Obédience : NC Loge : NC Date : NC

Le Bandeau

Lors de l’initiation, le futur initié subit en premier lieu l’épreuve de la terre, séjour solitaire dans la pénombre du cabinet de réflexion. A l’issu de cette
première épreuve, il est rituellement préparé par le frère expert pour sa réception dans le temple. Dans cette préparation, on place devant ses yeux un bandeau épais le privant totalement de la vue.

Le bandeau et le passage sous le bandeau Le bandeau n’est pas inconnu du candidat à l’initiation. Celui-ci l’a en effet déjà expérimenté lors de son audition. Dans ce contexte, le bandeau répondait à différents besoins : Préserver le secret de l’agencement intérieur du temple et de nos usages ; celui de l’identité des membres ; permettre au candidat de se concentrer sur sa réflexion sans être distrait par l’attrait visuel d’un lieu inconnu ; ne pas voir les visages et les regards des assistants lors de sesréponses, expressions qu’à coup sûr le candidat serait amené à interpréter. La voix est tout ce qui a sens à cet instant, et tout doit donc se limiter à la voix.

Le bandeau crée ici un climat singulier, qui isole le candidat de ses repères habituel, l’aide à trouver au fond de lui-même la sincérité qui le révélera aux autres tel qu’il est, non pas socialement, mais humainement. Autrement dit, cette dramatisation de l’instant le libère et l’autorise à se présenter en vérité et non en travestissant ses idées ou ses sentiments.

Les ténèbres du monde profane
Si le bandeau répond ici à un certain besoin que l’on pourrait qualifier d’ « utilitaire », tout autre est l’usage du bandeau dans la cérémonie d’initiation, usage chargé d’un caractère symbolique essentiel.

L’usage du bandeau nous a été légué par une tradition très ancienne. D’après les auteurs de l’antiquité, celui-ci était en effet déjà présent dans les initiations aux mystères d’Eleusis de la Grèce antique. Après la purification, le myste était ainsi introduit dans le lieu d’initiation, le télestérion, la tête couverte d’une étoffe.

En premier lieu, le bandeau symbolise bien sûr l’aveuglement du candidat dans son état profane. Le candidat est alors, suivant le rituel « un humble postulantplongé dans les ténèbres ». Comme le V.M. l’indique au candidat  trouve l’homme dominé par ses passions et plongé dans l’ignorance et la superstition ».

Etat d’ignorance dont le candidat va prendre conscience en expérimentant la difficulté, la maladresse, l’incapacité à se diriger. A travers ses émotions, les épreuves lui feront apparaître le caractère illusoire des seuls savoirs profanes, et lui donneront, peut-être, l’intuition d’une connaissance susceptible d’être acquise au-delà du monde sensible.

Conscient de l’incapacité où il est, en ce début de chemin, à triompher seul, le candidat va aussi prendre conscience du caractère essentiellement fraternel et solidaire de la démarche maçonnique. De la nécessité de la transmission par les plus anciens déjà en chemin vers les nouveaux frères.
Moment intense, chargé d’émotion par la préparation qui en est donnée dans le déroulement du rituel, le retrait du bandeau est symboliquement perçu comme l’apparition au néophyte de la Lumière spirituelle. Ce retrait ouvre symboliquement la voie vers la recherche de la Vérité. En accédant à la lumière, nous accédons en potentialité à la liberté intérieure, et, comme nous le comprenons, ce que la lumière est aux yeux, la vérité l’est à l’esprit.

Le retournement du regard
Dans l’instruction de l’apprenti, il est précisé : « Qu’avez-vous aperçu en entrant en Loge ? ». Réponse : « Rien que l’esprit humain puisse comprendre : un voile épais me couvrait les yeux ». Puis : Comment expliquez-vous cette réponse ». Réponse : « Il ne suffit pas à l’homme d’être mis en présence de la Vérité pour qu’elle lui soit intelligible. La lumière n’éclaire l’esprit humain que lorsque rien de s’oppose à son rayonnement. Tant que l’illusion et les préjugés nous aveuglent l’obscurité règne en nous et nous rend insensibles à la splendeur du Vrai ».

Pour être apte à recevoir la lumière spirituelle, le récipiendaire doit donc au préalable subir une transformation intérieure. C’est cette transformation
symbolique qui va s’opérer en lui par les trois voyages. Passer du monde apparent et limité perçu par nos sens à un plan de conscience plus vaste passe par une coupure. Faute des outils nécessaires, le récipiendaire serait encore dans l’incapacité d’appréhender nos symboles qui ne seraient pour lui, à ce stade, que des objets décorant un mur, ou des outils posés sur une table. Il faut donc en premier lieu que le récipiendaire retourne en premier son regard vers lui-même.

Avec le bandeau, le regard d’ordinaire porté vers le monde extérieur se retourne symboliquement vers l’intérieur. Sur le plan ésotérique, les yeux bandés possèdent le sens de retraite, de contemplation. Les yeux sont clos au monde de la matérialité. Avec le séjour dans le sein de la terre, d’où tout être humain vient,le candidat a symboliquement vécu une régression, un retour cers un état neuf, comme un enfant qui vient de naître, point de départ d’une reconstruction intérieure. Le retournement de sa vision vers l’intériorité de son être va permettre cette phase de maturation, indispensable à la réception de la lumière.

Lorsqu’on est privé de la vue, l’imagination est féconde; le monde extérieur se réduit

3008-9 L'EDIFICE  -  contact@ledifice.net \