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La Colonne D’Harmonie

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Le but du présent travail n’est sûrement pas de vous tracer ma biographie, mais pour vous aider à comprendre mes positions, il est je pense utile que je procède à un rappel schématique de ma trajectoire « rituel-psycho-musicale ».

Je me dois d’être explicite sur certains aspects de mon expérience : Plus de cinq ans derrière une sono dans un cours de danses de salon, un travail de fin d’étude portant sur l’influence du son dans la compréhension des messages et l’application de consignes, formation de base en musicothérapie et pratique des techniques de relaxation ont croisés mon chemin. Mon intérêt pour le sujet est donc très loin d’être neuf.

Le jour où encore compagnon, je me retrouve à la colonne d’harmonie, j’entre donc dans un domaine nouveau et connu. Nouveau de par l’aspect particulier du rituel, connu de par l’usage de la musique. J’ai maintenant derrière moi plus d’une année d’expérience à la Colonne d’harmonie et je peux dire qu’aborder le sujet relève de la gageure, si pas de la mission impossible. La difficulté sera essentiellement d’être synthétique, de rester compréhensible et pourtant d’avancer des arguments pertinents. Le tout en étant capable de porter un regard maçonnique et tout en n’oubliant pas les aspects profanes du problème.

I. Aspects théoriques.

En matière de colonne d’harmonie beaucoup d’idées et de conceptions circulent. Le problème, c’est qu’elles reposent pour la plupart sur des bases empiriques. Chacun peut donc lancer des affirmations chargées de subjectivité sans qu’il soit possible de trancher quant à leur bien fondé. Mon projet est donc de définir préalablement une base théorique permettant d’élaborer la pratique. Lorsque j’ai entrepris cette démarche exploratoire, je me suis trouvé plongé dans une forêt de questions où il était plus facile de se perdre que de trouver du bois pour confectionner sa planche. Il me fallait  trouver la question essentielle, celle qui génère les autres questions, celle dont la réponse éclairera d’une nouvelle lumière cette forêt profonde.

Ma quête m’a mené au pied d’un questionnement clé : « Quel doit-être le rôle de la musique dans le rituel ? » Je ne dois pas non plus m’aveugler et perdre de vue que l’un et l’autre s’adressent à un auditeur et pour le cas qui nous intéresse à un homme initié. Poser la question va nécessiter de redéfinir ces deux notions pré-requises : Qu’est-ce que la musique ? Qu’est-ce que le rituel ?

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La musique est une partie des sons. Elle est faite de vibrations. Ces vibrations sont codées d’une certaine manière. Elles forment un langage que l’auditeur décode d’une certaine manière.

Le rituel est un ensemble de consignes et de comportements que les initiés appliquent dans un lieu donné. Apparemment, le rituel exerce une influence sur l’initié sinon pourquoi le répèterait-il et le transmettrait-il de génération en génération ?

Pour percevoir le rôle de la musique dans le rituel je vais situer l’un et l’autre dans leur contexte c’est-à-dire une situation de communication entre initiés. 

Sur un plan général nous avons un schéma qui établi une communication symbolique avec le divin et une communication concrète entre FF\.

Dans l'image ci-dessous :
L'image supérieure : L’archétype Lumière
Fléche blanche vers le haut : Les symboles
Les flèches vertes : Les FF\
Le centre entre les flèches verte : La communication entre FF\ et avec l’archétype Lumière via un idéal au sein d’un espace sacré.
 
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Nous pouvons aussi poser l’hypothèse que nous triangulons c’est-à-dire que notre communication transite par un idéal. L'archétype fait partie de l'inconscient collectif, une sorte d'énergie commune à toute l'espèce humaine. Elle s'organise en magma ou noyaux et donne ainsi des archétypes. Si on veut résumer les caractéristiques des archétypes, on peut dire...

1. Qu'ils sont autonomes, dotés de leur propre énergie vitale.
2. Qu'ils sont organisés comme des entités ressemblant à des personnes.
3. Qu'ils s'activent au contact de facteurs externes (art, spectacles, doctrines religieuses, rituels, ...). On voit ici sa liaison étroite avec la musique.
4. Qu'ils sont beaucoup plus puissants que le moi et qu'ils sont capables de l'absorber si le moi s'identifie à eux.

Dans le cas pathologique où cela se produit, cette absorption fait disparaître le moi individuel qui s'exprime alors de manière mégalomaniaque comme si l'individu concret était lui le collectif. L'archétype lumière est présenté comme l'archétype du surnaturel, de l'au-delà et de ses représentations. Ses symboles sont la luminosité et la force. On peut le rapprocher du concept du G\ A\ D\ L\ U\…

Participer à un rituel de bonne qualité, c’est s’accorder sur cet archétype lumière ou à une de ses formes, c’est accéder à la spiritualité. Cela se traduit par un état où le participant devrait ressentir une sensation de bien-être, de plénitude, d’harmonie. Bien pratiqué, le rituel rassure.

Sans vouloir se fixer à la seule verticale, nous pouvons aussi identifier la situation de communication entre F\ F\ qui elle ressemble à celle de la vie profane, exception faite que des règles de fonctionnement très strictes sont mises en place (demander la parole, seulement dans certaines phases du rituel,…). Elle peut-être ramenée au schéma suivant :

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Nous voyons que nous échangeons des informations numériques et analogiques; ces informations sont codées et décodées selon des normes personnelles. Les informations numériques sont essentiellement liées à la parole sans son intonation, les informations analogiques englobent le reste des éléments de la communication qui ne font pas l'objet d’une codification stricte.

En parallèle avec ces informations numériques et analogiques, nous avons les rôles de l’hémisphère gauche et l’hémisphère droit de notre cerveau. Goethe affirmait déjà que nous abritons deux âmes en notre sein. On pourrait plutôt parler de faux jumeaux : l’un plutôt rationnel, intellectuel, analytique, l’autre plutôt artiste, émotif, « globaliste ». Les recherches menées sur les deux hémisphères cérébraux semblent démontrer une forme de spécialisation de ce type même si les travaux plus récents sont sans doute moins affirmatifs. Il n’en demeure pas moins cette réalité de deux centrales avec chacune leur spécialisation. L’une est programmée pour du numérique, l’autre pour de l’analogique.

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Quels rapports avec nos travaux et la musique ? Pour nos travaux, la démonstration nécessiterait en soi toute une planche, ils font appel à l’une et l’autre de ces centrales. Ainsi le rituel, les décors, …sont plutôt affaire de la communication analogique alors que les planches et la discussion sont plutôt affaire de la communication numérique. Quant à la musique, elle fait plutôt partie de la communication analogique sauf pour les musiciens qui l’ont numérisée en partition et dans un langage fait de notes. L’écoute d’une mélodie, les émotions qu’elle engendre est affaire d’analogique et d’hémisphère droit alors que la reconnaissance des noms et des notes, décortiquer l’interprétation est plutôt affaire de numérique et d’hémisphère gauche.

Sur base de ce que je viens d’énoncer quelle est donc la place de la musique dans le rituel ? La musique s’insère dans le processus de communication et l’influence. Ce rôle s’exerce dans la communication entre F\ F\ et dans les liens à l’archétype lumière autrement dit dans le caractère cardiaque et la spiritualité des travaux. En paraphrasant une part de notre rituel, la musique peut soutenir l’édifice que nous élevons et les travaux que nous menons en y insufflant la force nécessaire et en les ornant de la beauté. Elle contribue à construire l’égrégore, à tisser des liens subtils entre F\ F\ ainsi qu’avec le sacré.

Ceci dit, la musique mal utilisée peut aboutir à l’effet complètement inverse. La légende ne raconte-t-elle pas que la perte de l’Atlantide est venue d’un usage destructeur des sons ? Les traditions anciennes fourmillent d’exemples mettant en exergue le rôle constructeur ou destructeur du son : Thot créant le monde en poussant un cri, les trompettes de Jéricho, le joueur de flûte d’Hamelin... Notre époque redécouvre la musique en tant qu‘élément  thérapeutique (la musicothérapie). Par contre pour la majorité, autrefois comme maintenant, la musique ne semble avoir qu’un rôle esthétique, lénifiant ou stimulant et son aspect spirituel est tout bonnement passé sous silence.

En maçonnerie, comme dans les religions, la place de la musique n’est pas toujours très claire. Si je lis Guigue, elle n’apparaît que tardivement dans le rituel à la faveur de la frivolité  du XVIIIème siècle. Un vrai rituel requiert un silence absolu. Ceci dit, j’ai envie de citer Jacques Attali qui dans son livre « Bruits » déclare que seule la mort est silencieuse, ensuite, si je me plonge dans le monde ritualiste, je remarque que les rapports entre la musique et le spirituel n’ont pas toujours été harmonieux. Par essence, la musique est un rituel. Elle est le sacrifice (exécution) d’une œuvre devant un public. Elle a été liée aux pratiques religieuses des origines, il suffit pour s’en convaincre d’observer les pratiques animistes qui font usage de la musique. Mais, si elle accompagne les rituels de Delphes elle a sa place dans un rituel de possession, le soin d’un « tarentulé » et de transcendantes bacchanales. Les aspects incontrôlables et sexualisés du son font peur. Elle peut occuper une place : apollinienne si elle contribue à l’harmonie ou dionysiaque si elle contribue au chaos. Par extension, elle prendra aussi des aspects diaboliques. Mais le chaos peut se rapprocher du mouvement et l’ordre de la pétrification. En définitive où va le bien et où est le mal ? En clair, l’homme a souvent confondu la musique avec les pulsions et les parts d’ombre qu’elle révélait, la condamnant ainsi en leur lieu et place. Pourtant si on y regarde de près, la musique peut aussi révéler la lumière et de hautes aspirations.

II. Aspects pratiques et liens avec la théorie.

Comment la musique exerce-t-elle son influence sur les auditeurs et par extension logique comment utiliser la musique durant une tenue?

La musique est pour l’auditeur moyen, c’est-à-dire la plupart d’entre nous une affaire de centrale analogique. Nos racines animales, nos premiers apprentissages ont favorisé cette primauté. Ainsi par un jeu de conditionnement, nous sommes amenés à ressentir certains affects  (émotions) selon la manière dont la musique est encodée par l’auteur et l’interprète. Ce codage se fait en jouant sur les paramètres du son : le timbre, l’intensité et la manière dont ils sont utilisés dans le temps (durée, rythme, cadence, …).

Notre décodage de la musique est en définitive à la fois lié à des expériences personnelles et à des conventions, des règles culturelles, il est lié à notre manière de nous représenter le monde (Carte du monde en PNL). L’exercice auquel doit se livrer le maître de la colonne d’harmonie consiste à calibrer (accorder) la musique sur ses auditeurs mais aussi sur l’archétype lumière par un jeu de triangulation ce qui, avouons le, est  géométriquement, on ne peut plus maçonnique. Les uns doivent rejoindrent l’autre par subtil jeu de paliers sur une échelle de Jacob devenue musicale.

Premier souci, établir la liaison avec les F\ F\. La musique entendue doit se synchroniser sur le ressenti des F\ F\ et leur permettre de se synchroniser eux aussi sur la musique. Une majorité des F\ F\ doit pouvoir apprécier le morceau et le morceau ne doit pas bloquer l’accès au spirituel. Comment calibrer la musique ?

Je peux jouer sur différents paramètres :

1. La dominante grave – aiguë, le rythme lent – rapide. Plus le son est grave plus il agit sur la bas du corps. Plus il est aigu plus il agit sur le haut. Plus le rythme est rapide, plus il suggère l’excitation et l’envie de bouger, plus il est lent, plus il suggère l’immobilité.

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2. L’intensité.
Plus je mets de l’intensité, plus normalement, j’accrois les effets décrits ci-dessus et dessous.

3. Des variations ou non (fréquences, intensité, rythme, mélodie…). Les variations provoquent un changement. Et un changement peut créer une surprise ou introduire une nouveauté. Le jeu des variations peut créer des sensations de surprise, peur, confiance…

4. La construction mélodique. Comme l’intonation de la voix, la musique suggère des intonations particulières auxquelles nous associons des sentiments : gaieté, joie, tristesse…

Mise en pratique ? Je vais au travers du déroulement du rituel tenter de vous en apprendre plus. Le rituel est fait d’une succession de phases les unes répétitives, les autres particulières. Deux options se présentent dans la construction du programme musical : soit ajouter des morceaux au gré de son inspiration, avec un ressenti chez l’auditeur qui peut être dispersé, soit essayer de dégager une unité, une cohérence interne, un fil rouge lié au sens, avec un ressenti plus structuré et structurant. Le F\ de la Colonne d’Harmonie doit annoncer la couleur de ce qui va se passer, l’idéal serait donc qu’il connaisse au préalable le contenu des travaux.

Le fil conducteur étant tiré, reste à apporter la musique aux moments importants. Tout en assurant la cohérence de l’ensemble de l’ouvrage. Si on admet que le programme musical se fusionne avec les différents Travaux pour former une œuvre en soi.

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Le rituel nous amène à passer par différents paliers qui nous élèvent vers la spiritualité et/ou l’harmonie. J’en distingue trois grands : le temps de l’ouverture, le temps des travaux, le temps de la fermeture. Les éléments du rituel qui les régissent peuvent être complétés par les vibrations de la musique. Voyons plus en détails.

A. Le temps de l’ouverture des Travaux :

Phase n°1 : Entrée des F\ F\.
Nous sommes dans un cas à peu près parallèle au prélude et à l’ouverture dans un opéra. Les thèmes des travaux devraient déjà résonner à travers le ou les morceaux accompagnant cette phase. En plus clair, la musique devrait déjà annoncer la couleur de ce qui va se passer. En outre, il faut songer à harmoniser l’auditeur l’inciter à se détacher du monde profane. On ira puiser dans le répertoire des musiques que la musicothérapie défini comme apaisantes ou de détente. Elles inspirent un sentiment de calme et de sécurité. Traits : Pas trop de variations, mélodie neutre ou porteuse d’un sentiment.

Phase n°2 : Entrée du V\ M\.
Le V\ M\ représente l’autorité de la Loge, le médiateur principal dans l’exercice de l’Art Royal. Il incarne cette part de royauté en nous-même. Il convient d’évoquer les mêmes sentiments que ceux qu’inspireraient l’entrée d’un souverain pour les royalistes ou d’un président pour les républicains (Ceci dit, la royauté est en chacun de nous). Il doit se dégager de la musique une impression de force, de grandeur, de noblesse. Il faut impressionner sans terroriser. On ira puiser dans le répertoire des musiques que la musicothérapie défini comme fortes. Traits : Intensité importante, rythme soutenu mais pas trop rapide car un roi ne court pas, seuls ses subalternes courent.

Phase n°3 : Couverture extérieur.
Le F Couvreur vérifie au dehors qu’il n’y a pas de menace. Cette phase est très brève et pour que la musique puisse exercer un effet, il lui faut un temps d’expression suffisant. Jusqu’à présent, je n’ai pas ajouté de musique mais je pourrais éventuellement fusionner cette phase avec la suivante. La seule fois où j’ai inséré un accompagnement, c’était lors de la Tenue ou le Pen était à nos portes. J’avais voulu marquer le coup symboliquement.

Pour choquer les esprits, j’ai choisi d’insérer des bruits de bottes fascistes lors de ce moment. Le résultat a donné des traits contrastés. Une partie des auditeurs a décodé la menace, une autre a subi la résurgence de très mauvais souvenirs. Comme pour moi, ces derniers ne faisaient pas partie de mes expériences, je n’avais pas anticipé ce risque de décodage sous la forme d’une agression.

Schéma explicatif

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Phase n°4 : Couverture intérieure.

Le premier et le second surveillant déambulent dans le Temple pour s’assurer que tous les assistants sont bien apprentis franc-maçons. Durant cette phase, il faut ressentir le mouvement de marche d’une patrouille de surveillance. Cela doit inspirer la crainte et dégager une impression de force tranquille. On utilisera une musique forte et légèrement dynamogénique (qui donne envie de bouger). Le sentiment inspiré par la mélodie pourra être une légère crainte (Comme celle que peut inspirer la police opus l’armée).

Phase n°5 : Allumage des « petites lumières »...

Comme le jour se lève, les ténèbres se dissipent, la Lumière se répand dans la Loge. Le V\ M\, le premier et le second surveillant invoquent la Sagesse, la Force et la Beauté. C’est un moment capital de la consécration des lieux. La musique doit impérativement être à la hauteur de telles aspirations et venir donner vigueur à ce qui est mis en place. Que choisir ?

La musicothérapie distingue différentes sortes de musiques mais aucune ne répond aux attentes définies ci-dessus. Il me faut créer une nouvelle appellation pour des concepts pourtant millénaire : la musique pneumatique. Selon la liturgie orthodoxe, est pneumatique ce qui porte l’esprit vers le haut. Les musiques religieuses devraient donc être idéales si de graves  problèmes de décodage ne venaient semer la confusion. En effet, pour certains, musique liturgique = musique de « catho » = musique de « salauds ».

Schéma explicatif :

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Le jeu de « la boîte à souvenirs » se transforme une fois de plus en boîte de Pandore et vient abattre en plein vol notre effet pneumatique. Comme nous le voyons pour la deuxième fois, le problème du travail de la Colonne d’Harmonie est la confrontation à ce système de polysémie des sons, c’est-à-dire qu’ils contiennent plusieurs significations et correspondent à une infinité d’expériences du monde.

Prenons l’exemple suivant pour achever mon explication. Imaginons que j’utilise une très belle musique de Mozart pour ce moment du rituel mais que par ignorance de ce qui passe à la télévision, j’ignore que cette même musique accompagne la publicité d’une marque de papier hygiénique. L’effet chez l’auditeur sera…

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Comme tout spécialiste de la communication, je dois être capable de m’adapter à l’auditoire et non demander à l’auditoire de s’adapter à moi. Seulement, il me sera impossible de proposer une musique qui convienne à 100% à l’ensemble de l’auditoire. Je ne peux qu’espérer satisfaire une majorité. Alors quelle musique pneumatique employer pour arriver au schéma suivant…?

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Il n’y a malheureusement pas de réponse type. Les traits principaux devraient être proche des musiques de détente  avec quelques traits particuliers : Dominante des sons de fréquence médium à aigu pour éveiller le cœur et la tête, rythme paisible car on ne court pas dans un lieu sacré. En outre cela calme l’auditeur donc le rapproche d’un sentiment d’harmonie. On pourra y mettre des sentiments de différentes sortes mais de préférence nobles (ex. amour). Dans quels styles puiser ?

Je ne peux pas dire musique classique seulement, new age seulement, de musiciens maçons seulement, de Mozart seulement... D’abord parce qu’en procédant ainsi je ne trouverai pas toujours de la musique pneumatique, ensuite, parce que j’estime que cela relève de l’intégrisme et qu’une telle attitude dans un groupe qui prône la fraternité et la tolérance est une contradiction dans le canal analogique qui vient semer la confusion par rapport aux belles allégations reçues par le canal numérique.

Le schéma de la contradiction analogique / numérique :

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L’idéal est de varier les genres de musiques pneumatiques et de s’efforcer d’acculturer chacun à des écoutes différentes, des genres différents, des cultures différentes. Si les  chemins pris pour y parvenir sont multiples, le besoin de spiritualité lui est communément répandu et il nous revient de cultiver un espace d’empathie commun où je suis capable de comprendre la carte du monde de chaque culture sans m’y fondre et sans la dénigrer pour autant. A la Colonne d’Harmonie, il faut donc être capable de passer de tout. Tout en respectant le principe clé de la musicothérapie : se mettre en mode ISO (même état affectif) avec l’auditeur puis lui faire effectuer des changements d’état de conscience ou d’état affectif de manière à le faire cheminer vers l’état attendu. Quel est l’état attendu ? L’harmonie. Quel est l’état de départ le désordre profane.

Le rituel a déjà déblayé une partie de nos aspects « métalliques », les musiques d’entrée aussi. Mais il faut encore s’élever et c’est ce que va nous permettre le rituel combiné avec de la musique pneumatique. Venons maintenant aux phases suivantes du rituel.

Phase n°6 : Les trois Grandes Lumières et le tracé du Tableau.

Nous sommes à nouveau dans une phase importante et sensible qui requière toute notre attention. Des points de référence capitaux sont disposés au centre du Temple et en guise de médiateur entre les F\ F\ et l’Orient. Il faut à nouveau une musique de qualité spirituelle. Comme des liens se tissent entre les F\ F\ et le plan sacré, une musique pneumatique évoquant un cheminement, une force qui s’installe paisiblement sera particulièrement adaptée si…le Tableau n’est pas déroulé et l’extrait amputé.

Dans ce deuxième cas, le mieux est de poursuivre avec la musique utilisée lors de l’allumage. Cette question m’amène à aborder le problème de la durée de l’extrait. Comme je l’ai expliqué pour la phase n°2, une musique nécessite un certain temps pour produire un effet, l’écriture de l’œuvre n’introduit pas le moment fort dès la première mesure. Un extrait trop court est souvent d’un effet nul et me donne trop fréquemment l’impression de manquer de respect à l’auteur.

Face à ce genre de situation, je dois recourir à des stratagèmes techniques qui vont extraire le moment fort grâce à une découpe au moyen d’un logiciel informatique. Il n’empêche que cela dénature l'œuvre. Passer les 45 premières secondes d’une œuvre qu’un auteur a conçue pour durer 5 minutes, c’est plus grave qu’extraire une citation d’un livre. Avec la formule d’ouverture et l’équerre formée au-dessus de l’autel des serments, le temps du décollage est achevé.

B. Le temps des Travaux.

Maintenant que nous sommes lancés à la bonne altitude ou syntonisé sur les fréquences de l’harmonie, il faut faire place à la phase administrative puis aux travaux proprement dits. Ainsi se poursuit ma quête du sens. Au niveau du degré d’harmonie atteint, nous allons fatalement effectuer des mouvements ascendants et descendants. Un peu comme un avion qui tout en poursuivant sa route rencontre des trous d’air.

1. Les minutes d’actualité.
Avec ma logique du sens, cette phase est particulièrement difficile. Pour respecter l’unité de l’ensemble, je dois pouvoir anticiper le genre de sujet présenté. Or les minutes d’actualité s’annoncent par définition à la dernière minute. Il faut donc soit jouer au devin, soit prendre de la musique passe-partout aux rapports de signification faibles.

2. Les minutes de symbolisme.
Tout est symbole, la musique est symboles elle aussi mais comment accorder la musique avec un sujet symbolique ? Je dois, de mon côté, interpréter le symbolisme abordé, faire mentalement un travail de décodage personnel et tracer ma planche en musique tout en m’efforçant de respecter le fil rouge des Travaux. J’ai ainsi une chance d’apporter ma pierre aux autres pierres placée par le F\ qui s’exprime. Je peux ainsi calibrer les déambulations qui précèdent, le morceau qui suit et les déambulations qui raccompagnent, en espérant être plus ou moins sur la même longueur d’onde, la même carte du monde que le F\.

3. La planche.
La problématique est en tous points comparables avec celle des minutes de symbolisme mais avec cette variante que les sujets sont parfois plus faciles. Confucius appelle la musique de la Chine, la géométrie Bach... C’est souvent du thème de la planche que je m’efforce de tirer le fil rouge et de tracer l’ensemble du programme. Alors quand le programme change… Il faut avoir prévu une roue de secours, un programme un peu passe-partout  qui agrémentera les Travaux et le rituel sans en compléter le sens. C’est dommage, frustrant  mais moins grave qu’un contre-sens ou un non sens.

La musique qui accompagne la planche peut aussi servir à insérer des moments de respiration entre différentes phases de l’exposé. Au même titre que la musique de conclusion, elle doit laisser le temps de la méditation et de la réflexion. On pourra choisir une musique de détente mais porteuse d’une charge affective comparable à celle de la planche. Sinon, tant pis, on dynamisera et donnera un dernier sursaut à l’exposé.

4. La Parole circule.
Ici, normalement pas de musique. Elle peut cependant s’avérer nécessaire pour marquer la fin des échanges et introduire une rupture si le débat a été disputé. Elle permettra le cas échéant de calmer les esprits. On pourra recourir à une musique détente aux vertus pneumatiques.

5. Les communications.
Cette phase ne nécessite pas de musique. C’est la musique du tronc de la Veuve et du sac des propositions qui fera éventuellement office de tampon si les échanges ont manqués de fraternité.

6. Le Tronc de la Veuve et le sac des propositions.
Cette phase devrait logiquement faire partie du temps suivant mais dans la pratique, je remarque qu’elle est plutôt dans l’esprit des Travaux. Comme cette phase appelle à la charité, une musique ou une chanson invitant à l’aide ou la méditation sur la condition humaine est idéale.

C. Le temps de la fermeture des Travaux.

Nous étions montés, voilà qu’il faut descendre. Nous devons nous détacher progressivement de ce lieu d’harmonie, de paix, de concorde pour rester dans l’imagerie aérienne. Bien évidemment, en touchant à la problématique de la fermeture, je touche forcément à celle de la Chaîne d’Union et de sa place disputée dans les phases du rituel. La version qui va revenir à l’honneur s’inscrit dans une logique et celle que nous quittons dans une autre. Tentons de voir ce qu’il en est et les conséquences pour le travail à la Colonne d’Harmonie.

7. La Chaîne d’Union est un moment très important du rituel.Il est chargé d’émotions, de recherche d’harmonie. Si tel est le cas, la version « à la fin du temps sacré » est parfaitement adaptée puisque nous sommes encore dans une phase d’harmonie. Si nous nous plaçons dans une hypothèse de liaison à l’archétype Lumière, il est encore manifesté et vient s’insérer dans la chaîne. Version « Chaîne d’Union à la fin du temps et de l’espace sacré ».

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Si par contre nous partons dans la version « après le temps sacré », cet archétype n’est plus manifesté. Nous ne sommes plus que sur son souvenir. En terme de paliers, nous livrons à une espèce de « faux atterrissage ».

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Comme ce jeu de haut et de bas, de bas et de haut est « désharmonisant » (C’est un peu comme ne pas respecter des paliers en plongée), il faut tricher et ne pas descendre trop bas dans les phases du tableau et de l’extinction afin de laisser un niveau suffisant lors de la Chaîne d’Union. La musique de la Chaîne ne devra pas non plus voler trop haut, au risque de larguer ses passagers.

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Le problème de la Chaîne étant réglé au niveau de l’intensité pneumatique, comment compléter notre démarche au niveau du sens ?

8. Effacement du Tableau et refermer le Livre.
C’est un moment d’adieux donc un moment mélancolique. On s’efforcera d’inspirer la tristesse ou la mélancolie tout en gardant un effet pneumatique.

9. Extinction des trois petites lumières.
Nous poursuivons l’effet obtenu en 8 tout en y mettant un peu de poésie.

10. La sortie.
Il faut maintenant couper harmonieusement avec ce qui précède et repartir sur une note positive. Le Maçon plein de vigueur part porter la lumière et son action dans le monde profane. Une musique dynamique et/ou dynamogénique (qui donne envie de bouger) et positive conviendra pour la circonstance.

III. Conclusions.

Durant cet exposé, je me suis efforcé de vous monter combien la liaison avec le sacré et ce qui est désigné sous le nom d’archétype lumière joue un rôle important dans notre rituel. De cette liaison, il faut tirer les conséquences et considérer que le F\ M\ chemine vers l’harmonie. Pour y parvenir, il dispose du rituel. Ce rituel peut être soutenu par la musique de la Colonne d’Harmonie.

La musique va agir sur nos centres émotifs, mentaux et physiques par ses vibrations, significations, effets... Deux facteurs doivent particulièrement retenir notre attention : le sens, l’effet pneumatique. J’espère être parvenu à vous démontrer leur importance. J’aurais voulu prolonger ma démarche jusqu’au rituel d’initiation au 1°, j’aurais voulu aborder d’autres questions telles que le rôle d’un orchestre, la place de la C\ H\ dans la Loge…cela nous mènerait trop loin. Le plus sage est de réserver ces réflexions pour une éventuelle prochaine fois.

J’ai dit.

P\ R\


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