GLBF-GLPO Loge : Windiga 31/03/2009
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L’Initiation


Vous avez bien voulu m'honorer en me confiant la rédaction de cette planche sur L'Initiation. Il me plait de vous la présenter ce soir, à l'issue de mes lectures, réflexions et échanges avec des FF plus éclairés.

Ces lectures, réflexions et échanges me permettent d'emblée de me focaliser sur L'Initiation maçonnique, étant entendu que l'initiation en tant que rite, n'est pas exclusive à la FM qui, elle-même, n'est pas sans lien avec les sociétés initiatiques, de l'Egypte ancienne à nos jours. Je voudrais par conséquent traiter du thème en me proposant de répondre à la question : qu'est-ce que l'initiation ?

Pour ce faire, ai-je pensé trouver des éléments de réponse en rapportant mes lectures de profane sur le sujet, puis en m'intéressant au symbolisme de la cérémonie d'initiation au Rite Emulation, avant de conclure par une analyse des origines et buts de la FM.

Des lectures d'un profane sur l'initiation

VM, BBAAFF

Des échanges avec mon Parrain, je pus m'enrichir des lectures du livret de présentation générale de la GLBF et de l'ouvrage de Jack Chaboud sur la franc-maçonnerie[1]. De ces documents, relativement à l'initiation, j'apprends qu'initié est opposé à profane, défini comme étant celui qui se trouve devant le temple et qui est désireux d'être éclairé avant de faire le pas, volontairement. Ce temple lui est autant intérieur (son for intérieur) qu'extérieur (espace et temps éloignés du bruit et de la fureur du monde). De même, j'y apprends qu'en raison de sa méthode d'enseignement basée sur l'image, pouvant ne pas convenir à toutes les intelligences, même brillantes, "tout homme n'est point initiable". On y indique, par conséquent, ce préalable : "L'initiation présuppose une sélection, une qualification et une vocation."[2] Par ailleurs, je lis ceci : "La franc-maçonnerie est une fraternité initiatique qui a pour fondement traditionnel la foi en DIEU, Grand Architecte de l'Univers." A la question : "Qu'est-ce qu'une initiation ?", l'on répond : elle est "la cérémonie de réception" de l'Apprenti ou du profane qui, "par son intensité et ses énigmes, pose la première pierre brute de la future exploration de son temple intérieur qu'il entreprendra dans le temple extérieur." Le profane "subit des épreuves symboliques lui permettant de passer des ténèbres à la lumière, mourant à la vie profane et renaissant à la vie sacrée du franc-maçon." Enfin, "l'initiation vient du mot latin initium (commencement)" précise-t-on. Initier un homme, c'est donc déclencher en lui le début d'un mécanisme, d'un long processus, et pas du tout le mettre au courant d'un quelconque secret "transcendant" ou "magique".

De ces passages, je déduis une première signification de l'initiation : elle est un processus permettant aux profanes ayant des prédispositions à accéder à l'enseignement maçonnique, d'entrer volontairement dans le temple pour être éclairés et devenir initiés, c'est-à-dire des hommes pratiquant la fraternité suivant leur foi en Dieu, GADLU.

Tel était-il mon cas au moment où j'entreprenais ma démarche d'adhésion à la franc-maçonnerie ? Profane, je l'étais indiscutablement, aspirant volontaire, de par cette démarche, à un mieux être spirituel. Quant à être prédisposé à l'enseignement maçonnique, il serait prétentieux pour moi de le dire. Me fondant cependant sur la chance qui m'a été offerte par mon Parrain, puis-je me borner à avancer une explication à cette prédisposition supposée. Mis à part mon éducation familiale et catholique, je pense humblement que l'explication devra être recherchée dans ma formation scoute. Initié au scoutisme dès le plus jeune âge, c'est-à-dire instruit de la loi scoute, des principes fondamentaux du scoutisme, des pratiques scoutes et de la vie du fondateur du mouvement, Baden-Powell, soit-dit en passant, illustre franc-maçon, j'ai fait ma promesse scoute suivant un cérémonial inspiré des épreuves de l'initiation chez les Lobi (le Djoro), avant de passer, à deux ans d'intervalles, deux autres étapes supérieures : Flamme et Pilote.

"Me confiant en Dieu et à tous mes frères scouts, je mettrai mon honneur à servir Dieu, à servir mon pays et à vivre la loi scoute." Telle est la formule de promesse prononcée sur le Saint Livre (Bible ou Coran), les couleurs nationales et l'emblème du scoutisme mondial, mettant en évidence la fraternité scoute universelle ainsi que les principes fondamentaux du scoutisme : devoir en Dieu, devoir envers autrui, devoir envers soi-même. Aussi, à chaque étape, la progression scoute se fait dans les domaines de la vie spirituelle ou vie de foi, du civisme ou du patriotisme, de la relation avec les autres et de la personnalité. Ces étapes, je les ai vécues à l'adolescence.

Adulte, au moment où ma cérémonie de réception en tant qu'apprenti approchait, il a suffi que mon Parrain me dise qu'elle a des similitudes avec la cérémonie de promesse scoute, pour que je puisse savoir à quoi m'en tenir sur un plan purement formel.

Du symbolisme de la cérémonie d'initiation au Rite Emulation

VM, BBAAFF

Mis en confiance par mon vécu scout, la qualité du parrainage et les frères qui m'ont accueilli et guidé ce soir-là, ma cérémonie d'initiation fut vécue plutôt sereinement, sans aucune crainte.

Après en avoir vécu les différentes phases, il m'est loisible maintenant de m'imprégner, en tant qu'Ap., du symbolisme de la cérémonie d'initiation, en exploitant notamment le Cahier de l'Apprenti[3], l'ouvrage d'Oswald Wirth[4] ainsi que mes impressions des cérémonies d'initiation auxquelles j'ai pu assister jusque-là.

La préparation du candidat comprend les usages vestimentaires de la FM, le cabinet de réflexion, le bandeau, le dépouillement des métaux et le "déshabillement", autant de moyens pour mettre en avant l'humilité comme vertu cardinale de la FM. Le costume, la cravate, les chaussettes, les chaussures noirs et la chemise blanche illustrent discrétion, sobriété et harmonie dans les couleurs. Le cabinet de réflexion appelle à se connaître soi-même avant tout. Le bandeau marque la cécité (spirituelle). Dépouillement des métaux et état de demi-déshabillé, "ni nu, ni vêtu" sont des symboles d'indigence, car c'est par nature que tous les hommes sont égaux et seront dès lors, dépendants les uns des autres.

Les trois coups à la porte de la L., conduisent à plusieurs interprétations : trois comme l'âge de l'Ap. ; Invocation de la Très Sainte Trinité ; "Voyez et vous trouverez. Demandez et vous recevrez. Frappez et l'on vous ouvrira" ; Loi primitive, Loi mosaïque et Loi révélée par le verbe incarné, etc. Mais la FM appelle chaque initié à en avoir une interprétation personnelle, intérieure…

L'admission du candidat fait prendre conscience : conscience de ce que l'on peut sentir et ressentir de nos actes (pointe du poignard sur le sein gauche alors que l'on ne voit rien) ; conscience du passé lointain de la FM (être né libre et être majeur).

La prière sur le candidat établit sans équivoque que la fin de l'initiation maçonnique, qu'il appartient à l'initié de découvrir, est essentiellement religieuse.

La pérambulation souligne que la FM est une famille universelle, une voie initiatique où l'on avance "à l'Equerre", c'est-à-dire avec rectitude.

La présentation indique que le profane postule dans l'Ordre pour ses nobles idéaux (donc par vocation) et qu'il est un homme d'honneur.

La marche vers l'autel, à l'équerre, est une progression d'ordre intellectuel, moral et spirituel, de l'Occident à l'Orient, soit du monde profane vers la Lumière de l'Initiation, en trois stades qui évoquent les étapes de la connaissance humaine fondée sur la foi au GADLU.

L'avertissement du Vénérable instruit une fois de plus le candidat de se départir des préjugés négatifs sur la FM et le rassure sur la compatibilité de son serment avec ses devoirs civils, moraux ou religieux.

L'obligation (ou le serment) du candidat se fait sur le VSL, en présence du GADLU et de toute la FM universelle. Le candidat se trouve alors dans une position inconfortable, de sorte qu'à l'instant où il reprend une position plus confortable, il se trouve être un autre homme, un homme ayant dorénavant la qualité maçonnique : le VSL, l'E. et le C., soit les trois Grandes Lumières de la FM, sur lesquelles il a prêté serment, sont la Lumière qui l'éblouit à la chute du bandeau et qui devra l'amener à comprendre que ce qui va vivre désormais en lui est une longue tradition.

Les trois lumières secondaires, le Soleil, la Lune et le Maître de la Loge, représentés respectivement par les (bougies des) 2nd Surveillant (Midi), 1er Surveillant (Occident) et Vénérable (Orient), sont expliquées au "Frère nouvellement assermenté, parmi les maçons" : le Vénérable représente Salomon, roi d'Israël, dont la Sagesse conçut le Temple ; le 1er Surveillant, Hiram, roi de Tyr, dont la Force convoya les pierres taillées nécessaires ; et le 2nd Surveillant, Hiram Abiff, le principal architecte, dont la mission était d'en réaliser la Beauté.

Les trois grands dangers peuvent se comprendre comme des menaces, permanente pour le dernier, en cas de parjure, mais ce passage du Rituel demeurerait difficile à comprendre dans son ésotérisme.

La communication des secrets concerne en réalité des secrets purement formels (signes, attouchements, mots) encadrant le grand secret qui est propre et intérieur à chaque maçon : aucune vérité métaphysique, ni "pouvoirs" surnaturels, ni voie d'accès cosmique ou supra cosmique, mais une véritable ascèse permettant un travail profond de transformation sur soi, au moyen de symboles, à partir des trois Grandes Lumières.

Le passage devant les chaires n'est pas autre chose qu'un tuilage particulièrement solennel d'un désormais initié.

Le tablier est le symbole de l'innocence et le lien de l'amitié. Il élève l'emblème du Travail, implique une attitude honorable et de tolérance.

L'épreuve de la charité rappelle la pierre initialement rejetée par les constructeurs et qui s'avèrera être la pierre principale de l'Edifice : le profane dépouillé de tout, qui accède néanmoins à l'initiation, s'en souviendra pour pratiquer cette vertu (la charité) au profit d'un F. dans la détresse.

Les outils qui sont la Règle de 24 pouces, le Maillet à dégrossir et le Ciseau, serviront à polir la Pierre brute extraite des carrières (l'Homme) pour qu'elle devienne Pierre cubique (l'Initié).

La présentation de la charte au nouveau F. a pour but de prouver que la loge qui vient de l'initier est régulière.

L'exhortation après l'initiation est essentiellement morale, voire, déontologique : elle développe opportunément les devoirs de l'initié, "citoyen du monde", envers Dieu, envers son prochain et envers lui-même.

A cette étape, l'initiation est pour moi un grand moment de mystères, de silence, de méditation, de solennité et d'engagement sur des valeurs morales, sur des vertus à pratiquer dans sa vie quotidienne : fraternité, charité, discrétion, égalité, conscience, piété, droiture, honorabilité, tolérance, travail, fidélité... C'est aussi le moment où l'on commence à savoir ce qu'est réellement la franc-maçonnerie : rien d'occulte, de sectaire, ni de sorcier finalement, mais un cadre d'apprentissage fait de rites, cérémonials, d'images et de symboles.

Des origines et buts de la FM

VM, BBAAFF,

Les origines et buts de la FM définissent précisément ce qu'elle est. Ils montrent bien, comme je le notais au début de mes propos, le lien avec les sociétés initiatiques anciennes. Ils montrent aussi que l'initiation est consubstantielle à la FM.

Comme on le sait, d'après le Cahier de l'Apprenti[5], la FM tire ses origines des constructeurs médiévaux qui édifièrent les cathédrales. Bien plus, au moment où se fonde la FM moderne, c'est-à-dire en 1717, elle pouvait légitimement se réclamer de toutes les confraternités initiatiques du passé. D'où, se conformant à des usages antiques, ces constructeurs du Moyen Âge se transmettaient les secrets de leur art par la pratique de rites initiatiques tenant du mythe et cachant le plus souvent un sens allégorique. Ainsi comprend-on que la Maçonnerie moderne leur emprunte un ensemble de formes allégoriques et de symboles ingénieux, des règles de bonne discipline et des traditions de fraternelle solidarité, afin d'appliquer le tout à l'enseignement d'une architecture sociale, s'efforçant de construire le bonheur humain, en travaillant au perfectionnement intellectuel et moral des individus[6].

Ainsi, comprend-on également la signification de la célébration des solstices par les confraternités de Saint-Jean (les architectes du Moyen Âge) qui, semble-t-il, se retrouvaient être adeptes plus ou moins conscients de l'antique culte de Janus. De même que les deux saints solsticiaux (Saint-Jean), le dieu au double visage présidait à l'inauguration de la marche ascendante, puis descendante du Soleil, car il était le génie de tous les commencements, aussi bien des années et des saisons, que de la vie et de l'existence en général. Or, il ne faut pas perdre de vue que, comme je l'ai déjà mentionné, commencement se dit initium en latin. Les Initiés devaient donc voir la divinité tutélaire de l'initiation dans cet immortel préposé à la garde des portes (janua), dont il écartait ceux qui ne doivent pas entrer. Une baguette (baculum) était à cet effet son insigne. Il tenait, en outre, une clé, pour indiquer qu'il lui appartient d'ouvrir et de fermer, de révéler les mystères aux esprits d'élite, ou de les dérober à la curiosité des profanes indignes de les connaître[7].

La Constitution de la GLBF, dispose que "la FM a pour but le perfectionnement moral de l'humanité et pour moyen la propagation d'une vraie philanthropie par l'emploi des usages et formes symboliques. Ses moyens d'actions sont notamment : l'usage du symbolisme emprunté à l'Art Royal ; le respect et la pratique exacte des rituels, de la bienfaisance, de la tolérance et d'une conduite exemplaire."

Ceci met en exergue l'importance des rituels dont l'initiation est entièrement imprégnée. En fait, comme l'exprime bien à-propos Oswald Wirth : " Le rituel maçonnique est conforme aux traditions initiatiques. Il vise à former réellement des Initiés, c'est-à-dire des hommes supérieurs, des penseurs indépendants dégagés des préjugés du vulgaire, des sages instruits de ce qui n'est pas à la portée de chacun. Le mot initiation implique pour nous bien autre chose que la simple révélation des "mystères" qui permettent aux Franc-Maçons de se reconnaître entre eux. Il évoque un passé prestigieux, et sollicite le Maçon moderne à réaliser l'idéal de l'Initié antique."[8] Fin de citation.

In fine, l'initiation enseigne à se dégager des préjugés et des défectuosités profanes, afin de se mettre en état de voir effectivement la Lumière. Elle porte sur la vie entière du Maçon : une vie de réflexion et de méditation sur le langage allégorique, une vie à faire en sorte que les symboles ne soient pas lettre morte, pour être un Penseur et un réel Initié.

J'ai dit, VM.

F\ Ap\ S\ S\A\

[1]GLBF (2004), La Grande Loge du Burkina Faso. Présentation générale, Deuxième édition ; CHABOUD J. (2004), La franc-maçonnerie. Histoire, mythes et réalités, Librio.
 [2]Mots en gras dans le livret.
 [3]Cahier de l'Apprenti de la GLNF, Loge d'instruction du rite émulation.
 [4]WIRTH O. (2004), La Franc-Maçonnerie rendue intelligible à ses adeptes. Sa philosophie, son objet, sa méthode, ses moyens, tome I L'Apprenti, Editions Dervy.
 [5]Op. cit.
 [6]WIRTH O., op. cit.
 [7]Ibid.
 [8]Ibid.
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