Obédience : NC Loge : NC Date : NC

Le Labyrinthe Mythe d’hier,
réalité d’aujourd’hui

Mes FF\ ce soir je risque de vous décevoir car je ne m’essayerai pas à rentrer dans un domaine dans lequel je risquerai de me perdre la mythologie grecque. Mais je vais tenter simplement de vous faire traverser un symbole ancien dont l’expression maçonnique serait peut être le pavé mosaïque.

Pourquoi ne pas l’examiner à la lumière de nos travaux de loge ? Le Labyrinthe.

Le labyrinthe est avant tout fait pour être traversé.

L’idée du labyrinthe découla sans doute de l’exploration des cavernes et des gouffres, de la contemplation des fleuves, de leurs méandres et de leurs affluents, de la traversée des forêts. L’idée est naturellement terrestre. Le labyrinthe est anguleux, tortueux, désordonné, sur le modèle humain.

L’idée n’est sans doute pas non plus étrangère au premier chemin parcouru par l’homme, au terme duquel il devient une personne: Celui qui le fait sortir du ventre maternel. La femme, la mère est certainement  le Premier labyrinthe de l’homme.

Le labyrinthe est fermé dans une frontière : un carré, un cercle ou tout autre figure.

Chez les Egyptiens, les labyrinthes révèlent une de leurs premières fonctions, voisine des pyramides : Interdire l’accès aux tombes des morts royaux, des étrangers, préserver le secret de leur voyage, garantir que nul ne viendra dérober les objets qui les accompagnent.

Le plus anciens de ces tombeaux labyrinthiques, a été édifié il y a 55 siècles.

Quinze siècles plus tard, celui d’Amenemhat III, bâti prés d’une ville qui à pour nom "Medinet El Fayoun", est d’une complication inouïe. 1500 salles bâties sur deux niveaux.

Au Indes, c’est un rite traditionnel pour soulager les femmes qui accouchent, des lignes de safran sont tracées sur un plat en bronze et diluées dans de l’eau bénite et données a boire pour soulager les douleurs et accélérer l’enfantement.

Le labyrinthe incarne la matrice.

Pour notre tableau de loge j’ai trouvé une définition qui correspondrait au labyrinthe.

Le tableau de loge serait un système de mémoire artificielle. Sa valeur en tant que telle est d’autant plus grande, que sa connaissance et son établissement échappe, du moins en théorie, à l’initiative individuelle. Il ne s’agit pas là d’un système de mémoire élaboré à des fins pratiques et personnelles, mais d’un héritage spirituel collectif.

C’est l’initiation, démarche frappante s’il en est, qui en conditionne l’accès.

C’est aussi la pratique rituelle régulière, dans le silence et la rigueur, autres conditions, qui en ravive le souvenir par de permanentes déambulations.

Envisagé en tant que tel, le tableau de loge possède sa clef, son fil d’Ariane en lui-même.

L’initiation doit être considérée comme un rite de passage, il s’agit du passage d’un état dans un  autre état.

Les épreuves de la Terre (le cabinet de réflexion) de l’eau, de l’air et du feu, qui accompagnent les voyages de l’apprenti, ressemblent beaucoup au cheminement de Thésée (1)  dans le labyrinthe.

Dans le rituel il est dit : « les obstacles que vous avez rencontrés peignent les difficultés que l’homme éprouve et qu’il ne peut vaincre ou surmonter qu’autant qu’il acquiert l’énergie morale et les connaissances qui lui permettent de lutter contre l’adversité, l’ascension que vous avez tenté dans ces conditions devait être fatalement suivie d’une chute, qui aurait pu être mortelle ».

Il est dit aussi, et là nous voyons très bien le parallèle avec la légende de Thésée : « sans le secours des mains fraternelles qui vous ont soutenu au moment le plus critique ».

Quelles sont ces mains sinon celles d’Ariane (2) avec son fil ?

Les options offertes par le labyrinthe résument assez bien les divers chemins de la vie. En vérité s'il nous touche si vivement, c'est sans doute parce que l'homme n'est qu'une super­position de labyrinthes.

Il y a à la base, les méandres de l'intestin au sommet les cir­convolutions du cerveau et entre les deux le réseau in­fini des artères et des veines.

Plus on est « laby­rinthique », plus on est hu­main.

Qu’en est il de l'évasion par le haut en référence à Icare (3) ?

La leçon nous touche et nous en rêvons, lorsque les mé­diocres suggestions de la vie quotidiennes nous empri­sonnent.

Ce symbole, et l'allusion qu'il fait aux plus touchantes inquiétudes de l'âme humaine, ont trouvé dans l'art une variété infinie de figurations, soit symboliques de récits mythologiques, soit représentatives de l'interminable voyage auquel le sort a soumis l'homme et auquel il n'est pas possible de se soustraire, qu'il soit entraîné, selon les doctrines hindoues dans la longue chaîne des naissances perpétuellement renouvelées, ou qu'il atteigne un but fixe qu'il lui est permis de toucher en une seule existence. Car, c'est en parvenant à la chambre centrale du labyrinthe qu'il y recevra la dernière leçon, explicite et définitive, qui fera de lui un homme nouveau.

Rapprochons nous du labyrinthe Crétois (4)!  Le Minotaure y symbolise toutes les terreurs de l'expérience labyrinthique. Redoutable et fascinant, il appartient au règne des instincts obscurs, et Thésée, en luttant contre lui, lutte contre les ténèbres. Sa victoire est celle de l'homme supérieur, de l'initié qui, grâce au processus de l'initiation, acquiert le droit à la vie éternelle, c'est la victoire de l'homme sur lui-même, de la Sagesse et de la connaissance. Victoire du spirituel sur le matériel, de l'éternel sur le périssable, de l'intelligence sur l'instinct, du savoir sur la violence aveugle. C'est la victoire de l'homme nouveau.

Je me demande si Thésée, alors dépouillé de son orgueil, ne s’est pas rencontré avec lui-même, par ce symbole qu’est le miroir, il a reconnu dans la bête lui faisant face, tout ce qui était impur, il a tué le vieil homme qui n’était que son propre reflet.

Mais alors le labyrinthe mythe d'hier, ou réalité d'aujourd'hui ?

Sur le plan matériel, il n'y a pas à chercher beaucoup. Tout le monde qui nous entoure, tout ce en quoi nous sommes immergés, où nous vivons et nous développons, constitue un labyrinthe. Néanmoins, nous n'en sommes pas conscients, pas plus que ne l'étaient ceux qui pénétraient dans les jardins de Crète. Cependant, les jardins crétois étaient un labyrinthe, tout comme le monde qui nous entoure.
Psychologiquement, l'angoisse d'un Thésée cherchant le Minotaure pour le tuer, est aussi l'angoisse de l'homme d'aujourd'hui qui a peur et se trouve dans le désarroi. J’ai peur parce que je ne sais pas;

Peur, parce que je ne connais pas les choses et dans cette méconnaissance, je me sens insécurisé.

Cette frayeur qui se manifeste bien souvent par le fait de ne savoir que choisir, que faire, vers où se diriger, et de laisser courir les années de sa vie dans une médiocrité constante, épuisante et infiniment triste.
Le désarroi est l'autre maladie qui peut nous affliger psychologiquement dans le labyrinthe actuel. Désarroi car, évidemment, il est très difficile de pouvoir dire de soi-même:

Qui suis-je ?, d'où je viens ?, et où vais-je ?

Ces trois interrogations si simples, si naïves, qui n'ont même pas l'air de questions mais semblent bonnes pour les enfants, ce sont celles pourtant qui créent notre désarroi fondamental.

Pourquoi je travaille ou pourquoi j’étudie ? Pourquoi je vis et qu'est-ce que le bonheur ?

Qu’est ce que je poursuis ? Qu'est-ce que la tristesse et comment puis je la deviner ?

Psychologiquement, nous restons plongés dans un labyrinthe; bien qu'il n'y ait pas de monstres, bien qu'il n'y ait pas de couloirs, nous nous sentons perpétuellement coincés.
Il est clair que le mythe nous offre une solution. Thésée n'entre pas les mains vides dans le labyrinthe ; il n'est pas logique non plus que nous résolvions le problème de notre labyrinthe les mains vides.

Il est un F\ qui sait souvent évoquer la magie de notre Rite, les indulgences du REAA, qui nous permet à travers sa méthode et l’interprétation des outils qu’il nous met à disposition et qui jalonnent notre chemin initiatique, de progresser dans notre labyrinthe intérieur.
Ainsi Thésée porte une hache - ou une épée - pour tuer le monstre et un fuseau de fil, sa pelote, pour trouver son chemin.

L'épée a toujours été un symbole de volonté. Combien de traditions médiévales reprennent encore le symbole de l'épée enfermée dans la pierre que seul un homme de forte volonté va pouvoir extraire !

Que signifie alors « extraire de la pierre » ?

C’est la volonté qui extrait ce qui est vertical de la matière horizontale ; c'est-à-dire qu'une des armes fondamentales dont nous avons besoin pour ouvrir les chemins dans le labyrinthe est la Volonté, la force de la volonté.

J’ai une préférence pour cette solution certainement due à ma formation sportive.

Cette école du sport que certains FF\de notre atelier connaissent qui enseigne aussi la science du geste et du corps par la mémoire de l’effort (ou mémoire de soi des arts martiaux : le kata).

Elle m’a appris la seule attitude convenable, entrer dans ce labyrinthe, faire face, affronter le monde comme il est. Considérer le labyrinthe non comme un problème, mais comme une solution. Et pour cela avancer et vouloir s’y perdre. Il faut apprendre à persévérer face aux difficultés, et aussi résister aux échecs et aux déceptions, surtout ne pas renoncer.

Certains, et c’est un des plus grand risque du labyrinthe, une fois entrés dans le dédale, se résignent à vivre indéfiniment à l’intérieur de tel ou tel méandres, ne cherchant plus à en sortir, acceptant ce que j’appelle la prison intérieur, plutôt que d’affronter les risques du dehors.

Pour lutter une autre arme très importante est le fil, l'astuce du fil qu'on va dérouler par les chemins pour trouver le retour. Ce fil est la persévérance et je dirais plus, la mémoire.

Pourquoi déroule-t-on le fil par les chemins du labyrinthe ?

Parce que nous sommes dans l'incapacité de nous souvenir par où nous sommes passés, sur quels écueils nous butons et par où nous pouvons sortir. Ne pouvant nous le rappeler, nous utilisons le stratagème du fil que nous retrouverons et qui nous indiquera le chemin du retour. C'est la possibilité de ne pas répéter les mêmes erreurs dans le labyrinthe, de reconnaître les lieux que nous avons foulés au cours de notre propre évolution et de savoir quels sont les chemins qui nous restent à parcourir et comment le faire.
Pour les Grecs, Ariane est l'âme qui, au bon moment, quand Thésée est le plus désespéré, lui procure une réponse et une sortie, une clef, une solution. Ce qui vibre, ce qui vit, ce qui nous procure les solutions au bon moment, c'est Ariane, l'Ame, celle qui sauve et apparaît opportunément, nous donnant la solution pour résoudre un problème.
Quand on prend conscience du labyrinthe, quand, comme Thésée dans la mythologie, on y pénètre, il faut être également conscient de l'importance de trouver la sortie. Celui qui découvre la sortie détruit le labyrinthe.

Il faut savoir persévérer, accepter l’échec (provisoire), ne pas céder à la déception

(Provisoire) résister à l’abattement, avancer dans le noir, le regard intérieurement fixé sur le but invisible, mais avec une claire image mentale de l’avenir. Toujours positivé.

Néanmoins, il faut tenir compte que la sortie du labyrinthe n'est pas au dehors ; elle est exactement au centre, au cœur du labyrinthe. Celui qui pénètre dans le labyrinthe et, remarquant ses méandres et sinuosités, ressent de la peur et s'enfuit, celui qui prétend s'échapper par les côtés ou rester à l'extérieur, ou vient seulement humer la surface, celui-là ne résout pas le labyrinthe. Il faut faire réellement comme Thésée : pénétrer, cheminer et arriver au centre même. Là est la sortie et non vers le dehors. Il faut avoir la vaillance d'un Thésée pour affronter ses monstres.

Certainement, il nous est très difficile de nous représenter cet élément préhistoriques moitié homme, moitié taureau qu’est le Minotaure. Mais nous aussi, nous avons des monstres que nous affrontons chaque jour et avec lesquels nous devons batailler, si nous l'osons : les doutes, les préoccupations, les rancœurs, les peurs, les incertitudes qui, bien que ne prenant pas corps physiquement, vivent en nous et ont des tentacules aussi puissantes que l'est le Minotaure de Crète. Ces tentacules, ces monstres, ceux-là, il faut savoir les affronter avec les armes de la Volonté, de l'Intelligence, de la Mémoire

Le Minotaure est moins un monstre qu’une étape nécessaire dans le processus de l’initiation. Il représente le coté animal que chacun porte en soi.
Si nous arrivons à ce que chacun de nos pas ne se fasse pas seulement dans le labyrinthe horizontal, mais qu'au contraire, il atteigne un échelon supérieur, un point plus haut, nous aurons réalisé cette chose étrange et mystérieuse qu'est notre transformation, notre évolution, notre transmutation, et nous aurons appris à faire ces pas justes et mesurés, ceux qui ne se font pas n'importe comment, ni n'importe où, mais qui sont les pas de la vie ?

Nos premiers pas ceux d’apprenti.

Aidons nous pour cela de l’outil exemplaire de l’introspection : « le fil a plomb » qui nous sert à la rectitude de l’effort intellectuel et spirituel.

Chacun de nous doit faire en lui-même le travail de réveiller Thésée, de lui donner vie, de faire sortir ce héros à la lumière.

Pour chacun de nous existe une seconde naissance qui n'est pas l'apparition physique à la vie, mais celle où notre héros intérieur se manifeste avec ses meilleures armes, ses meilleurs ornements, ses meilleures forces et qualités.
Essayons, car de toute façon, nous ne sommes pas tous égaux ; nous ne sommes pas tous également héroïques et nos actes ne seront pas héroïques au même moment. Certains seront héroïques dans un sens et d'autres dans un autre ; certains se tourneront vers l'étude, vers les sciences, vers l'art, vers la religion, vers la politique ; d'autres iront vers la méditation intérieure, certains se tourneront vers leur famille, vers leurs conjoints, ou simplement embelliront la vie de ceux qui se trouvent autour d'eux.
Mais tout cela est un acte héroïque s'il naît du véritable être intérieur, de son propre choix. C'est pour cela que j’ai repris le thème du héros grec qui pénètre dans le labyrinthe, tue un monstre et trouve son âme qui l'aide à sortir. Vieux thème qui nous permet de prouver une fois de plus que les années ont passé et que les civilisations n'ont beaucoup changé qu'en apparence et que notre TRADITION est immuable et doit vivre dans nos T\ et à l’extérieur.

Le labyrinthe incarne le cours de l’existence, les hommes se croisent, partent dans différentes directions, mais notre but reste: LE CENTRE.

Les labyrinthes répondent à un besoin de méditation et de régénérescence, de la part des hommes.

Danger de se perdre, plus l’excitation que procure la dissimulation et la découverte, l’aventure, le plaisir du jeu de piste.

Que ce soit dans notre vie, notre travail, notre  développement de la ligne droite nous conduit toujours rapidement d’un point à un autre, c’est stressant, c’est ce qui rend l’homme ou peut être certains FF malades.

Le labyrinthe n’est pas un endroit où l’on fait la course. C’est un endroit pour vivre ses expériences, se rencontrer soi-même, par la méditation, et surtout être dans le doute.

Les labyrinthes nous font voyager à l’intérieur de l’âme et du corps, et nous révèle tous les secrets de la vie intemporelle de la vie sur la terre.

Ils demeurent des lieux de recueillement qui nous incite à considérer les tours et détours de la vie comme autant d’occasion de prendre un nouveau départ.

Il me faudra du courage, car à la sortie de tout labyrinthe, je sais que je ne trouverai jamais que d’autres labyrinthes. Des labyrinthes de labyrinthes. Certains croiront y rencontrer Dieu, d’autre la vérité, d’autre un désespoir panique. En F\ Maço\ enfin, plus simplement, un énigmatique et fragile chemin vers la sagesse.

Quoi qu’il en soit, traverser, perdez vous ne serait-ce qu’une fois, dans un labyrinthe, cela transforme la conscience pour toujours. Après s’être perdu, on a ouvert toutes les portes de soi-même, on s’est exploré. En fait, se perdre n’est jamais un échec, c’est une occasion de prendre du recul, d’aller là où l’on n’est pas attendu, de se trouver, de dominer sa peur de l’inconnu. Se perdre, c’est aussi aimer la curiosité, qui permet de découvrir l’inconnu, de s’intéresser aux autres, de ne pas essayer d’imposer sa volonté, d’écouter.

Ce qui forcera d’accepter sa différence, de ne pas se laisser juger par le regard des autres, de se tolérer, de savoir vivre avec soi-même, de s’écouter, de s’aimer, de ne pas craindre d’être oublié du reste du monde.

En finalité ce mythe du labyrinthe raconte d’une façon ou d’une autre une quadruple histoire :

Un voyage, une épreuve, une initiation, et une résurrection. Cette voie initiatique est longue, laborieuse, elle marque l’action de l’homme déterminé.

C’est le secret du labyrinthe, qui permet à celui qui l’affronte d’avancer dans la vie.

V\M\ j’ai dit.

N\ L\


 (1) Thésée, qui s’impose volontairement, pour tuer le monstre, est l’allégorie de l’homme jeune, de l’apprenti, plein de fougue et de courage qui lui donnent la victoire. Son parcours dans le labyrinthe peut être assimilé à celui de l’impétrant qui avance les yeux bandés avant l’initiation. Le labyrinthe est le chemin tortueux qui mène l’homme à la lumière et le guide vers la sagesse et la maîtrise de ses passions.

(2) Ariane, par son amour et son intuition, permet à Thésée de sortir du labyrinthe, comme l’amour et la fraternité guident l’apprenti et lui évitent de chuter.
(3) Icare est une allégorie de la jeunesse, ivre de connaissance et soucieux de s’approcher au plus vite de la lumière, sans poursuivre une démarche logique et progressive, ce qui le précipite vers la mort.

(4) C’est l’un des mythes fondateurs de la culture occidentale. Minos, roi de Cnossos en Crète avait épousé Pasiphaé, fille d’Hélios, dieu du soleil, qui lui donna huit enfants dont Androgée, Ariane et Phèdre. Un jour, il demanda à Poséidon, le dieu de la mer de lui envoyer un animal exceptionnel à lui sacrifier et ce dernier lui envoya un grand taureau blanc, symbole de royauté. Impressionné par la magnifique bête sortie des flots, Minos préféra l’épargner et immola au dieu un taurillon de son troupeau. Irrité, Poséidon, par vengeance, suscita dans le cœur de Pasiphaé une passion dévorante et insensée pour le superbe taureau. C’est de ces amours contre nature que naquit Astérios, un enfant monstrueux au corps humain et à la tête de taureau, surnommé le Minotaure. En grandissant, celui-ci développa une force herculéenne et une sauvagerie meurtrière qui amena Minos à ordonner à son architecte Dédale, de lui construire un palais d’une conception si compliquée que le monstre ne puisse plus jamais en sortir. Le palais comprenait tant de salles, et de couloirs enchevêtrés que le réseau inextricable de leurs circonvolutions ne permettait pas d’en retrouver l’unique porte.

Par la suite, Androgée, fils de Minos, fut tué par les Athéniens ce qui amena le roi de Crète à envahir Athènes et à soumettre son monarque, Egée. Il exigea comme tribut que sept jeunes gens et sept jeunes filles lui soient envoyés d’Athènes tous les sept ans pour être livrés au Minotaure. Thésée, fils d’Egée, demanda à son père de faire partie des futures victimes pour combattre le Minotaure. Avant d’être enfermé avec les autres dans le labyrinthe, il reçut des mains d’Ariane, ébloui par la beauté du héros athénien, une pelote de fil à dérouler pour lui permettre de retrouver l’unique issue du labyrinthe. Thésée s’avança dans le labyrinthe, déroulant son fil, affronta le Minotaure en son centre et le tua, puis grâce au fil retrouva le chemin de la sortie et ses compagnons. Il s’enfuit alors entraînant avec lui Ariane vers l’île de Naxos, par peur de représailles contre elle.

 Dédale fut alors soupçonné d’avoir aidé Thésée et Ariane et il fut condamné par Minos à être emprisonné dans le labyrinthe avec son fils, Icare, encore adolescent. La porte du labyrinthe ayant été murée, Dédale imagina de s’enfuir par les airs et inventa dans ce but des ailes artificielles confectionnées de plumes collées à la cire. Tous deux s’envolèrent mais Icare, s’approchant imprudemment du soleil vit ses ailles se désagréger par la fonte de la cire et sombra dans les flots.

Ce mythe du labyrinthe que conçoivent les Grecs remonte au VIIIème siècle avant Jésus-Christ. Mais son origine se situe en fait dans un passé beaucoup plus lointain, celui de l’âge du bronze dans le bassin égéen, dont le souvenir fragmenté, embelli et altéré, est parvenu oralement jusqu’aux Grecs sous la forme d’une épopée héroïque. Un roi Mwinu a bien régné sur la Crète vers 1500 avant JC. Des représentations de labyrinthe et d’acrobaties effectuées avec des taureaux comme on peut en voir aujourd’hui dans les Landes, ont été retrouvées et datées de 1450 avant JC. Le taureau était l’emblème de la royauté minocéenne et la mort du Minotaure pouvait représenter pour les Grecs leur revanche et leur victoire sur la Crète.

Mais les tous premiers éléments semblent bien venir de l’Egypte ancienne, car ce mythe a pour origine un bâtiment égyptien appelé par Hérodote: labmrinqoz. Il s’agit du temple funéraire du roi Amenemhat III de la XIIème dynastie (vers 2000 avant J.C.), situé à Hawara, à l’est du Fayoum. Il comprend douze cours couvertes, dont les portes se font face les unes aux autres et deux étages de salles, au nombre total de trois mille. Les chemins pour accéder aux sépultures royales qu’elles contenaient, causaient par leur complexité l’émerveillement de Diodore. D’après lui, le légendaire labyrinthe de Cnossos aurait pour origine ce monument égyptien que Dédale aurait visité et qu’il aurait copié à Cnossos.  Hérodote en le visitant lui donna le nom de labyrinthe.


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