Obédience : NC Loge : NC 12/2015

 

Réflexions sur les 2 St Jean

Nous sommes réunis ce soir pour célébrer la Fête de la St Jean d’Hiver ou Fête de Jean l’Évangéliste.

Or, cette référence à Jean ne nous quitte plus, depuis que nous sommes entrés en Maçonnerie,

- « Loge de Saint Jean »,
- ou « le Volume de la Loi Sacrée est ouvert au Prologue de Jean ».
- l’intérêt du sujet de ce jour aujourd’hui est que nous célébrons la Fête de St Jean d’Hiver avec
cette précision « l’Évangéliste ».

Pour prendre bien la mesure du thème proposé par le V\ M\ ; « le Prologue de Jean, une morgue chaîne qui rend témoignage à la lumière », il nous faut élargir le contexte en précisant le sens de certains mots aussi précisons tout d’abord le sens à donner à la Fête...

Dans toute société, la fête est comprise comme un temps particulier, réminiscence de repères ou créateur de rupture.

Dans une société de type traditionnel comme la F\ M\ régulière, la fête est comprise comme le moment d’une expansion du sacré, moment où la communauté s’exprime intégralement moment où temps sacré et temps profane communiquent.

Il s’agit du rétablissement d’une communication avec l’être, d’une sorte de rencontre où le sacré reprend en charge la réalité humaine et la régénère, le temps de la fête devient le temps mythique, le temps originel.

La fête est re-création, en même temps que récréation.

Et, pour l’événement d’aujourd’hui, cette célébration du temps originel a lieu à l’entrée de l’hiver...au solstice d’hiver...

Quel est est le sens de cette célébration du temps originel au solstice d’été en liaison avec le Prologue de Jean et le rituel maçonnique ?

Les deux fêtes solsticiales :

Les deux fêtes solsticiales (d’Hiver et d’Été) ont lieu aux deux points extrêmes de la course du soleil, aux deux points extrêmes de la « vie » du soleil dans le cycle annuel : elles induisent la même notion d’une liaison entre lumière et vie.

Chacune de ces fêtes figure un passage, comme par une porte : et pour nous, qui avons dû franchir une porte basse pour acquérir l’initiation, cette notion de porte prend une grande importance car, sur un plan traditionnel, on considère symboliquement que

- la descente vers l’hiver (vers l’obscurité) est le chemin, la voie des hommes (sur terre) : le solstice d’été = Jean le Baptiste, est la porte des hommes vers un retour dans l’obscurité de notre monde terrestre.

- au contraire, la montée vers l’été (vers la lumière) est le chemin, la voie des dieux (vers la
lumière) :

le solstice d’hiver = Jean l’Évangéliste, est la porte des cieux vers une voie de libération lumineuse, vers le monde de l’esprit.

Donc il est difficile de dissocier les deux Fêtes qui sont complémentaires.

Cette célébration des fêtes solsticiales est un invariant mythique : les hommes célèbrent ces deux fêtes depuis longtemps, et cette notion de porte solsticiale est déjà bien décrite par exemple en Inde au Xème siècle avant notre ère dans la Bhagavad-Gita et aussi, plus tard chez les Perses et chez les Pythagoriciens.

Mais pour les Maçons, cette célébration des fêtes solsticiales est la poursuite de la coutume des corporations d’artisans romains qui avaient pour dieu Janus qu’ils honoraient aux 2 solstices.

Les deux Saint Jean

Plus tard, avec le christianisme, les fêtes solsticiales de Janus furent remplacées par celles des deux Saint Jean. Les Saint Jean, tout comme le soleil en Franc Maçonnerie, sont les représentations symboliques du principe unique et universel, du Feu-Principe, de la Lumière, source du monde physique et intelligible, émanation et manifestation initiale de la
Cause Première à l’ouverture, le V\ M\ dit: « Et que nos regards se tournent vers la Lumière »

Comment cela s’intégre-il dans notre démarche ?

Sans employer de termes théologiques, qui seraient ici incongrus, rappelons que :

- pour Jean Baptiste, est important le baptême dans l'eau : cette immersion

- est bien différente des ablutions rituelles de la loi mosaïque,
- elle symbolise la purification morale acquise par une vraie « conversion du coeur ».

Ainsi il se considère comme seulement le Précurseur : « il faut qu'il croisse et que je diminue ».

Son animal est le coq, celui qui figure sur les clochers des églises ; et pour nous le coq est l’oiseau d’Hermès : sa présence au premier degré, dans le cabinet de réflexion, n’est donc pas innocente, en symbolisant celui qui annonce la lumière, sur la voie « des hommes », les pieds sur la terre.

En fait, couplé à V\ I\ T\ R\ I\ O\ L\, il nous invite à descendre dans l’obscurité du plus profond de nous pour y chercher, là, caché, ce qu’il y a de meilleur et pour remonter ensuite avec la lumière de l’Évangéliste.

- pour Jean l’Évangéliste, nous sommes en présence d’un « Maître Spirituel », qui offre à tous les hommes un message universel : la possibilité d’une réalisation vivante, l'incarnation, la révélation parfaite et absolue de la vocation de l'homme selon la pensée du Créateur.

C’est la volonté de transformer l’homme, aujourd’hui, pour qu’il « naisse à nouveau...d’eau et d’esprit » et pour lui permettre de participer à l’oeuvre du Créateur, participation qui amène l’homme à devenir « libre ». Le moyen de cette transformation se résume par un mot agapè = l’amour ; quand Jean dit : « Aimez vous les uns les autres », il exprime que l’amour pour les hommes est le chemin qui mène à l’amour de Dieu.

Le message de l’Évangéliste nous amène vers le haut ; comme l’aigle qui le symbolise, il nous convie à voler sur la voie « des dieux » dans un baptême de l’esprit. Cela indique que la compréhension du message johannique est un des piliers de l’écossisme.

Ainsi Jean préside notre initiation, ce passage des ténèbres à la lumière...

Pour chacun d’entre nous, l’initiation a constitué une rupture de niveau de conscience, rupture avec l’état que nous, devenus maçons, nous appelons profane : cette rupture a pour objet de re-créer un « homme véritable » dans le « vieil homme » que nous étions.

Ce parcours étant en réalité une véritable transformation alchimique de l’être, cette rupture constitue un engagement fondamental décisif : car, le jour de son initiation, en franchissant, courbé, la porte basse de la Loge, l’homme y détermine son destin : plutôt que de rester dans les ténèbres du monde, il a choisi, par l’initiation, d’orienter sa vie en se tournant vers la lumière, terme à prendre dans son sens ésotérique et cosmique. ... « et que nos regards se tournent vers la lumière ».

Et, en reprenant les premiers mots de la Genèse, le Prologue de Jean souligne cette liaison de vibrations établie entre Verbe, création et Lumière ; par la Parole, « qui a séparé » les ténèbres, la création est un acte d’amour du Créateur ; et la Vie est le résultat de l’amour.

Avec cette notion fondamentale, énoncée par Jean : rester dans la Parole permet de connaître la Vérité et Jean rapporte : « vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres », ainsi cette Vérité « affranchira » celui qui restera dans la Parole.

Le mot clé est : « affranchira », ou « rendra libre » ou « libérera » ; car, en réalité, tel est l’enjeu.

Et en restant dans une application purement maçonnique, la Vérité doit être recherchée à partir de ce qui nous est dit au premier degré :

« Frappez et on vous ouvrira la porte ;
cherchez et vous trouverez la Vérité ;
demandez et vous recevrez la Lumière ».

Ce tryptique « porte, vérité, lumière » exprime la nécessité d’une recherche, de la recherche de nous-même.

La démarche, débutée par V\ I\ T\ R\ I\ O\ L\, n’est pas de l’introspection ; notre recherche est la construction alchimique de l’homme intérieur, suggérée par le sel-soufre-mercure du cabinet de réflexion.

Mais il s’agit pas d’une démarche isolée et égoïste. L’initié ne peut réellement progresser dans le chemin écossiste que s’il sait se resituer avec humilité à sa juste place, dans la chaîne des autres hommes qui sont ses frères et s’il se soumet au commandement d’amour, indissociable de notre démarche : c’est ce que Jean dit dans sa première l'Épître : « Celui qui aime son frère demeure dans la lumière » car l’amour fraternel (l’amour de l’autre) est le seul capable de nous conduire à l’amour de l’Autre, avec le grand « A » de la transcendance.

Sur ce chemin à la fois solitaire et solidaire, nous sommes donc conviés à une mutation alchimique qui ne peut se réaliser ni par le raisonnement ni par la philosophie, mais par la voie symbolique et qui nous conduira à la réalisation de l’homme authentique, pour retrouver en nous-mêmes l’être que nous sommes véritablement, un vrai Enfant de la Lumière.

J’ai dit.

L\ S\ J\

Étymologiquement Ianus dérive d’une racine indo-européenne, signifiant « passer » ou « engendrer ».

Janus est le Dieu des portes principales Nord-Sud de la Ville, c’est aussi le dieu de tout acte qui commence : c’est le dieu des naissances (régénération de l’énergie cosmique) et le dieu des renaissances (c’est le dieu de l’initiation, commandant la porte étroite qui mène à la libération).

Les hommes célèbrent ces deux fêtes depuis longtemps, et cette notion de porte solsticiale est déjà bien décrite par exemple en Inde au Xème siècle avant notre ère dans la Bhagavad-Gita et aussi, plus tard chez les Perses et chez les Pythagoriciens.

Nous sommes enrôlés dans un processus d’évolution ontologique individuelle, pour devenir les soldats d’un combat dont le but collectif est clair : lutter pour que notre monde profane ne se perde pas dans « le Royaume de la Quantité » et cette libération, pour devenir universelle, ne sera possible que si, par l’initiation, les hommes nouveaux assument la charge de se faire de vrais témoins de l’Amour.


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