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La marche de l’apprenti et sa signification

Lève toi et marche !

Cette célèbre phrase du christ révélée notamment dans les évangiles de Marc et de Mathieu symbolise à mon sens et à elle seule la marche de l’apprenti ainsi que son postulat.
Laminé par un système, une chaîne dont il est un maillon et qui existe grâce à lui et malgré lui, le profane initié devenu apprenti cherche dans l’introspection un renouveau, une nouvelle voie, des réponses aux questions qui le hantent.
Lève toi et marche !

Par cette métaphore les paralytiques que nous sommes sont invités à se libérer de leur grabat, à prendre conscience de l’inutilité de leur vie, à se lever, se redresser pour tenter d’atteindre la sagesse, la lumière du dieu que chacun porte en lui.

Spinoza, philosophe hautement controversé, dont personne n’a su définir exactement la pensée, s’attachait à croire que le physique et le mental , le corps et l’esprit étaient intimement liés s’enrichissant mutuellement et qu’aucun n’avait l’ascendance.
Agir sur le corps pour enrichir l’esprit.
Partant de cette hypothèse, il est aisé de faire le rapprochement avec la gestuelle de la marche de l’apprenti et de son déplacement en loge.

Tout apprentissage ne pouvant s’envisager dans le cahot sans méthode et sans rigueur, le déplacement se fait à l’ordre, le corps rigide et droit, les pieds en équerre rappelant le niveau, et la perpendiculaire,
Par cette rigueur imposée, l’apprenti, dans sa quête se soumet à ses pairs,se soumet au grand architecte de l’univers, s’affranchit du monde profane.
Par cette posture il devient le point d’intersection des trois dimensions ;la jonction entre le zénith et le nadir, le midi et le septentrion, l’occident et l’orient.

Vient ensuite l’heure du premier pas, le moment ou démarre la quête, l’avancée vers l’inconnu.

Se sentant happé par l’instant, par l’envie d’une progression rapide, l’élan de ce premier pas se trouve brusquement freiné par cette démarche incommode, pénible et malaisée dont on ressent les entraves comme un boulet retenant nos pulsions.
Face à cette difficulté à nous mouvoir, à nous libérer de nos convictions,de nos passions, de tout ce qui nous rattache à notre quotidien,nous prenons conscience de l’emprise du monde profane dont on tente de se libérer.
Le manque de naturel et les difficultés rencontrées lors de ce premier pas nous contraignent à un arrêt forcé, une pause obligatoire, un temps du repos nécessaire à la réflexion et à la méditation au repli sur soi-même et à l’assimilation.
Cette première avancée, ce premier pas s’apparente à la première marche d’une échelle spirituelle dont chaque échelon validerait une étape, un passage obligé du parcours initiatique entrepris, une ascension vers la magnificence de la lumière.
Faire progresser son corps pour élever son esprit

Le second pas, identique au précédent semble s’effectuer de manière plus assurée, avec plus de retenue et de rigueur,

Cependant, comme lors du premier mouvement, l’arrêt, survenant tout aussi brutalement nous incite à nouveau à la méditation
Lors de ce déplacement sur le pavé mosaïque de la loge, l’esprit se trouve confronté à l’ambivalence du noir et du blanc, à ces choix difficiles et délicats de nos vies menant au bien ou au mal, à la dualité entre les éléments binaires qui nous entourent et qui déterminent notre dessein, aux deux étapes fondamentales de l’existence que sont la vie et la mort.

Bien que reliés physiquement au pavé mosaïque, la voûte étoilée nous coiffe de sa majesté, de son immensité, de cet infini dont nos esprits cartésiens ne peuvent appréhender la notion.
Éclairant de faibles lueurs la nuit dans laquelle nous nous trouvons, elle nous incite à nous affranchir de cette vision opaque dont on nous a affublé et par ces halos de lumière nous balise la piste à emprunter.
Canalisée entre les colonnes du nord et du midi, la progression se traduit par un mouvement purement longitudinal vers l’orient.
L’apprenti, fraîchement initié, auprès de qui la symbolique maçonnique s’apparente à une sorte de code indéchiffrable, s’efforce instinctivement de maintenir un cap rectiligne qu’il pense infaillible.

Sans prendre conscience que le plus court chemin est souvent le plus hasardeux, et que l’apprentissage s’appuie principalement sur la transmission d’un savoir, le novice oubli qu’il peut combler ses lacunes en s’appuyant sur l’expérience de ses frères et poursuit mécaniquement sa marche en avant
.

Renouvelé par trois fois, ce pas nous rappelle le nombre autour duquel gravite l’apprenti, nombre auquel tout le ramène.

Dans son parcours de reconstruction, il se retrouve, dès son initiation, lié à son nombre.
Ce nombre dans lequel les Pythagoriciens voient le principe créateur de l’univers, addition de l’unité et du binaire, et hautement symbolique dans les différentes religions, mythologies et civilisations, nous indique la démarche, nous jalonne le chemin, nous guide vers la route à suivre .
La présence du ternaire apparaît aux premiers moments de l’initiation. Tout d’abord les trois voyages accomplis.
La purification par l’air, l’eau et le feu.
L’age symbolique lié au grade
Les trois grandes lumières de la franc-maçonnerie que sont le volume de la loi sacrée, le compas et l’équerre.
Ainsi que les trois marches du tableau de loge symbolisant l’entrée du temple , induisant l’ascendance, la prise de hauteur, l’élévation,
Élévation corporelle, élévation spirituelle.
Chaque geste, chaque mouvement, chaque déplacement seraient-ils des vecteurs de la pensée favorisant la méditation et l’introspection ?

Arrivant au terme de cette réflexion, pour conclure de façon beaucoup moins académique et sur un trait d’humour, force est de constater qu’un apprenti, quel que soit son age profane demeure un apprenant.
En effet malgré les conseils d’une grande partie des frères de l’atelier insistant sur le rituel et ses réponses à bien des questions, il m’a fallu plusieurs semaines et quelques pages d’écriture pour m’apercevoir qu’à la question :
« Que signifie la marche de l’apprenti ? »
Le rituel répond tout simplement et par une seule ligne :
« Le zèle qu’il doit montrer en marchant vers Celui Qui nous Éclaire ! »

J’ai dit Vénérable Maître


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