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La Vérité

J'ai cherché la vérité comme on cherche un trésor.

Certes, elle n'était pas l'unique ambition de mes travaux. Qui peut dire ce qu'il y a tout au fond de nos désirs ? Car ils sont comme des visages que la course du soleil marque d'ombres changeantes ; et ils sont comme la terre qui cache sa semence.

Au travers de tant d'aspects où sont la fantaisie et l'orgueil, j'ai cherché la vérité comme les eaux obéissent à leur loi. Mais l'ange s'est dressé au seuil du paradis et de son glaive il a brisé, tout le langage de mon cœur.

Puissante est la vérité, inimaginable est-elle, et au-dessus de toute stature. J'essayerai de dire d'elle, la glorieuse, l'ineffable, ce qui la contraindra le moins.

Sache, ô terre dont les formes sont sans fin, sache que nul ne peut transmettre la vérité. Mais sache aussi que la capture de la vérité n'est pas inaccessible à notre chant. Je dis chant, parce que la conquête de la vérité est une œuvre d'amour comme le chant.

La conquête de la vérité est une peine, pour nous qui vivons dans la peine inlassable, pour nous qui sommes la sueur de tout ce qui S'accomplit dans le sein sanctifié où son âme et notre âme se perçoivent et se confondent dans un baiser qui durera jusqu'au matin.

J'ai cherché la vérité comme on cherche une loi, comme on cherche la clef d'une pensée, la justesse d'une action. Et j'ai trouvé la vérité dans la joie de ma recherche. Où est la vérité. Elle tombe des lèvres qu'a brûlées le tison de l'ange, et seuls la reconnaissent ceux qui l'attendent avec un cœur d'amour.

La vérité n'est ni supérieure, ni inférieure, ni ancienne, ni future. La vérité est dans la chaleur même de la vie, dans la peine et dans ce qui dépasse la peine. Les lois sont en elle, mais elles ne la contiennent pas. Il est plus commode d'adorer les lois. Mais telle n'est pas la vérité. La vérité se voile, et elle ne se révèle qu'à la mesure de nos forces. Nul ne peut donner la vérité, pas même les saints, pas même les sages de Dieu.

La vérité se donne elle-même à ceux dont le cœur souffre à cause de sa présence. La parole des sages et des saints, la parole des Ecritures disent la vérité conformément à l'intelligence. Elles ne la donnent point.

Il faut que chaque enfant s'en retourne, sur le chemin où elle passe. Mais elle n'est pas au bout du chemin. Elle est à chaque pas, dans l'histoire des hommes.

La vérité est une rencontre avec Dieu. Mais qui ne dira jamais la nature de cette rencontre ? Telle est pourtant l'épée qui tranchera le fil de notre servitude. Dans les chants de célébration il y a Dieu. Mais Dieu est-il dans le cœur des hommes qui les chantent ? Car Dieu n'est pas, simplement par le cantique de Son nom. Dieu est quand nous ne sommes plus.

Et pourtant les deux présences sont là, toutes pénétrées l'une de l'autre. La rencontre avec Dieu est une mort dans l'homme et un accueil de Ce qui n'est plus lui. Et pourtant l'homme est là avec sa dépendance des choses. La rencontre avec Dieu est une mort dans l'homme et une résurrection.

Ce qui naît dans le cœur de l'homme qui s'est détruit en Dieu est l'ineffable vérité. Comment pourrait-on jamais dire la vérité Car pour la redire aux hommes, il faut se défaire d'elle à nouveau, il faut la rendre expressive et la polir selon le mode aimable des écrits. Voilà pourquoi jamais les mots ne donneront la vérité. Ils en tirent des mélodies, merveilleuses comme l'ambition, dont le seul but est d'éveiller l'extase dans le cœur de ceux qui attendent.

La vérité est comparable au chant. Et l'on ne force pas le chant, il se donne selon sa loi, si on ne lui en substitue aucune autre. La vérité du chant est joie ; c'est la reconnaissance unique où le don réciproque est absolu. L'édifice d'un double élan trouve sa forme et cette forme est vie d'amour. J'ai cherché la vérité comme un malade recherche la santé. Et voici, la vérité est le bien-être dans la maladie et dans la santé. Elle respire avec ce qui donne et avec ce qui reprend, et elle est bonne avec la grâce et avec la disgrâce dont elle prépare pare le pardon.

Le matin est venu, et la vérité était encore sur les lèvres de l'ange le goût nouveau qui vient de la langue et de la gorge, et de tout l'être intérieur. Les mots avaient perdu cette ambiguïté des relations humaines. Ils étaient faits de lumière et ils étaient faits de joie.

Sache, ô terre dont les formes sont sans fin, sache que l'ange, ayant fermé le paradis, a donné le courage du chant et la promesse de la justice dans la récompense. Il s'est servi de ta ruine et de ta sève, et il en a pétri une pâte dont il fait ta nourriture. Aveugle, aveugle est le regard des hommes ! Insatiables sont leurs mains, commune est l'heure de leur naissance et l'heure de leur mort. Insipides sont leurs espoirs.

Console-toi, ô terre d'infortune et de gloire, oublie ta détresse. Il n'appartient pas à l'homme de donner l'espérance, mais à Dieu. Et l'espérance de Dieu, c'est la réponse de la vérité à notre attente.

T\ B\


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