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Eléments sur le Temple du Roi Salomon
 et la chambre du Milieu


« Ainsi parle le Seigneur, le tout puissant, le Dieu d’Israël : améliorez votre conduite, votre manière d’agir, pour que je puisse habiter avec vous en ce lieu. Ne vous bercez pas de paroles illusoires en répétant : Temple du Seigneur ! Temple du seigneur ! »   Jérémie 7, 3-4. TOB

ELEMENTS SUR LE TEMPLE DU ROI SALOMON ET LA CHAMBRE DU MILIEU
Pour débuter ce travail, il me parait nécessaire de repositionner quelques éléments concernant la Chambre du Milieu dans l’ensemble auquel elle appartient, c'est-à-dire le Temple du Roi Salomon.
Le temple de Salomon, comme beaucoup de temple de cette période (phéniciens et égyptiens) était bâtit sur une tripartition ; un Oulâm que nous appelons vestibule, un Hékal, la plus grande des salles, un Debhir, situé tout au fond, que nous appelons chambre sacrée et parfois désigné comme le Saint des Saints. C’est dans I Chroniques 28/19 que le Roi David, faisant ses ultimes recommandations à son fils Salomon, qui allait lui succéder, lui expose tout ce qu’il a préparé en vue de la construction du Temple, et il ajoute « Tout cela se trouve dans un écrit de la main du Seigneur qui m’a fait comprendre tout les ouvrages du plan ».

Le temple de Salomon, œuvre révélée,  est conçu comme une représentation du cosmos. Tout univers prend naissance en son centre, il s’étend à partir d’un point central qui en est le nombril (on trouve des explications similaires dans le Rig Véda X, 149, chez les hébreux, etc.). Une représentation du Cosmos sur la terre, un lieu, un centre autour duquel s’organise le cosmos, parce que rien ne peut se faire, rien ne peut commencer sans une orientation préalable. Rappelons-nous que jusqu’ici, l’Arche de l’Alliance qui contenait les secondes tables de la Loi était abrité sous une tente, un mode d’être nomade. Le peuple juif en avait alors terminé avec le nomadisme. Une orientation suppose l’acquisition d’un point fixe. Ce sera le Temple de Salomon. Le Temple est donc à la fois une représentation du cosmos et en même temps le centre du monde.
Le premier espace du temple est  l’Oulam, il correspond à une vie exotériquement tournée vers le Seigneur, on peut le comparer au Narthex de nos cathédrales (qu’on appelle aussi Galilée).

Succédant au vestibule par une porte carrée (qui marquait les 4 points cardinaux), l’Hékal est la première partie couverte du temple de Salomon. Une des fonctions de l’Hékal renvoie à l’onction spirituelle, ce que nous appellerions l’initiation. L’Hékal se dit aussi le saint (1), « Kodesh » en hébreux. Ce terme nous renvoi à trois idées fortes : le « séparé » (du profane - en latin, pro-fannum signifie devant le temple, on peut donc définir le profane comme celui qui n’a pas encore franchi la porte du temple), la deuxième acception nous propose  l’idée de « sainteté » (ce qui est pur, par opposition à ce qui ne l’est pas), le troisième se rapporte à l’idée relationnelle de « respectabilité », est respectable celui qui dans la société est saint et pur, dans le monde des chantiers de l’époque, ce titre devait en particulier convenir aux Maîtres.

Le Temple possède 3 étages (2), probablement installés en une sorte de déambulatoire pourvu de chambres destinées sans doute aux prêtres et aux magasins. Cet étagement n’est pas sans nous rappeler les 3 niveaux de l‘Arche de Noé (Genèse 6, 16), (cela nous entraîne dans la légende Noachite - je n’ai pas travaillé dans ce sens là). Les 3 étages du Temple comme ceux de l’Arche de Noé évoquent la stèle dressée par Jacob au lieu qu’il à nommé Bethel (la Maison de Dieu), suite au songe qu’il fit d’une échelle immense dressée vers le ciel (Genèse 28, 11/13), d’où montaient et descendaient des anges (messagers) et au sommet de laquelle se trouvait Dieu. Cette échelle est  l’axe du monde. L'endroit où Jacob s'est arrêté pour la nuit était le Mont Moriah, le futur emplacement du Temple de Jérusalem. L'échelle représente un pont entre le Ciel et la Terre. On peut interpréter, dans l’approche chrétienne,  le fait que les anges de Dieu montent et descendent comme un échange perpétuel entre le Ciel et la Terre par l’intermédiaire de Christ. Jésus, le Fils de l’Homme,  est alors l’échelle dans sa force de médiation entre Dieu et les hommes.

La notion de Chambre du Milieu, si on laisse de côté ce qu’en dit de manière  laconique le Livre des Rois,  semble fondée uniquement sur la légende liée à construction Salomonienne. On  la trouve dans quelques catéchismes liés au grade de Maître. La bible ne la cite pas en tant que tel (je ne l’ai trouvé que dans la bible Segond). La Chambre du Milieu désigne en FM le lieu ou le Compagnon est élevé au grade de Maître. C’est aussi, selon la légende, le lieu où les Maîtres bâtisseurs du temple du roi Salomon recevaient leur salaire. On y accédait à partir du porche du temple par un escalier en colimaçon situé sur le coté droit du sanctuaire. Peut être peut on comparer cette salle avec une chambre du trait, comme on en trouve encore dans certaines architectures (la cathédrale de Clermont-Ferrand par exemple). Représentation du cosmos, Imago

Mundi et Axis Mundi tout à la fois, le temple resanctifie infiniment le Monde parce qu’il le représente, parce qu’il le contient, et enfin parce qu’il le relie à l’univers.

CONSIDERATIONS SYMBOLIQUES SUR LA CHAMBRE DU MILIEU
« L’entrée de l’annexe inférieure était le côté droit de la maison. Par des trappes, on pouvait accéder à l‘annexe du milieu et de celle du milieu, à la troisième » 1 Roi 6/8 littéralement : l’étage du milieu. Incompréhensible nous dit la bible œcuménique. TOB ou :
« L’entrée des chambres de l’étage inférieur était au côté droit de la maison, on montait à l’étage du milieu par un escalier tournant, et de l‘étage du milieu au troisième » 1 Roi. 8 selon la Bible SEGOND.

1 – la Chambre du Milieu
La Chambre du Milieu ne peut que nous évoquer un souvenir funeste, c’est un lieu tragique, c’est en effet dans la chambre du milieu, alors symbolisée par l’Hékal (d’où les 3 portes sur le Tracé de Loge au 1°) que se joue le meurtre fondamental, celui de Maître Hiram, par les 3 mauvais compagnons voulant à tout prix s’arroger le droit à la Maitrise par la connaissance indue du Mot de passe. Hiram exclut de donner ce mot et il est mis à mort. Il est occis par les mauvais compagnons au cause de leur ambition, dans son acception la plus malsaine, il est abattu par leur fanatisme furieux, il est assassiné par l’ignorance la plus veule.

La Chambre du Milieu, pour le Compagnon qui y entre, après avoir été dûment contrôlé, est  un lieu de détresse où tout n’est que souffrance (souffre alchimique ?), c’est un lieu qui signe pour le compagnon qui y pénètre la perte complète de ses illusions. Des illusions qu’il a pu avoir en l’Amour que son entrée en maçonnerie à fait germer dans son cœur. L’amour désintéressé, la perfection, l’ordre,  ne sont manifestement pas de ce monde. Mais la perte des illusions ne signifie nullement  perte de l’Espoir. En faisant VITRIOL durant son Apprentissage et son parcours de Compagnon, l’initié à  recherché la Raison du Cœur,  et le nouveau Maître Maçon va pouvoir alors changer de niveau de conscience, grandir dans son rapport au monde et donc à ses propres représentations, puisque l’amour désintéressé et la perfection ne sont pas de ce monde, il va se lancer le défi de bâtir une forme d’amour raisonnée par l’idée qu’il se fait du désintérêt : la Fraternité.
Lieu de pèlerinage parce que lieu de l’apparition de la Raison du Cœur, je me demande souvent, alors même que mes gants et mon tablier de compagnon ont été jugé propres : aurais- je pu tuer

 Maître Hiram ? Suis-je immunisé ! Contre l’ambition, contre le fanatisme et contre l’ignorance ? Non,  je ne suis pas vacciné contre une telle vanité… mais je suis F\M\;  C’est ce bon Saint Augustin qui m’a proposé, au travers de son approche du ternaire ou plutôt de la trinité dans l’homme, une vision d’espérance, je le cite : « 3 choses ; être, connaître, vouloir. Car je suis, je connais, je veux. Je suis celui qui connait et qui veut. Je connais que je suis et que je veux. Et je veux être et connaitre. Combien, dans ces trois choses la vie forme un tout indivisible, l’unité de la vie, l’unité de l’intelligence, l’unité de l’essence, l’impossibilité de distinguer des éléments inséparables et pourtant distinct, comprenne cela qui peut » (3).

L’homme est en face de lui-même, nous dit en substance l’Evêque d’Hippone, son grand Maître à penser, Platon, ne nous dit-il pas que « le devenir de chacun de nous est déterminé par la tendance de nos désirs et la nature de notre âme » (4) ? Etre, connaître et vouloir sont  verbes de vie pour les hommes et en particulier pour le Maçon, ils sont les opposés de l’ambition, de l’ignorance et du fanatisme, qui sont des désirs qui relèvent des tendances les plus obscures des hommes et dont la jouissance procure une satisfaction insensée dont la facture exorbitante est la mort à l’essentiel, une mort de l’âme. A la question « qu’as tu fais de ton talent ? », le Maître-Maçon peut répondre qu’il à fait le choix délibéré de le mettre en travail , avec ses Frères, faisant ainsi le deuil de la facilité et de la volupté, pour reprendre un terme augustinien, pour construire quelque chose de bien plus gigantesque que lui-même, dont il ne touchera, sans doute jamais, le bénéfice.

2- Le centre.
Lorsqu’il écrit les Confessions, Augustin a déjà renoncé à chercher la vérité dans le monde inaccessible des idées ; il pense que la première étape de cette recherche est de se trouver soi-même, et cela passe pour lui par la confession. « Toi tu étais devant moi mais moi j’étais parti loin de moi, je ne pouvais plus me trouver moi-même : combien moins encore pouvais-je te trouver toi-même ». Nous ne pouvons pas découvrir à l’extérieur ce qui existe uniquement à l’intérieur. Le Centre est l’origine, le point de départ de toutes choses, il est comme le dit Nicolas de Cues « la machine du monde qui a, pour ainsi dire, son centre partout et sa circonférence nulle part »(5) (N de Cues mort en 1464 ; idée repris par Pascal  - 1596 /1650 - dans les Pensées). Pour le franc-maçon, la Chambre du Milieu est l’expression de cette centralité, elle est constituée du point de départ représenté par Maître Hiram, possesseur de la Parole,  sa circonférence englobe l’univers et elle est la Maison de l’Homme Accompli ou de celui qui cherche à le devenir, le Maître Maçon. Ainsi placée au centre de

l’univers, la Chambre du Milieu est la Maison du Cœur, c’est l’un de ses rôles que d’irriguer le monde, comme un cœur biologique pompe pour irriguer l‘organisme de tout ce dont il a besoin. La chambre du milieu est alors un moteur de vie, un moyeu qui prend toute la roue dans son mouvement. Centre, moteur,  mouvement, elle est comparable au « moteur invisible » dont nous parle Aristote, principe permettant d’entrainer le changement. La Chambre du Milieu est comme un cœur et comme pour le cœur, il existe un mécanisme de retour. Tout ce qui du cœur part doit y revenir. Comme l’exprime fort bien René Guénon « s’il est d’abord un point de départ, il est aussi un point d’aboutissement ; tout est issu de lui, et doit finalement y revenir »(6), j’y reviendrai un peu plus tard.

Alors que dire de ces mouvements constants entre le dehors et le dedans. Parlons d’initiation. La Chambre du Milieu est un lieu s’il en est d’initiation, c’est un Centre. La Chambre du Milieu est un point en dehors de l’espace et en dehors du temps ou les Maçon célèbrent le sacrifice d’Hiram. Un sacrifice me direz-vous et pas un meurtre ? Oui, le sacrifice offre une fonction différente au simple meurtre et c’est justement d’être symbole. Le meurtre symbolique d’Hiram, nous continuons à le vivre, Maitre Eckard nous rappelle que « qui veut être ce qu’il devrait être, doit cesser d’être qui il est. » L’approche est mise en abyme sans être nouvelle pour nous, les différents degrés de passages initiatiques que nous avons vécus pour côtoyer le Centre reposent sur cette idée de mort et de renaissance, sur cette idée de sacrifice. Mais jusqu’à aujourd’hui, le sacrifice était le nôtre et passait par l’acceptation. Hiram n’a pas eu de réserve, je cite notre rituel « « Plutôt la mort, dit HIRAM, que de violer le secret qui m’a été confié ». Mais la mort vient d’ailleurs, elle est perpétrée par des ennemis que nous combattons toujours. Hiram sort victorieux de ce combat… et mort, car on ne peut échapper au sacrifice quand on est un Homme Accompli : « celui qui veut sauver sa vie la perdra »(7) nous dit Saint Marc, et nous savons entendre de quoi il est question. Il est en effet profondément éthique d’être capable de sacrifier sa vie corporelle au profit de la vie essentielle, autrement dit, de préférer la mort du corps à la mort de l’âme. La Mort d’Hiram est essentielle parce quelle permet d’interrompre la construction du Temple pour un temps physique, afin de permettre aux compagnons et aux Maîtres de prendre de la distance avec la matière ; essentielle aussi dans un temps spirituel infini afin de se tourner en entier vers (se convertir) la Vérité, la Lumière et la Vie. Le sacrifice du Maître Bâtisseur nous projette en un lieu/temps Autre qui n’est plus  lieu des apparences, des faux espoirs et de la vanité, un lieu/temps hors du temps et de l’espace pour nous faire contempler les voies de la spiritualité, pour nous et pour nos Frères en humanité. En cherchant un peu compulsivement dans Guenon, j’ai touché du doigt ce

qu’Augustin avait évoqué et dont j’ai parlé plus haut : « dans le symbolisme du grade de Maître, l’initié s’identifie à la victime »(8). Ananda Coomaraswamy, dans un de ses ouvrages va également dans ce sens, je cite « la victime, ( comme le montrent clairement les Brâhmanas), est une représentation du sacrifiant,(ou, comme l’expriment les textes,) elle est le sacrifiant lui-même, en accord avec la loi universelle suivant laquelle l’initiation est une mort et une renaissance, il est manifeste que l’initié est l’oblation ».(9)  Nous connaissons Hiram quand Hiram est  Nous ! Parce que, dans la Chambre du Milieu, qui est pour nous un lieu de Sacrifice, nous avons été offerts. La transmission n’est pas, et je sais l’avoir cru quand bien  même  mes Surveillants me montraient gentiment un autre chemin, une affaire intellectuelle, Augustin à raison, il est dans la Lumière, la transmission est une affaire de chair et de sang. Je me suis rappelé un charismatique passage de Saint Paul : « par le baptême, en sa mort, nous avons été enseveli avec Lui, afin que, comme Christ est ressuscité des morts, nous menions aussi une vie nouvelle »(10). Et Paul nous dit quelques versets plus loin « notre vieil homme a été crucifié avec Lui pour que soit détruit ce corps de péché ». Notre vieil homme est celui dont le corps recherchait la volupté facile. Bien évidemment mes Frères, je ne suis pas encore à même de comprendre toute la profondeur de ces différents messages, mais j’en mesure la profondeur abyssale à l’aune de mon vertige.
La première phase de tout sacrifice est la mort et le démembrement, et René Guénon nous dit encore à ce sujet, je cite : «  on a d’ailleurs souvent insisté sur les rapports de la légende d’Hiram avec le mythe
d’Osiris, de sorte que, quand il est question de « rassembler ce qui est épars », on peut penser aussitôt à Isis rassemblant les membres dispersés d’Osiris »(11) .

La seconde phase du sacrifice est pour nous la plus importante en ce sens qu’elle donne un axe à notre propre vie dans ce monde : rassembler ce qui avait été démembré, construire notre Soi avec les Autres, retour au cœur, « point d’aboutissement ; tout est issu de lui, et doit finalement y revenir(12) », une boucle semble bouclée, il faut reconstruire. Cette reconstruction, cette entrée en soi est à la fois une mort et en même temps une renaissance. C’est bien tout cela que nous confie Saint Augustin quand il conseille : « ne va pas au dehors, cherche en toi-même; la vérité réside à l’intérieur de l'homme »(13). L’évêque d’Hippone nous propose  d’échapper aux désirs exaltés, qui représentent également le péché originel, et donc à l’ambition, au fanatisme et à l’ignorance, afin de retrouver le désir fondamental, celui de connaître le Mystère de la Vie(14). La démarche de Saint

Augustin est celle d’un homme absolument passionné par la vie et ses délices, qui, se convertissant sur le tard et dans la douleur (le Jardin de Milan), après avoir été assez proche de la pensée manichéenne, va lutter de toute ses forces contre l’amour, avant de réaliser qu’il n’y a pas d’autre sens possible à la vie que l’Amour. Le message augustinien nous explique comment la révélation (l’initiation pour nous) travaille l’homme de l’intérieur, le renvoyant constamment à sa vie, ses pensées et ses actes. Pour bâtir sa Citée de Dieu, Augustin pense qu’il faut agir, devenir meilleur pour rendre meilleur le monde. Ayant compris que le royaume n’est pas de ce monde, il faut agir pour le transformer en y labourant pour y semer les graines permettant de transformer en amour et en paix les incessantes violences des conflits des hommes. Chez l’auteur des Confessions, la foi se manifeste par les œuvres, par l’agir. L’évêque d’Hippone  a été le précurseur du génie de l’occident, qui réside dans l’action : la contemplation doit, pour lui, déboucher sur l’action ! Cette approche bien augustinienne est celle de la mise en mouvement de la raison dans le monde manifesté,    la raison appliquée aux désirs de l’âme ;  Ainsi, nous dit-il encore, «  l'homme intérieur pourra s'unir à l'être mystérieux qui habite en lui, et trouver dans cette union non des plaisirs grossiers et charnels, mais la volupté spirituelle »

3        – Le Maître et la Chambre du Milieu
Lieu de l’élévation du Compagnon au grade de Maître, c’est pour lui la reconnaissance de sa capacité profonde à participer à l’élévation morale de l’humanité,  il est censé ne plus être perméable à la subjectivité. Il sait maintenant  utiliser les outils de construction qui lui ont été confiés pour bâtir sa « Citée de Dieu », son temple avec ses Frères. Passer en Chambre du Milieu, avoir été offert en sacrifice, avoir vécu la mort et le retour à la vie de Maître Hiram lui permet de laisser sa vieille dépouille d’être de désir, pour devenir un être nouveau, éveillé à la conscience. En mourant à lui-même, il peut partir en quête du Maître en devenir qu’il est : « tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais déjà connu » (théorie de la réminiscence, Platon). Il doit  passer par cette mort et cette renaissance pour aller vers son propre centre, se poser la question de la mort, du sens de la vie et de la vanité de son égo, de ses désirs et de ses ambitions. Faible de sa mort et fort de sa résurrection, il se pose entre l’Equerre et le Compas, « c'est-à-dire au lieu même où s’inscrit l’étoile flamboyante ». « Il se tient consciemment debout, s’identifiant à l’axe du monde ». Tout le sens de sa vie est maintenant d’assumer, dans la recherche constante de son équilibre,  la complémentarité entre la verticale (l’élan) et  l’horizontale (les faux désirs)(15). C’est « être vivant »

et pour reprendre  St Augustin « on ne doit désespérer d’aucun homme tant qu’il est encore vivant(16) », c’est ainsi que l’espérance dont j’ai parlé plus haut me conduit, dans le silence intérieur, au-dedans de toutes ces signes muets de l’indicible, vers une forme de la Vérité que je peux parfois, pas assez hélas,  reconnaitre. Cette espérance, que j’ai déjà promise « en prenant l’engagement d’aimer mes Frères avec ferveur et dévouement », se trouve renouvelée, revivifiée entre l’Equerre et le Compas, en Chambre du Milieu. Revivifié parce que le Maître Maçon à besoin de nourrir son énergie, de se recharger spirituellement auprès de ses FF dans la Chambre du Milieu. Devenu Hiram, le Maître Maçon est condamné au travail. Ce n’est  lié à aucune justice, fut elle divine, c’est pour vivre que le Maître-Maçon travaille, parce que notre Maître Hiram, troisième point d’un ternaire entre Salomon, roi d’Israël et Hiram, roi de Tyr, est un homme d’action, que toute sa sagesse, toutes ses connaissances, tout son amour des hommes font de lui un Etre de l’Agir, s’accordant à merveille avec la philosophie théologique que professera, bien des siècles plus tard, Saint Augustin, Evêque d’Hippone.

Mais un voile sépare le Débhir  de la chambre du Milieu (l’Hékal), serait-ce la frontière de la Connaissance ? Comme le propose P. Négrier dans son livre sur le temple de Salomon « la chambre du Milieu est aussi le lieu qui regroupe les fonctions de la création ; aussi est-il approprié à la révélation du secret de la résurrection du Maitre. Celui qui est ressuscité ne plus mourir et rejoint celui qui n’est jamais né, le principe qui est la vie même »(17). Il est des choses que l’homme, fut-il Maître, ne peut, ni ne doit, pénétrer. Dans le Débhir du temple salomonien, le Saint des Saints,  le Tabernacle est entouré d’une nuée virulente, seul un Grand Prêtre y entre, rarement, avec de multiples précautions,  pour quelques offices bien particuliers. La connaissance de la vie et de la mort peut être approchée, probablement pas contemplée directement, Saint Jean sait nous le rappeler dans son évangile « Personne n’a jamais vu Dieu »(18)

Et permettez-moi Mes Chers Frères de terminer ce travail sur la Chambre du Milieu en laissant à nouveau la parole à l’Auteur des Confessions : « Regarde au moins si tu n'es pas sûr de ton doute; et si tu en es certain, cherche ce qui te donne cette certitude. Non assurément, tu n'auras pas pour te guider les rayons du soleil, mais la lumière véritable qui éclaire tout homme venant en ce monde »

 
J’ai dit       V\M\
J\M\ F\
[1]  1 Roi. 8. 8
[2]  1 Roi 6/6
[3]  Saint Augustin. Les confessions. Fin du chapitre 11
[4]  Platon. Les Lois 904c
[5] Nicolas de Cues, La Docte Ignorance, Edition Trédaniel, p 225
8 René Guénon, Symboles de la science sacrée, NRF, P 71
[7]  Evangile de Marc
[8] 9 René GUENON. Symboles de la science sacrée
[9] Ananda K. COOMARASWAMY. La doctrine du sacrifice. DERVY. P 193
[10]  Epitre aux Romains 6, 4 TOB
[11]   René GUENON. Symboles  de la science sacrée. P 284
[12] René Guénon, opus cité
[13]  Saint AUGUSTIN. De la vraie religion. Chap. 29
[14]  voir Paul DIEL : la psychologie de la motivation et le symbolisme dans l’évangile de Jean
[15] voir Paul DIEL : la psychologie de la motivation et le symbolisme dans l’évangile de Jean
[16] Saint Augustin, les homélies, XXXVIII
[17] Patrick NEGRIER. Le Temple de Salomon. Editions Thélètes. P 62
[18] Evangile de St Jean. 1.18. TOB

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