Obédience : NC Loge : NC 22/02/2001


Le maillet et le ciseau

Avoir à prendre la parole n’est pas chose facile pour un jeune Maçon, et pas même pour moi qui suis pourtant conscient d’être un fieffé bavard. J’ai souvent parlé sans réfléchir et aussi bien souvent oublié d’écouter les autres, et puis lorsque, après avoir été reçu apprenti on m’a imposé le silence, j’ai compris mes erreurs, que l’écoute des autres était source d’enrichissement que dans le silence on trouvait la réflexion nécessaire à tout apprentissage.


Je n’ai pas la parole mais ai mes oreilles, mes yeux pour observer, voir, écouter, penser, déduire et tenter d’analyser.

En tant qu’apprenti Maçon, je regarde à l’occasion des tenues, des premiers voyages et des découvertes avec mes FF, les outils placés dans le temple.

Deux outils symboliques m’ont particulièrement parlé le jour de mon initiation, en tant que maçon opèratif, ce sont le maillet et le ciseau.

Je voudrais  m’excuser auprès de mon VM\, mon  2ème Surv\ et vous tous mes FF\ Et mes SS\, si par moment j’oublie de laisser mes métaux à la porte du T\, car j’ai par moment du mal  à savoir si je suis maçon opératif –spéculatif ou maçon spéculatif –opératif.
Mais parler de l’outil, sans parler de la pierre brute serait sur le plan symbolique incomplet. La pierre brute, le ciseau et  le maillet, sont  trois éléments indissociable de l’apprenti maçon.

Quand j’ai commencé la taille de pierre il y a déjà quelques années ,mon Ancien m’a dit « Tiens lapin prends ce bout de caillou, le ciseau, la massette et fait moi une surface plane ». Le jour de mon initiation, je refaisais les mêmes gestes. Je commençais donc à tailler cette pierre brute de midi à minuit, pour tenter de la rendre compatible avec les autres pierres brutes et polies, pour la placer juste à sa place, et ainsi avancer la construction de notre édifice qui reste et restera toujours en cours de réalisation. Le maçon-tailleur de pierres qui travaillait sur les chantiers des cathédrales, savait qu’il ne verrait  jamais la construction achevée, mais lui aussi avait apporté sa pierre. De même que l’appr\ maçon doit persévérer dans sa recherche, tout en sachant que sa quête n’est pas  vaine, mais que tout au plus , il se rapprochera de son idéal, sans jamais l’atteindre.


La taille de la pierre brute se fait comme je l’ai déjà dit mes FF et  mes SS\ avec deux outils le ciseau et le maillet.  

Mais avant de vous parler de ces deux outils symboliques, je vais vous parler de l’outil en tant que maçon opératif.

Je suis encore de ceux qui croient à la main de l’homme, au travail manuel, à l’outil, au bel outil !

L’outil suscite le respect, l’admiration ou l’émotion, car l’oeuvrier entretient un rapport étroit et privilégié avec lui. Son manche de bois va se façonner, se polir, peu à peu au contact de la main, qui, elle se durcira, se formera au contact du bois. A la jonction des doigts et de la paume apparaîtront des callosités, à force de serrer, de se frotter à l’outil, tout ceci dans la douleur de l’apprentissage. Entre les bras qui supportent des charges impressionnantes, le poignet qui apprend à avoir le coup de main, la main qui reçoit les coups de massette, au lieu d’atterrir sur le ciseau comme prévu. « mon lapin dirait un Ancien c’est le métier qui rentre ». Oui mais j’aurai préféré qu’il rentre autrement !!!

Un ouvrier qui aime ses outils, les reconnaît au simple toucher, sans avoir besoin de les voir. Un outil, ne se prête pas, de peur de l’abîmer. A l’inverse on ne se sert pas dans la caisse des autres, car on ne les trouve pas à sa main. Mais si l’on hésite à les prêter , un Ancien  est heureux d’offrir l’un ou les outils à son apprenti. Certains outils se transmettent de génération en génération. Ainsi Le maillet et le ciseauj’ai le fil à plomb de mon grand-père qui était d’ailleurs quel qu’un de droit…Le jeune apprenti est fier de recevoir ce cadeau dont il  prendra soin .Un bon ouvrier, qui aime ses outils respecte l’homme et le travail. On pourrait dire :  montres moi tes outils et je dirai qui tu es.

Lorsque voici quelques millénaires l’Homme eut l’intuition de tailler le silex pour en faire son premier outil, il fit sans doute la plus grande découverte.
Celui qui n’a jamais tenu un outil pour transformer, façonner la matière, ne peut  éprouver ce sentiment mêlé de modestie et de fierté qui habite l’homme manuel, sensible plus que tout autre, à l’âme des outils.

Le maçon spéculatif est appelé à travailler pour s’initier au mystère de l’Art Royal, c’est pour cela qu’en taillant sa pierre brute, il doit apprendre à connaître l’Outil, comme l’apprenti le fait sur ses chantiers. Il peut ainsi mieux connaître  la matière  et enfin utiliser son ciseau et son maillet.


C’est avec eux , en effet, que l’Appr effectue son premier travail, lors de son initiation puisqu’il frappe par trois fois la pierre brute .
Le maillet et le ciseau sont inséparable et interdépendants.

Le maillet du latin malleus, qui veut dire marteau, est le sens actif de l’association maillet-ciseau. Il représente le travail et la force matérielle. Il aide à surmonter les obstacles et les difficultés. Il est la logique, puisque l’on l’utilise par rapport à la pierre à tailler et au ciseau .  Il est la fermeté et la persévérance de notre pierre brute dans notre vie, afin d’accéder le mieux possible à notre idéal de jeune Maçon. Le maillet est la volonté et l’application réfléchie dans le travail, mal dirigé par l’esprit, il peut occasionner des conséquences néfastes, destructives.


Le maillet est l’autorité et le pouvoir par son V\M\ qui fait travailler sa loge et par ses deux surveillants qui supervisent les colonnes.(à noter qu’à l’Union Compagnonnique des Devoirs Unis, le Compagnon qui préside, utilise lui aussi un maillet pour diriger sa cayenne.)

Le maillet ne créé pas de forme, il ne peut que détruire tandis que le ciseau s’il n’est pas percuté par le maillet reste inutilisable.

C’est pour cela que le ciseau à besoin du maillet pour travailler la pierre comme l’Appr à besoin de ses FF pour l’aider dans son Œuvre.

Le ciseau du latin  caedere, qui veut dire, fendre, tailler est utilisé dès les début des grandes constructions des pyramides égyptiennes. Il est le complément logique du maillet ; Il est destiné à tailler les pierres avec plus ou moins de précision selon la taille et la forme du biseau qui lui a été forgé .C’est l’outils par excellence des tailleurs de pierre, des maçons mais aussi du charpentier, du menuisier, de l’ébéniste, du sculpteur .

Le ciseau est lié au dégrossissage de l’oeuvrier pierre brut. Il est avant tout l’outil de décision, sans lequel rien ne se réalise en  Initiation. Il faut savoir ce que l’on veut afin de prendre des résolutions qui seront parfois difficiles. Suivant la structure de la pierre, il faut utiliser  le bon ciseau, ciseau à pierre dure ou à pierre tendre, ciseau acier ou ciseau acier manche bois. Il faut alors réfléchir avant d’agir, afin de ne pas faire de dommage irrémédiable à la pierre. « nous avons le droit à l’erreur, mais nous n’avons pas à nous étonner des conséquences de notre erreur » me disait un vieux singe. Il ne faut rien laisser au hasard, ne pas négliger les petites choses, indispensable pour que les grandes puissent se réaliser. L’important est que chaque chose soit accomplie au  moment juste pour que le chantier puisse bien avancer. Le ciseau nous apprend à discerner et à être logique avec soi-même. Tailler les bosses afin de faire disparaître les creux, comme l’Appre\ à pour mission de faire disparaître ses erreurs et ses préjugés.


L
’Appre\ n’étant pas un être parfait, son travail connaît des moment de relâche. Il doit se servir de ses outils pour échapper à la crainte du laxisme, du relâchement. Mais la Franc-Maçonnerie par la voie du symbolisme des outils nous trouve des repères, matière à relancer sa réflexion et à nous soutenir dans ses difficultés.

Comme le dit Christian Jacq dans "le message des constructeurs de cathédrales", je cite « La matière était difficile à travailler, elle résistait au maillet et au ciseau, elle se rebellait . Arriverait il un jour à sculpter cette femme si belle, ce chevalier si majestueux, parviendrait il à dessiner une tour qui atteint le ciel ? Ou donc était la vérité du métier ? Elle est dans tes questions, lui dirent les Maîtres. Nul ne peut modifier la matière et l’orienter vers la perfection si tu ne t’es pas d’abord modifié toi-même . Apprends à poser les bonnes questions et la pierre se fera douce sous tes doigts ».

L’apprentissage est le grade de la découverte  où l’Appr\ va apprendre le métier , il rêve souvent de pouvoir accéder au grades supérieurs, mais il ne faut  pas être pressé et ne  pas mettre la charrue avant les bœufs, il doit découvrir petit à petit le métier. En se regardant dans le miroir et accepter de se remettre en question et d’agir en connaissance de cause.
 
Pour l’homme de métier il existe trois fonctions importantes pour lui :travailler la matière, travailler l’homme, travailler l’esprit.
L’apprentissage maçonnique nous offre un art de vivre qui n’est pas une pâle  imitation de l’outil pour dégrossir  et transformer, avec intelligence et patience pour devenir la pierre équarrie et polie qui sert à la construction de notre Temple.
Pour conclure ma planche, je voudrais dire que l’outil a inspiré beaucoup d’ouvriers-chansonnier-poëte, en voici un  couplet de la coterie Joseph Dulaud, La gaieté de Villebois, Honnête Compagnon Passant Tailleur de Pierre Du Devoir :
…par la règle et par le ciseau
Par le compas et par  l’équerre
Taille un parement sans défaut
Et des moulures exemplaires…
Tu as pour bureau ton chantier
Et ta broche pour secrétaire…

J’ai dit. V\M\ 

D\ P\


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