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L’Ordre Teutonique

L’Ordre des chevaliers teutoniques est né en 1191 et apparaît initialement comme le versant germanique de l’Ordre des Hospitaliers.

Bien que sa confirmation officielle ne survienne que près d’un siècle après la conquête de la Ville Sainte par les croisés, l’histoire de l’Ordre commence, en fait en 1128, avec la fondation par des pèlerins allemands, de l’Hôpital de Sainte-Marie des teutoniques.

Initialement, ce dernier reprend la même finalité que l’Hôpital de Saint-Jean, à savoir : assister les souffrants et les nécessiteux, avec la spécificité de s’adresser préférentiellement aux pèlerins allemands.

L’autre particularité de l’Ordre Teutonique réside dans le fait que, dès son origine, il n’a aucune vocation militaire et va jusqu’à présenter un caractère séculier plus prononcé que son homologue hospitalier.

Ce n’est qu’à partir de la troisième croisade qui voit la disparition tragique de l’armée de Frédéric Barberousse, que l’Ordre opta pour une vocation davantage militaire.

La légende affirme que le Duc Frédéric de Souabe s’émut du sort de quelques pèlerins allemands délaissés par les hospitaliers et par les templiers, et que devant leurs souffrances, il annonça la création de l’Hôpital de Sainte-Marie de Jérusalem.

Le Duc ne vit pas le résultat de sa noble initiative car il disparut un mois avant la confirmation de la nouvelle fraternité par le Pape Clément III en Février 1191, mais en léguant la quasi-totalité de ses biens en la ville d’Acre, il apporta à l’Ordre son premier centre en Terre Sainte.

En l’an 1198, les teutoniques réunis en conseil, validèrent la mesure qui stipulait que l’aspect hospitalier de l’Ordre suivrait pour tout ce qui se rapporterait aux pauvres et aux malades, la règle de Saint Jean, alors que son versant clérical adopterait la règle du Temple.

Le même conseil officialisa aussi les vêtements que devraient dorénavant porter les frères, à savoir : Le manteau blanc à croix noire.

En Février 1199, le Pape Innocent III reconnut le nouvel Ordre militaire, satisfait à la fois d’avoir acquis un élément de contre-poids à l’hégémonie des templiers et des hospitaliers et l’arme absolue dans sa lutte contre le Saint Empire germanique.

Dès leur reconnaissance officielle, les teutoniques intensifièrent leurs activités et de nombreuses maisons de l’Ordre apparurent en Europe, mais c’est avec Hermann Von Salza que l’Ordre Teutonique acquit ses lettres d’or.

Personnage talentueux, il fut aussi un fin politicien qui perçut, dès l’échec de la troisième croisade, que le maintien en Terre Sainte des Etats latins d’Orient relevait, à long terme, de l’impossible.

Sans interrompre la présence de l’Ordre en Palestine, le Grand Maître renforça la position des teutoniques sur les terres du Saint Empire germanique et établit un nouveau centre à Venise. De ce fait, il obtint une position intermédiaire et privilégiée entre ces deux pouvoirs temporels antagonistes que demeuraient : la Papauté et l’Empereur.

Par ailleurs, Hermann Von Salza souhaitait « germaniser » la notion de croisade, percevant que l’idée de pèlerinage armé perdait progressivement de son attrait aux yeux des croisés allemands.

Il fut confirmé dans son aspiration lorsqu’en l’année 1217, le Roi André II fit appel à l’Ordre Teutonique pour mettre fin aux incursions ravageuses de nomades païens en Transylvanie. En 1225, la province fit définitivement pacifiée et les teutoniques, aidés de colons germains, commencèrent à exploiter les terres reconquises.

Inquiet du pouvoir grandissant des nouveaux arrivants, le Roi de Hongrie somma ceux-ci de se retirer. Faute de forces suffisantes et sans garantie, le Grand Maître dut céder.

Entre 1218 et 1223, plusieurs raids de tribus païennes prussiennes dévastèrent les terres du Prince polonais Conrad de Mazovie. Incapable d’en venir à bout, ce dernier céda définitivement le territoire d’Helminskaya aux teutoniques, en échange de leur protection permanente.

En obtenant le soutien de la Papauté et de l’Empereur Frédéric II, Hermann Von Salza sut alors garantir ses acquis. Mieux encore, l’Empereur lui concéda que toutes les terres païennes conquises par l’Ordre, seraient de fait, sous la suzeraineté teutonique.

Cette concession souleva l’opposition du Pape Grégoire IX, inquiet du rapprochement de l’Ordre à l’égard du Saint Empire germanique, il sut rappeler au Grand Maître que de tels droits avaient déjà été octroyés à l’Evêque Von Buxhovden, fondateur de l’Ordre chevaleresque des Porte-Glaives.

En l’an 1228, toutefois, dans une volonté d’obtenir définitivement le soutien du Grand Maître, le Pape accorda à l’Ordre teutonique, les mêmes privilèges dont bénéficiaient déjà les templiers et les hospitaliers et confirma les droits de l’Ordre sur les territoires prussiens, à la mort de Von Buxhovden.

La disparition du Grand Maître Hermann Von Salza n’interrompit pas la prospérité de l’Ordre, bien au contraire. Partis de la province de Kulm au début de l’année 1230, les teutoniques anéantirent toutes résistances et établirent tout au long de leur parcours vers la côte balte, des forteresses.

En 1235, l’Ordre de Dobrin fondé en 1227 par le Prince Conrad de Mazovie, fut incorporé aux teutoniques, suivi en 1237 par celui des Porte-Glaives.

Après l’invasion mongole, l’Ordre aspira à agrandir ses territoires aux dépens de ses voisins russes, mais fut défait en 1242 sur le lac Peïpous par le Prince de Novgorod : Alexandre Nevski. La même année, les teutoniques durent faire face à une vaste révolte des prussiens, qui justifia sept années de lutte acharnée, avant d’en venir à bout.

En 1253, une grande croisade, à laquelle participa le Roi tchèque, fut organisée dans l’intention d’unir les territoires côtiers de Prusse et de Livonie. En l’honneur du Roi et de sa participation aux nouvelles prises, fut fondée la ville de Königsberg (Kaliningrad), achevant la conquête du territoire de la Semigallie.

En 1260, une nouvelle révolte remit en cause les vingt années de conquêtes et de combats de l’Ordre dans la région mais l’intervention papale sous la forme de 22 bulles invitant tous les croyants à se croiser, sauva ce dernier :

« …A la fin du XIIIème siècle, la Prusse fut divisée en quatre diocèses dirigés par des évêques qui étaient vassaux nominaux du Pape.

…Une sage politique des autorités dans ces territoires nouvellement conquis stimula les développements de l’agriculture et des jeunes cités, …fondées par des immigrants originaires de terres germaniques.

Les cités recevaient…des privilèges municipaux, appelés Loi de Kulm. …Peu à peu, l’aspect du pays changea, à la place de forêts sauvages, de marais infranchissables et de prairies, on trouvait des riches cités, …de gros villages, des terres cultivées et des ports de mouillage. Dès le milieu du XIIIème siècle, l’Ordre avait passé un traité avec la population locale : tout noble prussien pouvait être adoubé pour peu qu’il se convertisse.

En 1309, la capitale de l’Etat teutonique et le Quartier Général de l’Ordre furent transférés de Venise à la forteresse prussienne de Marienburg… »

A la fin du treizième siècle, devant la montée en puissance de la Lituanie, dont la population demeurait païenne, et de la rivalité avec la Pologne catholique, les teutoniques recherchèrent de nouvelles alliances. Ils eurent alors l’idée de ressusciter les idéaux croisés en rendant populaires les chemins de pèlerinage de la Prusse.

Malgré la renommée et la crainte qu’inspiraient les chevaliers teutoniques, leur expansion et leur puissance incitèrent leurs ennemis à se rassembler contre eux. Ainsi en 1385, le Prince de Lituanie Jagellon épousa la Reine de Pologne Edwige et une puissante alliance s’instaura.

Le couronnement de Jagellon autorisa l’adhésion définitive de la population lituanienne au christianisme et la Pologne réalisa par la diplomatie ce que des décennies de campagnes militaires de l’Ordre teutonique n’avaient pu obtenir.

La popularité de l’Ordre déclina sérieusement après leur défaite enregistrée au cours de la bataille de Tannenberg le 15 juillet 1410 :

« …L’Ordre avait assemblé toutes ses forces pour vaincre les lituaniens. La grande armée réunissait presque tous les frères chevaliers, les contingents des milices des territoires et des villes, les « invités » de l’Ordre (chevaliers pèlerins d’Europe Occidentale avec leurs suivants), des détachements de mercenaires…

Au total, l’armée comprenait 50 régiments, les divisions de choc de la cavalerie lourde étant constituées des chevaliers et sergents en armure…, 24 chevaliers venaient de Geniegau, environ 120 de différentes provinces françaises (Normandie, Picardie) et selon certaines sources, le fameux chevalier et futur Maréchal de France : Jean Boucicaut. L’effectif total approchait les 25000 hommes.

…L’armée polono-lituano-russe sous le commandement du Roi polonais Jagellon…et du grand Prince de Lituanie Vitold…comprenait 50 bannières polonaises et 40 bannières russes…au total 40000 guerriers.

...Au début, l’attaque de la cavalerie légère de l’aile lituano-russe et tartare fut brisés par les forces de l’Ordre et le flanc droit de l’armée s’enfuit, mais les régiments de Smolensk, au centre, tinrent bon et sauvèrent la situation, offrant la possibilité à la cavalerie polonaise de contre-attaquer.

Le Grand Maître Ulrich Von Jungingen mena sa dernière troupe de réserve pour percer la ligne polonaise mais échoua. Il fut débordé avec ses chevaliers et tué.

Après un court engagement, le reste de son armée se dispersa et s’enfuit, laissant plus de 200 chevaliers de l’Ordre morts sur le champ de bataille, sans compter ceux faits prisonniers… »

Les conflits suivants avec la Pologne en 1422 et 1435 amplifièrent son déclin, alimenté par le soutien de la Papauté au Roi de Pologne.

En 1457, impayés depuis plusieurs mois, les troupes mercenaires vendirent aux polonais la capitale de l’Ordre teutonique : Marienburg, précédant la reddition de la Prusse Occidentale au Roi de Pologne en 1466.

Moins d’un siècle plus tard, l’Ordre abandonna le principe de guerre sainte.

En 1525, le Grand Maître Albrecht Von Ansbah de Brandenbourg se convertit au luthérianisme, puis reconnut officiellement comme suzerain le Roi de Pologne, faisant ainsi de la Prusse un duché de la couronne polonaise !

En 1561, l’Ordre perdit la région de Livonie, conquise par le Tsar Ivan IV le Terrible. Le Grand Maître prit alors la décision de transférer son Quartier Général à Margentaim (en Franconie) et l’Ordre teutonique se rallia au Saint Empire germanique.


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