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L’Ordre Maçonnique

De l’utilité des agapes : un frère donc au cours des agapes, a posé une bonne question : « qu’est ce qu’on appelle l’ordre maçonnique ? »

A une pareille question on peut prendre le dictionnaire pour y chercher une réponse, mais on sera vite insatisfait par le résultat de cette recherche.

Alors je pense qu’il faut aller voir beaucoup plus loin dans le temps pour tenter de donner une réponse à peu près acceptable, il faut sans remonter à une hypothétique naissance de la maçonnerie, naissance qui se perd dans le brouillard, en regardant du côté des Collègias romaines, au VIII éme siècle avant JC, premières associations professionnelles connues avec précision par les historiens.

Mais pour ma part je préfère me rendre au Moyen Age, en regardant de près la société médiévale. La société médiévale est organisée autour de la féodalité. Au sommet de la pyramide, le Roi qui reçoit de Dieu, le pouvoir terrestre, et qui a comme fonction de reproduire sur Terre l’harmonie divine. Il est la pierre angulaire de la société et du Roi découle toute l’organisation de la société, avec le relais des clercs de l’Eglise pour le monde spirituel, et les seigneurs pour le monde profane, chacun ayant comme devoir de faire en sorte que la société médiévale soit la copie la plus parfaite du plan divin.

Ensuite nous trouvons les confréries religieuses mais composées de laïcs, les guildes professionnelles qui concernent surtout les commerçants, les devoirs pour les professions manuelles. Et toutes ces associations, fonctionnent dans le cadre de la Féodalité en parfaite harmonie, mais chacune ayant autorité dans son domaine qui diriger les activités qui les concernent. Le point commun, c’est d’avoir comme modèle moral et religieux un Saint chrétien.

De ce fait, toutes ces associations ont édicté un certain nombre de règles, de règlements, de recommandations, de mesures et de sanctions. Mais avec nos yeux du 21 éme siècle, cela pourrait nous sembler comme très contraignant, mais pour les hommes du Moyen Age, ce n’est simplement qu’une manière de vivre les enseignements religieux et sociaux, c’est normal, et cela va dans le sens de la religion, en respectant tous ces règles, on peut espérer gagner sur Terre le paradis. C’est très important pour l’Homme du Moyen Age. Mais il serait illusoire de croire que toutes ces associations fonctionnent en autarcie ; non il y a de nombreuses passerelles entre elles, pour le bon fonctionnement de la société, et puis la Religion rassemble toute cette diversité, dans son sein en réglant d’une manière générale, la vie de la communauté chrétienne.

Il y a deux exemples fameux : la règle de Saint Benoit et les règles de la Chevalerie et je crois qu’il faut explorer ces deux Ordres dans l’espoir de trouver des racines pouvant donner de la vigueur à l’Ordre maçonnique.

La règle de Saint Benoit (486-547) nous dit par exemple qu’il faut un équilibre entre la vie commune et l’attention de chacun, équilibre entre l’obéissance à l’Abbé et l’exercice de là. Cela c’est la théorie ! Car les sociétés humaines sont toujours taraudées par la dégradation et la dégénérescence. Arrive ce qui devait arriver, à l’approche de l’an Mille, un grand doute mais aussi une grande espérance s’empare de la société médiévale, c’est la crainte de la fin du monde, alors deux attitudes mobilisent les humains, un abandon à la licence et à la débauche, et un accroissement de la piété religieuse. Les maçons opératifs n’échappent pas à l’air ambiant. N’échappe pas à cette situation. Et comme cela arrive dans ce genre de situation, il y a des hommes qui relèvent la tête et reprennent en main le flambeau. C’est l’épanouissement de la Règle de SAINT BENOIT, tout comme un nouvel essor de la Chevalerie. Pour la corporation des bâtisseurs, c’est l’élaboration des Devoirs (les plus anciens datent de 1352) qui donne la direction à suivre dans le comportement journalier de chacun. Je pense que bien avant la date de 1352, les bâtisseurs, à l’exemple non seulement des autres corporations mais aussi des Ordres religieux, avaient des règles donnant un sens et un devenir au Métier.

On trouve dans un poème du XV éme siècle (Constitutions de l’art géométrique suivant Euclide) quinze points de moral dont voici un résumé : 1) servir Dieu et l’Eglise, le maître et les compagnons 2) probité dans le travail 3) obligation pour les apprentis de suivre les conseils du maître et pour les compagnons de garder le « secret » de la loge [en ce qui concerne les techniques du métier] 4) ne faire aucun tort à autrui 5) devoir, pour le maître, au moment du versement du salaire de donner à son ouvrier, seul à seul, de bons conseils ; 6) se reposer les jours fixés par la loi divine ; 7) rétablir la paix, s’il y a dispute ; 8) respecter la gent féminine ; 9) participer, selon le droit, aux discussions, entre compagnons et maîtres ; 10) amabilité, serviabilité, exactitude dans les comptes ; 11) vivre sans bruit, honorer son art par sa conduite, châtier les délits selon les statuts ; 12) être raisonnable, montrer l’exemple ; 13) dans les assemblées des maîtres, compagnons, shérifs, chevaliers, aldermen, observer fidèlement les ordonnances établies ; 14) respect du bien d’autrui et guerre aux voleurs, 15) fidélité aux maître, au roi, au serment de suivre toutes les règles, châtiment contre les coupables.

C’est sans peine que l’on peut faire des rapprochements aussi bien avec les règles de l’Ordre monastique, qu’avec l’Ordre de la Chevalerie.

Mais même à ce moment précis de l’histoire de la maçonnerie, on ne peut pas encore dire que la corporation des bâtisseurs est devenue un Ordre, elle reste encore une confrérie de bâtisseurs avec les règles concernant le métier. En fait, elle se maintient dans le domaine du profane comme n’importe quelle autre guilde. Certains historiens pensent que c’est à partir de ce poème que la confrérie passe du profane au sacré en devenant un Ordre en introduisant une partie littéraire avec la légende d’Euclide, et en faisant mention du Divin. A cela dans ce même poème, on y joint l’histoire des Martyrs, appelés les « Quatuor Choronati » (Quatre Couronnés). Ces tailleurs de pierre chrétiens, martyrisés en 287 sous Dioclétien, qui préfèrent la mort plutôt que de sculpter une idole. Ils sont l’exemple de la fidélité à la Loi Divine. Le serment, le sacré, le sacrifice, trois éléments qui font passer la maçonnerie opérative de la confrérie à l’Ordre. (Le Quatuor Coronati, est une loge anglaise toujours en activité qui s’est spécialisée dans l’étude historique de la maçonnerie), il y a un autre élément à prendre en compte, c’est du moins mon avis, les maçons opératifs avaient comme principale activité, l’édification de monuments religieux ; monuments censés donner au monde une image de la perfection divine, entre autre.

La maçonnerie opérative, depuis son début n’a pas cessé de baigner dans un fond religieux chrétien, et même si nos lointains ancêtres étaient exemptés de certaines contraintes féodales, dans le domaine de la croyance religieuse, ils étaient sans nul doute catholiques.

Ordre, ne veut pas dire carcan pesant, je pense qu’il vaut mieux penser à ordonnancement. C’est ce que disent les règles opératives de l’époque : « le travail sur la pierre ou le travail sur soi est un des éléments de sacralisation et comme le dit le premier épître de Pierre, vous-même, comme pierres vivantes, prêtez vous à l’édification d’un édifice spirituel, pour un sacerdoce saint ».

De même les constructions réalisées obéissent à un certain symbolisme. Les Outils ne sont pas de vulgaires instruments, mais des moyens de penser et de régenter sa vie de bon chrétien ; Ainsi la « règle », symbole de la droiture, n’est pas faite que pour tracer des traits.

Il est clair que le travail n’est pas seulement fait pour gagner sa vie, son salaire, mais qu’il donne à l’aspect matériel du métier, à travers les outils bien réels, la possibilité d’une réalisation spirituelle individuelle. C’est la grande leçon du Moyen Age.

Lorsque le travail matériel vint à manquer, faute de chantier à réaliser et à cause d’une économie en état de mutation, l’Ordre maçonnique était devenu une réalité, mais n’ayant plus la possibilité de s’exercer dans le monde du travail, tout naturellement, l’ORDRE dépositaire d’un contenu spirituel, d’une méthode de réalisation, d’outils symboliques et surtout d’une finalité précise, à savoir l’élévation spirituel de l’Homme, trouva sa continuité dans une nouvelle forme d’activité.

L’Ordre venant du monde matériel, celui du travail de la matière, a su faire un changement d’état, et c’est en cela qu’il est un Ordre traditionnel et non conservateur, en considérant que la transmission de ses valeurs spirituelles, pouvait s’épanouir dans une autre maçonnerie [spéculative] sans que le contenu spirituel et initiatique, perde de sa force.

Donc pour clore temporairement ce travail, je puis dire que la maçonnerie est bien un Ordre initiatique, car depuis les constructeurs, la transmission n’a pas été interrompue.

Mes sources : Internet, La franc-maçonnerie française de Mr J\ P\ Le Febvre-Filleau et ma propre vision de la maçonnerie.

P\ L\


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