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Le Coq

Alors qu’avec J\ F\, nous préparions la décoration du temple pour notre deuxième tenue, et encore tout emballé de la planche de la première tenue sur la paternité (la paternalité), je demandais à D\ quand aurions-nous l’occasion de « plancher ».

« Justement » nous dit-il, il serait intéressant que vous écriviez une « planchette » sur un symbole de votre choix…

J\ F\, sans hésiter propose de disserter sur le pavé mosaïque, moi je pense immédiatement au « fil à plomb » avec déjà en tête l’attraction, la gravitation universelle, Newton, le centre de la terre, la verticalité, la…« non !, intervient D\, le thème est déjà retenu par T\, autre chose
dans le cabinet de réflexion ? ».

Coupé un peu dans mon élan, je pense à V\ I\ T\ R\ I\ O\ L\, puis je me souviens que, dans la restitution des impressions de mon initiation, j’avais indiqué que je n’avais pas tout compris aux symboles du cabinet de réflexion et notamment celui du coq. Que n’ai-je pas dit là, D\ tranche, ce sera donc le coq !

Pas fier comme un coq, me viennent aussitôt à l’esprit, le sketch de Coluche…, une chanson de Claude Nougaro « Le coq et la Pendule » et quelques expressions avec l’animal… J’ai du pain sur la planche… Il doit y avoir à dire, le gallinacé est tout de même le symbole de la France !

Comme un coq en pâte dans ma maison du Poitou, je commence ma réflexion avec un petit cocktail…

Sans doute à cette heure rouge comme un coq, comment, sans trop passer du coq à l’âne, définir la symbolique de notre emblème sportif.

Jusqu’alors appelé gallus, comme le peuple, il devrait son nom soit à une racine celtique « kog » signifiant rouge, soit à son chant le fameux « cocorico » (c’est sans doute la bonne hypothèse, l’onomatopée imitant le cri du coq est attestée sous la forme coccus en latin impérial, « coco, coco » Pétrone 1401). A noter que le coq ne chante pas de la même manière en allemand « kikeriki », en anglais « Cock-a-doodle-do », Ake-e-ake-ake en thaï ou encore en islandais « Gaggalagaggalagó ».

Croyances :

Le coq est à l’origine de diverses croyances :

• Les Chaldéens croyaient que le coq recevait, chaque jour, un influx divin qui le poussait à chanter avant tout autre oiseau ;

• En Chine, le coq était respecté autant que protégé. Il était censé protéger la maison et représenter les cinq vertus, les vertus civiles, par son port de tête « mandarinal », les vertus militaires par ses ergots, le courage par son attitude dans les combats, la bonté pour son partage de la nourriture avec son harem, la confiance pour sa ponctualité à annoncer le lever du soleil. Il a mérité ainsi de figurer dans l'horoscope chinois.
• Les Etrusques et les Romains pratiquaient l'alectryonomancie (d'Alectruon), c'est à dire la prévision des faits à venir. Sur un échiquier étaient disposés des grains ; selon la façon dont les volatiles les mangeaient, les prêtres tiraient des prédictions fastes ou néfastes ! L'oiseau s'est de même vu doté d'un pouvoir de psychopompe, c'est à dire annoncer dans l'autre monde l'arrivée de l'âme d'un défunt, et l'accompagner dans son dernier voyage, avant qu'elle trouve une nouvelle lumière, une nouvelle naissance.
• Les Grecs en firent l'emblème du courage militaire comme le montre cette légende : « Thémistocle, sur le point de livrer bataille aux perses, harangua ses hommes en leur recommandant l'exemple des coqs ».

Le coq était consacré à plusieurs dieux solaires et lunaires, comme Jupiter, maître du ciel, Apollon, dieu du soleil, Diane, déesse de la lune et soeur jumelle du précédent, Esculape, fils d'Apollon, ainsi que Minerve. « Nourrissez le coq, et ne l'immolez pas, car il est consacré au soleil et à la lune ».

Socrate (Vème siècle avant J\ C\), à la veille de sa mort, demandait, à l'inverse, à son disciple Criton de sacrifier un coq à Esculape, dieu guérisseur, et, parfois, de résurrection. Athènes créa, en souvenir de ce fait, une fête annuelle qui comportait principalement des combats de coqs. Les Gaulois eurent la même idée que les Grecs.

• En Inde, le coq est l'attribut de Skanda, personnification de l'énergie solaire.
• Au Japon, le chant du coq, associé à ceux des dieux, fait sortir de sa caverne Amaterasu, déesse du soleil et dans les temples shintoïstes des coqs courent librement.
• Les musulmans ont réservé au coq une place éminente à l'heure du jugement dernier. Quand viendra ce jour, c'est le Grand Coq Blanc qui avertira les croyants de l'événement.
• Les anciens croyaient que les entrailles du coq renfermaient une pierre mirifique : « La pierre alectorienne ». C'était un talisman qui porterait les vertus de l'audace, de la vigueur et de la décision. Ils sacrifiaient un coq à Priape, renommé pour sa sexualité débordante !
• Au Moyen Age, une autre pierre aurait été contenue dans le gésier d'un coq castré : « la pierre de chapon », celle-ci, portée, procurerait sagesse et bon sens.

Symbolique

Le Coq a toujours était symbole :

• Symbole du soleil levant, symbole du temps, de vigilance et de courage, de résurrection, le coq allait se voir également adopté par la franc-maçonnerie comme symbole de la vigilance et d'avènement de lumière (initiatique). Nous y reviendrons plus tard. Le fait que le Coq chante tôt le matin a contribué à le parer des qualités de vigilance et d'obstination. Le Coq symbole du courage, le roi de Crète Idoménée avait fait peindre un coq sur son bouclier lui attribuant une part de son héroïsme.

Le Coq symbole d'ardeur sexuelle : son assiduité à « honorer » toutes les poules de son secteur lui a valu une réputation d'ardeur sexuelle très enviée. Cette réputation a valu à la langue française de s'enrichir de dictons comme « être le coq du village » ou « faire le coq ».

• Le soleil, bien avant les horloges, était seul à rythmer la vie quotidienne, il devenait normal d'associer le coq au temps et à la journée.

Il était naturel que Louis XIV, le Roi Soleil, voua un culte tout particulier à l'astre qui nous éclaire, lui qui avait ordonnancé Versailles en grande partie autour du soleil, appartements, parterres et bassins. En 1659, le roi et Colbert décident la création d'un ordre architectural et décoratif, « l'ordre français » : le projet retenu de Lebrun mêle les fleurs de lys et le coq, ainsi qu'on peut le voir dans la Galerie des Glaces.

• Le coq symbole noir : Que ce soient les poulets des Romains ou le coq des musulmans, leur couleur était la blanche. Dans les superstitions et croyances populaires, le coq devient noir, la couleur de la nuit et des maléfices. Lui qui est sensé éloigner les terreurs de la nuit subit le revers des pouvoirs qu'on lui prêtait. Il devient ainsi victime expiatoire ou propitiatoire. Pour s'assurer d'une bonne expédition en mer, nombre de marins de toutes latitudes sacrifiaient un coq avant leur départ.

Les cérémonies du culte vaudou en Haïti ou en Amérique du sud, font grande consommation de poulets. Au Moyen-âge le sabbat, pendant lequel se déroulaient des pratiques parfois inavouables, était heureusement interrompu par le chant du coq faisant revenir la lumière.

Le coq français :

Le choix du coq comme symbole français remonte à la chute de l'Empire romain pendant la création de la Gaule.

Le Coq, symbole du peuple français du fait qu’en latin : Gallus = gaulois / Gallus = coq le gallinacé.

L'origine proviendrait d'une boutade des ennemis héréditaires des Français : les Anglais. Au début XIIe, ils firent remarquer par dérision qu'en latin, coq et gaulois se disaient tous deux « gallus » et que les Français (tout particulièrement leur roi Philippe Auguste) étaient tout aussi orgueilleux que l'animal de basse-cour. Par esprit de contradiction, les Français reprirent à leur compte cette expression en mettant en avant que ce fier animal était même cité dans l’évangile selon St Luc (« Avant que le coq chante aujourd'hui, tu m'auras renié trois fois » affirma Jésus à Pierre).

A la Renaissance, le coq commence à être rattaché à l'idée de Nation française. Sous le règne des Valois et des Bourbons, l'effigie des Rois est souvent accompagnée d'un coq censé représenter la France dans les gravures, sur les monnaies. Le coq est ainsi présent au Louvre et à Versailles.

En 1659, Colbert, désireux de créer en architecture un ordre français pour les chapiteaux des colonnes, mit au concours un motif de décorations utilisant des coqs au lieu des acanthes corinthiennes. Le vainqueur en fut Le Brun : ses chapiteaux en bronze doré sont encore dans la galerie des glaces à Versailles.

En 1665, une médaille officielle fut frappée pour la délivrance du Quesnoy : le coq français met en fuite le lion espagnol. Dès lors, les adversaires des français, et notamment les Hollandais, emploient constamment le coq pour symboliser la France, dans leur caricature et dans leurs allégories.

Le coq fut très apprécié à l'occasion de la Révolution française et de la monarchie de Juillet, où il fut introduit en remplacement des animaux symboliques de la Royauté (lion et aigle), ainsi que du lys dynastique.

Ainsi, à la période révolutionnaire, on le voit figurer sur un écu, orné du bonnet phrygien, sur le sceau du Premier consul et l'allégorie de la fraternité porte souvent un bâton surmonté d'un coq.

Napoléon Ier substitue l'Empire à la République et dès lors l'aigle remplace le coq.

Après une période d'éclipse, les « Trois Glorieuses » de 1830 réhabilitent l'image du coq français et le Duc d'Orléans, c’est-à-dire Louis-Philippe, signera une ordonnance indiquant que le coq devrait figurer sur les drapeaux et les boutons d'uniformes de la garde nationale.

Ainsi un coq figure avec un globe sous les pieds sur le premier et second contre-sceau de Louis-Philippe 1er, au sommet des drapeaux qui sont croisés en sautoir derrière les armes d'Orléans ou derrière le livre ouvert représentant la charte constitutionnelle, ainsi qu'au sommet des drapeaux et étendards de l'armée, sous la Monarchie de Juillet.

L'aigle impérial retrouve sa place avec Napoléon III, comme signe de la permanence de l'Empire.

Le coq devient un symbole quasi officiel sous la IIIème République : Depuis 1848, le coq figure sur le Sceau de la République, La Liberté assise tient un gouvernail orné d’un coq, il a été utilisé à partir de 1899 comme motif des pièces d’or de 20 F\.

La grille du parc du Palais de l'Elysée construite à la fin du XIXème siècle est ornée d'un coq, « la grille du coq » que l'on peut voir encore actuellement.

Il est l’emblème officiel des sportifs français sélectionnés dans des épreuves internationales.

Le coq apparaît aussi sur des timbres.

L'exclamation « cocorico ! », imitant le cri de l'animal, est une affirmation (dans la majorité des cas ironiques) du patriotisme français.

Pour nous Francs-Maçons : Seul animal présent, sa symbolique regroupe l’ensemble des fondements du processus initiatique de l’apprenti maçon.

Ils prennent naissance dans le cabinet de réflexion, lorsque le récipiendaire dépouillé de ses métaux, se trouve enfermé dans un espace sombre et caverneux, avec une bougie pour éclairage unique. Environnement, qui symbolise un lieu de séjour souterrain, propice à l’introspection et à la concentration mentale, et, qui l’invite à ce moment à se préparer à la mort symbolique. Isolé, réduit à ses propres ressources, Le récipiendaire cesse de participer à la vie profane.

Du point de vue ésotérique, le coq annonce que la lumière est proche, c’est ainsi qu’il dénonce une vérité cachée en nous, qui est révélée par l’ensemble des symboles présents dans le cabinet de réflexion, qui invitent le profane, une fois le bandeau retiré, à la transformation de son moi.

A ce moment, le profane par la prise de conscience de cette alchimie interne qui doit s’opérer en lui, est invité par le coq à un voyage au plus profond de lui-même par le V\ I\ T\ R\ I\ O\ L\ (Visita Interiora Terrae : En visitant les entrailles de la terre, Rectificandoque : et en fouillant au plus profond, séparant le pur de l’impur, Invenies : tu découvriras. Occultum Lapidem : la pierre cachée).

Le coq interpelle l’homme mourant, l’ennemi de soi même que reflète le miroir placé juste en face du profane, et, l’entraîne dans une phase d’introspection favorisant la gestation féconde d’un être nouveau, « Les Hommes sommeillent, c’est quand ils meurent qu’ils s’éveillent » aurait dit le Prophète Mahomet.

Symbole solaire, parce qu’aussi appelé oiseau de lumière, il est l’animal qui chante la libération, le passage des ténèbres à la clarté. La raison est toute simple, car il chante à l’aube, en interpellant l’humanité à prendre conscience que le soleil se lève, et que la lumière qui luisait dans les ténèbres apparaît maintenant au grand jour.

Conscience positive, le coq rythme les jours et les nuits qui se succèdent, rythme dans lequel nous vivons, la force du mouvement binaire. Le passage des ténèbres à la lumière qu’il incarne met en évidence la dualité qu’est le bien et le mal, le jour et la nuit, la clarté et l’obscurité, la chaleur et le froid, et, permet de synthétiser ces deux aspects opposés de notre milieu naturel.

Par son chant au réveil appelant les ouvriers au travail, il met en évidence la symbolique du temps, ce temps de travail imparti qui permet à tout franc-maçon d’accéder à la connaissance universelle. Chaque jour le coq nous invite à nous lever courageusement pour défendre nos valeurs humaines, il nous dit : « Soyez éveillés pour faire face à vos responsabilités d’hommes et de femmes libres ».

L’attitude qui personnifie le coq, sa combativité jusqu’à la mort à travers les temps, car ne s’avouant jamais vaincu, sa droiture et son engagement, soumet et impose l’attitude qu’un franc-maçon devrait avoir au sein de la loge et de la citée en jurant de respecter le règlement intérieur, et, de ne pas dévoiler les secrets qui lui sont révélés.

Son tronc droit similaire à la position adopté par le franc-maçon quand il est à l’ordre, et son regard toujours aux aguets rejoint les principes :

• de prudence : « La prudence ne fait-elle pas la moitié de la vie » comme le rappelle un proverbe oriental ?
• de vigilance : rappelons-nous la parole de Bouddha « La vigilance est le chemin du royaume immortel. La négligence celui qui conduit à la mort » ;
• et de persévérance : « L'espérance ne mène à rien, mais la persévérance mène au droit chemin », citation de Jean-François Morin.

Ces principes que le futur initié doit intégrer dans sa vie, et qui constituent les règles que l’apprenti doit continuellement observer, et dont il ne peut se départir.

Voilà ces quelques lignes pour vous décrire un symbole…quand je regarde autour de nous dans le temple, que je me souviens du cabinet de réflexion, je n’ose pas compter le nombre de symboles présents et je me dis que les travaux sont, pour moi, loin d’être terminés…

J’ai dit vénérable Maître.


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