GLMU Loge : L'Astrolabe - Orient de Saint Nazaire Date : NC


Le maillet et le ciseau

Un peu de symbolisme :
Selon la symbolique maçonnique, le maillet (du latin malleus) est le symbole de l'intelligence qui agit et persévère ; il dirige la pensée et anime la méditation de celui qui, dans le silence de sa conscience, cherche la vérité. C'est le symbole du maître au cours des tenues maçonniques.
Le maillet est en bois de buis ; choisi du fait de sa dureté, le buis symbolise la fermeté et la persévérance.
Dans notre temple, le Maillet est une des lumières du Vénérable ; il n’est pas l’outil de commandement, mais une invitation au travail.
Le maillet est donc associé à la volonté agissante. C'est pourquoi il est remis au vénérable et aux deux surveillants. Il est utilisé au cours du rituel pour annoncer l'ouverture et la fermeture des travaux, et pour demander la parole. Au cours de la cérémonie d'initiation, le vénérable pose l'épée sur l'épaule du récipiendaire puis frappe la lame de son maillet. Le maillet est le symbole du maître opérant comme la foudre lors de l’admission d’un candidat.
Ce marteau de bois est un symbole de la puissance de l’énergie directrice du travail.
Mais le maillet de l’apprenti ou du compagnon n’est pas le même que celui du maître.

Maçonnerie opérative :
Pour extraire la pierre de la carrière, le carrier utilise le marteau et le burin.
Le tailleur de pierre utilise, lui, le maillet et le ciseau. Pour tailler la pierre, le ciseau ou le maillet seuls sont inefficaces, leur complémentarité est requise.
Le maçon de métier doit savoir tailler la pierre, la dresser, la façonner, poser un niveau et lever une perpendiculaire.
Le maçon opératif est un bâtisseur de cathédrales travaillant d’abord sur la matière pour la transformer. Cet ouvrier modèle la matière dense et rugueuse en blocs lisses et parfaits puis les réunit pour édifier des monuments sacrés.
La pierre brute est un produit grossier de la nature, couverte d’aspérités, elle est impropre à toute construction sans l’intervention de la main de l’homme. Cette pierre doit devenir propre à la construction par ses qualités intrinsèques et par sa forme. Après les phases successives de dégrossissement, la pierre brute est taillée à angles droits, conformément aux exigences de la construction qui nécessite d’établir des surfaces planes à arêtes vives.

Puisque la main ne peut agir directement sur la matière dure, pour tailler la pierre le ciseau sert d’intermédiaire. L’origine de cet outil est très ancienne ; sa présence est attestée dès l’antiquité en Égypte, dans l’ancien empire. Pendant longtemps il a servi à la taille de la pierre tendre ; c’est à partir du 6 ème siècle avant notre ère vulgaire que son usage se répand en Grèce et s’étend à la pierre dure.
Le terme de ciseau (du latin, cisellus, coesellus et coedere, couper) est en usage depuis la fin du 17ème siècle. Le ciseau est destiné à tailler la matière, et formé d'une lame que l'on pousse au marteau ou au maillet. Parmi ceux-ci, le ciseau à bois des menuisiers et ébénistes, et le ciseau des sculpteurs. Le ciseau du tailleur de pierre doit être souvent affûté et le tailleur doit sans cesse contrôler son savoir-faire pour ne pas émousser la lame.
Le maillet, dont l’emploi est aussi attesté depuis l’antiquité, est classé parmi les outils dits à percussion lancée ; généralement formé dans du buis, il a été utilisé aux époques de rareté du fer. Le maillet, composé d'un manche et d'une tête symétrique, se distingue de la masse et du marteau par le matériau dont est constituée sa tête : traditionnellement en bois, mais aussi de nos jours en caoutchouc, plastique, etc. Cette particularité permet à l'outil qu'il percute de pénétrer dans le matériau travaillé (pierre, bois, etc.) sans onde de choc.
Le maillet et le ciseau associés : le maillet agit en fonction de l’énergie cinétique de la masse mise en mouvement par la main ; sous l’effet de la percussion du maillet, le ciseau fait disparaître de la pierre la matière superflue.
La proportion des dimensions de la pierre taillée est vérifiée par le compas. La règle, aidée de l’équerre, portée en tous points, permet de vérifier la rectitude des arêtes. Le niveau vérifie la position horizontale de la pierre ; à l’aide de la perpendiculaire, on pourra superposer verticalement chaque pierre. À l’aide du levier on peut retourner la pierre sur toutes ses faces pour les vérifier.

Maçonnerie spéculative :
Les principaux devoirs de l’apprenti sont :
·                    D’assister aux tenues et aux réunions d’instruction,
·                    D’observer le silence en tenue,
·                    De dégrossir sa pierre brute,
·                    D’obéir aux demandes des maîtres.

Le premier travail de l’apprenti consiste à donner les trois premiers coups pour commencer à dégrossir sa pierre. Cette pierre symbolise la nature humaine à l’état brut, mais reconnue perfectible puisqu’elle est admise sur le chantier de construction. C’est le symbole de l’apprenti entré.
Symboliquement, cela consiste à affiner le caractère, à s’instruire, à se perfectionner et à augmenter ses connaissances, quitte à se frotter aux autres, en commençant par se parfaire, puis comme compagnon pour poursuivre dans le monde extérieur.

Nos outils de F :. M :. sont ceux des bâtisseurs ; ceux que nous utilisons, pour la taille de notre pierre, sont : le ciseau, comme force intellectuelle et force agissante et le maillet, en tant que volonté qui la met à exécution.
C’est l'union du ciseau et du maillet qui sert pour la taille de la Pierre Brute ; c'est cette association qui permet de progresser vers la vérité par l'alliance de la force et de la volonté qui lui donne sa direction de frappe.
Les éclats qui se détachent de la pierre brute peuvent être considérés par l’Apprenti comme ses imperfections, ses vices, ses passions.
La pierre cubique taillée symbolise l’être devenu paraît, idéal auquel tout maçon aspire. En fait, l’apprenti devra tailler sa pierre toute sa vie car elle n’est jamais achevée, la perfection n’étant pas de ce monde. En dégrossissant sa pierre, l’apprenti apprend qu’il doit se défier de ses aspérités qui sont, en résumé, des passions et pulsions irréfléchies ou inconsidérées.
Symbole de la rigidité, le ciseau indique à l’apprenti qu’il doit être déterminé de manière inflexible à suivre le chemin. On peut considérer le ciseau comme le symbole de la détermination, vecteur de la réalisation de l’objectif choisi.
Cependant, uni du meilleur ciseau, l’apprenti aura une action stérile sur la matière s’il ne trouve pas la force nécessaire pour utiliser le maillet.
Le maillet correspond à la volonté qui met à exécution, main droite, côté actif, se rapportant à la volonté agissante et à la détermination dont découle la réalisation pratique.
Le maillet symbolise la volonté active de l’apprenti. Ce n’est pas une masse lourde et brutale, car la volonté ne doit être  ni obstination, ni entêtement, elle doit être simplement ferme et persévérante.
Le ciseau et le maillet sont étroitement liés par l’énergie jointe mise en mouvement, déterminée par l’objectif à atteindre.

Le Maillet et le Ciseau, qui servent à l’Apprenti pour transformer « la Pierre Brute » qu’il était  en « Pierre Taillée » qu’il sera, nous révèlent qu’il en est à la fois la pierre et l’ouvrier qui taille cette pierre, l’objet et le sujet, l’élève qui doit devenir son propre maître.

Car « Je est un autre ».
Quand Rimbaud dans une lettre de 1871 s’exclame « je est un autre » il professe une conception originale de la création artistique : le poète ne maîtrise pas ce qui s’exprime en lui, pas plus que le musicien : l’œuvre s’engendre en profondeur…
Ce « Je est un autre », à entendre comme « Je est un autre que moi », nous le retrouvons chez Freud. Dans son séminaire de 1953, Jacques Lacan montre que Freud emploie deux termes qui ne se recoupent pas tout à fait : celui d’ego et celui de moi. Lacan continuera dans cette voie et distinguera plus tard le moi et le je, puis le moi et le Sujet.
Pour Freud, le ça est le réservoir de toutes les pulsions ; au contact de la réalité extérieure une partie du ça s’autonomise et constitue le moi. Avec Lacan, nous apprendrons que le moi et le moi-idéal c’est la même chose, c’est ce que nous montrons de nous aux autres, c’est le moi social, celui que nous mettons en scène. Quand nous ne sommes pas contents de nous, nous critiquons notre moi : il n’est pas conforme à nos valeurs, à nos convictions.
Une personne, en somme, c’est un je plus un moi.
Je ne me reconnais pas en moi. Je est un autre que moi.
Le but d’une cure psychanalytique sera de faire dégonfler ce moi, pour laisser la place à un je plus authentique.

C’est aussi ce que propose la franc-maçonnerie dans cette métaphore de la taille de la pierre. Je taille la pierre, et cette pierre c’est moi. Je rectifie mon moi.
Muni du maillet de la volonté et du ciseau de la détermination, le je de la connaissance remanie le moi du savoir.

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