Obédience : NC Loge : NC 01/02/2010


Tenue Funèbre
 pour notre F
\ Cla\ POU\ le 01-02-2010

Pensons à  notre Frère CLAUDE qui nous offre, de L’Orient Eternel, l’opportunité d’aborder le mystère de la mort lors de cette tenue particulière.

 
Nous pouvons envisager ce thème sous plusieurs angles qui ramènent toujours invariablement à une conception cyclique du parcours de l’homme.

Une première approche pourrait être celle du sommeil.

Pendant le sommeil, le corps est inanimé et l’homme primitif conclut naturellement que l’esprit l’avait quitté.
L’expérience des rêves, dont la mémoire garde parfois quelques traces des visites dans d’autres lieux et d’autres mondes atteste que l’esprit peut ainsi s’évader.
Ainsi, l’apprenti sent, dissimulé en lui, la présence d’un héros endormi qui aspire à l’éveil.
La connaissance de soi demande beaucoup d’humilité et d’honnêteté dans le sens où il ne s’agit pas de distraire son regard en le portant extérieurement sur autrui, mais de le maintenir sur son propre comportement
Il est curieux de noter combien il est facile de décrire les formes extérieures avec des formules, des chiffres ou des croquis, mais combien nous sommes indigents pour parler de l’essence humaine, pourtant si proche de nous !
Plongés dans l’obscurité des ténèbres de la nuit qui n’est que confusion et conflits , nous sentons plus ou moins clairement que seule la sortie de cet état peut nous conduire vers des parcelles de lumières.
Les rituels nous invitent tous à des voyages fondés sur les mythes fondateurs de l’humanité.

Telle pourrait être une seconde approche.

Ainsi parlait –ton de la nef des morts, ou de la traversée d’un fleuve séparant les vivants et les morts.
Donc, notre voyage a un prolongement qui nous reste inconnu, mais qui contient dans son caractère dynamique de déplacement matériel une nouvelle perspective.

L’initiation nous invite à la mort du vieil homme et au réveil à la vraie vie.

Ces deux pôles sont deux piliers entre lesquels nous feront d’incessants allers-retours pour convertit notre cœur et notre regard à la lucidité d’une lumière qui nous entoure, mais que nous ne percevons que fugacement et partiellement.
Cette discipline nous pacifie et nous permet, progressivement d’intégrer à notre vie actuelle, la présence de la mort, comme changement d’état et non plus comme finitude inéluctable, ce qui est totalement désespérant et devrait confiner au suicide immédiat tout homme logique, face à la perspective de ce cul de sac de notre destin.
Eveillons nous, endormons nous et réveillons nous, tel est notre chemin cyclique inscrit dans le cosmos.

L’art funéraire a beaucoup à nous dire au travers des millénaires.

Ainsi trouvons nous sur les pierres tombales des escargots, petits animaux endormis dans leurs coquilles ; que survienne une averse et la vie renaît.
On trouvait sur des tombeaux de l’Antiquité , des capsules de pavot qui symbolisaient le sommeil ; l’association des dieux Hypnos ,de son frère Thanatos et de Somnus oscille entre sommeil et rêve comme nous oscillons entre éveil et sommeil , vie et mort.
Le papillon, sous forme d’apparente sculpture décorative est lui aussi promesse de métamorphose et  de résurrection.
 
Le mot «  résurrection » mériterait à lui seul de nombreuses planches, tant son acception ordinaire semblerait choquer les non croyants, ce qui serait opposé à l’éthique de ce lieu.
Posons nous la question de savoir pourquoi, l’église catholique a tant insisté sur la résurrection des âmes et peu à peu oublié la résurrection des corps ?
L’âme étant pur esprit et immortelle, on comprend mal la nécessité de sa résurrection ?
Pourquoi aussi faire l’impasse sur le corps, ou plus précisément la chair, bien sûr chargée de l’accomplissement de tous nos péchés, alors que les peintres du Moyen Age naviguaient avec aisance dans la représentation de la pesée des âmes bien chevillées à des corps sexuées et charnellement pourvus ?

L’homme est créé corps et âme mêlés, par quelle acrobatie dogmatique cela est-il rompu ?

Peut être pour éliminer définitivement les héritages des mythologies païenne et juive ?
On pourrait m’objecter que le corps est corruptible et je ne vous contredirais pas dans mes activités de praticien légiste.

Mais si le grain ne meurt, le blé ne repoussera pas !

Nous sommes bien là, et très simplement, dans un changement d’état, inscrit dans le cosmos qui nous environne.
Aurions nous la prétention de nous croire supérieurs à la matière qui nous constitue et qui, à chaque seconde est le lieu de changements incessants qui conditionne notre biologie et notre pensée au sein même du corps de chacun.

La mort témoigne de ce qui se transforme dans l’homme mécanique ; pour que quelque chose naisse, une autre doit mourir.

Nous sommes tous initialement issu du spermatozoïde qui a perforé la paroi d’un ovule pour se démembrer et se diluer en son sein.
Cette primitive seconde de la fécondation est intangiblement inscrite en nos gènes comme un parcours obligé qui préfigure notre futur.
Nous ne pouvons ignorer ces phénomènes qui nous constituent et les intégrer est un devoir auquel nous ne pouvons nous soustraire, ce qui est bien sûr impossible !

Considérons aussi les différences culturelles d’approche de la mort où les rites de passage prennent des formes toutes autres selon les antipodes.

La couleur des vêtements oscille du noir profond au blanc éclatant ; les cérémonies se partagent entre un recueillement silencieux et des lamentations démonstratives.

Ces lectures multiples doivent nous inciter à relire notre conception de la mort à la lumière de ces approches millénaires.

Notre concept n’est qu’un concept et ne peut  éliminer tous les autres dans la prétention de détenir la vérité.

D’ailleurs, avons-nous examiné finement nos propres concepts ?

Ainsi, la mort représentée sous la forme d’un squelette maniant une faux semble à première vue une image évidente de cette lame qui coupe la vie.
Pas si évident , si l’on observe que le squelette fauche de gauche à droite , c'est-à-dire du sinistre ou senestre ou gauche à droite , vers le dextre , le lumineux , à l’inverse du mouvement traditionnel du faucheur de blé.
Elle indique qu’elle ne coupe pas tant la vie que les illusions liées à la matière et l’ignorance de celui qui n’a pas encore atteint à la connaissance.
Défions nous donc de considérer, comme acquis solides et sûr, des approches culturelles non suffisamment explorées.
Ce qui s’avère judicieux sur ce sujet doit être une ligne de conduite quotidienne pour le franc-maçon afin de rechercher toujours l’idée sous le symbole.

Depuis sa création, l’homme possède le potentiel transcendantal ; certains hommes ont été jusqu’à développer cette responsabilité et d’autres se sont arrêtés à leur développement physique.

Ce que l’on découvre au bout du chemin initiatique , c’est la vérité éternelle , si l’on parvient à l’atteindre , sans s’égarer , soit dans l’imagerie ésotérique , soit dans l’allégresse d’un langage suave et tendre d’une fraternité uniquement conceptuelle.
Le rituel d’initiation ne prône pas une activité intérieure surnaturelle, mais propose bien l’abandon des automatismes, la mort de l’homme ordinaire, de son égoïsme pour permettre la renaissance de son Etre intérieur.
A la mort de l’homme pantin succède la naissance de l’homme conscience.
Mais cette mort nécessite une longue agonie, des efforts scrupuleux et volontaires ; c’est une condamnation à assumer, dans la solitude, l’abandon de certaines de ses idées, de ses émotions, de ses préjugés.
 
L’homme ordinaire est effrayé par l’idée de la mort. Il perd de vue que tout ce qui vit prépare sa mort pour poursuivre la vie.
La mort est dans le mouvement de la vie, alors que l’immobilité est absence de vie.
Et si la mort d’un proche se produit, surtout s’il a longuement souffert avant,  comme notre Frère CLAUDE, elle est plutôt un soulagement qu’une tristesse.

La mort ne trouble jamais l’ordre cosmique, mais suscite des remous chez ceux qui restent ; elle n’est pas un corps sans vie, mais une vie qui quitte un corps pour un autre destin.

« C’est une conscience qui quitte une forme »
Pour ceux qui comme moi on connu les enterrements campagnards d’antan, bien loin des cérémonies aseptisées de notre époque, on y vivait réellement la présence du défunt, attablé au milieu des convives, mangeant et buvant sec et où ses exploits de séducteur, de hâbleur ou son caractère un peu rude faisaient la joie de tous, une fois les larmes asséchées.
Cette mort était comme apprivoisée et la « part de l’absent » était une part sacrée scrupuleusement respectée.
 
Je crois que CLAUDE aimerait cette perspective, bien qu’il se soit souvent privé de partager les agapes sur prescription médicale ; alors ne manquons pas, en, salle humide de lever nos verres à sa mémoire, tout en gardant un verre bien rempli à la place qui lui est réservée pour l’éternité à notre table et dans nos cœurs.
 
« Personne ne  ressemble à un frère car personne ne vous connaît aussi bien !
Notre regard l’un sur l’autre est unique !
Nous avons connu la peur ensemble !
Nous sommes marqués par des combats secrets !
Nous avons pleuré des chagrins intimes !
Nous faisons bloc pour toujours ! »
 
J’ai dit

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