Obédience : NC Loge : Saint Jean - Orient de Paris Date : NC

 

Le Frère retrouvé

Petite digression sur les mots

Un diagnostic est la conclusion de l’examen d’une situation... Le préfixe dia exprime une idée d’imprégnation. Dans une précédente Planche sur la Transmission, j’avais exprimé cette situation à l’égard de ma croyance religieuse.

Aussi, cette Planche, portera sur une réflexion concernant.

Gnose et Spiritualité

Je ne traiterai pas de la gnose au plan divin, mais essentiellement au plan de la connaissance. Une recherche d’un au-delà de l’identité enfermée en moi. Comme je l’avais exprimé dans la Planche citée ci-dessus, et par mon expérience passée, je me situe en tant qu’agnostique devant toute croyance religieuse.

Le théisme est la croyance en un seul Dieu transcendant et en sa volonté révélée ; il est immanent dans toute sa création.

Le déisme est une représentation mentale reconnaissant l’existence d’une puissance supérieure que nous Francs Maçons au REAA nous désignons par le GADLU. C’est une croyance basée sur la raison, mais niant, par principe, toute révélation, et, partant tout dogme, mais observant la religion naturelle. En un mot, le déisme croit en une entité supérieure.

C’est dans ce déisme que je me reconnais.

Le « Je crois » n’est pas éliminable par une démonstration ostensive, mais il doit être rendu raisonnablement acceptable par des arguments, tels que l’ordre ou le désordre du monde, les événements de l’histoire sainte…

Faire une expérience, c’est s’inscrire dans une ouverture La plénitude d’expérience ne consiste pas à déjà tout savoir, à déjà mieux savoir ; l’homme d’expérience s’avère au contraire étranger à tout dogmatisme. L’ouverture est ce qui ménage, pour un être libre, la capacité de poser des fins définissant ce qui doit être ; ces fins n’étant pas de l’ordre de l’absolu, car alors ce serait la négation du perfectible.

Dans le rituel au 2ème degré, il est demandé au récipiendaire : Etes-vous F\ M\ ? Et lui de répondre : J’ai vu l’Etoile Flamboyante.

Et au centre de cette Etoile, la lettre G, pour laquelle plusieurs définitions sont proposées ; je m’attacherai à la définir par GNOSE.en tant que Connaissance par excellence et Sagesse. Dans cette définition, la Gnose est un perfectionnement de l’homme en tant qu’homme.

La gnose classique est une école de penser qui s’est développée au début de notre ère au sein du paganisme finissant, ainsi que dans certains milieux juifs et chrétiens.

La « gnose de Princeton » développée par Ruyer, rappelle que « le monde est dominé par l’Esprit qui trouve une résistance, une opposition : la Matière. L’homme par une science supérieure, peut accéder à l’Esprit cosmique, et, s’il est sage et intelligent, y trouver le salut ».

L’exemple quotidien et vécu, c’est évidemment l’homme qui se voit lui-même intérieurement ; il a conscience d’être, et voit son corps en tant qu’objet extérieur, comme il voit toutes les réalités de l’univers. L’exemple vécu de la conscience n’est pas une mystérieuse exception, il est la clé.

L’évidence première est que l’Univers décrit par la science, tend à fabriquer du « pensant », du conscient... C’est par la science que l’homme accède à la pensée cosmique : c’est cela la gnose. La science déchiffre la pensée primordiale dont l’Univers est le langage.

La réalisation de la gnose passe par la volonté de tout être humain cherchant à apprendre toujours davantage afin de parvenir à son accomplissement Elle permet de recevoir intuitivement l’intérieur des choses. Ainsi, la gnose peut être considérée comme une tentative de réponse à la triple question existentielle : D’où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? Mais y a-t-il un préexistant indicible avant l’existence même ?

D’une gnose à une autre, le thème immémorial de la seconde naissance s’enrichit de valeurs nouvelles ; il reste pourtant un élément : « l’accès à la vie spirituelle comporte toujours la mort à la condition profane suivie d’une nouvelle naissance ». Connaître les situations assumées par l’homme, pénétrer son univers spirituel, c’est faire avancer la connaissance de l’homme.

La nature et le contenu de la spiritualité sont inséparables de la transcendance ; autrement dit, c’est bien dans la foi en une transcendance universelle que se développe toute spiritualité. L’ignorance étant le pire des maux, l’ésotérisme a au moins le mérite d’affirmer le primat d’une connaissance qui est selon le mot de Claudel co-naissance et, de ce fait, chemin de spiritualité.

La spiritualité révèle une autre réalité que celle vécue au quotidien dans le monde profane. Cette spiritualité s’accomplit dès la porte du Temple franchie ; par ce passage (SHIBOLET). Il y a transcendance du monde profane. Elle se valorise en s’impliquant dans l’héritage de la
tradition en transmettant aux générations futures.

De profane, j’ai atteint la maîtrise. Car il faut passer par bien des états intérieurs et vivre bien des métamorphoses spirituelles pour atteindre ce but, chemin de quête, de ressourcement et d’espérance.

L’ésotérisme ne surgit pas d’une accumulation de savoirs mais d’une réactualisation permanente. Il se définit non comme l’interne d’une doctrine, mais.comme l’intérieur de l’esprit. Et s’intéresse avant tout à la réalisation spirituelle. A l’inverse, l’exotérisme, comme l’indique son préfixe, s’intéresse au monde extérieur. L’exotérique confond son vide intellectuel avec la vacuité spirituelle.

L’ésotérisme imprégné de cette spiritualité conduit dans la réalisation d’un projet à construire en harmonie avec l’égrégore dans lequel il est immergé, « car la spiritualité active » ne peut se contenter de l’isolement. L’ésotérisme se projette comme un dévoilement, une révélation du contenu des secrets qui oeuvrent dans l’intimité de l’être.

Se recueillir,se convertir à soi, se savoir dans la conscience de soi, est déjà une aspiration vitale et morale vers le haut.

L’ésotérisme opératif part de l’idée que le monde est à parfaire, que l’homme est à perfectionner : il y a à la fois réalisme et idéalisme. D’où deux tendances : action centripète, qui agit sur l’extérieur et action centrifuge qui stimule l’intérieur.

« Continuer à l’extérieur l’œuvre commencée dans le Temple ».

C’est au plan des émotions et des comportements que la spiritualité exprime une réalité considérée comme la demande d’autre chose nécessaire. Cette spiritualité n’est pas à confondre avec la religion, les pratiques religieuses et les Eglises de toute confession ; elle se distingue et n’impose aucun dogme. Elle donne à l’homme sa liberté intérieure en libérant la parole.

L’homme est inscrit dans une alternance entre une existence sans vitalité fondamentale et une vie complètement énergétisée par le mouvement dynamique d’un projet porté par le langage en constant mouvement.

Le fait qu’un même texte puisse offrir d’innombrables interprétations implique qu‘il n’y a pas d’interprétation juste. Ce qui conduit à sortir de la logique binaire du vrai et du faux pour entrer dans la logique du sens. Dans l’interprétation la question tient une place privilégiée, et prend alors le sens de « remise en question ». L’herméneutique n’est pas l’art de répéter, mais l’art d’interpréter ; et de ce fait elle implique la suspension de nos propres préjugés.

Le Delta Lumineux, l’Etoile Flamboyante, sont les symboles de la Grande Lumière qui vient d’en-haut ; le Maçon, aussi éloigné de la croyance sans preuve que de la négation à priori, pourrait expliquer alors positivement, en vertu même de sa tradition ésotérique, si elle n’est pas parti pris. Elle ne peut plus nier l’existence de ces influences intangibles, quoique senties par certains.

L’œil unique au milieu du Delta Lumineux est aussi un symbole de l’ésotérisme parce qu’il est feu et lumière, la connaissance même, la totalité.

Par l’Etoile Flamboyante, le rituel de Compagnon va noter le passage de l’Energie mystérieuse et constructive du cosmos dans la personne humaine, par son rayonnement vital et spirituel ; car c’est toujours de l’Universel que vient le génie humain qui prend ses racines dans les forces de la nature et dans le substratum caché.

Ainsi-les rituels du compagnonnage nous montrent-ils le Compagnon gravissant une échelle dont le sens est intellectuel, moral et spirituel ; on lui présente le panorama des sciences, des lettres et des arts, la référence aux Grands Sages, du Travail non pour qu’il les entasse dans sa mémoire, mais pour lui montrer ce qu’est l’homme dans l’Universel et lui indiquer son rôle dans la Vie Universelle.

A l’initiation, l’Apprenti découvre le sens des quatre éléments ; puis il parcourt 5 voyages pour être admis Compagnon, et en découvrant les cinq Cartouches, il prend conscience de toute l’étendue des connaissances qui lui sont offertes. Cette quête du sens va l’amener à concevoir au-delà du sens, vers l’essence même de la complétude de son chemin : c’est la quintessence, qu’on peut considérer comme cinquième élément.

Les voyages avec les outils, voilà ce qu’a fait l’Apprenti pour devenir Compagnon la main, puis l’outil, et enfin le voyage les mains libres, les mains vides, car le Compagnon une fois façonné’et moralisé, une fois éclairé par la culture à la lumière de l’Etoile Flamboyante, peut accomplir son travail de vrai maçon en incorporant le génie de l’humanité ; c’est aussi ce génie qui le conduit à chercher sa vraie place dans le cosmos.

Dans cette région supérieure et sereine où les religions placent la Divinité, la lettre G expression de l’ésotérisme, va inscrire le symbole du Grand Architecte de l’Univers, l’Un agissant et constructif que tout Franc Maçon rencontrera à la base du problème de la connaissance intégrale de la Gnose. Définir autrement le mystère placé au-dessus de la raison comme de notre expérience, et d’envisager seulement sa puissance active.

Le symbole du GADLU, n’étant lié à aucune croyance exprime donc la foi du Franc Maçon. Il se place dans le cadre de l’initiation, exaltant les valeurs spirituelles les plus hautes, invitant au sacré et accompagnant les voyages. Initiation qui est libération à l’égard des dogmes.

Ainsi, le Franc Maçon affirme t-il le Grand Architecte de l’Univers comme il a été dit plus haut. Celui-ci serait seulement le Logos qui organise le monde selon l’Ordre, et non le Créateur du monde. L’affirmation et la glorification du G A D L U qui ouvre et clôt nos travaux est sans doute l’acceptation d’un Etre transcendant origine de la Lumière (Fiat Lux).

La gloire pourrait alors se définir comme le droit d’aimer sans mesure. A ces hommes qui doutent d’une présence, Levinas répond : « De quel magicien étrange avez-vous donc peuplé votre ciel, vous qui, aujourd’hui le déclarait désert ? »

Cette croyance en le GADLU, à la gloire duquel nous travaillons, loin d’être un désert, nous donne le sentiment de participer à des cérémonies sacrées, nous situant au-delà de l’humain, et ainsi à chercher et à trouver la plénitude du sens de la vie. Une liberté de conscience mais aussi un libre arbitre.

Dans le chapitre 14 du Tractatus, Spinoza démontre que la liberté de conscience n’est nullement incompatible avec la foi :« La foi condamne seulement comme hérétiques ceux qui enseignent des opinions propres à répandre parmi les hommes la haine, la colère…elle tient pour fidèles ceux qui répandent la justice et l’amour du prochain ».

Non point la négation de la religion, mais la sauvegarde de la liberté de conscience et de la tolérance, un lieu où la religion échappe à toute manipulation idéologique ou politique pour qu’elle puisse reposer non sur la contrainte mais sur la liberté et la dignité d’autrui.

Cet appel aux forces qui sommeillent en nous, n’est-ce pas la formule VITRIOL ? Selon le conseil de Socrate commentant le Gnôti séauton de Delphes en ces termes : « Cherche au fond de toi la divinité et identifie-toi à elle, car elle constitue ton être essentiel ».

Savoir si cette puissance interne peut, par son rayonnement agir sur le monde extérieur, sur nos semblables, comme une vérité de l’Universel véritable génération de sa gestation, ou l’interprétation de l’Etoile Flamboyante elle-même. C’est aussi ce qu’exprime sur l’autel des serments le croisement de l’équerre avec le compas.

J et B, voilà l’éternel couple ; nul ne peut initier autrui, il ne peut que lui montrer le chemin, car chacun seul peut faire son voyage ; c’est dans ce sens que la gnose est incommunicable. Car celui qui ne la fait pas éclore dans son propre esprit ne pourra jamais la recevoir du dehors. C’est toujours de l’Orient que vient la Lumière ; la carrière est ouverte pour le Compagnon en marche vers la maîtrise à travers la gnose.

Maïmonide, médecin théologien juif du 12ème siècle, écrit dans « Le Guide des Egarés » :

« Ce que je crois posséder moi-même n’est qu’une simple conjoncture et une opinion personnelle. Je n’ai pas eu la dessus de révélation divine qui m’ait fait savoir que ce soit là réellement ce qu’on a voulu dire ».

Les querelles théologiques ont engendré de part et d’autre le désir et la volonté d’en finir avec ce tintamarre théologique, avec les exclusions, les excommunications… Certes, la foi subsiste encore mais elle se manifeste au niveau d’une expérience spirituelle intérieure indépendamment des dogmes établis, comme surgissent des conceptions ésotériques, des sortes de gnoses renouvelées qui s’éloignent de la tradition des Eglises.

Pascal a tout dit avec son pari : il faut trancher une fois pour toute. Le pari pascalien demeure une réponse actuelle aux questions qui, depuis la nuit des temps, tourmentent l’être humain. Alors que s’agrandit le champ de nos connaissances, le domaine de la foi laisse l’homme libre d’inventer sa propre vérité.

Pascal donne à la laïcité sa définition la plus rigoureuse : non pas seulement rendre à Dieu ce qui lui revient, mais dégager la vie de l’esprit de la tutelle religieuse sans pour autant la faire tomber sous la coupe du politique ; il est laïque en ceci qu’il reconnait l’indépendance de l’ordre spirituel.

Sans doute le mystique est-il celui qui non pas entre dans la religion, mais sort de la religion. Le mystique a trouvé la voie : il s’y rend et chaque étape de sa vie, chaque rencontre avec les humains et le monde qui l’entoure, compose une solidarité mystérieuse dont la succession forme un dévoilement.

Ce qui est primordial, ce qui est essentiel c’est le fait même de chercher la vérité avec sincérité, et pour être sauvé, il suffit d’être « libre et de bonnes mœurs ». Ainsi, l’homme éclairé par sa raison peut saisir la vérité par lui-même et selon sa conscience et peut aussi opérer lui-même son salut. L’empirisme de la connaissance entraîne le libéralisme politique et religieux.

Dans Critique de la raison pratique, Kant énonce :

« Deux choses remplissent le cœur d’une admiration et d’une vénération toujours nouvelles et toujours croissantes, à mesure que la réflexion s’y attache : le ciel étoilé au-dessus de ma tête et la loi morale en moi ». Ce dépouillement devient une richesse ; celle de s’atteindre à soi-même, non pas sous le ciel étoilé des anges, mais sous la voûte étoilée du Temple.

Aucun homme investi d’un quelconque pouvoir ne peut me forcer d’adhérer à des vérités qui ne me semblent pas évidentes. Car le moi a la notion d’un Etre qui le dépasse ; le cogito appelle l’idée de transcendance ; la conscience humaine n’est pas fermée sur elle-même mais ouverte sur tout ce qui la dépasse, ouverte sur l’universel, située dans le temps et dans un corps.

Les Constitutions des Francs Maçons nous disent que le Franc Maçon ne saurait être un libertin irréligieux. A quelle religion ? Celle de tous les hommes et non pas seulement ceux qui acceptent une révélation particulière, mais une religion entendue dans le sens le plus large, le plus universel, celle qui veut rassembler tous les hommes de bonne volonté.

Il est dit dans l’article 1 des Constitutions que la religion du Franc Maçon est liée une fois encore à une révélation historique, une religion universelle qui voudrait englober toutes les religions particulières. Elle serait une religion adogmatique, si on entend par dogme la proclamation authentique par le magistère de ce qui est contenu dans l’écriture. Les Constitutions de 1723 laissent à « chacun son opinion particulière qui consiste à être des hommes bons et loyaux ou hommes d’honneur et de probité quelles que soient les dénominations ou croyances qui puissent les distinguer ».

Il y a une idée qui serait au-dessus, sinon en dehors de ces affirmations dogmatiques des théologiens et qui serait l’idée de la Loi morale. Cette loi morale apparaît comme au-dessus des controverses théologiques et métaphysiques qui opposent les hommes entre eux. Elle réalise l’universalité et l’accord des consciences. Elle s’impose à tout homme qui pense qui réfléchit et qui veut agir pour le bien commun. Tel est le sens du titre même des Constitutions, les Obligations d’un franc maçon : l’idée de Devoir et d’Obligation est essentielle.

La loi morale qui est loi d’amour, est loi d’intériorité ; elle a sa source en nous mais elle est aussi le signe qu’il y a en nous une instance qui nous dépasse, qui est au-dessus de nous. La loi morale exprime à la fois notre liberté et le principe transcendant à nous-mêmes et au monde. Et c’est parce qu’il reconnaît cette loi que le Franc Maçon ne peut être dit athée stupide, libertin et irréligieux.

On peut appeler athéisme cette séparation de l’homme qui se maintient tout seul dans l’existence sans participation à une méditation spirituelle. C’est la naïveté qui mène à l’athéisme.

Une maçonnerie morale et humanitaire, celle de l’opératif devenu spéculatif par la raison symbolique de ses instruments et outils de travail. Plus à l’intérieur, une maçonnerie hermétique ne limitant pas ses efforts à la morale, mais tendant à la spiritualité à travers les enseignements de l’alchimie complétant ceux de la connaissance.

Paroles de Jérémie (22,3-5) :

Pratiquez la justice et l’équité, arrachez celui qu’on dépouille des mains de l’oppresseur, ne faites subir ni avanie ni violence à l’étranger, à l’orphelin et à la veuve, et ne versez pas de sang innocent.

La pensée maçonnique et la foi maçonnique consistent à affirmer un ensemble de valeurs spirituelles, à affirmer la valeur de l’Esprit contre tout ce qui le nie.

Paracelse donne une autre orientation à la connaissance, en évitant à la fois l’écueil du dogme religieux incarné par la scolastique. Une connaissance qui englobe et fait se correspondre des vérités en apparence sans liens ente elles comme par exemple la grammaire, l’astronomie, l’alchimie, les arts libéraux. Une connaissance qui demande à la fois une observation objective des faits pour purifier le savoir de toutes les superstitions et son intégration dans une totalité.

Mais cela demande une mutation du regard ; c’est l’expression de la voie spirituelle.

La connaissance, même approximative de son archétype, est une source d’équilibre. Il est l’Orient de notre être et indiquera toujours, pour celui qui sait lire sa parole, la direction la plus favorable vers le chemin spirituel ; celui-ci consiste à accueillir cette clarté de l’homme intérieur, à être progressivement revêtu de ce manteau de lumière. Et petit à petit, cette étincelle de lumière enfouie se développe, s’élargit.

Pour ces « chercheurs de Lumière » que nous sommes, il n’est qu’une certitude, celle du risque de l’absolu.

Seules des qualités humaines d’altruisme, d’amour du prochain et du respect de la vie, ainsi qu’une meilleure qualité d’être plutôt que d’avoir, pourraient apaiser les conflits et changer les mauvais comportements qui menacent la vie sur notre planète. Mais comment arriver aujourd’hui à intégrer ces vertus, chez un plus grand nombre, alors que des siècles de théories, de recherches et d’études n’ont pas réussi à trouver le chemin des cœurs ?

C’est peut-être aussi ce constat d’échec qui explique pourquoi de plus en plus de « jeunes » sont attirés par de nouvelles approches spirituelles, libérées de dogmes et de luttes intestines qui ont conduit au fanatisme et à l’intégrisme. Cette approche pourrait retrouver les repères qu’elle recherche, en s’intéressant à nos grandes traditions spirituelles authentiques qui ont été négligées au cours des derniers siècles.

Parmi ces grandes traditions spirituelles, le Judaïsme entre autres, possède une somme d’enseignements, d’intuitions et d’expériences vécues et contenues dans la Kabbale. C’est de cette restauration (le Tikun), que dépendra l’unité cosmique qui a été perturbée dès l’origine, par la création même de l’univers.

Pour que nous comprenions ce phénomène, ainsi que la place et la responsabilité de l’homme dans cet univers, il nous faut comprendre le processus de la création ; il nous faut intégrer le fait que l’aspect physique extérieur de l’homme ne constitue qu’une partie de son être.

Les psychothérapeutes le savent bien puisque l’objet principal de leur pratique se situe au niveau du « corps éthérique » de la personne. Celui-ci est invisible, mais il constitue l’aspect énergétique de l’homme. C’est ce « corps énergétique » appelé aussi « le souffle de vie » qui représente le lien entre le corps physique et le corps spirituel.

Ce corps spirituel, je l’ai vécu dramatiquement. D’abord avec mon père il y a une quarantaine d’années, alors que son cancer l’avait définitivement relégué des hôpitaux... J’ai abandonné ma famille à Paris et j’ai roulé en pleine nuit en espérant arriver à temps. Sur les conseils du médecin traitant, il était indispensable de le piquer à la morphine toutes les six heures. Et je l’ai ainsi fait pendant quinze jours, à chercher le moindre espace pour introduire la seringue. Je l’ai embrassé une dernière fois et dans le train qui me ramenait à Paris, accoudé à la fenêtre, j’ai eu une brusque intuition de sa disparition. Il était 17 heure.En arrivant à la maison, au regard de mon épouse j’ai compris que c’était arrivé ; elle m’a confirmé que mon père s’était bien éteint à 17 Heure.

Puis avec mon épouse. Pour le nouvel an juif en septembre 2011, j’avais réuni à la maison mes enfants et petits enfants pour célébrer ce rituel en la mémoire de mon épouse qui avait l’habitude de le pratiquer. Après leur départ, j’ai eu comme une illumination. Mon épouse, vêtue de blanc planait au-dessus de nos têtes dans une luminescence et elle nous souriait comme pour nous remercier, et s’excuser de son absence qui, au cours du dîner avait assombri nos esprits.

« Et pourtant ces êtres du passé vivent en nous, au fond de nos penchants, dans le battement de notre sang ; ils pèsent sur notre destin, ils sont ce geste qui ainsi remonte de la profondeur du temps ». (RILKE)

Et pourtant ces manifestations, définies comme des éons par ceux qui sont tournés vers le divin, ne correspondent pas à ma position d’agnostique. C’est sans doute qu’il existe en moi une relation vers l’Autre, ce GADLU.

Dans une société comme la nôtre, où tous les signes de la finitude humaine sont devenus insupportables, où la transgression des limites est, non seulement permise mais valorisée, on voudrait rêver tranquillement d’un autre monde et d’une harmonie universelle. On ne peut dire que la soif du sacré n’existe plus. Simplement elle cherche à s’étancher à une autre source qui se situe aux antipodes des sources bibliques et de ce Dieu qui dérange parce qu’il ne correspond pas à l’image qu’on voudrait s’en faire.
 
Quand je cite des auteurs,- même si j’en abuse parfois,- ce n’est jamais dans le but d’en faire ressortir une certaine autorité, mais toujours dans le but de donner à penser. La citation ne vient jamais se substituer à la réflexion et ne sert jamais de preuve inaliénable.

Il fait beau à Paris aujourd’hui…

Et ça balance aussi à Paris entre ma religiosité que vous avez sans doute soupçonnée dans mes Planches, et mon agnosticisme que j’ai essayé de vous livrer ce soir.

J’ai dit.

S\ A\


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