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L’Equerre et la Compas


Pour mon deuxième travail d’apprenti, il était important à mes yeux de traiter du compas et de l’équerre dans le sens où ces deux symboles sont omniprésents en franc-maçonnerie et que ma curiosité ne pouvait attendre plus longtemps. J’interviendrais en trois parties ; la première sur l’équerre, la deuxième sur le compas et enfin sur le symbolisme binaire du compas et de l’équerre.

L’équerre :

L’équerre est un instrument dont la propriété est de rendre les corps carrés. L’équerre se dit « norma » en latin classique, ce qui a donné en français norme, normal, et lorsqu’un maçon place ses pieds et sa main droite en forme d’équerre, il se réfère à une norme. Le terme d’équerre vient du bas latin exquadra lui-même issu d’exquadrare (rendre carré). Il s’agit d’une pièce à l’origine uniquement en bois qui sert à tracer des angles droits ou élever des perpendiculaires. L’équerre est devenue l’outil de tout métier de construction. L’équerre est simple ou double, en forme de T ou de L, si elle est en métal elle ne désigne plus forcément l’outil mais la pièce servant à consolider des assemblages de charpente. Par sa forme et sa fonction, l’équerre est associé au cube en en particulier à ses quatre angles, angles qui évoquent également les quatre points cardinaux. Les deux branches de cette équerre sont inégales, elles sont dans un rapport de trois à quatre, les deux côtés du triangle rectangle pythagoriciens, le côté ayant un rapport de 5 étant l’hypoténuse. Cette manière de former le triangle rectangle est considérée comme un secret de la maçonnerie opérative. En effet Pythagore a inventé la manière de tracer un angle droit sans avoir besoin de l’équerre dont se servent les ouvriers, et nous tenons de lui la méthode que nous avons pu faire avec justesse et exactitude cette équerre que les ouvriers avaient tant de mal à fabriquer correctement. Il est important d’insister sur ce symbole et outil car à l’époque il n’y avait aucun de nos appareils modernes. La seule manière de bâtir était fondée sur la connaissance de la géométrie grâce au tracé d’angles droits avec l’équerre et de cercles avec le compas.

Le symbole de l’équerre est attesté dès 1725 dans la franc-maçonnerie spéculative. Cependant il est intéressant de savoir qu’en 1830 près de Limerick en Irlande, fut trouvée une équerre en cuivre jaune qui portait sur ses deux faces l’inscription suivante : « je m’efforcerai de vivre avec amour et sollicitude sur le niveau au moyen de l’équerre ». Cette équerre portait la date de 1517. De plus les traces de cet outil et de sa valeur symbolique peuvent être retrouvée dans la plus haute antiquité :
  • Sur les monuments Chaldéens (4500 av JC)
  • Dans les plus anciens livres sacrés de la Chine
  • Sur les portes des temples en Inde centrale

L’équerre est un des outils symboliques adoptés par l’ordre de la Franc-maçonnerie. Portée en particulier par le vénérable Maître, gardien de la tradition, elle symbolise :
  • Le droit
  • La rectitude de la raison
L’équerre fait partie des outils de base en maçonnerie car elle permet de vérifier le travail pour l’ajuster avec exactitude tandis que la règle sert à mesurer et le maillet à détacher de la pierre le superflus. Elle est un instrument de référence pour l’apprenti. Ce dernier apprend que la maçonnerie est un travail d’équerre, ce qui lui est aussi enseigné par son signe, ses pas et ses déambulations.

L’équerre traçant des angles et des perpendiculaires permet ainsi de reproduire les grands axes du monde. C’est à partir de ces axes que chacun peut orienter sa conscience et son action. L’équerre symbolise la matière, et en même temps elle permet d’ordonner et de rectifier cette matière.

L’équerre est considéré comme étant l’emblème de la perfection des travaux d’une loge dont le Vénérable Maître doit diriger toutes les orientations. L’équerre indique au maçon que s’il remplit avec exactitude tous ses devoirs, il pourra espérer parvenir à la vraie lumière.

Au niveau de la gestuelle le signe de la mise à l’ordre rappel au frère l’obligation de respecter son serment lors de son initiation, il invite à la droiture. D’autre part mettant les pieds en équerre, un frère doit toujours avoir en vue l’équité, la justice, la fidélité et l’irréprochabilité dans ses mœurs. Se mettre à l’ordre est l’incarnation même de l’équerre. En effet le maçon se tient droit, il est en équerre par rapport au sol, ses pieds sont en équerre, son bras est en équerre, et son pouce forme une équerre par rapport aux autres doigts de la main.

C’est ainsi que j’ai pu trouver trois raisons principales du port de l’équerre par le Vénérable Maître :
  • C’est une marque de sa dignité, car tout doit se régler par l’équerre de même les frères doivent se régler sur le maître et lui prêter obéissance.
  • Comme toute pierre brute qui s’équarrit, les frères doivent se construire sur les exemples du Vénérable Maître
  • C’est pour aller vers la connaissance que nous devons rapporter nos actions à l’équerre, l’équerre de la vérité.
L’équerre, destinée à tracer des angles droits, représente l’union d’une ligne horizontale avec une ligne verticale, l’union des contraires. Il vient immédiatement l’idée de droiture, d’équilibre et d’équité. L’équerre est l’emblème de la rectitude qui doit inspirer la droiture dans les pensées et dans les actions. Elle représente l’action de l’homme sur la matière, ainsi que sur un second sens, l’action de l’homme sur lui-même.

L’équerre permet de donner la forme à ce qui ne l’a pas, elles est reconnue comme symbole de bonne mœurs. Sa forme n’existe pas dans la nature, elle n’est donc en rien naturelle. Elle demande au maçon de faire un effort, de prendre sur soi pour marcher les pieds en équerre ou se mettre à l’ordre, indispensable pour être conforme à la norme de l’angle droit.

Une des premières perceptions de l’équerre est l’aplomb : tout ce qui se maintient dans la nature est plus ou moins d’aplomb même si rien ne semble être parfaitement d’équerre. Dès que les hommes se sont mis à bâtir, ils ont compris que l’aplomb était indispensable. Donc il n’y a pas de construction solide sans la chute d’un objet sur un plan horizontale ce qui formera un angle à 90°. Ainsi la vie se manifeste par le croisement d’une ligne verticale et horizontale grâce à la gravitation. Ne peut on pas alors se demander si l’équerre est la première manifestation de la vie.

Toute construction passe par la recherche d’un équilibre. C’est la rencontre du vouloir et des devoirs. On peut dire « je veux, donc je construis » qui peut-être représenté par une verticale se dressant vers le ciel, alors que « je dois » peut être représenté par une horizontale qui repose sur la terre et lie chaque maçon dans une interdépendance fraternelle. La verticale rejoint l’horizontale, formant une équerre et donnant ainsi la loi de la construction. « je veux » c’est l’orientation de la volonté pour créer et s’élever tandis que le « je dois » c’est accepter la condition humaine dans ses limites.

Le maniement de l’équerre permet d’approfondir les concepts de droiture, d’équité, d’équilibre qui correspondent à la sagesse. L’utilisation de l’équerre permet de donner aux mots leurs sens propres, afin qu’ils expriment des idées précises suivant des raisonnements droits. Grâce à l’équerre, le travail des maçons pourra faire bénéficier aux pierres une juxtaposition parfaite sans laquelle la construction du temple serait impossible. En un mot l’équerre symbolise ce que doit être la vie d’un franc-maçon et elle le représente lui-même.

Sur la poitrine du vénérable Maître la branche la plus longue se trouve du côté droit ; ceci marque la prépondérance de l’actif (coté droit) sur le passif (côté gauche). C’est parce que son rôle est de former de parfaits maçons que le Vénérable Maître porte l’équerre, signe de la rectitude et instrument indispensable pour transformer la pierre brute en pierre cubique.

L’équerre qui concilie le symbolisme du « niveau » du premier surveillant (horizontale = égalité) et celui de la « perpendiculaire » du second surveillant (verticale = hiérarchie, droiture) est donc en maçonnerie l’instrument primordial car elle dirige le dégrossissement de la pierre brute. Autrement dit, elle dirige la formation de l’individu en vue de l’exact accomplissement de sa fonction humanitaire et sociale. Cette formation lui permettra de donner aux mots leur sens propre afin qu’ils n’expriment plus que des idées précises et que les raisonnements qui s’édifient sur leur base soient aussi solides, aussi rigoureusement justes dans leurs formes que les pierres du temple, ce qui est un gage d’équilibre de la construction.

Il faut savoir que pendants très longtemps les maçons marchaient les pieds en équerre sur les échafaudages, ce qui leur permettait une stabilité dans le mouvement.

Pour terminer sur l’équerre il ne faut pas forcément que cette dernière soit un but. On peut considérer l’équerre comme le chemin lui-même que tout maçon doit parcourir. Dans ce cas c’est notre degrés d’intégration du symbole équerre qui nous donnerait notre capacité à parcourir le chemin de la vertu et de la vérité. C’est pour cela que l’équerre enseigne « le faire » afin de construire en rectitude notre vie et le monde qui nous entoure. Peut-être est-ce pour tendre vers cette précision, vers cette rigueur, que les maçons, en loge, lorsqu’ils se mettent à l’ordre, se couvrent de l’équerre, symbole de rectitude.

Le compas :

Compas provient de compasser (mesurer avec exactitude) issu du latin passus (le pas) et compassare (mesurer avec le pas), il désigne un instrument de tracé ou de mesure qui, composé de deux branches articulées à une extrémité et dont les formes sont adaptés à la mesure, sert à mesurer des angles, transporter des longueurs ou tracer des circonférences. Il est symbole de science exacte. Il existe plusieurs sortes de compas utilisés par les tailleurs de pierre, les charpentiers, les maçons, les architectes et les navigateurs. On attribue à Talaos, le neveu de Dédale, l’invention du compas. C’est l’un des outils et instruments de tracé les plus anciens que l’homme ait inventé. Et en même temps d’une simplicité de conception remarquable.

La branche mobile du compas permet suivant son écartement de tracer des cercles, déterminer des rapports de proportions, évaluer et reporter des mesures. Le compas permet donc symboliquement d’évaluer la portée et les conséquences des actes de chacun dans notre vie au quotidien.

Le compas symbolise :
  • La sagesse de l’esprit
  • La mesure dans la recherche de la vérité
Si le cercle est, dès la plus haute antiquité associé à la création et/ou à un dieu créateur, le compas en Occident et dès le Moyen-âge, se substitue au cercle : il est l’outil par excellence du créateur. L’utilisation du compas implique une rotation, donc un mouvement, c’est pourquoi il est perçu comme l’activité dynamique de la pensée et de l’esprit. Il symbolise également ces vertus fondées sur la mesure que sont la prudence, la justice, la tempérance et la sagesse. C’est ainsi que Dante dans « le paradis » (13è s) désigne le dieu créateur comme : « celui qui de son compas marqua les limites du monde et régla au-dedans tout ce qui se voit et tout ce qui est caché ». le compas est donc symbole de création du monde et de liberté.

Cependant notre compas sert à tracer un cercle en partant d’un centre précis. Ce cercle peu ainsi représenter le champ des connaissances humaines virtuellement illimité excepté par nos propres limitations individuelles. Ainsi le compas donne aussi la mesure du relatif car si nous écartons ses deux branches au maximum (avec chacun son propre compas) nous voyons que notre connaissances ne pourra jamais dépasser ce diamètre maximum.

Souhaitant continuer un peu plus loin, j’ai découvert que le cercle tracé et les branches du compas évoquent aussi le cadran d’une horloge ou d’une montre. Il est intéressant d’y voir que lorsque la branche mobile a effectué sa révolution, elle revient au point de départ. Nous avons donc un tracé qui limite l’étendu d’un cercle et un tour complet de la branche de notre compas. Ce qui nous conduit à faire un lien entre l’espace et le temps. Certains en déduiront que l’être, c'est-à-dire nous même, est au centre et que la circonférence représente l’univers qui nous entoure. Ou peut-être l’inverse si nous prenons le courant de pensée de Jean Delaporte dans son ouvrage « le grand architecte de l’univers » : « le cercle révélé par le grand architecte de l’univers est une forme qui contient toute les formes et tous les possibles. C’est une matrice où sont conçues les multiples naissances, de l’esprit à la matière. Le grand architecte de l’univers, en nous révélant le cercle de la création, nous invite à pénétrer dans celui de l’initiation. Chaque point de la périphérie se trouve à égale distance du centre, et il en est de même pour chaque frère par rapport à la connaissance. Mais cette égalité vraie n’est pas uniformité, car ce cercle contient à la fois l’unité du point et la multiplicité des rayons ». Autrement dit, selon moi, chaque frère chemine sur des sentiers différents mais ont tous la même destination, celle de la connaissance, de la vérité et de la vertu.

Dans la confession d’un maçon (1727) le compas est lié au serment de l’initié qui le tient alors piqué sur sa poitrine ouvert à 90° qui est la mesure de l’équerre. Dans le régime rectifié le Vénérable Maître disant à l’initié : « prenez ce compas ouvert en équerre et posez en la pointe avec la main gauche sur votre cœur à découvert… l’équerre vous désigne que, si vous remplissez avec exactitude et régularité tous ces devoirs, vous devez espérer de parvenir à la lumière du vrai Orient. L’interpellation qui vous a été faite vous apprend que si l’homme a perdu la lumière par abus de sa liberté, il peut la recouvrer par une volonté ferme et inébranlable dans la pratique du bien. Le compas sur le cœur est l’emblème de la vigilance avec laquelle vous devez réprimer vos passions et réguler vos désirs ».

Le compas est par excellence un symbole d’ouverture. L’apprenti ayant son compas contre sa chair rentre en fait dans un espace temps, dont on a parlé précédemment, qui permet d’échapper au bruit du monde profane. De surcroît, la pointe du compas tournée vers le haut peut être interprété comme le désir d’aller dans les étoiles et d’accéder à la connaissance.

Ainsi, parce qu’il est représentation de l’esprit, le compas a cette faculté, en prenant l’écart d’une équerre, d’être à la fois lui-même et l’équerre comme si, la sagesse acquise, la lumière révélée et atteinte, le Franc maçon avait le pouvoir de soumettre son corps et ses désirs matériels à la maîtrise de son esprit et ce faisant d’accéder à la liberté d’une dignité humaine juste et parfaite. D’ailleurs dans le manuscrit de Wilkinson, il est dit qu’un maçon ne peut jamais se perdre puisque l’on est sûr de toujours le retrouver sur l’équerre et à l’intérieur du compas.

Le compas est donc l’expression de la rigueur géométrique dans les activités créatrices, du temps, des cycles spatios temporels, de la connaissance, de l’esprit, de la vérité, de la sagesse puisqu’il est l’instrument de mesure par excellence et qu’il permet donc d’accéder à la mesure en toutes choses.

Le compas est considéré comme l’image de la pensée dans les différents cercles qu’elle parcours ; les écartements de ses branches et leurs rapprochements figurent les divers modes du raisonnement qui, selon les circonstances, doivent être abondantes et larges ou précis et serrés, mais toujours clairs et persuasifs. Le compas donnera également aux raisonnements leurs limites car malgré la richesse du travail maçonnique, les déductions, inductions et comparaisons ne peuvent pas non plus se compliquer à l’infini.

Comme beaucoup d’autres outils, le compas est un emblème de précision et d’exactitude. Un maçon ne doit rien entreprendre s’il n’a pas mûrement réfléchit à son projet en examinent la surface du cercle qu’il souhaite tracer afin d’arriver au but recherché. La structure mobile du compas nous invite ouvrir les branches de nos conceptions, élargir le cercle de nos compréhension, de notre évaluation et cela sans préjugés. Le compas permet de trouver la mesure dans la recherche du juste milieu. Avoir le sens des proportions. Maîtriser ses passions dans de justes limites.

Bien entendu, n’oublions pas que le compas possède une pointe fixe indispensable à un tracé stable, ce qui rend nécessaire pour chacun de trouver son propre point d’ancrage qui permettra de tracer un cercle juste et parfait, et malgré tout en restant ouvert et mobile sur l’autre pointe. Pour conclure cette 2ème partie je dirais à chacun son compas.

L’équerre et le compas:

Mais pourquoi l’union de l’équerre et du compas est-elle devenue le symbole si caractéristique de la franc-maçonnerie ?

Les trois grandes lumières de la maçonnerie sont une des premières choses que l’initié perçoit ; la bible pour diriger notre foi, l’équerre pour équarrir nos actions, le compas pour nous faire rester dans la juste mesure à l’égard de tous les hommes. L’équerre et le compas ont pour objectif de former le cœur, de régler l’esprit et de ne rien faire qui sorte du bon ordre. L’équerre et le compas représentent la sagesse et la justice, un bon maçon ne doit jamais s’en écarter. C’est pourquoi l’équerre et le compas sont deux symboles de bases fondamentaux qui sont les plus souvent utilisés pour reconnaître une entité maçonnique. Dans la symbolique maçonnique comme dans toutes autres symboliques, les symboles sont souvent associés : ils se complètent, se tempèrent, se contrarient. Et il en est ainsi de l’équerre et du compas. En effet ces deux instruments sont complémentaires l’un par rapport à l’autre, reprenons leurs définitions de base :
  • L’équerre est un instrument fixe qui reste passif et qui symbolise la matière.
  • Le compas est mobile, donc actif et symbolise l’esprit.

En loge le compas et l’équerre sont placés sur l’autel de trois manières différentes :
  • au 1er degré l’équerre est placée sur le compas ainsi que la matière domine l’esprit et que l’on ne peut demander à l’apprenti que sincérité et confiance.
  • Au 2ème degré l’équerre est entrecroisée avec le compas. La matière et l’esprit s’équilibrent et le compagnon fait preuve de sincérité et de discernement.
  • Au 3ème degré enfin le compas est placé sur l’équerre. L’esprit survole la matière et la devise devient discernement et justice.
N’oublions pas que lors de la cérémonie d’initiation, au moment où le récipiendaire prononce le serment maçonnique, il appuie une des pointes du compas qu’il tient de la main gauche contre sa poitrine. C’est probablement là la première manifestation de l’alliance de la matière et de l’esprit.

Dans la quasi-totalité des systèmes philosophiques jusqu’en Orient (hindouistes, bouddhistes, shintoïstes), l’équerre est la base, la référence immuable. Son énergie est passive. Elle montre ce qui est droit de ce qui ne l’est pas. Elle redresse ce qui ne l’est plus ou ce qui ne l’est pas encore. Elle est impartiale. Elle vérifie si la direction ou la décision prise est juste. De son côté, le compas est vif et il faut savoir l’utiliser sans se blesser. Si la sagesse n’est pas présente il peut être dangereux car son énergie est active. Grâce à sa branche mobile il permet de tracer d’évaluer, de mesurer, de comparer. Si l’on écoute les deux, il est donc indispensable d’être droit, de travailler sa rectitude dans son comportement pour prendre des décisions justes et parfaites dans la vie. Si l’équerre est un outil de vérification et de contrôle de la rectitude d’une décision, d’une direction prise, le compas est l’outil du concepteur, ce qui rappelle que tout travail doit être pensé avec intelligence et conçu avec esprit avant d’être réalisé. C’est la raison pour laquelle on ne peut tracer des cercles avec un compas dont les branches sont écartées jusqu’à 180°. Et en même temps plus le compas est ouvert plus l’esprit s’ouvre et grandit. C’est pourquoi dans le métier des bâtisseurs on considère que l’image de la parfaite mesure est lorsque le compas est à 90° c'est-à-dire qu’il est aussi équerre.

Ainsi le mouvement de l’équerre au compas est la traduction du passage symbolique de la terre au ciel, de la matière à l’esprit, de l’inconscient au conscient. Nous avons vu que leur position l’un par rapport à l’autre évolue suivant qu’on progresse dans la construction de soi. Ce cheminement va donc d’un esprit dominé par la matière à un esprit dominant la matière et la chair, et cela en passant par une étape de conciliation, voir de réconciliation. Les humains seraient donc deux réalités, deux facettes en un être vivant. Vu sous cet angle nous sommes amené à nous battre contre nous même pour qu’une des deux réalités domine l’autre. C’est peut être là le but essentiel de l’initiation maçonnique ; cette prise de conscience pour se diriger vers la lumière. La maçonnerie serait alors une ascèse morale à laquelle se livreraient tous les maçons. Cette discipline sur laquelle les maçons travaillent serait quelque part un renoncement de leur condition humaine pour se perfectionner, s’élever dans la vertu et vers la lumière.

Le cercle tracé par le compas est le développement du centre dans son aspect dynamique, alors que le carré est une représentation géométrique dans son aspect statique. Expliquons plus précisément cette particularité. L’équerre, qui sert à vérifier les angles droits et par extension à tracer un carré, borne la matière dans l’espace, donc est statique alors que le compas qui trace des cercles est créateur donc possède un aspect dynamique. L’équerre et le compas entrelacés ou superposés l’un sur l’autre représentent la perfection complémentaire du carré et du cercle ainsi que l’harmonie du matériel et du spirituel. Ils représentent la rectitude dans l’action et la précision dans toute réalisation.

D’autre part considérant que l’équerre et le compas sont respectivement l’image de la terre et du ciel, le volume de la loi sacrée correspond à la descente de la vérité, du verbe créateur. L’entrecroisement des deux outils font penser à un mariage entre le ciel et la terre, bien entendu l’équerre ayant ses pointes vers le bas tandis que le compas les a vers le haut. L’initié après son serment devient quelque part, symboliquement enfant du ciel et de la terre.

Hormis la symbolique individuelle et en couple de l’équerre et du compas, il est intéressant de souligné que ces deux symboles renvoient également à deux notions essentielles que l’on retrouve dans toute les sciences : la verticalité et l’horizontalité. En effet même si le maçon doit tendre vers le juste milieu et l’équilibre en toute chose, notamment entre l’équerre et le compas, la maçonnerie se voulant progressive doit aider les frères à s’élever , ce qui se figure par la passage de l’horizontalité à la verticalité. Ainsi le maçon travaillant à sa construction se lève à la verticale, passe progressivement de l’état allonger à l’état debout donc créer l’angle du compas jusqu’à qu’il soit complètement debout à 90° donc d’équerre. C’est pourquoi on dit qu’un compagnon écrit au moyen d’une équerre alors qu’un maître écrit au moyen d’un compas. C’est cette évolution qui permet au maçon de passer des choses terrestre aux choses célestes qui nous met en face de réalités supérieures qui nous affranchissent de nos limites et nous donnent aussi la possibilité de grandir dans notre vie de profane.

Pour terminer sur ce travail d’approche concernant l’équerre et le compas, je suis satisfait de mieux connaître ces deux symboles maçonniques qui sont les plus connus du monde profane. L’élément fondamental dont j’essaierai d’en faire mien, c’est la notion de symbolisme en acte. En effet ce travail m’élèvera à la verticale que si, et seulement si, j’intègre en compétence inconsciente à ma vie de maçon et de profane l’ensemble des devoirs inhérents à l’équerre et au compas. A ce moment là ces deux symboles serviront de filtres à mes prises de décisions quotidiennes. Voilà pour moi la différence entre étudier un symbole et vivre le symbole.

Enfin je ne sais pas si c’est la rectitude qui m’a permis de faire ce travail ou si c’est ce travail qui m’a permis de trouver la rectitude, une qualité relativement contraignante mais tellement enivrante lorsqu’elle permet de nous construire mieux et plus haut.

J’ai dit vénérable Maître.

F\ P\
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