en ses murs de l’Arche d’Alliance, la ville est au centre du monde.

Alexandre DUMAS décrit ainsi la cité : « David est donc maître d’un formidable emplacement ; il a pris pour centre de défense trois montagnes reliées par leurs contreforts même : Sion, Acra et Moriah. Il a trois fossés gigantesques à l’orient, au midi, et à l’occident. Au nord seulement, la nouvelle ville ainsi construite est fragile,vulnérable ».

Aussi est-ce par le nord que, malgré sa triple muraille, l’attaqueront successivement Nabuchodonosor, Alexandre le Grand, Pompée, Titus (qui fera détruire le temple en l’an 70, il n’en subsistera que le mur occidental, le Mur des lamentations) et Godefroy de Bouillon (durant la première croisade en 1099).

L’explication des trois fenêtres du temple pourrait tout à fait tenir en ces quelques lignes :

Toutes les directions sont naturellement protégées par le relief, sauf le nord. Quoi de plus normal donc de ne pas percer de fenêtres de ce côté vulnérable, mais de permettre à la lumière de pénétrer par l’Orient, le Sud et l’Occident, parfaitement défendus par des à-pics, la sécurité des ouvertures ainsi pratiquées étant encore accrue par des grilles.

III) Conclusions :

Les différentes interprétations que l’on a évoqué ce soir concernant les trois fenêtres de l’Atelier peuvent susciter des contradictions, c’est le but de l’initiation et de la bonne utilisation des outils qui nous sont proposés que de trouver l’explication adéquate.

Que l’on ait besoin d’éclairage pour travailler en loge et que des fenêtres soient le meilleur moyen de faire entrer la lumière naturelle est une évidence. Or symboliquement les Maçons travaillent de « Midi à Minuit » et à cette heure-là il nous faudrait une lanterne en sortant…

Les fenêtres sont symboliques car un Temple Maçonnique est un lieu totalement clos…il s’illumine donc par lui-même, par ses occupants et par le rayonnement des initiés passés à l’Orient Eternel qui nous transmettent le Verbe par ces fenêtres.

Nous sommes réputés libres et de bonnes mœurs pour travailler ensembles ici, nous devons aussi faire preuve d’une grande « ouverture d’esprit » pour faire un parallèle imagé avec les trois fenêtres du Temple.

Je me trouve en tant qu’apprenti au tout début de mon parcours initiatique.Tel un nouveau né je sort de mon silence gestationnel pour pousser mon premier cri, ou plutôt mes premières réflexions par le travail de ce soir.

Je respire à peine l’air du monde que vous me faites l’honneur et la joie de partager en m’accueillant parmi vous mes frères.

Il y a peu de temps encore, le 5 novembre 2003, jour de mon initiation à la Loge ZOROASTRE de l’Orient de Metz, je me retrouvais dans les ténèbres, seul, à remplir mon testament philosophique, comme si j’allais mourir, ou plutôt renaître ?

Si le nouveau-né ressent une émotion à la sortie du ventre de sa mère, elle pourrait être similaire à ce que je ressens chaque fois que je m’éclaire de vos lumières dans le Temple, renaissance ou nouvelle naissance ?

Je rassemble chaque jour, petit à petit les outils symboliques de ma construction, de mon édification, de mon parcours initiatique, afin d’œuvrer grâce à la Lumière des quatre (ou plutôt trois plus une) fenêtres du Temple, à l’amélioration du monde, à l’organisation de mes idées, à l’amour et à la Fraternité.

J’ai dit, Vénérable Maître…

C\ L\


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