Obédience : NC Loge : NC Date : NC

A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers
Franc Maçon de Rite Ecossais Ancien et Accepté
Au nom et sous les Auspices de la Grande loge de France
Ordo ab Chao
Liberté Egalité Fraternité

Le pain et l’eau

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Du pain et de l’eau, cette expression nous fait penser de prime abord à une brimade, au sort que l’on réserve à ceux qui ont gravement fauté, voir même à la prison, au bagne. Mais en réalité, il s’agit bien là de deux éléments essentiels à la vie. L’un nous nourrit, l’autre nous abreuve. Ils sont complémentaires et indispensables.

Lors de notre passage dans le cabinet de réflexion, nous avions devant nous de l’eau et un morceau de pain. Ils étaient placés là non pas pour nous permettre de nous restaurer mais pour amener en nous une réflexion sur leur symbolisme.

Si le pain est symbolique, c’est probablement parce qu’il a été considéré comme nourriture essentielle pour l’homme depuis l’antiquité. Le pain est une marque de générosité envers les dieux, lesquels se comparent au pain : Osiris puis Jésus déclare être le pain de vie des enfants. C’est la raison pour laquelle les chrétiens demandent rituellement du pain quotidien qui devient en ce sens une double nourriture, physique et spirituelle.

Le pain apparaît dès la Genèse où il est associé à la peine et au travail :

« C'est à la sueur de ton front
que tu mangeras du pain
jusqu'à ton retour au sol
car de lui tu as été pris ».

Le pain assure ainsi la transition entre la vie profane et la mort symbolique, le retour au sol de la Genèse.

La notion de deuxième naissance implique, une notion de matrice dont le four est le symbole, l’égrégore où s'élabore l'union d'éléments complémentaires.

Le pain est le fruit du travail de l'homme et de la chaleur du four, tout comme l'initié est le fruit de l'introspection du profane dans le creuset, l'athanor du Cabinet de Réflexion. C’est la transformation spirituelle du récipiendaire. Il est aussi symbole de partage dans le culte catholique (le partage du pain par le christ lors de la cène). Un partage qui devra être fait sans ménagement par le F\ M\. Et surtout sans calcul. Il faut partager sans juger de la faculté de recevoir de celui à qui l’on donne.

En Égypte ancienne, les Pharaons versaient les salaires sous forme de pains cuits sous la cendre. Ce salaire était le fruit du labeur d’autres individus ; il nous rappelle le salaire de l’apprenti voué au silence et à l’écoute sur sa colonne. Son salaire, l’apprenti le reçoit par l’écoute du rituel et du travail de ses frères.

Une légende raconte que lorsque Pythagore voulait éprouver ceux qui désiraient devenir ses disciples, il les mettait dans une pièce avec seulement une petite cruche d’eau et un morceau de pain, et il leur donnait un symbole à déchiffrer… C’est l’épreuve de la terre subit par le récipiendaire avant son initiation.

Le blé qui donnera le pain est aussi une divinité (telle Déméter ou Cérès) qui apprend aux hommes comment cultiver et transformer le fruit de leur labeur en véritable pain nourricier. Le blé est le fruit du soleil, il a germé d’une graine mourante pour se redresser et donner à nouveau des épis. Il est le symbole de la renaissance, il se dresse fièrement vers le ciel et garde du soleil sa chaleur et sa couleur. Il est le lien direct entre le ciel et la terre, gardant ses racines il va vers l’astre qui lui donne sa force. Comme lui, nous devons, tout en gardant nos traditions et notre âme, renaître à cette nouvelle vie qui nous est offerte, et comme lui produire une nouvelle source de vie.

Tout ce que je viens de vous dire, vous le saviez déjà pour la plupart, ce que je voudrais ajouter, c’est que le pain c’est la vie faite par l’homme, l’homme élabore avec les éléments qui lui sont donnés. Souvent il se trompe. Elaborer, fabriquer, transformer, c’est ce que l’homme désire, il ne se contente jamais de ce qui lui est offert. Pourtant il est parfois plus facile de profiter des éléments essentiels qui sont à notre disposition, mais nous voulons plus.

Le pain que nos grands-parents confectionnaient avait goût de sueur et de suie celui que nous mangeons aujourd’hui sent le gaz oïl et le fric. Son symbole est devenu désuet et l’odeur du fournil a été remplacée par celle de gaz chimiques dont la composition n’entre certes pas dans notre alimentation. Il nous faut aujourd’hui retrouver ces valeurs, ces symboles qui nous rattachaient à ce qui faisait notre âme.

L’eau :

Rien n'est comparable à l'eau sinon la spiritualité elle-même. Insaisissable, en constant mouvement, prenant la forme de tous les contenants sans jamais en conserver une, capable de percer la roche sans pourtant s'opposer à quoi que ce soit, bonne à tous les êtres sans rien demander en échange, d’origine du Ciel et de la Terre, mère de toutes choses c’est l’expression du grand architecte sur la terre.

Nous sommes fait de 80% de cet élément, et si chaque jour nous n’en consommons pas, notre corps se dessèchera.

L’eau c’est la vie, elle est éternelle et ne peut être altérée. Elle peut être transformée, édulcorée ou polluée, mais elle retrouvera sa forme et sa pureté initiale.

Je n’ai jamais vu ma grand-mère gaspiller de l’eau, ni la polluer. Elle avait un trop grand respect pour ce qui lui apportait la vie. Je l’ai vu se laver les dents pendant toutes mes années de jeunesse au savon de Marseille par ce que ça ne polluait pas (je vous promets c’est vrai).

L’eau à fait ma vie telle qu’elle est : lorsque j’étais enfant, mes parents m’ont emmené en week-end dans un petit village où coulait le Ciron. Petite rivière tranquille où toutes les familles se baignaient. Ce village s’appelle Uzeste. J’en suis revenu changé…j’avais attrapé la polio ! Cette eau si tranquille si limpide, si agréable sur la peau avait en quelques secondes transformé un enfant plein de vie qui courrait et riait en un pantin désarticulé et dépendant. Je ne m’apitoie pas sur ce gamin qui aurait pu, s’il n’avait pas était frappé par ce fléau, devenir délinquant, ou…champion d’athlétisme…mais bon… Ce qui est à retenir c’est l’impitoyable sentence de l’eau ! Elle frappe, elle punit, elle détruit…aussi bien qu’elle donne la vie. Je n’ai jamais été rancunier, plus tard mes grands-parents ont acheté une maison au bord du ciron et mes parents aussi. Ma grand-mère devait avoir un peu de rancœur car chaque fois que j’allais à la pêche, elle m’accompagnait et me surveillait. Peut-être de peur que la rivière ne finisse son œuvre.

L’eau : source de vie, de chagrin et de peine. Elle, elle est éternelle, pour moi c’est le symbole de l’éternité. Elle coule de sa source, fertilisant au long de son chemin toutes les terres même les plus arides. Ces mêmes terres qu’elle détruira lors d’un prochain passage de crue. Elle coulera ainsi jusqu’à l’océan. Entre temps une partie d’elle rejoindra la terre et alimentera d’autre source. Le calme du large rejoint, elle prendra son temps et s’évaporera au gré des vents et des marées pour rejoindre le ciel sous une autre forme. Là, tranquillement elle déambulera faisant fi de la vie s’écoulant à ses pieds. Le moment venu, elle repartira vers la terre. Elle peut être liquide, solide ou gazeuse, parcourir des dizaines de milliers de kilomètres, être salie ou polluée, mais elle reviendra à sa source un jour ou l’autre aussi pure qu’au premier jour pour alimenter le fleuve de ses débuts.

Et si nous aussi nous faisions pareil ? L’eau pourrait être notre exemple, notre force. Comme elle, nous avons un parcours qui peut nous changer. C’est vrai que la vie profane que nous menons ou que nous avons mené n’est pas toujours celle qui nous aurait convenue mais, comme l’eau nous continuons d’avancer. Notre esprit peut être sali ou pollué et c’est là que le maçon que nous sommes peut interférer en rectifiant et en dépolluant notre âme avant de retourner à sa source. Le jour de notre initiation, ce jour où nous renaissons à cette vie nouvelle qu’est la Franc Maçonnerie, nous pouvons faire comme l’eau : faire évaporer notre esprit grâce à la chaleur de nos frères et le laisser s’élever vers la lumière, parcourir la terre en observant ce qui nous entoure, puis rejoindre sous la forme la plus parfaite possible et la plus adaptée la source qui nous a vu naître afin de pouvoir suivre un parcours meilleur.

Si l’eau est éternelle, nous aussi, car cette eau qui nous compose, lors de notre mort elle va s’évaporer et rejoindre on ne sait quelle rivière. Cette eau qui composait notre sang, nos tissus, sera bu par un autre être vivant et composera à nouveau une part de cet être. Et ainsi de suite. Une part de nous restera donc sur terre pour l’éternité. Les 20% restants ne sont qu’illusion et apparences.

L’eau (ou son symbole) est présente dans toute les religions et est vénérée non comme un élément mais elle est comparée à Dieu.

Dans la tradition Judéo-Chrétienne, l’eau symbolise la purification, le renouveau. C'est « l’eau qui lave les péchés du monde ». L'eau - tout comme Dieu - protège les gentils et punit les méchants. Moïse est ainsi « sauvé des eaux », fait surgir une source en tapant sur un roc avec son bâton et sauve son peuple en ouvrant la Mer Rouge avant de la refermer sur l'armée du pharaon. Miracle ultime, il rencontrera sa future épouse, Sephora, près d’un puit.

L'eau est encore plus vénérée dans la tradition musulmane mais quoi de plus logique pour des peuples vivant dans les régions les plus désertiques de la planète... Dans le Coran - qui cite le mot eau « ma » plus de 60 fois, il est dit : « un seul et unique élément insuffle la vie au monde : l'eau ».

L'eau est la « Materia Prima », « Tout était eaux » dans les textes hindous.

Dans l'hindouisme, le pèlerinage aux sources du Gange - l'un des sept fleuves sacrés de l'Inde permet - paradoxalement à la qualité de l'eau - de se purifier le corps et l'esprit mais aussi de gagner en sagesse, le Gange étant considéré comme l'ultime réalité. C'est également le lieu de dispersion des morts suite à leur crémation. Dans la pensée hindoue, l'eau est associée à l'illusion, à mâyâ. L'eau, en perpétuel mouvement, jamais stable, est le symbole parfait de cette impossibilité que nous avons - sous l'emprise de nos sens et de notre pensée conceptuelle - de voir les choses telles qu'elles sont, dans leur simplicité naturelle.

L’eau est un des quatre éléments avec le feu, la terre et l’air qui étaient vus par Bouddha comme les éléments de base de l’univers.

Noé a affronté le déluge pour nous offrir un monde purifié, il n’a en fait réussit qu’à se purifier lui.

A défaut d'un bateau, aborder l'eau à travers ses symboliques religieuses ou spirituelles, ses fêtes et ses rituels, permettra de la respecter, de l'aimer et de lui faire occuper l'espace infini qui est le sien, loin des dogmes scientifiques ou des croyances individuelles.

En fait, le pain et l’eau se rejoignent dans leur symbolisme : ils sont tout deux l’image du partage, de la tradition et de l’universalité. Quel que soit l’endroit du monde où nous nous trouvons, ils seront respectés pour leur rapport à la vie. Malheureusement…nous n’avons pas tous la même notion du respect.

V\ M\ et vous tous mes F\, J’ai dit.


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