Obédience : NC Loge : NC 10/2000


La Franc-Maçonnerie n'est pas une doctrine,
mais une méthode


Pour bien différencier ces deux termes, il serait peut-être utile de se reporter aux définitions dans le dictionnaire.

Doctrine : ensemble des principes, des opinions, des croyances, des idées d’une école littéraire, religieuse ou philosophique.

Méthode :  manière de dire, de faire, d’enseigner une chose suivant certains principes et avec un certain ordre. En philosophie, ensemble des règles et procédés, permettant de parvenir à la vérité. Façon logique de conclure un travail, une réflexion.

Symboliquement, la Franc-Maçonnerie remonte à la création du monde (elle a même adopté un calendrier qui commence à cette « date », 4000 ans avant J.-C.) et elle célèbre la construction du Temple à Jérusalem (Xe siècle av J.-C.) comme son premier grand œuvre : la mort d’Hiram, l’architecte de Salomon, est à l’origine d’un de ses principaux mythes. Des théories nombreuses et fantaisistes veulent lui trouver les filiations avec les sociétés initiatiques de l’Antiquité ou du Moyen-Âge au sein desquelles, par les voies de l’ésotérisme ou de l’observation méthodique, des esprits évolués ou mystiques cherchaient, dans un langage symbolique, à comprendre le monde et à expliquer la place de l’homme dans l’univers.
           
Ainsi, on peut aborder l’étude de la Franc-Maçonnerie en considérant son histoire, en partant des Loges de Francs-Maçons opératifs du Moyen Age, en passant par les mutations et les transformations qui vont donner naissance aux célèbres Constitutions d’Anderson qui, elles-mêmes, règleront l’existence, le mode d’être de la Franc-Maçonnerie moderne appelée souvent Franc-Maçonnerie spéculative.
Mais on peut aussi étudier la Franc-Maçonnerie à partir des Principes qu’elle a voulu se donner et qui la définissent et la caractérisent. Et pour ce qui concerne la Grande Loge de France, en considérant cette Institution, ou plus exactement cet ordre, à partir de ses Déclarations de Principes.   
           
« La Grande Loge de France travaille à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers. » En effet, les Francs-Maçons de la Grande Loge de France, dans leurs tenues rituelles, ouvrent et ferment leurs travaux à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers. Et la déclaration du Convent de Lausanne, en 1875, nous rappelle que :
« La Franc- Maçonnerie proclame, comme elle a proclamé dès son origine, l’existence d’un principe créateur sous le nom de Grand Architecte de l’Univers. »
Aussi, ce vocable de Grand Architecte de l’Univers, l’esprit humain ne peut jamais le saisir dans sa totalité et dans son unité, ne peut jamais le comprendre adéquatement. Il peut seulement l’appréhender, et cela, par la voie du symbole et de l’analogie. C’est-à-dire que dans la mesure où l’univers peut être comparé à un ensemble qui a un ordre, un sens, une finalité, on peut dire qu’il y a, à l’origine de cet ordre, un Principe recteur et ordonnateur qui est à l’univers ce que l’architecte est à l’édifice.

Le Grand Architecte est, à la limite, un postulat, une croyance minimale, car il représente le Principe qui donne à la nature forme et organisation, la fait passer du chaos initial à l’ordre, c’est-à-dire au cosmos, à un univers ordonné, et qui fait passé le monde des Ténèbres à la Lumière.

La Franc-Maçonnerie est une institution philanthropique et société de pensée, elle est une association dont les membres se recrutent par cooptation, selon des rites initiatiques. Elle se fixe pour but de réunir en son sein les « hommes libres et de bonnes mœurs » qui veulent travailler à l’amélioration matérielle et morale ainsi qu’au perfectionnement intellectuel et social de l’humanité. Elle se veut universelle : les vicissitudes de son histoire l’ont pourtant divisée en de multiples obédiences. Elle se veut également sociale et universaliste, mais tolérante elle cherche à comprendre, à assimiler ; elle se situe au-dessus du fait historique, qu’il soit religieux ou politique, mais elle cherche à pénétrer l’esprit et ne peut que combattre tout dogmatisme.
           
La discrétion dont elle entoure ses activités et qu’elle impose à ses membres n’en fait pas, pour autant, une société secrète : elle se manifeste souvent publiquement et ses « secrets » ont été depuis longtemps révélés au monde profane par d’innombrables ouvrages. Il est vrai que cette abondante littérature, souvent polémique et mal informée, ne facilite pas toujours la compréhension des réalités maçonniques, et laisse subsister, dans l’esprit du grand public, sur la nature de l’Ordre et sur l’idéal des Francs-Maçons, bien des incertitudes et bien des préjugés tenaces.

L’originalité de la Franc-Maçonnerie par rapport aux autres associations et institutions humaines tient à sa nature de société initiatique et à ses « méthodes » de travail. Elle n’est ni une secte ( car elle n’a pas de « doctrine » à imposer aux autres hommes ), ni un parti (car elle ne cherche pas conquérir le pouvoir), ni une Eglise, car, si elle se veut universelle, son prosélytisme est limité et n’exclut aucune  croyance.
           
L’initiation, dont les épreuves permettent au profane de devenir Apprenti, puis d’accéder aux grades de Compagnon et de Maître revêt à la fois une signification symbolique ( la renonciation aux habitudes du monde et la découverte de la « Lumière ») et une valeur éducative : la préparation au langage des symboles. Il ne s’agit pas de la révélation mystique de quelque absolu ésotérique, mais, plus simplement et sagement, de l’acquisition des moyens et des instruments de la recherche maçonnique. Plus qu’une simple cérémonie de réception, l’initiation engage le Maçon à se libérer de ses préjugés, à se dépouiller de ses passions et à prendre une meilleure mesure de ses forces spirituelles et morales.
           
L’enseignement maçonnique n’est pas celui d’une doctrine, mais celui d’une méthodologie de la connaissance par le truchement des symboles : universels et intemporels, ils peuvent aider tous les hommes à mieux comprendre le monde sans imposer de préalable idéologique.

La Tradition Maçonnique n’est ni un système, ni une doctrine. Elle est le fil d’Ariane permettant de se véhiculer jusqu’à nous ; elle nous transmet le message d’un très lointain passé, celui de notre origine ; nous avons oublié cette unité créatrice, ce temps primordial, mais sans doute nos cellules nous incitent à rechercher avec nostalgie ces lois du monde que nous voulons interpréter selon le langage de notre époque.
           
Aussi bien, pour l’essentiel, le symbolisme maçonnique est celui des outils : équerre, compas, règle, ciseau, niveau et levier ; des formes : triangle, étoile à cinq branches ; des nombres : 3, 5, 7, ou des lettres ; et non pas celui des œuvres, sinon celui de la pierre brute, qui doit être taillée et polie, et celui du Temple, dont la construction et l’embellissement mobilisent éternellement le travail des Francs-Maçons.
Ainsi l’équerre, le compas, le Volume de la Loi Sacrée sont toujours unis sur l’Autel des Serments, dans la Loge traditionnelle ; ils sont unis comme sont unis des moyens et une fin. Car il s’agit, pour le Franc-Maçon, avec ces outils symboliques, de tracer les plans d’un Temple et le bâtir selon la règle de la rectitude et de l’équilibre, la règle de l’Amour et de l’Amitié. Il s’agit de réunir ce qui est épars, de rassembler ceux qui sont divisés, de réconcilier ceux qui sont déchirés. Il s’agit de réconcilier enfin l’homme avec lui-même, dans l’équilibre et l’harmonie, par la recherche de la Vérité, par la pratique de la justice, grâce à la Connaissance et à l’Amour.

Le secret maçonnique, si souvent invoqué comme la volonté de cacher des actions malfaisantes, s’explique d’abord par la nécessité de conserver aux travaux la discrétion indispensable à leur poursuite sereine à l’abri de l’agitation du monde. Surtout, il ne fait que traduire l’impossibilité de décrire et d’expliquer à l’extérieur une réalité incompréhensible au profane.

Il faut faire tout de suite une mise au point : le secret de la connaissance, ce n’est pas la connaissance d’un secret, c’est la connaissance d’une technique, d’un langage et d’une méthode. Il y a longtemps que l’on répète l’évidence selon laquelle  un traité d’algèbre ou le schéma d’un circuit intégré sont de profonds et impénétrables mystères pour qui ne connaît pas ce dont il s’agit en spécialiste et qu’il est tout à fait impossible à un non initié de pénétrer le secret ainsi divulgué.

Toutefois, il n’est pas inutile de tenter de définir en quoi le travail maçonnique est lié symboliquement au secret, et pourquoi cette notion de secret joue un rôle considérable dans la démarche initiatique.

Il existe, a propos du secret, comme à propos de toutes les notions significatives divers niveaux d’accès. Il est naturel que le premier dont nous ayons à noter l’importance c’est celui qui est commandé par la Tradition. Les Francs-Maçons n’ont jamais renié leurs origines opératives. La Tradition des métiers, qui remonte aux plus hautes origines, nous impose de prendre en considération les données élémentaires du secret.

L’enseignement maçonnique n’est pas la dispensation d’un certain nombre de connaissances qui viendraient d’en haut et seraient livrées toutes faites. L’enseignement maçonnique, c’est un principe rigoureux, doit être cherché, poursuivi et conquis. Il faut vouloir et mériter le savoir par l’effort et face à l’épreuve.
L’instruction est un élément de l’insertion d’un être humain dans le tissu communautaire. C’est un devoir, de la part de celui qui sait, et qui donné la vie,  de donner à celui qui grandit, les moyens de la conserver.
Mais au-delà, il y a la question du savoir nécessaire à l’épanouissement de l’individu. Ce savoir, il faut montrer qu’on en est digne pour y prétendre. Symboliquement, le Franc-Maçon, le Constructeur, le Maître se trouve entre deux obligations : la première est de témoigner en faveur de la connaissance par sa vie, son œuvre et sa sagesse. La seconde de ne pas avilir les voies et de ne pas détourner ceux qui font l’effort d’y avancer vers plus de Lumière.
Le secret du Maçon ? C’est précisément son humilité dans la quête, le fait d’œuvrer sans honte ni faiblesse là où il a été placé par sa naissance et selon ses moyens. Face aux emportements de la foule, face aux engouements de la mode, face au déferlement du fanatisme aveugle et de la violence imbécile, il fait ce qu’il doit.
Le Maître Maçon, juge des rois, des pontifes et des chefs de guerre, est l’ouvrier, sans le bon sens, la patience, la prudence et l’humilité duquel rien ne se ferait.
    
Mais il est peut-être utile de souligner la façon dont les Francs-Maçons prennent les accusations dont on les accable.
Oswald Wirth disait : « nous n’avons rien à redouter à révéler la vérité, personne ne la croit. »
Et l’on pourrait ajouter une plaisanterie à cette affirmation désabusée : « quelle différence entre un secret que personne ne connaît et un secret qui n’existe pas ? »
Aussi la Franc-Maçonnerie n’apparaît pas comme une Société Secrète mais reprenons le mot de Ragon : « C’est une société qui a son secret. Et une fois encore quel est et quel peut être ce secret ? »

Liés entre eux par une solidarité de travail et une communauté de pensée, les Maçons ne s’exilent pas du monde ; et s’ils croient que l’action d’un groupe restreint peut être en certains cas plus efficace que celle des masses, leur œuvre ne répond nullement à des tendances égocentriques. En formant des hommes meilleurs, la Maçonnerie tend à mieux servir tous les autres.

CONCLUSION :
                       
En travaillant à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers, les Francs-Maçons écossais manifestent leur attachement à l’idée d’un univers, cosmique et humain, où le sens l’emporte sur le non-sens, l’ordre sur le chaos, la vie sur la mort, l’amitié sur la haine, la Lumière sur les Ténèbres.
Et ils s’efforcent, de toute leur volonté, de tout leur courage et j’ajouterai de tout leur cœur, de faire triompher ces idées, ces valeurs, cet idéal…

A\ M\    

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