Obédience : NC Loge : NC 16/11/2000


Amour et Vigilance


V\M\ et vous tous mes FF\, en vos grades et qualités, me voici devant vous pour tenter de me situer aujourd’hui, ici et maintenant à travers le prisme de l’amour, associé à celui de la vigilance.

La polysémie de l’amour est telle, qu’en la replaçant en ce lieu, je m’arrêterai aux racines grecques agapè, et à son équivalent latin caritas.
Il s’agit ici bien d’un amour de bienveillance, de prévenance, de courtoisie, un amour oblatif et désintéressé.
Je laisserai éros, amor, cupido et cupiditas sur les parvis, quoique l’éros de Platon puisse désigner la ferveur mystique.
La vigilance implique un éveil cérébral minimal pour que le sujet puisse répondre activement aux situations inopinées, et ceci est en rapport avec la capacité d’attention.
Il existe dans ce cas ce que nous appelons une conservation des réflexes de sécurité, c’est à dire une conservation des réflexes qui permettent la vie.
La vigilance, c’est aussi une surveillance attentive, sans défaillance.
Mais une surveillance attentive est-elle compatible avec l’amour ? Et envers qui, ou quoi l’exercer ?
Il est beaucoup plus facile d’affirmer son amour de l’humanité que d’essayer simplement de supporter son F., car la relation immédiate engage la sensibilité et les préjugés, tandis que la sensibilité déclamée se passe de preuve.
« Mon F., ta différence m’enrichit », oui mais…
Chaque être tend à se conserver, et rejette ce qui le dégrade, à moins que les effets de ce qui le dégrade soient destructeurs au point de provoquer sa ruine.
Or, je ne peux me développer sans recevoir un élément extérieur à moi-même, qui m’oblige à devenir autre.
Je suis ce que je suis, par ce qui est étranger à moi-même, autant que par moi-même.
Etranger mais pas incompatible.
Et c’est là où se situe la vigilance, celle qui est faites de mesure et de jugement, de complaisance et de discernement.

Mon F., je veux t’aimer sans condition préalable, et en t’aimant ainsi, créer une ouverture, voir un passage vers toi. Alors seulement, la distance pourra s’effacer et le cercle pourrait se fermer. Le Je et le Tu disparaîtraient à travers la fusion du Un.

Ceci, il m’est arrivé de le ressentir ici, lors d’un moment privilégié que nous nommons l’Egregore.
Cet Egregore que je perçois comme une osmose issue d’une construction commune exceptionnelle.
Je le comparerais à une membrane qui ne doit pas être trop étanche, ni trop poreuse et qui nous englobant, nous ferait mieux "tendre" vers le Un.

Une autre partie de ma réflexion concerne l’amour de soi : peut-on aimer sans s’aimer ?
L’amour de soi est-il naturel, comme le prétendait Rousseau ? Ou bien faut-il le considérer comme un mécanisme de défense contre les retombées de l’amour, voire comme une perversion par laquelle le sujet, rétrécissant son univers, est appelé à confondre l’objet et la source ?

Si je ne me connais pas, ne me comprends pas, si je n’ai pas un minimum d’estime et d’indulgence qui me permette d’être en paix avec moi-même, pourrai-je alors apporter aux autres les secours qui leurs sont nécessaires, serai-je simplement capable de deviner, soupçonner, la détresse de mon F\ ?

V.I.T.R.I.O.L visita interiora terroe rectificandoque invenies occultum lapidem.
Je suis mon premier sujet de travail.
Toute intolérance vient de ce qui me dégrade à mes propres yeux.
La recherche de la paix avec soi-même est indispensable pour vivre en paix avec les autres.
Continuons encore, et encore, et encore à dégrossir la pierre.

Je ne connais pas la vérité car je marche dans la nuit en tâtonnant, et il m’arrive de faire des erreurs. Il importe à ces moments là surtout que je me sente accepté.

Il n’est pas facile d’être soi, notre quête est un combat perpétuel, et d’abord contre soi, pour tenter d’atteindre cette souveraineté sur soi-même qui permet de se maîtriser.
On peut alors respecter l’originalité de chacun, la comprendre, arriver à être en accord avec sans se dédire en aucune façon, ni se diluer dans l’autre.

Cette originalité est celle d’un frère, de mon égal, en qui j’ai confiance car j’ai juré que l’engagement fraternel sera tenu, quoiqu’il en coûte.

D’avoir été, avec Alain, les premiers à recevoir la lumière dans ce temple, je l’ai toujours considéré comme un présent fabuleux.
Pierre vivante dans cette loge ou dans mon imaginaire j’assimile chaque frère à une pierre colorée et palpitante d’une pyramide inachevée, sans arrêt en mouvement et en équilibre : les pierres bougent, s’effritent, grandissent, se fissurent, s’ajustent, et quelques fois, disparaissent.
La place que j’essaye de tenir est celle d’un élément élaboré par l’homme, et issue partiellement de la terre et de l’eau : le ciment.

Si les Egyptiens avaient découvert le secret de l’ajustage parfait des pierres entre elles pour la construction des pyramides, ce secret s’est perdu, et malgré notre fabuleuse technologie, nous ne le retrouvons pas.

Il faut prendre d’autres voies. Peut être se trouve t’il dans l’ultime sanctuaire, le saint des saints, l’infoulable.
A moins que là aussi, il y ait un miroir, un pavé mosaïque, ou une chambre vide.

J’ai dit

X\ M\

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