Obèdience : NC Loge : NC 05/1998
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Le pavé mosaïque
 
À la gloire du Grand Architecte De L'Univers,
Vénérable Maître et vous tous mes frères, en vos grades et qualités…
 
Pour ma première planche tracée devant vous, je vais avoir le bonheur de parler du pavé mosaïque.
En effet, s’il est un sujet riche d’évidences autant que de non dits, c’est bien celui-là !
 
Pour dégager toute la symbolique de cet élément essentiel du Temple, nous allons chercher en premier lieu son origine historique. Ensuite, nous l’étudierons plus en détail de façon à en dégager les deux éléments forts que sont sa structure et ses couleurs.

Pourquoi ce pavé ?
Si l’on remonte aux origines de l’homme, il semble que le lieu de culte a toujours eu besoin d’être différencié et que, dès les premières cavernes cultuelles, le sol nu ou le rocher dégagé de toute trace de végétation ou de pollution ont été une constante essentielle.

Quand l’homme vivait encore sur la terre battue, Dieu avait droit au sol pavé. En Afrique, en Asie, les cérémonies traditionnelles se pratiquent sur la terre battue et balayée, et dans toutes les religions du monde, la pierre sacrificielle ou l’autel conservent ce besoin de propreté, d’isolement et de démarcation.

Au-delà de la simple limitation de l’espace sacré, le revêtement du sol représente également une coupure qui isole des profondeurs de la terre. Il sépare les profondeurs infernales où règne le démon, des cieux où règnent le soleil et le Dieu Créateur.

Ce pavé fixe de nos civilisations occidentales sera d’ailleurs nomadisé dans les tapis de prières islamiques indispensables dans le désert.

Si l’on remonte aux origines opératives, les loges où officiaient les bâtisseurs de cathédrales étaient-elles carrelées ? Si la réponse n’est pas essentielle, la vocation utilitaire de ce pavement ne fait aucun doute. Fa c i l e d’ entretien dans ce lieu de passage, aux couleurs neutres et sans ostentation, il assure également une fonction essentielle de surface quadrillée pour les croquis et esquisses réalisées à la craie, à même le sol. La loge est, en effet à cette époque, la salle commune où les compagnons sont logés et nourris.

Les premières loges spéculatives étaient réunies dans ces mêmes auberges ou loges, puis leur essaimage a rendu nécessaire de matérialiser l’espace sacré par une représentation de ce même pavement en le dotant d’une origine symbolique dans le Pavé du temple de Jérusalem. Le tableau de loge, comme le tapis de prière, représente ainsi le temple ramené à sa plus simple expression.
Pavé, et non carrelage, il est formé de pierres taillées et non de céramiques moulées : En cela même, c’est déjà un symbole maçonnique. Il ne semble pas innocent ce choix qui privilégie l’une des formes les plus parfaites de la taille. Quel travail prodigieux devait réclamer chaque pavé, coupé d’équerre, aux dimensions exactes au millimètre
près, parfaitement plan, poncé et poli comme un miro i r. Il représente alors l’aboutissement exact de l’ œuvre maçonnique et, chacun à sa place, parfaitement joint, devient Temple Universel.
Mosaïque, sa définition est donc une juxtaposition d’éléments de diverses couleurs formant par leur assemblage une sorte de peinture. No t re damier noir et blanc en devient alors la forme la plus épurée. Si la mosaïque classique éclate en feu d’artifice multicolore, quand les couleurs se fondent et s’imbriquent, c’est le noir et le blanc qui les contiennent toutes. De même, quand les éclats disjoints se rapprochent pour former la plus complète continuité, c’est le carré qui est la plus parfaite unité de base.

Ses dimensions vont de l’Orient à l’Occident, du Midi au Septentrion, du Zénith au Nadir. Le pavé mosaïque se veut donc universel. Cet assemblage parfait de pavés aussi contrastés que peuvent l’être les hommes s’étend sans frontière dans les quatre directions géographiques pour unir l’humanité par delà les couleurs de peau, les pays et les nations, les religions et les idéologies politiques.

Il reste pourtant deux dimensions que seul l’esprit pourra voir :

• Le Nadir qui nous uni au monde des morts et de la terre, marquant ainsi notre union dans l’ humanité passée, nos racines, prolongement de nos pieds. La terre n’est-elle pas faite de poussière, celle-là même que nous sommes et vers laquelle nous retournerons ?

• Le Zénith qui nous uni à l’univers et à son Grand Architecte, prolongement de notre tête que l’on a parfois dans les étoiles. Dès lors, il est hors de question de fouler aux pieds un tel lieu qui est à la fois l’Univers et la perfection de son Créateur, encadré de ses piliers que sont la sagesse, la force, la beauté et la recherche de notre propre place dans cette construction. Notre but ultime n’est-il pas d’être, un jour, le quatrième pilier !
Sa structure géométrique contient l’essentiel des symboles maçonniques :

• Le trait droit, c’est la règle qui permet l’alignement des pierres formant les murs. C’est le symbole de la rectitude, de la ligne de conduite maçonnique. Le premier devoir du maçon est en effet de fuir le vice et de pratiquer la vertu.

• L’angle droit, c’est l’ é q u e r re qui permet la taille en vue d’une cohésion parfaite du monument. C’est le symbole de la pensée droite, sans détour, véritable signe de reconnaissance du franc-maçon.

• Les intervalles réguliers forment les divisions qui se re t ro u vent sur la règle. Ils symbolisent la mesure, l’alternance du temps, des heures et des jours…

• L’horizontale, c’est le plan ou se situe le pavé, le niveau. Il marque la frontière entre le Zénith et le Nadir, c’est le niveau du présent, le niveau de l’homme.

• La perpendiculaire n’apparaît pas, mais les trois colonnes qui en marquent les angles en sont la
représentation.
L’égalité des côtés relève aussi de la perfection géométrique humaine opposée à la perfection des formes courbes de la création ; Soleil, lune, terre, atomes sont ronds, mais l’homme occidental, à son échelle, utilise la droite mieux adaptée à son système de pensée, contrairement à l’oriental dont le Taï-ki (symbole du yin et du yang) est rond .
Ses deux couleurs sont formées de toutes les autres. Elles ont ceci de remarquable qu’elles n’existent pas par elles-mêmes, mais parce que toutes les autres couleurs existent.
Ce sont des couleurs absolues que nous ne pouvons qu’imaginer : oui, plus blanc que blanc, ça existe ! Nos yeux ne verront jamais au-delà d’un gris très clair ou très foncé. La symbolique est donc forte, puisque, comme le divin, ce sont des couleurs infinies !

• Le noir est la nuit et le froid, mais en captant les rayons énergétiques il peut devenir chaud ! Alors que le blanc est le jour et le chaud, mais en réfléchissant les rayons énergétiques, il garde le froid !

• Le noir est obscurité, mais dans l’obscurité jaillit la lumière ! tandis que le blanc est lumière, mais la lumière aveugle et ne permet pas la vision des étoiles !

• Le noir est le Nord que la neige illumine, le blanc est le sud qui recherche la fraîcheur de l’ombre.

• Le noir est le drapeau de l’anarchie, donc du désordre, mais idéalisée l’anarchie est le système social le plus élaboré vers lequel tend toute démocratie, tandis que le blanc est le drapeau de l’ordre, mais la domination des uns crée l’esclavage des autres.

• Le noir est absence de couleur réfléchie, donc mélange de toutes les couleurs, le blanc est somme de toutes les couleurs réfléchies, donc absence de couleur.

• Le noir est couleur de deuil, le blanc est couleur de vie.

• Le noir est le mal, le péché, le côté obscur de notre âme, le blanc est le bien, la sainteté, le côté lumineux de notre âme.

• Le noir est le tumulte, la guerre et la tristesse, le blanc est le silence, la paix et la joie.

• Le noir est le Yin, le blanc est le Yang.

Entre les carreaux, il y a aussi le joint. Il est l’élément primordial du pavement.
Ni blanc, ni noir, il apporte la cohésion aux carreaux de couleurs opposées mais n’a pas de matérialité.

Invisible, il est en réalité le chemin du maçon. Dans cette dualité constante entre le bien et le mal, les bons et les m a u vais moments, les satisfactions et les peines, les bonnes et les mauvaises actions, le profane traversera sa vie chahuté entre les pavés blancs et noirs qu’il franchira, le saint cherchera la diagonale qui lui permettra de rester sur les pavés blancs, le démoniaque recherchera la diagonale noire.

Le maçon, en revanche, choisira le joint qui réconcilie les deux aspects de notre monde, dominant les zones obscures et tirant profit des zones de clarté.

C’est le chemin de la vérité et de la sagesse, où il n’y a pas lutte entre les extrêmes, mais au contraire maîtrise et a p p r i voisement des deux facettes d’un même infini. Et c’est cette voie que prend l’ a p p renti quand il fait son pre m i e r
pas : Le pied gauche, celui du cœur, est dirigé vers l’orient source de lumière, le pied droit, en équerre, reprend appui e n t re chaque pavé après l’ a voir balayé. Ainsi, donc, le pas de l’ apprenti prend son sens : toujours orienté vers le delta rayonnant, bien calé de niveau, glissant sur les zones d’ o m b re et de lumière dans un égal équilibre .

En résumé, nous pourrons dire du pavé mosaïque que :

• C’est un assemblage parfait en régularité et en alternance... il donne une image unique, composée de carreaux noirs et blancs alternés à l’infini, de lignes jointives sans épaisseur, de lignes visibles en diagonales, complètement équilibrée.

• Il peut représenter un tissu, une natte, symbole de l’isolement vis à vis de la terre et de ses salissure empêchant la prise de racine et offrant ainsi une possibilité d’élévation.

• Il est réconciliation dans le divin des deux extrêmes que sont les ténèbres et la lumière, le bien et le mal, Dieu et le Diable, l’infini négatif et l’infini positif des mathématiciens qui ne sont qu’un au bout du compte.

• Il permet à chacun de trouver son chemin dans la liberté divine, qu’il soit erratique, maçonnique, saint ou diabolique. Vitriol ne signifie-t-il pas qu’il faut descendre au fond du gouffre noir qui est en nous pour y trouver la lumière divine, tout comme ces criminels condamnés par la justice qui, dans l’antichambre de la mort, ont trouvé la foi après des années d’introspection forcée sur leur acte criminel ? La lumière est dans le noir et l’aveuglement vient parfois de la lumière !

Le pavé mosaïque est donc, à la fois le temple, l’univers, l’humanité, notre vie et le chemin qui nous mène vers le Grand Architecte De L’Univers dans la maîtrise des passions et de la vie sociale.

J’ai dit, V\M\
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