La vertu des Chevaliers
Lorsque
notre V\ M\m’a demandé de préparer un travail sur la (ou les)
Vertu(s) des Chevaliers, j’ai tout d’abord pensé qu’il me croyait dans
un atelier du R.E.R.
Impossible ! Donc j’ai réfléchi, cela m’arrive
quelquefois, qu’il était donc persuadé que j’étais au 18ème degré où la
Chevalerie vient nous rejoindre au Rite Écossais Ancien et Accepté, du
moins, je crois !
Pas du tout, seconde erreur de ma part ! Alors, je me suis mis à lire,
à questionner... Et écrire.
Tout ceci, mes Frères, pour vous demander une grande indulgence sur ce
travail. Je pense que pour parler de Chevalerie, il faut se situer au
début du Moyen-Age, époque où la société commence à se transformer et
s’organiser.
Les bas-instincts naturels de l’homme, à savoir la violence, la
brutalité, la férocité, la convoitise, se transforment au fil du temps
en générosité, douceur, tolérance. En fait, l’homme est en train de
s’élever moralement et commence à mettre en place des Vertus.
En réalité, la Chevalerie est née avant les croisades de la volonté de
l’Église afin - comme il était convenu de dire - de défendre les
innocents contre les méchants. Ceci pour gérer une paix nécessaire dans
le but d’appliquer des Vertus.
Les motivations de cette Chevalerie : défense des faibles, protection
des pauvres, restent d’une énorme actualité... Même si ce combat pour
le règne du Christ et de son Église a changé de nature, mais non de
sens. Nous y reviendrons !
Appartenir à la Chevalerie à l’époque, c’était pratiquer la prière et
la méditation quotidienne,
approfondir
ses connaissances théologiques, morales pour prêcher l’Évangile,
rappeler la primauté de la personne humaine et du bien commun. Mais
aussi, veiller à ce que chaque être humain puisse se respecter et être
respecté et, enfin, reconnaître que la créature humaine est
collaboratrice dans l’oeuvre de Dieu.
Devant toutes ces exigences,
l’Ordre des Chevaliers demandait à chaque futur chevalier, avant d’être
adoubé (donc initié), de participer à une retraite pour confirmer ou
infirmer sa vocation. Une fois admis Chevalier, celui-ci doit soutenir
les différentes actions de l’Ordre au travers d’une Lieutenance de
France (sorte d’obédience), mais aussi se rendre au minimum une fois
tous les dix ans en Terre Sainte. Ceci dit pour la petite histoire de
la grande aventure chevaleresque.
Vertus cardinales et théologales
Mais, mes Très Chers Frères, pour devenir Chevalier,
il fallait passer par un certain rituel basé sur des codes et des
vertus.
Ainsi, l’on retrouvait les vertus cardinales traditionnelles que sont
la Tempérance, la Force, la Justice et la Prudence.
Pourquoi vertus cardinales ? Justement parce qu’elles sont le pivot et
le fondement des vertus morales.
La prudence était la vertu qui dirigeait toute action vers son but
légitime et cherchait par la suite, les moyens convenables pour que
l’action soit bien faite et, par là, agréable au Seigneur, donc à Dieu
lui-même.
La
justice était la vertu par laquelle le chevalier rendait
àchacun
ce qui lui était dû. La force, celle qui rendait courageux le Chevalier
au point de ne craindre aucun danger, pas même la mort, pour le service
de Dieu. Et la Tempérance était cette vertu par laquelle il fallait
réfréner les désirs désordonnés des jouissances sensibles et user avec
cette modération des biens temporels.
«Le
triomphe de la vertu», de Rubens : le peintre propose ici
une vision chevaleresque et allégorique des choses
Beau programme, mes Frères, que ces Vertus cardinales. L’on semblerait
même y trouver quelques similitudesavecla
philosophie
maçonnique de nos jours...
Mais il existait également les vertus théologales que sont la Foi,
l’Espérance et la Charité et qui, en elles mêmes, sont en référence à
Dieu...
Comme l’on peut le constater : la Chevalerie, à l’époque, était une
fonction sociale permanente, c’était une constante de l’histoire et ce
serait, à mon humble avis, une erreur que de ne rien voir de plus
qu’une institution archaïques du passé...
L’esprit et la vertu chevaleresques sont beaucoup plus importants,
peut-être, de nos jours qu’elles ne le furent au Moyen-Age. Et je
ferai, personnellement, un rapprochement avec le rôle d’hospitalier. Un
rôle que chacun d’entre nous doit être en puissance dans la Loge et à
l’extérieur.
Cette Chevalerie qui parlait également d’initiation par le nom
spécifique d’adoubement. Ces vertus donc de la Chevalerie étaient la
conscience de la Fraternité entre toutes les créatures des différentes
règnes de la nature. Le but en était de jeter ce pont dont elle
construisait les arches.
C’était un lien vivant entre toute les dualités et polarités. En somme
un régulateur et un transformateur des énergies venues d’en bas et de
celles venues d’en haut.
Une Chevalerie qui était également la gardienne de la Tradition du
Temple, à savoir d’unir et non de diviser, à faire comprendre, estimer,
aimer, et non faire haïr et mépriser, mais aussi, et surtout, élever
l’homme en l’intéressant à ses semblables, et à sa vie intérieure...
Cette vieille chevalerie qui a basé ses fondements sur toutes les
vertus qu’elles soient cardinales ou théologales et que l’on peut
englober sur la même palette bienfaisante que l’on appellera LA VERTU
DU CHEVALIER.
Cette vertu dont se parèrent tous ces chevaliers partis pour les
croisades à la suite de la prise de Jérusalem en I099 par les
chrétiens-francs, mais aussi pour protéger ceux qui se rendaient en
Terre-Sainte.
Parmi ces groupes, il faut mentionner notamment les Hospitaliers de
Saint-Jean-de-Jérusalem, devenus les Chevaliers de Malte, les
F\ de la Milice du Temple devenus les Chevaliers du Temple,
mais
aussi les Chevaliers Teutoniques...
Toutes ses « coteries »
chevaleresques - et en particulier les Chevaliers du Temple – plus
tard, protégeront les francs-mestiers à bâtir encore et toujours les
cathédrales à la gloire de Dieu.... Ces Chevaliers du Temple qui
s’avouaient tout de même une vertu principale de Vaillance. Vaillance,
d’abord, à bien faire la guerre pour la gloire de Dieu. Vaillance
àexécuter le travail demandé par le Seigneur, donc
représentant
de Dieu à l’époque. Vaillance également, plus tard, pour protéger ces «
francs-mestiers » que l’on désignera par la
suite Compagnons du Tour de France ou, en Angleterre, « maçons
opératifs »
Mais, mes F\, à force d’avoir lu, écouté les uns et les autres, je me
surprend à penser qu’une Chevalerie des temps modernes devrait avoir sa
place.
Une chevalerie qui lutterait contre les vices de ce monde.
Lutter contre l’indifférence aux autres, contre l’égoïsme, la
résurgence de superstitions vétustes ouvrant trop grandes les portes
des sectes, provoquant ainsi la confusion et la déformation des
esprits... Bien sûr que nous pourrions, et nous sommes certainement,
ces Chevaliers de Vertu du temps des Croisades et du temps moyenâgeux.
L’idée qu’une étroite et intime relation doit exister entre la
F\M\ et l’Ordre Vertueux des Chevaliers chemine depuis
longtemps
dans le monde profane comme dans le monde maçonnique.
Creuser des cachots pour le vice, et bâtir des édifices à la Vertu...
Voilà une bien belle similitude entre notre démarche d’apprenti et
celle des Chevaliers du Temple...
Ces vertus des Chevaliers qui permirent aussi, aux libres-maçons, de
bâtir force cathédrales et édifices à la gloire de Dieu.
Ces architectes de la maçonnerie opérative qui, rejoints plus tard par
les maçons spéculatifs, donneront à la F\M\ régulière les
premières bases des vertus qui nous animent aujourd’hui. Nous vivons
dans cette philosophie de mieux se connaître, de s’éclairer de lumière
afin de découvrir les autres d’un regard fraternel. Nous sommes des
maçons libres et de bonnes mœurs, amis du riche et du pauvre si ceux-ci
sont...vertueux.
Et, si je disais précédemment, que le combat pour le règne du Christ et
de son Église du temps des Chevaliers avait changé de sens, ce combat
est toujours présent en nous avec une nouvelle chevalerie moderne
paraphée de ses vertus contre les vices modernes. Récemment, mes F\, à
la dernière tenue du Saint-Mors, nous discutions sur le fait d’aller « achever
au dehors l’œuvre commencée dans le temple ». N’est ce pas
une bien belle image calquée sur la Vertu ancestrale des Chevaliers ?
Cette vertu qui est un moyen de se construire soi-même dans la liberté,
face aux vicissitudes d’un monde en total chambardement...Cette Vertu
qui nous conduit à la paix et à la joie intérieure... Pourquoi, tel un
Chevalier, ne pas en faire profiter nos semblables.
Propager la vertu, mission du Chevalier
Voilà un beau tournoi à préparer dans l’enceinte de la Fraternité, afin
de se préparer pour cette nouvelle croisade des temps
modernes...Une croisade dont la bannière serait ornée du logo de
l’amour !
Comment donc continuer notre chemin maçonnique sans ignorer les vertus
chevaleresques, ou du moins d’en analyser leur bien-fondé ?
D/ J/
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