Obèdience : NC Loge : NC Date : NC


Le Bandeau

Le Bandeau, symbolisant la privation de lumière, ou son contraire lorsqu’il est dénoué, est directement ou indirectement un des éléments essentiels du symbolisme maçonnique et de sa rituélie.

La première apparition de cet accessoire se fait lors de la rencontre avec les S\ et F\ de l’At\, lors du bien nommé passage sous le bandeau. Il s’agit pour l’impétrant de mieux se faire connaître par ceux qui l’accueilleront, pour aller au-delà de ce que les enquêtes auront pu révéler, dans une ambiance toute particulière. Notre institution n’a pas de caractère secret, mais est essentiellement discrète, d’où une certaine précaution quant à la forme, afin de respecter la sensibilité de chacun.


Cependant, il crée un climat singulier, qui isole le novice de ses repères, l’amène à puiser au fond de lui-même l’énergie et la sincérité qui le révèleront aux autres. Cette dramatisation de l’instant, doit lui permettre de se présenter en vérité et non en travestissant ses sentiments ou ses idées. C’est pourquoi cette atmosphère, que certains esprits sensibles peuvent mal vivre, est pour nous un gage de sincérité. Pour autant, il ne doit pas être perçu comme humiliant ou avilissant.


Dans un contexte différent, la corde au cou passée lors de l’initiation, pourrait relever du même caractère, alors qu’il n’en est rien. Ce symbole rappelle l’assujettissement de l’homme à la matérialité, et donc par là, la nécessité de s’en détacher, sans autre critère concernant spécifiquement l’impétrant. 

Parallèlement, au delà du contexte particulier ainsi créé, le bandeau voilant la vision, rappelle le besoin de prendre du recul, voire du détachement par rapport à l’environnement, pour espérer trouver le chemin de sa Vérité. Mais dès lors que l’impétrant franchit l’étape suivante de son cheminement vers la F\ M\, il revêt à nouveau le bandeau, pour aller du monde profane au Cabinet de réflexion où l’attend en signe d’espoir, le coq annonciateur de la fin de la nuit, pour ensuite rejoindre le Temple, lieu de l’Initiation. 

Le choc émotionnel de la situation que nous avons tous vécu est d’une rare intensité. Nous nous trouvons démunis, face à un vécu inédit et difficilement intelligible. L’humilité est plus que jamais de mise pour prétendre s’intégrer pleinement à ce que nous comprendrons plus tard, lorsque le voile sera levé. 

Le rituel du R\E\A\A\ dit à un moment de l’ouverture des travaux :

V\M\ :

Frère Second Surveillant, à quelle heure les apprentis francs-maçons ont-ils coutume d’ouvrir les travaux ?

S\S\ :

A midi, Vénérable Maître

Ou bien au rite de Memphis – Misraïm le Second Surveillant répond :

Lorsque le soleil culmine sur les sables de Memphis, lorsqu’il est Midi, et que l’ombre est la plus courte, alors les Maçons d’Egypte ouvrent leurs travaux, Vénérable Maître.

Sur un plan symbolique, on peut dire que le bandeau (unité), voile les deux yeux (dualité) pour cheminer par V.I.T.R.I.O.L. , pour tendre vers la conscience pure. Au moment où le bandeau est soulevé pour témoigner du sort réservé aux parjures, la perception est encore altérée, mais lorsque, in fine, le parrain délie les liens pour nous libérer de l’obscurité, l’éclatante luminosité du Midi maçonnique nous éblouit tant, qu’il nous faudra mûrir longuement l’événement pour l’intégrer.

C’est alors qu’on perçoit le sens du symbole, non par analyse directe, mais par analogie, rapprochement ou contraste. Nous sommes soudain soulagés à l’idée de nous éloigner de ces épreuves. Pour autant, le temps nous démontre que c’est peut-être le premier pas qui coûte, car la transition est saisissante d’intensité, de causes et de conséquences, d’épreuves lourdes aux sens obscurs. Mais au-delà, les pas suivants, de l’apprenti, du compagnon du maître et plus, ne seront, s’ils sont bien perçus, qu’une succession d’oeuvres d’architecture, de la pierre brute à la pierre polie, jusqu’à la pleine compréhension du sens caché de toute chose. 

L’ouverture ne peut porter que sur les travaux de la Loge et non sur la Loge elle-même. C’est le travail qui nous rassemble et qui nous construit. Alors les deux chemins parallèles, connaître le monde et se connaître soi-même, se rejoindront pour aboutir à la quintessence lumineuse de ce pour quoi nous sommes si fébriles, car derrière cette vision éblouissante se profile le Graal de la conscience humaine : la Vérité. 

J’ai eu l’occasion de revenir de mon propre chef dans le cabinet de réflexion avec grand profit (mais aussi émotion !). Mais je gage que l’expérience de la tenue sous le bandeau, si tant est que ce fût possible, serait une expérience probablement riche de sens, car le bandeau privatif, se transforme alors en révélateur et amplificateur de la voie de la conscience par l’introspection. 

Cette analyse, je ne peux la faire qu’aujourd’hui, car avant d’avoir eu à réfléchir sur cet élément symbolique, je ne l’ai jamais considéré autrement qu’en tant qu’accessoire. Il participe pourtant totalement du mystère de l’initiation, en vecteur d’une perception inédite, fortement transformatrice, creuset de la transmutation du profane en initié. La Lumière du Midi est notre quête, mais il m’apparaît aujourd’hui, que c’est bien le contraste entre sa privation et sa soudaine découverte qui a été le facteur déclenchant d’un processus de compréhension.

La conclusion que je peux en tirer, est qu’une fois de plus les symboles se croisent et se recoupent, ici avec le contraste du pavé mosaïque représentant selon les analyses, plusieurs types de dualités, mais qu’il appartient à l’initié de parcourir non par le passage frontal, mais en pesant les deux valeurs pour en tirer l’enrichissement intérieur le plus fort.

D\ M\


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