Obédience : NC NC : Date : NC

 

Fraternité

Lorsque j’ai souhaité vous proposer une planche, un thème m’est apparu comme une évidence : celui de la Fraternité ; plus précisément, j’ai eu envie de vous  parler de  « Notre Fraternité »…

Dans un premier temps, je vous l’avoue,  j’ai pensé changer de sujet… Je me suis vu tomber dans le piège de la banalité en délayant la devise de notre ordre, en devisant sur « Caïn et Abel », sur « Romus et Romulus », etc.
Mais tant pis, il fallait que je traite de ce sujet !

C’est le premier que je choisi « librement », en toute autonomie, et il m’importait de vous communiquer ce sentiment que j’éprouve pour notre Loge…et les frères qui la composent ;
de vous proposer une réflexion consécutive à mon expérience de ces quelques années passées sur nos colonnes.

Le manuel d’instruction au 1er degré nous fait répondre, dès la troisième question :

« Êtes-vous Franc-maçon ? »

Mes frères me reconnaissent comme tel
Ainsi, il est nécessaire de clarifier cette fraternité, car de quel lien parlons-nous et à quelle sorte  de sentiment appartient la Fraternité ?
Dans une première partie, je vais donc essayer de comprendre pourquoi et comment ce sentiment peut et doit exister en F\M\
Dans une seconde partie, je vous infligerai, mes frères, quelques pensées personnelles sur mon parcours parmi vous…
En préambule, je citerai  la première phrase de notre Ordre qui  proclame :
« La F\M\ est un ordre initiatique, traditionnel et universel fondé sur la Fraternité »
De même, les textes des Constitutions d’Anderson posent comme règle fondamentale :
« Vous cultiverez l’amour Fraternel qui est la base, la pierre angulaire, le ciment et la gloire de notre confrérie »
Quel programme !
Et oui, à l’inverse de l’Amitié, notre Fraternité est décrétée :
« Mes frères me reconnaissent comme tel »…

Autrement dit, je ne décide pas d’être Franc-maçon, ce sont mes frères qui décident que j’en sois un…

En effet, après avoir pris un engagement solennel et librement accepté, le soir de son initiation le nouveau Maçon découvre sa nouvelle « communauté ».
Sa surprise est grande, car il n’y a pas de transition, il était à l’extérieur et maintenant il se retrouve à l’intérieur d’une communauté parmi des hommes qui  lui sont pour une grande majorité inconnus, mais qui lui manifestent spontanément une chaleur fraternelle.

Ce premier soir, le « jeune  initié »  est interpellé, surpris par l’ attention et l’élan de cœur que lui confèrent ses « nouveaux frères », lui faisant prendre conscience de la dimension de cette fraternité ;  ressentant dès les premiers instants de partage, la notion d’appartenance et les liens qui l’unissent à la F\M\.
                                                                                                                               
C’est un des rares environnements où un homme peut manifester à un autre homme, sans le connaître et sans l’avoir vu (autrement que le soir du passage sous le bandeau) , l’expression d’un sentiment fraternel, uniquement pour ce qu’il est, et plus précisément pour ce qu’il est devenu : c’est-à-dire un Maçon.

(Car « claquer » 3 bises à une quarantaine de bonhommes qu’on ne connaît pas, dès le premier soir, ce n’est pas banal n’est ce pas !? ).

Ainsi au même titre que je n’ai pas choisi ma famille natale, je n’ai pas choisi mes Frères maçons, mais j’ai librement choisi de faire partie de la famille des «  Maçons ».

Et c’est une des particularités de la Franc Maçonnerie, elle crée une famille.
Elle décrète que par le fait de partager des valeurs communes, nous sommes Frères.
C’est un fait, je le répète, écrit dans nos textes ; textes auxquels nous adhérons par serment, donc nous sommes Frères…

Cette Fraternité, inscrite dans les gènes de la F\M\ débute par l’acceptation inconditionnelle de l’existence de l’autre :

« La Franc-maçonnerie a pour but de lutter contre l'ignorance sous toutes ses formes. C'est une école dont le programme se résume ainsi : obéir aux lois de son pays, vivre selon l'honneur, pratiquer la justice, aimer son semblable, travailler sans relâche au bonheur de l'Humanité… », cet extrait de la « Déclaration de principes du Convent de Lausanne du R.E.A.A » (en Sept. 1875) est prononcé par l’Orateur, avant que l’initié, sur la coupe des libations, s’engage sur l’honneur en jurant fidélité à ces principes...

C’est une démarche volontaire donc, prise sur l’autel des serments ; et, si  c’est d’abord un principe qui est respecté, il se transforme  progressivement en une seconde nature où la notion de devoir -  sans que celle-ci disparaisse - laisse également la place à des liens affectifs très forts.

Car la Fraternité  se vit et s’entretien ; c’est de l’affection, de la solidarité, de l’écoute, de l’attention pour l’autre. C’est de  l’émotion partagée lors de la chaîne d’union. C’est aussi le geste que nous faisons pour le tronc de la veuve. C’est parfois appeler un Frère que l’on pourrait aider. C’est abandonner nos métaux à la porte du temple, nous montrer tels que nous sommes, sans cacher nos faiblesses, protégés et rassurés par la Fraternité du groupe.

La Fraternité met en œuvre les facultés les plus nobles du cerveau et du cœur, elle amalgame naturellement l’intellectuel et l’affectif  qui permet à tout F\M\ de travailler à la construction de son temple intérieur tout en œuvrant  au projet commun : « Achever au dehors…etc. ».

Je ne suis pas le plus versé - je l’assume - dans les écrits bibliques, cependant mes recherches m’ont fait connaître cette phrase de « Saint Jean » :

« Celui qui dit être dans la lumière et qui a son Frère en haine est dans les ténèbres. Celui qui aime son Frère est dans la lumière »...

Ainsi, à ce moment de mon travail sur la Fraternité, l’actualité « au dehors » croise ma route, et je ne peux m’empêcher de rappeler que les démonstrations de haine d’un pathétique soi-disant humoriste (et de ses soutiens), ses propos et ses gestes sont  antinomiques des buts et des idéaux prônés par notre Ordre !

Je ne suis qu’un jeune maçon et,  sans doute comme le sont souvent les nouveaux convertis, je suis passionné, peut-être trop et je vous prie de m’en excuser…

Mais comment de ne pas rappeler - sans manichéisme béat - que notre ordre et notre obédience sont bâtis sur une Fraternité initiatique, à base de symboles, de rites, de traditions, s’inscrivant dans une perspective de bâtisseurs d’un monde meilleur : « à la construction du Temple de l’Humanité »…

En conclusion de cet aparté, je citerai SOCRATE et Martin LUTHER KING  se répondant, comme  dans un écho troublant,   à 2500 ans de distance :

SOCRATE : « le combat pour la vérité et la justice, pour la fraternité des hommes, est le plus beau et le plus noble des combats ».

Martin LUTHER KING : « nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous mourrons ensemble comme des idiots ».

En quoi la Fraternité est elle différente de l’amitié ?

Au sens littéral la Fraternité vient du concept « Fils d’un même père », cependant c’est le socle des valeurs communes qui va déterminer la solidité de la Fratrie.
Dans la Franc Maçonnerie, à tout le moins au sein de la GLDF, nous avons également le même « Père », Le Grand Architecte de l’Univers, quelle que soit la définition que chacun y voit, et nous développons également un socle de valeurs communes.

Ces valeurs communes, qui fondent notre Fraternité, et que j’ai déjà abordé plus haut (respect, tolérance, humilité, bienveillance, justice, et j’en oublie encore beaucoup…) sont complétés en Loge par des règles acceptées par serment : solennité, correction, bienséance, tonalité de voix posée , courtoisie, respect du rituel pour les déplacements, prise de parole codifiée, le silence, etc.

Bref, une attitude générale  conforme et en relation avec notre démarche, comme on nous l’a rappelé lors de la dernière tenue  à l’occasion des « 5 minutes de rituel ».

En fin d’année dernière, un frère lors d’une intervention, rappelait combien il était important de se saluer « sincèrement »…

J’insiste sur cette marque d’attention, la première lorsqu’on arrive au temple : bien sur il  doit exprimer la bienvenue  mais surtout le plaisir de se voir ; il doit comporter  la certitude d’une fraternité réciproque dans le regard, la parole, le sourire…Le « Bonjour » maçonnique est un geste d’union !

La Fraternité n’est pas un du, c’est un bien qu’il faut faire fructifier …

Le Frère qui était à ma place il y a 15 jours, évoquait « l’héritage » que nous devions assumer… Je rebondis pour dire que nous avons aussi un devoir de transmission…

Un capital nous a été donné, nous devons le transmettre encore plus beau !

Aujourd’hui, grâce à vous je suis un « cherchant », comme cela me l’a été dit lors de ma première réunion d’instruction… Et ce soir, mes frères, j’ai le désir profond de vous remercier pour ma présence parmi vous… et de vous faire partager quelques souvenirs de fraternité.

A commencer par le souvenir vivace d’une soirée de janvier, froide et étoilée, ou j’attendais devant la porte de ce que je n’appelais pas encore un « temple ».

Nous étions « trois Quidams » à attendre, à gérer sans doute le même stress, de manière différente et pourtant si semblable…

Soudain la porte s’ouvrit… Comment oublier cette main tendue, ce sourire, ce regard bienveillant, ces premières paroles d’accueil amicales et douces,  par celui  - mais  je l’ignorais à l’époque - qui était le frère « expert ».

A partir de ce moment, et en une fraction de seconde,  la stressante attente est devenue un rassurant moment…

Sur les parvis en train de nous préparer (de façon étrange pour des « encore profanes », faut-il le rappeler) nous avons échangé nos premiers mots de « triplés » et  le courant – devrais-je dire « un fluide » ? - est immédiatement  passé alors même que nous ne connaissions pas encore nos prénoms.

Depuis ce jour, un lien invisible nous unit, nous rapproche et nous rend « complices », parfois par un simple regard.

Puis ce fut, l’étourdissante valse de l’initiation…

Et ce moment si particulier ou on m’ôta le bandeau des yeux  et ou j’ai vu « au moins 200 hommes » masqués et habillés en noir pointant vers nous une épée… (vous n’étiez qu’une trentaine…).

Ce soir là, je suis rentré « un » dans le temple, mais j’en suis ressorti « trois »…

Car, un FM\ existe  avec ses Frères et par ses Frères. Il ne peut exister seul dans son coin, sans se rendre aux tenues, sans se nourrir des travaux de ses Frères, sans apporter sa contribution, etc.

Etre un FM\ seul n’aurait guère de sens ;  ainsi, mon engagement  ne prend pleinement sa signification qu’à travers vous mes Frères, en particulier de « la Fleur d’Or »…

C’est pourquoi, j’ai le souvenir - profane - de mes trois enquêteurs aux tempéraments différents, mais  qui m’ont permis par leurs questions – parfois avec humour – de préciser mon engagement…

J’ai le souvenir des surveillants qui au long des réunions d’instruction de chaque degré ont su me faire passer leurs enseignements avec patience et pédagogie. De ces soirées d’échanges, de ces repas et de ces discussions ou la confiance et la joie étaient au rendez-vous…

J’ai le souvenir de tous ces frères qui, après une planche ou une salve de questions (au 2ème), par un mot, un regard, un fraternel sourire ont su me dire « continue, tu es sur le bon chemin ! »...

J’ai le souvenir de ces « St Jean d’été » si magiques sous la voute étoilée en pleine montagne, en communion avec l’ensemble de la loge devant un  vrai  feu de bois…

J’ai le souvenir de ces agapes ou, de tous degrés confondus,  alternent conversations sérieuses et rires joyeux…

J’ai le souvenir de ces visites dans des loges parfois d’orients lointains voire dans des obédiences différentes, ou j’ai été accueilli comme un frère à part entière …

J’ai le souvenir - récent – des mots « justes et parfaits » envoyés par textopar le Frère Expert pour me rassurer quelques heures avant que je le remplace pour la première fois en ma qualité de suppléant…

J’ai le souvenir des « véné » de notre loge (j’en ai connu trois à ce jour) qui par leur personnalité différente et pourtant complémentaire ont apporté - et apporte toujours - une vision unie et sereine de la loge…

Voilà mes Frères, j’ai souhaité par ces quelques rappels vous dire combien pour moi est importante cette notion de Fraternité Maçonnique…

Je terminerai par un dernier souvenir…  en fait, le premier…
                                                                                   
Le souvenir de ce jour où celui qui n’était qu’un ami (!) allait devenir mon parrain et mon frère…et de ces quelques mots prononcés à l’écart de la foule un soir de « cérémonie en ville » : « tu es libre à déjeuner la semaine prochaine ?... Faudrait que je te parle d’un truc… ».

Merci « Parrain »,  de m’avoir par « ce truc » ouvert cette porte initiatique et spirituelle,  et permis d’entamer ce magnifique chemin…

Et à vous tous mes Frères, quels que soient vos grades et qualités,  Merci de me permettre, à la question : « Êtes-vous Franc-maçon ? »,  de pouvoir répondre :

« Mes frères me reconnaissent comme tel »

J’ai dit


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