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Impressions d’initiation à la franc-maçonnerie

Tout d’abord c’est la première fois que je m’exprime devant vous mes frères en qualité d’apprenti, et je tenais donc à vous remercier. Vous remerciez d’avoir su détecter en moi ce besoin de chercher sans cesse la vérité, d’évoluer dans un monde pourvu d’obstacles et de toujours travailler avec l’aide de mes frères maçons.

Je suis né pour la deuxième fois le samedi 3 mars je sais que mon entrée dans la lumière de la vie ne fut pas évidente, mais bizarrement elle était de moins en moins douloureuse au fur et à mesure des étapes.

Les yeux bandés, certainement le symbole du profane que j’étais en rentrant dans l’enceinte de la vérité, je me concentre sur mes pas, j’appréhende les contacts physiques avec un mystérieux inconnu à la voix rude et aux bruits inquiétants. Mais je n’ai pas peur, je me sens protégé par celui qui me tient la main. D’ailleurs, durant toute la soirée, je me suis senti en sécurité grâce aux mains de mon accompagnant posées sur mes épaules.

Je rentre dans une pièce, courbé, je ne m’oppose pas un instant, je suis venu chercher la Vérité, celle qui ne vient pas à toi, celle qui demande travail et rigueur et que l’on approche sans l’adopter pleinement.

Je m’assois, je patiente, encore et encore, lors de la précédente soirée, je crois avoir patienté plus de ¾ d’heure et j’ai compris que la patience était l’une des qualités demandées pour être franc maçon, être patient d’attendre, patienter et écouter, patienter et méditer les yeux bandés.

Et c’est à ce moment-là, le moment où on est autorisé à enlever le bandeau, que fut mon premier choc. On est livré à soi-même. Le moi-même qui est en fait un autre. Un accoutrement qui fait de moi une personne lambda, je ne suis plus l’image que je souhaite donner de moi aux personnes qui m’entourent et plus particulièrement dans le cadre de mon travail. Grand moment de solitude. Le sens de ma recherche commence à prendre forme. Dans un premier temps, je reste pendant plusieurs secondes devant ce miroir en faisant abstraction de ce qui m’entoure, je et bizarrement je suis bien, je ne sais rien, je suis totalement dévoué à apprendre et tout le meilleur reste à venir.

Après cet instant d’observation de mon reflet, je fais l’inventaire de ce qui m’entoure. Je vois d’abord plusieurs écriteaux faisant référence à la discrétion, à la curiosité, et à l’humilité. C’est alors que je me demande s’il n’y a pas une part de curiosité dans ma démarche, et si curiosité il y avait, qu’est ce qu’elle allait m’apporter ? Je souhaitais vraiment que le profane que j’étais médite sur dernières questions qu’il pouvait se poser. Et une partie des réponses se trouvaient devant moi, quelles explications pouvais-je donner aux objets posés devant moi :

● A gauche du miroir, le crâne : symbole de la mort, j’étais donc ici pour mourir spirituellement, enterrer mes idées fausses et repartir vers le chemin de la vérité

● Au-dessus du miroir : un coq avec ces abréviations au-dessus V.I.T.R.I.O.L, dont je ne saurais donner sens. Le coq, cet animal qui annonce l’aube d’une journée par son cri, qui nous réveille, mais également le coq qui fait office de girouette pour donner la direction du vent. Suis-je à l’heure actuelle vivant ? N’ai-je pas été finalement somnambule à la vie avant de rentrer dans cette pièce ? C’est aussi pourquoi j’ai été guidé car je ne pouvais trouver le chemin tout seul. Le crâne et le coq ensemble, je dois mourir ce soir pour vivre une nouvelle vie.

● En face de moi le sel, le soufre, le mercure. A cet instant, je ne peux donner un sens qu’au sel, matière qui se crée naturellement, consommé par l’homme de manière vitale. Le soufre et le mercure me laissent perplexes, curieux de connaître la symbolique au cours de mes prochains travaux.

Devant moi, mon testament, je ne sais pas combien de temps il me reste pour le remplir alors j’écris tout ce qui me semble être le plus important à mes yeux. Je pense fort à ma femme, mon fils comme si c’était un testament notarial. Je vais mourir ce soir c’est sûr, mais mourir pour être meilleur, comme une plante qui se meure et que l’on arrose afin qu’elle redevienne resplendissante.

Je pense à mon jumeau, à quoi pense-il en ce moment ? Ça me rassure finalement de ne pas être tout seul…

Et enfin c’est le moment tant attendu, je vais être face à une assemblée et au V . M mais j’ai encore tant à faire pour être accepté parmi ceux qui seront prochainement mes frères.

J’entends une voix haute, une voix imposante. Je suis avec mon frère jumeau et c’est le moment d’affronter ces 3 étapes qui sont l’étape de l’eau, l’air et le feu.

A plusieurs reprises j’entends le mot récipiendaire, un mot qui m’était inconnu avant d’entrer dans le Temple, à plusieurs reprises il m’est demandé si je souhaite toujours rester, qu’il est toujours temps de partir. Je suis bien, encore dans le noir, mais hâte d’être dans la lumière.

Les trois épreuves passent finalement très vite, c’est un rituel exécuté rigoureusement. J’ai mal à force de boiter, mais n’est-ce pas aussi cette pression qui se relâche, tout le stress accumulé qui maintenant se libère ?

On me détache le bandeau et à cet instant je comprends quel est le véritable sens du secret, de la discrétion, et donc je ne pourrais décrire mes impressions sur ce moment unique. On me remet le bandeau et je reviens dans la pièce face au miroir. Dans quelques minutes je deviendrai franc-maçon, dans quelques minutes ma vie aura changé. J’ai un peu de temps pour dérouler ce que je viens de vivre, trois étapes, l’eau, l’air et le feu…je m’attendais à entendre l’étape de la terre, le quatrième élément naturel. Après réflexion cette étape de la terre je l’ai vécu, dans cette petite pièce noire, face au miroir, face à la mort.

C’est alors que je reviens dans le Temple toujours avec le bandeau, et c’est mon parrain qui me l’enlèvera en tenant le miroir et en le baissant pour être face à lui. Encore un autre moment de forte émotion. Je suis à vrai dire un peu déboussolé, j’ai retrouvé la vue mais je suis encore plus perdu que lorsque j’avais le bandeau. C’est alors que je me retrouve encore une fois face à moi-même en tapant avec le ciseau contre la pierre et vient enfin le moment d’apothéose, le moment sacré, cette phrase raisonne encore dans ma mémoire : « je vous crée, constitue et reçois apprenti Franc-Maçon … », on me remet mes premiers outils :

Je suis fier d’être Franc-Maçon !

Une fois assis, cette énigme me viendra à l’esprit : « Je suis ce que je suis mais je ne suis pas ce que je suis car si j'étais ce que je suis je ne serais pas ce que je suis, qui suis-je ? » La réponse à cette énigme est l’homme car l’homme qui suit un cercueil lors d'un enterrement. Il est ce qu'il est (vivant), mais il n'est pas ce qu'il suit (la mort). Car s'il était ce qu'il suit (mort), il ne serait plus ce qu'il est (vivant). mais après avoir vécu cette initiation je me dis que cette énigme finalement n’a plus vraiment le même sens….

V.M brûle mon testament, signe de ma vie de profane. Ce testament ne sera plus que cendres.

Mes frères m’apprennent les premiers actes d’un maçon pour se présenter, j’aimerai faire exploser ma joie, j’aimerai dire merci à tout le monde, mais encore une fois je suis déboussolé, il me faudra me réveiller le lendemain pour revivre cet instant magique, cet instant où on peut se demander si ce n’était pas un rêve.

C’est encore avec une grande émotion que je vous dis : Merci !

J\ F\


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