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  La fraternité, mythe ou réalité ?
 
Comme pour donner suite à la tenue comme des loges de l’Ain de Vendredi dernier 21 Avril je me suis dit que vous présenter ce midi ce thème de réflexion avait tout son sens.
 
1)      La notion de « Fraternité » a une double histoire : étymologique et sociologique.
Du côté de l’étymologie, il semble qu’il faille remonter au vieux sanscrit pour voir       apparaître le terme « bhratar » avec le sens de « frère » au sens large de parent proche. Ce serait cette racine sanscrite que l’on retrouve dans la Grèce antique, au travers du terme « phrater », et du latin « frater », membre d’une fratrie.
La définition du mot « fraternité », relevé dans mon « petit Robert » est la suivante :
« Lien existant entre les hommes considérés comme membre de la famille humaine ; sentiment profond de ce lien ».
 
Le dictionnaire Gaffiot traduit "fraternitas" comme le lien de parenté entre frères.
Par extension, la notion de fraternité désigne un lien entre les membres d'une même famille puis d'un ensemble d'humains.
 
La fraternité familiale comporte lorsqu'elle est culturellement valorisée, une dimension affective.
Son contraire renvoie aux notions de désunion, de discorde, d'isolement, d'individualisme, associées à des comportements allant de la simple ignorance à l'inimitié.
 
Dans la Bible, la première description de rapports entre deux frères nous est donnée dans le récit concernant Caïn et Abel. C’est le premier récit de meurtre.
 
2)      Un mythe est une construction imaginaire (récit, représentation, idées) qui se veut explicative de phénomènes cosmiques ou sociaux et surtout fondatrice d'une pratique sociale en fonction des valeurs fondamentales d'une communauté à la recherche de sa cohésion. Il est porté à l'origine par une tradition orale, qui propose une explication pour certains aspects fondamentaux du monde et de la société qui a forgé ou qui véhicule ces mythes :
 
Le terme mythe est souvent employé pour désigner une croyance manifestement erronée au premier abord, mais qui peut se rapporter à des éléments concrets exprimés de façon symbolique et partagée par un nombre significatif de personnes. Il met souvent en scène des êtres incarnant sous une forme symbolique des forces de la nature, des aspects de la condition humaine.
 
 
-          La Fraternité, précepte ou postulat indispensable ?
En effet qu’est la FM sinon une démarche de groupe vécue individuellement et en même temps une démarche individuelle vécue en groupe ?
-          La Fraternité nécessaire à cette démarche ?
-          La fraternité est-elle un choix ou une exigence ?
-          Fraternité synonyme de tolérance ou pas ? On aime son frère comme soi-même voire plus, bienveillant et empathique, altruiste que nous sommes, qu’en est-il en FM ?
-          Qu’est-ce que la Fraternité Maçonnique ?
-          Comment se manifeste telle en loge et au dehors ?
-          N’entrave telle pas la liberté de chacun ?
-          En Maçonnerie, pratiquons-nous réellement la fraternité et vivons-nous tous une réelle amitié ?
-          Qu’est-ce qu’un Frère ?
-          Qu’est-ce que la vraie fraternité dans le cadre de notre Maçonnerie ?
-          Connaissons-nous vraiment les Frères de notre Loge et comment les percevons-nous ?
-          Sommes-nous capables de les aimer et comment ?
-          Alors, commençons par cette première question : s’agit-il d’amitié ou de fraternité ?
-          Mais alors que le rituel nous rappelle qu’ici « tout est symbole », y aurait-il lieu de considérer la notion de « fraternité » comme un symbole dont il conviendrait d'essayer de mettre en lumière la partie cachée et peu évidente ?
 
 
Discussion :
 
Le progrès rend ce besoin de Fraternité très important, car de nos jours, la téléphonie mobile, le courrier électronique, la mobilité des images et des écrans ne créent pas de liens, ils rendent la solitude supportable et peuvent finir par enfermer chacun de nous dans sa solitude surinformée.
 
Prenons comme point de départ biblique, la réponse que Caïn donne à l’Eternel, lorsque celui-ci s’enquiert du sort d’Abel : « suis-je le gardien de mon frère ? »
La fraternité n’est pas quelque chose d’inné, mais plutôt le résultat d’un long processus où l’homme apprend à reconnaître et à dominer ses pulsions meurtrières pour aboutir à la révélation d’une fraternité plurielle.
 
Depuis la nuit des temps, les hommes ont rêvé d'une Fraternité universelle, essayant de faire passer leurs messages à travers les grands courants religieux, politiques, qui ont marqué l'histoire de l'humanité.
 
Depuis des siècles, le message fraternel trouve un écho dans le cœur de millions d'hommes: ceux qui aspirent à une existence plus éclairée par l'esprit, et à une quête personnelle ouverte sur autrui, et sur le monde, et dégagée du poids des systèmes.
Ceux  aussi qu'éprouvent le sentiment que leur recherche personnelle serait moins aléatoire si elle s'insérait dans une communauté fraternelle.
 
La Fraternité est une société initiatique, une société fraternelle ou une société de pensée; et parfois les trois à la fois….
La force d’une association réside essentiellement dans la cohésion de ses membres. Plus ils sont unis, et plus ils sont puissants. L’union n’est point l’effet d’une discipline imposée, elle ne peut naître que de l’affection que ressentent les initiés les uns pour les autres.
De cette rencontre d'hommes d'horizons politiques, professionnels et philosophiques différents naît un enrichissement.
Dans la loge, nous formons un groupe chaleureux qui se plaît à se retrouver autour d'idées communes en dépit de nos itinéraires contradictoires. Il y a du bonheur à ressusciter périodiquement cette communauté.
 
La Fraternité n’est pas une exclusivité à usage interne, elle doit rayonner et se répandre. Elle est le ciment de notre association ; sans elle nos mardis et mercredis se réduiraient à une réunion d’un club ou d’une amicale.
 
Nous nous appelons tous " Frère " entre nous, et il va de soi que cette expression traduit bien ce qui nous réunit tous dans une sorte de famille, unique, quelle que soit les autres associations auxquelles nous pouvons appartenir.
 
L'esprit de Fraternité est important, il est trop souvent battu en brèche dans notre société et doit occuper une place primordiale dans les rapports humains.
Notre fraternité commence par la mise en pratique commune d'un rituel ; c'est un acte de communication.
 
Le goût du libre débat, de la tolérance sans arrière-pensées, du respect de l'autre, nous porte à intervenir dans tous les champs de la réflexion.
La Fraternité, contrairement à la liberté et à l'égalité, vient directement du cœur et n'obéit pas à la raison pure. Nous voulons établir un équilibre harmonieux entre les activités du cerveau et celles du cœur.
 
Je considère que la solidarité entre les êtres humains est ce qui permet de mieux travailler et de trouver une solution aux divers problèmes individuels et collectifs qu'ils peuvent rencontrer.
La Fraternité, c'est la recherche de la valeur humaine partagée qui nous mène à une existence digne.
Le terme " Fraternité " implique d'abord que tous les hommes sont Frères et qu'à ce titre, ils ont droit à notre respect et notre aide.
Nous nous reconnaissons comme Frères. Je sais aussi que tous les hommes, quelle que soit la différence de leurs talents ou de leur position sociale, sont nés avec les mêmes droits et les mêmes devoirs.
Mais cette vérité est souvent méconnue dans la vie. J'estime par conséquent qu'il est de notre devoir d'entretenir et de fortifier, des sentiments de fraternité et d'égalité.
 
Il n'y a de Frère moins Frère qu'un autre. Nos relations sont dites fraternelles, car elles sont entretenues entre des personnes unies comme des Frères de sang ou de lait. Un lien naturel s'instaure ainsi entre nous : la Fraternité, que beaucoup souhaitent universelle.
 
 A Fraternité, je voudrais ajouter le mot " solidarité ". Cette valeur, la solidarité proche de cette Fraternité est beaucoup plus répandue car plus impersonnelle, indirecte, elle prend moins en compte les sentiments. Et deux autres encore, complémentaires : bienveillance et sincérité. Trois valeurs essentielles, car pour moi la Fraternité est au confluent de plusieurs principes, une résultante où doit primer l'amour sur la fermeté.
 
La Fraternité répond parfaitement à Saint-Exupéry :
" L'amour, ce n'est pas se regarder dans les yeux, c'est regarder ensemble dans la même direction ".
 
Ainsi la Fraternité, ce lien à inventer est à la fois un moyen de s'épanouir et un but.
La Fraternité résulte souvent d'une épreuve à surmonter qui peut-être aussi bien négative que positive.
 
Dans le sport, la Fraternité vient d'une volonté commune de parvenir à un même but : arriver à une satisfaction partagée en passant un bon moment. Ici, il s'agit d'une Fraternité causée par une épreuve sportive.
Au contraire, la Fraternité peut provenir de sources négatives comme les guerres.
 
La Fraternité ne vient jamais sans une cause antérieure ; cependant, certaines épreuves ont parfois la Fraternité pour pouvoir les surmonter.
 
La solidarité, née du lien fraternel qui nous unis, fait partie des quelques buts essentiels.
 
L'histoire nous montre qu'il s'est de tout temps trouvé des hommes qui consacrèrent la meilleure part de leur vie à secourir leurs frères infortunés, leurs veuves ou leurs orphelins.
 
Nous avons le devoir d'aider, d'éclairer, guider et protéger nos Frères et Sœurs, et de les défendre de toute injustice, même si ceci nous implique des sacrifices personnels.
 
La Fraternité trouve sa source dans le fait que chacun s'engage dans une voie commune de recherche. Chacun ainsi se trouve uni aux autres par l'expérience partagée et par le désir de tous de former une communauté.
 
Que sur cette base naissent et se développent des amitiés personnelles très fortes, que nous nous accordons à faire régner entre nous un climat de respect et d'affection réciproque, c'est évident. Mais notre Fraternité n'est pas le simple résultat d'un désir commun de relations amicales.
 
La Fraternité aide à découvrir et à développer sa personnalité, dans une ambiance de chaude amitié, de sincérité et de respect réciproque.
 
 Quel homme ne désirerait pas indépendamment de son activité professionnelle, de ses devoirs familiaux et de ses multiples autres obligations faire partie d'un cercle d'hommes qui éprouveraient pour lui des sentiments d'amitié. Et auprès desquels il pourrait compter sur de la compréhension, de l'appréciation et une estime envers sa personnalité. Et auxquels il pourrait également témoigner respect, sympathie et amitié.
 
Cette Fraternité est évidemment plus facile à mettre en œuvre avec les Frères pour lesquels nous ressentons un penchant affectif.
Cette Fraternité nous indique une voie, la voie d'amour. Etre capable d'aimer tous nos Frères du genre humain sans jugement.
 
Dans notre loge, nous nous retrouvons pour échanger nos idées, c'est le plaisir d'être ensemble et de rencontrer des personnes qui partage ma vision humaniste et fraternelle de la vie, de faire connaissance avec des hommes que je n'aurais pas connus et qui m'enrichissent de leurs expériences et connaissances.
 
La structure de notre loge est favorable à l’épanouissement du comportement fraternel. Mais cette affection ne peut être immédiate, il faut laisser le temps d’agir pour que les liens s’établissent.
 
Les liens ainsi créés vont nous rapprocher les uns des autres. Nous ne serons plus étrangers car nous aurons pris le temps de nous connaître. Mais cela ne suffit pas pour faire de nous des sœurs et des frères. Il faut faire preuve d’humilité, car les différences apparaissent et il faut bien les accepter pour aller de l’avant dans l’échange de relations fraternelles. Les accepter sans les juger, car les jugements prennent souvent un caractère définitif, et toutes choses définitives créent des limites qui ont pour but de réduire la liberté de chacun.
 
Un moment important, lorsque nous nous retrouvons autour de notre buffet, où la simplicité et la sympathie sont essentielles, où nous pratiquons l’échange, la confrontation de nos idées, la discussion autour des différences. Autant de raisons qui confèrent à ce moment toute l’importance et lui donnent une place de choix dans la vie de notre loge.
 
La vie moderne, par ses tensions et ses difficultés journalières nous font privilégier le temporel, le réel immédiat, le confort matériel, alors que l'intemporel du spirituel tels l'amour, la solidarité, l'altruisme, est notre vrai nature.
 
Comment ne pas aimer, au moins un peu, celui qui nous ressemble, celui qui vit comme nous, qui souffre comme nous ?
Comment ne pas lui rendre un témoignage solidaire au nom de cette humanité que nous partageons ?
Au-delà de nos convictions respectives, nous sommes tous Frères devant la vie, même opposés.
 
La Fraternité met en lumière la cause commune et génère la solidarité.
Elle témoigne d'une certaine manière d'être au monde qui porte à l'effort de compréhension, à la bienveillance et à la bienfaisance, au nom d'une humanité commune
Et d'une vie commune.
 
 Le mot « Frère » est un mot qui doit se mériter. En mon Frère, je dois pouvoir avoir réellement confiance, sans aucune restriction, comme lui-même doit lui aussi pouvoir croire en la valeur de ce mot, tant dans les domaines de la conduite morale que financière. Un Frère se doit de veiller à ce que sa conduite ne puisse nuire à l'harmonie de la loge et ainsi devient-il un véritable Frère comme je l’entends.
Notre charte parle de l'amour fraternel, oubliant que le mot " amour " implique la confiance, ce pilier de l'amour.
 
Il existe des liens positifs entre les individus, comme la Fraternité qui est le fait d'aider les gens en partageant des situations, des sentiments avec eux.
Les aides apportées seront spirituelles et spontanées. La Fraternité est-elle réellement présente en fait, ou n'est-ce qu'une utopie ?
 
La vraie solidarité signifie une implication véritable et personnelle, un don réel de soi et de ce que l'on est, par la reconnaissance de l'autre en son " humanitude ".
Pour certains la solidarité est carrément une éthique, un idéal humain, une manière de construction idéale de l'humanité. Utopie dans un monde par nature inégalitaire.
Certains ont souligné comment l'utopie a souvent précédé les réalisations.
 
" L'utopie c'est la vérité de demain ". 
(Victor Hugo)
 
La bienfaisance est un devoir essentiel. L'aide et le besoin qui la provoque ne sont d'ailleurs pas forcément de nature matérielle.
La bienfaisance, élève l'homme, mais dans le secret des cœurs. Elle n'humilie pas l'autre, mais le rend parfois meilleur, comme Jean Valjean secouru par l'abbé Myriel.
 
La solidarité s'appuie sur la générosité, la Fraternité c'est ouvrir son cœur à l'autre, mais aussi tout se dire sans pudeur. La Fraternité c'est la confiance.
 
Seul un homme fort de sa liberté de penser est capable d'écouter l'autre, et de le comprendre.
Et, l'ayant compris, sans forcément avoir admis tous ses arguments, il sera capable de l'aimer. Pour autant que l'on donne au mot  " aimer " la signification de " se mettre à la place de l'autre ".
 
La Fraternité implique la capacité à se mettre réellement à la place de l'autre, et non simplement à côté, par sympathie ou complaisance.
 
La Fraternité est une qualité majeure. C'est la capacité d'aimer l'autre, de prendre soin de lui, souhaiter qu'il se libère de tout ce qui le rend malheureux, l'aider à voir par lui-même les causes de ses problèmes, de ses difficultés et de ses frustrations.
 
Il faut parfois abandonner nos convictions pour nous mettre à l’écoute de l’autre, il faut accepter que notre frère ne soit pas ce que nous aurions souhaité qu’il soit, il faut renoncer à notre propre idéal de la fraternité pour reconnaître qu’il en existe d’autres, différents, mais ayant tout autant leurs raisons d’être.
 
Cette disponibilité soudaine vis-à-vis de personnes venues d’ailleurs et que nous avons acceptées comme frères est génératrice de sentiments de bien-être. Ces sentiments sont sécurisants et nous font réaliser que tous les hommes, quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent sont nos frères.
 
Manifester ses sentiments fraternels, c'est chercher un partage sans aucun calcul. C'est un sentiment noble, généreux, mais également risqué. Car nous n'en sommes pas moins des hommes, (au sens « humains ») avec nos qualités mais aussi nos défauts. Prendre le risque de la déconvenue et l'accepter lorsqu'elle se présente est sans doute une épreuve douloureuse qui retrempe le caractère.
 
Notre loge sera ce que nous en ferons, chacun est responsable de ce qu’elle deviendra par sa propre participation positive ou négative. Agir pour l’intérêt de tous, travailler individuellement pour tenter de créer un idéal. Il faut apporter pour recevoir, continuellement se remettre en question pour conserver le caractère de notre démarche, rester humble, agir sans passion, ne pas démolir, mais transformer et construire, ne pas mal juger, mais aimer, agir pour le bien de tous.
 
Sommes-nous capables de cet amour, don de soi ?
Nous sommes peut-être capables de le conceptualiser, mais sommes-nous capables de le réaliser ?
L'amour c'est éliminer tout calcul, toute préoccupation, tout pesage du pour et du contre.
 
Le don de soi c'est un signe de réelle Fraternité : don de soi aux autres, à tous les autres, et à tous les instants.
La Fraternité cela se vit, c'est de l'affection, de la solidarité.
 
On pourrait dire que la fraternité naît de l’amour des autres et exprime un désir d’union réalisé par l’intelligence du cœur. Sa qualité d’action est fonction du niveau de conscience des membres mais aussi de l’attitude personnelle de chacun. D’une manière générale, son principe formateur est la reconnaissance acceptée et sans jugement de la diversité comme valeur d’union. Le deuxième principe est que chaque membre doit vivre sa vérité sans faux fuyant et exprimer son sentiment d’union par une attitude évolutive dans le sens du Vrai. Cela présuppose une attention de tous les instants et une rigueur personnelle qui demande beaucoup de courage et d’abnégation.
 
Cette Fraternité est le lien profond qui nous lie aux autres hommes.
Pouvons-nous supposer avancer sur le chemin de l'universalité si nous ne savons pas rendre réel notre idéal au sein même de notre association ?
La Fraternité n'est jamais acquise ; elle est toujours à construire, elle exige donc des efforts constants de chacun en direction de l'autre.
 
" C'est parce que les hommes sont inégaux, qu'ils ont d'autant besoin d'être frères ".
(Charles Du Bos)
 
Lorsque tous les hommes mangeront à leur faim, qu'il n'y aura plus d'exclus et de ghettos, quand l'air et les eaux ne seront plus pollués et qu'une poignée de multinationales ne tiendra plus sous le joug de ses lois iniques le reste de l'humanité, alors…il n'y aura plus beaucoup à faire pour que les hommes deviennent des frères.
 
L’idée de fraternité ne disparaitra jamais pour trois raisons : d’abord parce qu’elle est en soi une aspiration profonde de chacun vers cet autre qui peut être, tout autant, le semblable que le différent, l’inconnu que le familier, le proche que le lointain ; ensuite, parce qu’elle est le lien qui relie ce que la vie tente de séparer et, enfin, parce que ce qui fonde la fraternité n’est, ni plus, ni moins, ce que l’on partage : la famille, les souvenirs, le passé, les engagements. Nous savons tous qu’un peuple disparaît lorsqu’il n’a plus de mémoire, qu’un être meurt quand il n’a plus de souvenir. Davantage que sur un avenir possible, la fraternité s’établit, se construit, s’érige sur un passé commun. C’est la traversée du temps qui noue les liens et les renforce. Cette fraternité-là existera quoiqu’il arrive dans le temps et hors du temps.
 
Plus le temps passe et plus je me rends compte que le respect, la Fraternité, l'attention et la confiance entre nous sont très importantes et primordiales pour nous.
 
« La force d'une association réside essentiellement dans la cohésion de ses membres. Plus ils sont unis, et plus ils sont puissants. En maçonnerie, l'union n'est point l'effet d'une discipline imposée, elle ne peut naître que de l'affection que ressentent les initiés les uns pour les autres. Il est de la plus haute importance de contribuer par tous les moyens à resserrer les liens qui unissent les Maçons ».
                                                                                                          Oswald WIRTH
 
La fraternité implique les notions de tolérance, d'affection, et aussi dans une certaine mesure de charité, d'indulgence, de fidélité et de communion.
De manière concrète elle se manifeste par une attention profonde d'un frère à l'égard de son semblable. Une écoute respectueuse de propos que l'on ne partage pas forcément, une aptitude à prononcer une parole réconfortante, à agir avec un élan d'affection au moment opportun. Savoir proposer sans vouloir imposer, savoir être présent sans jamais être pesant.
La structure de la loge maçonnique est favorable à l'épanouissement du comportement fraternel. Les bons sentiments d'un jeune initié vis à vis de ses frères se transformeront vite, s'il entend bien l'art, en véritable sentiment fraternel. Mais cette affection ne peut être immédiate, il faut laisser le temps agir pour que les liens s'établissent.
 
Les liens ainsi créés vont nous rapprocher les uns des autres. Nous ne serons plus des étrangers car nous aurons pris le temps de nous connaître. Mais cela ne suffit pas pour faire de nous des frères. Il nous faudra faire preuve d'humilité, car les différences apparaîtront et il faudra bien les accepter pour aller de l'avant dans l'échange de relations fraternelles. Les accepter sans les juger, car les jugements prennent souvent un caractère définitif, et toutes choses « définitives » créent des limites qui ont pour effet de réduire la liberté de chacun.
Il faut parfois abandonner nos convictions pour nous mettre entièrement à l'écoute de l'autre, il faut accepter que notre frère ne soit pas ce que nous aurions souhaité qu'il soit, il faut renoncer à notre propre idéal de la fraternité pour reconnaître qu'il en existe d'autres, différents, mais ayant tout autant leurs raisons d'être.
 
Les Stoïciens de l'antiquité l'avaient bien compris. En condamnant l'esclavage, ils reconnurent la communauté d'origine des hommes et leur participation à l'universelle raison. Les Chrétiens, en associant fraternité et charité, ont développé le coté sentimental de la fraternité. Plus sélective et élitaire : la chevalerie moyenâgeuse, avec la « Fraternité d'armes », a mis en exergue les liens tissés par ceux qui ont lutté pour la même cause.
 
Il s'agissait d'un engagement à se défendre l'un l'autre envers et contre tout, à se garder une foi inviolable et à tout faire pour mériter cette foi.
 
Ce dernier exemple est frappant car il fait état d'une fraternité absolue et sans limites. Cette fraternité-là serait-elle un mythe ?
 
En Maçonnerie, nous avons l'habitude de donner une mesure à toutes choses et à refuser les dogmes. La fraternité Maçonnique est bien une réalité mais elle a, comme toute manifestation, ses propres limites.
Ces limites, nous les fixons nous-mêmes, elles dépendent de la sincérité de notre engagement. La maçonnerie propose et l'homme dispose : libre à chacun de progresser, libre à chacun d'accepter ou de refuser les richesses qui lui sont offertes, libre à chacun de collaborer à l'accroissement du patrimoine commun et de son propre patrimoine.
 
La loge sera ce que nous en ferons, chacun est responsable de ce qu'elle deviendra par sa propre participation positive ou négative. Agir pour l'intérêt de tous, travailler individuellement pour tenter de créer un idéal de vie. Il faut apporter pour recevoir, continuellement se remettre en question pour conserver le caractère initiatique de notre démarche, se souvenir que notre fierté est de créer l'unité dans la diversité et pour ce faire, utiliser le langage du cœur, persévérer dans notre démarche et ne pas oublier que nous avons des outils pour nous aider à rechercher la vérité. Le rayonnement de la loge dépendra de notre volonté de persévérer dans la recherche de la connaissance, afin d'être présent sur la scène de l'action. Rester humble, agir sans passion, ne pas démolir, mais transformer et construire, ne pas mal juger, mais aimer, agir pour le bien de tous. Nous hériterons de la loge que nous construirons, nous hériterons du monde que nous construirons...
 
Pour agir dans cet esprit, la fraternité doit demeurer notre acte de foi afin de donner un sens à notre démarche. De la participation active de chacun des Frères dépend l'importance de la notion de réalité qui caractérise les relations fraternelles établies au sein de l'atelier.
 
La Fraternité ne serait-elle pas une source d’harmonie ?
 
 
La fraternité maçonnique, réalité ou utopie ?
 
Pour pouvoir mettre les lois de la fraternité en pratique, c’est-à-dire arriver à nous aimer vraiment les uns les autres et à nous venir en aide mutuellement, ne devrions-nous pas commencer par apprendre à nous connaître nous-mêmes mais aussi et surtout à mieux connaître nos Frères ?
 
La fraternité maçonnique est-elle réelle, ou alors elle n’est qu’une façade ou si elle n’est qu’une utopie ?
Les Constitutions d’Anderson de stipuler :
« Ainsi, la Maçonnerie devient le Centre d'Union et le moyen de concilier une véritable amitié parmi des personnes qui auraient dû rester perpétuellement éloignées ».
 
« La Franc-maçonnerie est une association initiatique qui, par son enseignement symbolique, élève l’homme spirituellement et moralement, et contribue ainsi au perfectionnement de l’humanité par la pratique d’un idéal de paix, d’amour et de fraternité ».
 
 
Amitié ou fraternité ?
Il n’est pas facile de délimiter une frontière entre le copinage, l’amitié et la fraternité, de même qu’entre entraide, secours mutuel, bienfaisance et affairisme.
 
La Franc-maçonnerie, ordre initiatique et traditionnel fondé sur la fraternité, nous invite à un engagement. Cette fraternité des Maçons n’a pas de base objective. Les Francs-maçons n’ont pas, la plupart du temps, les mêmes idées en matière de religion ou de politique. Mais ce qui devrait nous unir, au premier chef, en fraternité, c’est la recherche d’un idéal commun, de beauté, d’amélioration de l’homme par la sagesse, le dépassement de l’individu par lui-même par la force qui le soutient dans sa progression : la recherche de la Lumière.
 
Au sein de notre Ordre, nous avons coutume de lire ou d'écrire le vocable « frère » avec une majuscule. Le terme prend alors un sens que je vais essayer de préciser à présent en proposant une réponse aux deux questions essentielles suivantes :
« Qu'est-ce qu'un Frère ? »
« Qu’est-ce que la fraternité au sens maçonnique ? ».
 
Pour moi, un Frère, c’est un Profane qui, comme moi, a eu un jour la chance d’être choisi puis parrainé, un être qui a reçu l’Initiation et qui, reconnu par nous tous, a accepté d’être placé au début d’un cheminement spirituel qui lui sera propre, dans la quête de la Lumière, en travaillant sur lui-même d’abord pour tenter de se connaître et de s’améliorer au contact de ceux qui ont, apparemment, choisi le même idéal.
 
Pour les Francs-maçons en général, la fraternité désigne surtout le lien privilégié qui unit les Maçons et les oblige particulièrement.
 
Cette fraternité des Francs-maçons procède d’abord d’un choix libre, celui qui pousse le Profane à entrer en Maçonnerie. Par la suite, l’Initiation en fera un des buts essentiels qu’il poursuivra dans sa quête. Mais si la fraternité est la base de la Franc-maçonnerie, celle-ci ne crée pas de manière spontanée la fraternité, pas plus que la fraternité ne se décrète. Le Franc-maçon chemine vers la fraternité et ne peut y parvenir que par le Travail.
 
Cette fraternité, le Maçon la rencontre à trois niveaux :
 
dans les origines de la Maçonnerie ;
dans son symbolisme, c’est-à-dire ce qui rassemble les Maçons et tout particulièrement celui du rituel et de l’architecture du Temple où se réunit la Loge, avec son Pavé mosaïque, les lacs d’amour de la corde qui orne ses murs, avec la Chaîne d’union que pratiquent ses membres ;
et enfin dans l’action du Maçon en dehors de la Loge.
 
Il me faut donc approfondir la réflexion sur ce concept. C’est pourquoi, j’envisagerai à présent la fraternité comme source initiatique.
 
La fraternité, source initiatique
 
Nous percevons facilement le Temple maçonnique - la Loge - comme un havre de paix au milieu d’un monde de conflits et de rivalités parce que la fraternité y a le pouvoir d’effacer tous les clivages sociaux, religieux, politiques et culturels. Mais une analyse plus poussée montre que la fraternité est l’élément fondamental du Maître, et qu’au-delà d’une fraternité associative, une fraternité initiatique permet d’entrevoir comme possible notre propre réalisation.
 
Cette fraternité initiatique, qui se reconnaît extérieurement à la capacité de se réjouir du bonheur de l’autre, de son épanouissement et de sa progression vers l’accomplissement de sa plénitude, est la condition nécessaire à notre propre développement dans la voie spirituelle de la Maçonnerie.
 
Le terme initiatique indique un mouvement, une dynamique, le début d’un nouveau mode d’appréciation des valeurs habituelles, un regard différent sur tout ce qui nous entoure, mais plus encore, une ouverture qui devrait permettre une réelle transformation progressive.
 
La fraternité initiatique est interactive : la construction de soi passe par la construction de l’autre. Elle est l’un des facteurs de la quête initiatique qui est désir de passer d’une vie subie à une vie choisie.
 
Cependant la grandeur du Maître ne se réalise seulement que lorsqu'il commence lui-même à se voir tel qu’il est et qu’il comprend ce qu’il est capable de faire en fonction de ce qu’il est.
 
La fraternité trouve sa source dans le fait que chacun, par l'Initiation qu'il a reçue, s'engage dans une voie commune de recherche et de progrès spirituel. Chacun se trouve uni aux autres Maçons par l'expérience partagée d'un symbolisme vécu et éprouvé, par le désir de tous de former une communauté initiatique. En recevant le nom de « Frère », l'Apprenti devient un maillon de la chaîne ininterrompue reliant tous les Initiés, ceux d'hier, ceux d'aujourd'hui et ceux de demain.
 
Par des voies souvent très différentes, les Francs-maçons vont vers la Lumière : mais c'est leur souci commun. Il paraît évident que sur cette base naissent et se développent des amitiés personnelles très fortes, que les Maçons s'accordent à faire régner entre eux un climat de respect et d'affection réciproques.
 
L’entraide que se portent spontanément les Francs-maçons se fonde sur l’estime réciproque et l’attachement à un idéal partagé : l’aide morale, affective ou matérielle que tout Franc-maçon dans l’épreuve reçoit de ses Frères est l’esquisse de la solidarité humaine pour laquelle la Franc-maçonnerie s’efforce d’œuvrer.
 
La pratique de la solidarité maçonnique doit toujours se fonder sur le respect systématique de l’équité la plus stricte : elle ne saurait se manifester au détriment de tierces personnes.
La recherche de privilèges indus ou de faveurs injustifiées est en totale opposition avec la conception maçonnique de la solidarité.
 
Pierre angulaire de l’éthique maçonnique, la fraternité permet à ses membres de triompher de l’égoïsme et de se sentir reliés par elle. La fraternité initiatique relie des êtres de toute race ou religion qui ne sont ni du même sang, ni de même condition sociale, témoignant d’un sens de l’unité, mais aussi des liens sacrés de la famille étendus au sens large et à toute l’humanité, liens remontant au premier homme à la recherche de son identité.
 
Mais la caractéristique essentielle de la fraternité maçonnique, c’est qu'elle est issue de l'Initiation : elle en est une conséquence.
 
La fraternité maçonnique, c'est bien plus que le fait d'être gentil avec tout le monde et en particulier avec ses Frères et/ou ses Sœurs, sous prétexte de ne pas leur faire de peine ; c'est bien plus que de les caresser dans le sens du poil afin de ne surtout pas interrompre le doux ronronnement qui n'est pas toujours absent de nos Loges ! C’est tout autre chose que de trinquer devant un bar.
 
La fraternité est-elle un symbole, un mythe, une utopie ou une réalité ?
Les Maçons, de quelque Obédience qu’ils se revendiquent, se reconnaissent comme Frères mais la fraternité est-elle un mythe ou une réalité ? La frontière où se définit véritablement la fraternité est si difficile à délimiter !
 
Si la fraternité et la solidarité sont logiquement inséparables, la réalité n’est-elle pas vécue différemment ?
 
La fraternité implique un état d’esprit d’ouverture et un comportement de bienveillance envers l’autre. Comment avoir le souci de l’autre quand on est perpétuellement dans le souci de soi ? Lorsqu'on évoque une fraternité en actes, on parle d’élans de compassion. Et la compassion – étymologiquement – c’est « souffrir avec ». Si la fraternité suppose la solidarité entre tous et suggère l’amour de l’autre, elle ne peut devenir réalité que si l’Initié passe par une révolution intime et personnelle qui demande de lutter contre l’individualisme naturel.
 
La fraternité initiatique repose sur le fait d’aimer son prochain comme soi-même, ce qui demande à l’Initié de s’être réconcilié au préalable avec lui-même, pour entreprendre une démarche volontaire, altruiste, fondée sur l’amour et la notion que tous les êtres sont issus d’une même origine, d’un Principe qui est leur source et leur force.
 
Si l'Initiation est une voie qui doit nous permettre de nous transmuter, lorsque nous prenons conscience intérieurement de cette unité profonde du réel, nous savons alors que nous sommes reliés essentiellement à tout ce qui est.
 
Dès lors, comment ne pas voir se modifier de l'intérieur, petit à petit et à la mesure de l'intériorisation de cette prise de conscience, notre manière d'être au monde et, partant, nos relations avec autrui, comme avec tout ce qui est ?
 
L'extérieur en devient non plus « l'autre », l'ennemi potentiel, mais une modalité de ce qui est, une part du Tout dont nous sommes aussi parties. Alors, une fraternité profonde, ce que les bouddhistes appellent « compassion », marquera de plus en plus toute notre vie de son sceau. Ce ne sera plus un code comportemental exotérique qui guidera nos actions, mais ce seront nos actions qui deviendront l'expression d'une conscience, d'une intériorité. Nous serons en marche, véritablement, dans une voie ésotérique.
 
Mais quelles sont aujourd'hui les notions que ce vocable sous-tend dans la Franc-maçonnerie régulière et quel poids lui accorde-t-on ?
 
La fraternité maçonnique n'est pas une manifestation innée, comme pourrait l’être la fratrie engendrée par un lien familial. Elle reflète d'abord l'acceptation et le respect d'une règle qui est la traduction et l'expression d'un lien irréfragable reliant les membres de cet Ordre. Mais c'est aussi un des fondements et un précepte de comportement requis au sein de la Maçonnerie de tradition, où les membres reçoivent l'appellation de « Frère » et sont reçus et reconnus comme tel ».
 
Le contexte maçonnique est un des rares lieux où un homme peut manifester à un autre homme, sans le connaître et sans l'avoir vu, l'expression d'un sentiment fraternel, uniquement, pour ce qu'il est, c'est-à-dire un Franc-maçon.
 
C'est après avoir pris un engagement solennel, librement accepté, que le nouveau Maçon découvre immédiatement sa nouvelle « communauté ». Sa surprise est grande car cela se passe sans transition. Il était à l'extérieur et le voici à présent à l'intérieur parmi des hommes encore inconnus, mais qui lui manifestent spontanément une grande chaleur fraternelle.
 
C'est probablement ce premier choc émotionnel qui réveille en lui ses qualités de cœur. Il lui fait prendre conscience de la dimension de cette fraternité et lui fait pleinement ressentir, dès ces premiers moments, la notion d'appartenance et les liens qui l'unissent à l'Ordre. Ce puissant lien fraternel qui les unit fait aussi partie des mystères de cette initiation commune à tous les Francs-maçons.
 
La raison de cet accueil chaleureux paraît simple : lorsqu'il est admis, l'impétrant est accueilli comme étant un gage d'espoir de voir s'accroître l'Ordre d'une nouvelle unité.
 
Dans un élan commun de fraternité, cette nouvelle unité s'intègre en symbiose dans le groupe. Idéalement, tous regardent dans une même direction, avec une même raison d'être et une même finalité. J’ai bien dit « idéalement » …
 
Par ailleurs, le désir que le nouveau Frère exprime de se montrer digne d'un tel accueil génère en lui une synergie, dont le travail en Loge et la confrontation de tous les instants, renforcent les liens de fraternité qui se construisent.
 
Dans la vie profane il nous arrive de retrouver des manifestations d'une aussi grande intensité mais elles sont en général le concours d'événements et de circonstances non maîtrisées s'appuyant sur l'affectif.
 
Ces manifestations relèvent d'actes guidés par de nobles sentiments, tels que l'amitié ou la passion, voire l'amour au sens général du terme, que l'on peut avoir, par exemple, pour le peuple, ou pour une culture. Ensuite elles ont parfois un impact sur la notion de devoir et d'éthique envers autrui.
 
La Fraternité maçonnique, cependant, relève d'un processus inverse. En effet, elle est d'abord la manifestation d'un acte délibéré. Etre fraternel est une démarche volontaire. C'est d'abord
 
un principe qui est respecté et qui se transforme progressivement en une seconde nature où la notion de devoir s'estompe pour ensuite laisser place spontanément à des qualités de cœur qui feront naître un peu plus tard des liens affectifs très forts.
 
C'est à chaque fois une joie et une révélation de cette fraternité de « reconnaître » un Frère rencontré fortuitement, pour la première fois, dans un environnement inhabituel, et souvent loin de notre contexte familial ou maçonnique.
 
Si la fraternité est le principal liant de la Franc-maçonnerie, elle est également l’élément moteur qui guide notre comportement, que ce soit dans notre contexte associatif ou dans notre vie de tous les jours.
 
Examinons à présent comment la fraternité devrait idéalement se manifester.
 
Les manifestations de la fraternité
 
-          Par quoi se traduit la fraternité maçonnique ?
La fraternité maçonnique se traduit tout d'abord par la joie de se rencontrer, mais aussi par l'expression des qualités de cœur, c'est-à-dire le fait d'être bienveillant et à l'écoute des autres, et bien entendu, mais cela est implicite, c'est l'assistance fraternelle de toute nature.
 
-          Qu'est-ce qui caractérise son universalisme ?
C'est l'expression de notre savoir être qui, rejetant les préjugés et l'intolérance, s'exprime par une reconnaissance et un accueil des autres, en faisant abstraction de leurs spécificités spirituelles, culturelles et sociales, car, en fait, ce qui est important, c'est que tout simplement il soit un Frère.
 
-          La fraternité a-t-elle des limites ?
En s'appuyant sur nos Travaux effectués en l'honneur et à la Gloire du Grand Architecte de l'Univers, les limites externes de notre fraternité initiatique sont appelées à s'étendre à une grande fraternité d'hommes libres, car, par l'expression des qualités de cœur qu'elle dégage, elle est à la fois le ciment qui structure l'édifice maçonnique et un des éléments constituant les fondations sur lesquelles l'Ordre repose.
 
-          Quand la fraternité se manifeste-t-elle dans la Loge ?
C’est dans la Chaîne d’union que les Maçons s’unissent en fraternité. La Chaîne d’union est l'une des plus belles manifestations de la fraternité maçonnique, au cours de laquelle les Francs-maçons réunissent leurs énergies et ce qu'il y a de meilleur en eux.
 
Ce symbole ne concerne pas que l'aspect humain : par lui, en effet, les Frères se mettent aussi en liaison avec les Frères passés à l'Orient éternel. Cette réunion d'Initiés évoque l'union de tous les Initiés à la surface de la terre. La Chaîne d'union m'apparaît comme un des temps les plus forts du rituel car elle permet la transmission du mystère de la fraternité au-delà des grades et des individus.
 
On ne peut pas décrire la Chaîne d’union : c’est un instant qu’il faut vivre. Les Maçons n’entrent dans la Chaîne d’union qu’en fraternité. Et chaque fois qu’elle est bien formée (c’est-à-dire nos bras croisés sauf ceux du Vénérable et de lui seul), la Chaîne d’union régénère la fraternité de sa puissance créatrice, génie inéluctable de la Franc-maçonnerie.
 
La Chaîne d’union, c’est aussi le moment privilégié où les mains des Maçons qui se joignent font apparaître tous les Maçons épars sur le globe mais aussi ceux qui sont passés à l’Orient éternel, comme ceux qu’il plaira au Grand Architecte d’amener à frapper à la porte du Temple. Dans la Chaîne d’union, ce sont tous les Maçons de tous les temps et de tous les lieux qui s’unissent en fraternité.
 
-          Où la fraternité se manifeste-t-elle encore avant que nous ne quittions la Loge ?
Pour beaucoup de Loges, les agapes fraternelles se réduisent un peu trop souvent à un dîner qui suit la Tenue et où l'on se comporte davantage en profane qu'en Frère. Pourtant la signification même du terme « agape » devrait faire réfléchir tout Franc-maçon. L'agape, c'est l'amour du sacré. Célébrer des agapes revient à vivre un banquet fraternel. Les agapes fraternelles ne sont pas un appendice de la Tenue mais son couronnement ! Peu importe le menu ou la nature du plat du jour !
 
Pourquoi mettre en pratique les lois de la fraternité et comment la Franc-maçonnerie peut-elle faciliter la construction de la personnalité de l'Homme capable de relever les défis à l'aube du 3ème millénaire ?
Tenter de répondre à cette question, c’est se pencher sur les buts de la fraternité. Tel sera le dernier chapitre de cette planche.
 
Les buts de la fraternité :
 
Société initiatique des temps modernes, la Franc-maçonnerie est par essence philosophique, philanthropique et progressive. Cette association s'est érigée en Ordre initiatique, c'est-à-dire en système ordonné ayant ses propres lois et règlements rigoureux, ses valeurs fondamentales au premier rang desquelles la liberté de conscience, la tolérance réciproque, l'égalité, la fraternité. A ces valeurs, l'Ordre adjoint sa méthode de travail, le symbolisme.
 
L'Ordre maçonnique, institution vivante qui tend symboliquement à représenter une image du monde, offre à ses membres, nous Maçons, un espace sacré : la Loge. Il met aussi à notre disposition des outils : l'Initiation, le symbolisme, le rite et ses rituels.
 
Cet espace et ces outils nous permettent de réaliser un désir en le transformant en projet : celui de passer, par degrés, de la condition d'Homme de la nature à celle d'Homme de l'esprit.
 
En parcourant ce chemin, nous, Francs-maçons, apprenons d'abord à nous connaître, ensuite à nous maîtriser et à nous dépasser. Chemin faisant, nous constaterons, que nous ne nous résumons pas à des individus séparés, réduits à nous-mêmes, mais que nous sommes reliés aux autres.
 
Dès les premiers pas sur la voie initiatique, l'Apprenti découvre la fraternité, cette relation dont il n'imaginait pas qu'elle existait vraiment sur la terre. Fraternité avec les symboles qui expriment le mystère de la vie ; fraternité avec d'autres êtres, montrant qu'il est possible de sortir du modèle conventionnel de rapports humains fondés sur la compétition ; fraternité avec les forces de l'univers.
 
L'apprentissage est notamment le grade de la découverte de la fraternité en esprit et de son corollaire, l'amour fraternel, véritable ciment de la Loge. Cet esprit dépasse celui des Frères présents physiquement : il inclut celui de tous les initiés qui les ont précédés et qui les suivront sur le chemin.
 
Cette découverte de la fraternité initiatique est source d'une joie difficilement exprimable et elle éveille une énergie insoupçonnée.  L'Apprenti apprend à servir non un individu ni une organisation, mais un esprit, un ordre qui sont incarnés dans la Loge et qui se rattachent et le relient à une tradition immémoriale.
 
Pour l'Apprenti, écouter revient à diriger son attention vers l'œuvre accomplie par l'ensemble des Frères. Cette communion conduit à la perception du feu créateur et de l'amour fraternel.
 
C'est donc ainsi que naît la fraternité maçonnique, mes Frères, rassemblant ce qui est épars, mettant en état de se comprendre et d'aimer des êtres qui, sans cela, demeureraient des étrangers. Le sentiment fraternel que ressent le Franc-maçon lui permet de vivre solidairement avec tout homme de foi et de l'aimer par-delà les divergences formelles.
 
La relation affective rejoint la relation intellectuelle à travers les confrontations, les élans généreux ou sévères, l'accompagnement et les réconforts soutenus. C'est une des vertus du travail commun en Loge. Antoine de Saint-Exupéry ne disait-il pas : « si tu veux que les hommes soient frères, fais les travailler ensemble ! » ?
 
L'Ordre maçonnique rassemble donc des hommes et, dans certaines Obédiences, des femmes, qui possèdent le sentiment d'une fraternité et donc de son corollaire, la solidarité. Solidarité et fraternité s'expriment tant au plan matériel qu'affectif et spirituel.
 
Il semble dès lors que la mission de la Franc-maçonnerie c'est de donner aux hommes le sens de l'humain, c'est-à-dire de la probité, de la liberté, de la droiture, de l'équité, de la créativité et de la fraternité universelle. Elle nous invite à nous rendre capables d'être utiles à l'espèce humaine.
 
Est-ce à dire que la Franc-maçonnerie est une grande école de la fraternité des nations ? Non. Notre ordre n'est ni une université, ni une école. Notre Ordre met uniquement à la disposition de ses membres la méthode initiatique associée à un système de valeurs humanistes.
 
C'est aux Maçons de s'en servir au mieux afin de se perfectionner et de s'intégrer dans la Chaîne d'union de l'espèce humaine.
 
Par contre, la Franc-maçonnerie pourrait être le centre par excellence de l'apprentissage de la fraternité, permettant à l'individu de se construire tout en reconnaissant l'Autre.
 
Elle donne à l'éternel Apprenti qu'est le Franc-maçon la clé lui ouvrant la voie de la fraternité tant vis-à-vis de ses Frères et Sœurs que de la communauté des hommes et des femmes peuplant notre planète. Ainsi, la Franc-maçonnerie pourrait être l'institution d'apprentissage de la fraternité entre les peuples.
 
Mais comme chaque Frère est différent et que chacun a sa propre personnalité, quelquefois forte, il est confronté, dès le départ, au problème des affinités. Or un Frère, quel qu'il soit, est un être unique et indispensable à la construction de l'unité que représente la Loge.
 
L'Apprenti apprend à découvrir les complémentarités et, bien au-delà des affinités avec tel ou tel, une dimension exceptionnelle : celle de la fraternité. La fraternité est d’abord espérance et amour. Elle est aussi générosité et beauté, tolérance et joie.
 
Il n’y a pas de fraternité sans liberté, sans choix libre, comme le choix libre de devenir Maçon. Mais au tréfonds de son cœur, l’homme est toujours libre. L’homme est libre d’aller en fraternité vers les autres hommes pour tourner ensemble leur regard vers la Lumière. Et l’homme sait bien que la liberté ne se conçoit pas sans sagesse, car c’est en respectant celle des autres, c’est-à-dire en admettant leur différence, qu’il édifie sa propre liberté, et que sans liberté il n’y a pas de paix possible entre les hommes.
 
Il n’y a pas non plus de fraternité sans égalité car comment se dire « frères », comment être vraiment le frère d’un autre être si nous le jugeons inégal à nous-mêmes, c’est-à-dire, en fait, inférieur à nous ? L’égalité donne à la chaîne des hommes sa force harmonieuse et invincible ; elle y fait naître la joie.
 
Enfin, il n’y a pas de fraternité sans générosité. Mais qu’avons-nous de plus précieux à offrir que notre temps, que le Temps créateur de toute chose et de tout être, Temps universel, tout puissant, omniprésent et pourtant invisible ?
 
Alors, tout compte fait, la fraternité est-elle une réalité dans nos Loges ? N’est-elle pour certains qu’une utopie ? Au risque de décevoir certains d’entre vous, la réponse ne peut être exprimée de façon généralisée. La vérité réside dans le cœur et la conscience de chaque Frère. C’est sans doute cela aussi le secret maçonnique !
 
La fraternité n'est pas innée, elle fait partie du chemin initiatique.
 
J’ai dit !
 
 
-          « La Fraternité a pour but de diminuer les inégalités tout en préservant ce qui est précieux dans la différence »
Albert JACQUARD
 
-          « La Fraternité est difficile : elle demande du courage, de la volonté et de l’intelligence aussi »
Henri TORT NOUGUES, Ancien Grand Maître de la GLDF
 
-           « Celui qui dit être dans la lumière et qui a son frère en haine est dans les ténèbres.
Celui qui aime son frère est dans la lumière ».
Saint Jean
 
-          « Le combat pour la vérité et la justice, pour la fraternité des hommes, est le plus beau et le plus noble des combats ».
SOCRATE
 
-          « C’est la recherche, la quête qui fonde la fraternité des hommes, et non l’inverse »
Jacques BARAT, Ancien Grand Maître de la GLDF
 

Bibliographie :
 
François FIGEAC
« La Fraternité Initiatique, mythe ou réalité ? »
Maison de Vie Editeurs
 
Marcel BOLLE DE BAL
« La Fraternité Maçonnique »
Encyclopédie Maçonnique
Editions maçonniques de France
 
Planches sur l’edifice.net  
-          http://www.ledifice.net/3023-3.html
-          http://www.ledifice.net/3023-I.html
 
Revue de la GLDF Point de Vue Initiatiques :
 
-          La Fraternité Maçonnique devant la Mort - Points de vue Initiatiques N° 5
-          Propos sur la fraternité - Points de vue Initiatiques N° 15
-          Fraternité universelle - Points de vue Initiatiques N° 33
-          La Devise Maçonnique : Liberté - Egalité - Fratenité - Points de vue Initiatiques N° 35
-          La Fraternité Humaine - Points de vue Initiatiques N° 48
-          Les chemins de la fraternité - 1789-1989 Liberté - Egalité - Fraternité - Points de vue Initiatiques N° 74
-          Confiance, Purification, Allégeance & Fraternité - Bulim N°26

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