Obédience : NC Loge : NC 20/04/2011


Dialogue avec la Pierre

Le rendez-vous à la carrière était fixé en fin d’après midi. Curieuse façon d’engager un apprenti tailleur de pierre, pour ainsi dire, à la nuit tombante…
Le contre-maître, en salopette blanche, me montra la pierre que, dés le lendemain, je devais entreprendre.
Il ajouta, que j’avais toute la nuit pour réfléchir et que, si je voulais, je pourrais repartir mais, que dans ce cas, je n’avais pas à tenter de revenir et que, puisque j’étais arrivé jusque là, autant continuer…
Le crépuscule venant, il me conduisit vers la pierre enfin, un gros, très gros caillou sale, moussu, avec des petites bêtes qui couraient et rampaient parmi. Il y avait aussi cette odeur de moisi, de vieille chose.
Il me dit « voilà mon gars, c’est avec ça que tu vas te battre, tu vas me sortir de ça, le plus gros et le plus parfait cube possible, tiens, voilà ta caisse. Ah ! Un dernier conseil, si tu n’as pas déjà, dans ta petite tête, le résultat de ton travail alors, ne commence pas encore. Bonne nuit » Je regarde la pierre, me retourne doucement, je dis…bonne nuit, seulement voilà il n’y avait plus personne et même pas un bruit… de pas…
Je ne m’endormis pas cette nuit là et, par la force du Temps et des Choses, le lendemain (lent demain) arriva enfin. Je me présentai à la carrière, il n’y avait personne, il y régnait un Silence oppressant, j’étais SEUL. Alors, pour me donner une contenance, je dis, « salut pierre brut » comme ça, pour faire du bruit, pour meubler le Silence, un silence tellement épais qu’on l’aurait dit capable d’arrêter les rayons du soleil…alors, j’entends « salut vieille brute » Je me retourne, …personne…il y a quelqu’un ? Et j’entends « il y en a deux qui sont un mais, qui sont deux à cause d’un » Mais enfin, c’est quoi cette histoire de deux de un, de un de deux ?
La pierre -  (parce que c’était la pierre qui parlait !) C’est ton histoire.
Le tailleur – qui es-tu ?
P – TOI !
T - Moi ! ?
P - oui, TOI !
T – Mais, en te taillant….. ?
P – Oui ?
T – Je vais te faire mal ! ?
P – TU vas TE faire mal
T – Parce que tu es vraiment moi ?
P – Oui, je suis ce que tu es, tu es comme tu me vois.
T – on ne peut pas dire que tu sois jolie.
P – je te retourne le compliment !
T - …
P – Je suis ton symbole, ton symbole total.
T – Explique moi, MOI, dis-moi,-TOI.
P – Commençons par le commencement. Je suis, philosophie et, pour m’apprendre, tu dois faire TABLE RASE de tous préjugés, dogme, idéologie, habitude, routine. Tu dois te laver de l’homme ancien avant de commencer l’Homme nouveau ; m’entends-tu ?
T – Oui, en signe de compréhension, je vais te passer au jet d’eau afin de te débarrasser de tout ce qui n’est pas toi.
P – Tu as compris, mais gardes toi de l’orgueil d’avoir compris ! Lave le sol autour de moi, ce qui veut dire : éloigne de toi les êtres douteux qui ne viendraient ici que par curiosité.
T – Qu’adviendrait-il de toi si je renonçais à te tailler ?
P – Je finirai dans une décharge parmi toute sorte d’immondice, le Feu de cette géhenne me ferait éclater et s’en serait fini à jamais de l’Oeuvre Cubique.
T – Oui…. Bon…. Je te taillerais mais, tu es sûr que tu ne sentiras rien ?
P – Ma douleur sera la tienne, mes émotions seront les tiennes, ma vie sera ta vie, ma mort, ta mort.
T – alors, vivons ensembles.
P – N’est-il pas Midi ?
T – Oui, il est Midi.
P – Prend tes outils. !
T – Dis, ma pierre, Table Rase, c’est vite dit ! Mais ces aspérités vont poser problème !
P – Ce sont Tes aspérités, là, c’est ton ego, là, tes désirs, ici, ton orgueil, oui oui, ton orgueil, la preuve en est le très beau tablier dont tu t’es revêtu pour accomplir une tâche aussi ingrate, un simple tablier blanc eu fait l’affaire, ne trouves-tu pas ? Là, ton amour de l’argent, là, c’est ton impatience, fais attention, respecte bien la façon de tailler : Pan, Pan…. Pan. C’est comme quand tu plantes un clou, tu assures, pan pan et PAN mais, avec Mesure, Nombre et Poids !
T – Ca arrive une pierre qui pleure ?
P – Et toi, c’est une goutte d’eau qui descend le long de ta pommette ? Sais-tu, tu devrais mettre des lunettes, ce qui veut dire qu’en te protégeant, tu limite ton champ de vision, ce qui permet de te concentrer sur le seul travail à accomplir. Ne trouves-tu pas que la lumière est un peu vive ? Ne devrais-tu pas te couvrir la tête afin que ton esprit ne s’échauffe pas trop.
T – Pierre tu es ma mère, en te faisant renaître, tu me fais pareillement renaître
P – Je crois te l’avoir déjà dit mais, en le redisant avec d’autres mots, tu témoigne de ta compréhension…. Il me semble…, oui c’est ça…, que l’aspérité de ton orgueil …, oui…. là,…dépasse encore pas mal !
T – C’est fou ce que tu peux être dure, je risque de briser mes outils !
P – Ma dureté, c’est la tienne ! … Les outils te seront toujours remplacés mais, toi seul accomplira ton œuvre.
T – Est-ce pour cela qu’il est dit « vous avez un cœur de pierre ? » Dis c’est quoi l’œuvre.

P – Il y en à qui te répondrai que ce n’est pas de ton âge mais, tu as posé une question voici la réponse. D’abord, tu taille la Pierre au cube….. Ensuite tu la taille triangulaire équilatérale dessus, à trois faces carrées sur les côtés mais ce n’est pas fini, tu la taille entièrement triangulaire. Et ensuite, mon Apprenti, tu devras la tailler « dedans » bon assez parlé, taille, fais d’abord Table Rase
T – le soleil descend, il va falloir que je range mes outils.
P – aurais-tu peur qu’il fasse nuit à tel point que tu ne retrouves plus ta bouche ? Tu sais maintenant la lumière du soleil. Je vais t’apprendre la lune et les étoiles. Tu exerceras ton œil à percer, à discerner les mystères de la NUICT LUMINEUSE et, dans cette nuit, tu continueras à aplanir la pierre jusqu’à ce que cette table devienne un miroir en lequel pourra se réfléchir le firmament, d’où nous venons toi et moi et, ce jour là, il y aura des étoiles dans ton regard…mais, fais attention, les étoiles brillent sans faire de bruit…
\ ET AINSI FUT FAIT\

DEUXIÈME ARRIVÉE À LA CARRIÈRE.

T – Salut pierre ! Oh ! Mais, tu es humide de rosée !
P – N’es-tu pas encore humide du lait de la mère ?
T – Les plaisanteries fusent ce matin.
P – Ce n’est pas une plaisanterie mon lapin coureur en zig zag. Je vais t’expliquer. Avant de faire table rase, n’aurais-tu pas dû, d’abord, délimiter le carré de la table ? Te rends-tu compte du travaille superflu auquel tu as consacré un temps désormais perdu ? Tu t’es même donné la peine de polir au brillant des parties de toi-même et qui plus est qu’aujourd’hui tu devras briser. Maintenant, tu devras respecter la LOI. Prend la règle, l’équerre et, demande au contre-maître qu’il t’aide à tracer le carré. Ton inexpérience, en la matière, nous mènerait certainement au non-achèvement. Désires-tu devenir un être non-achevé ?
T – Non, bien sûr. J’appelle le Contre-Maître.
Mais le Contre-Maître est déjà là.
CM – N’en fais rien, il y a longtemps que je te regarde et, comme les conséquences de ton erreur ne sont pas encore trop graves, j’ai souris, c’est à dire, que j’ai ris, j’ai même amenés des amis et tu nous as fait passé un bon moment !
T – je n’apprécie pas que vous vous moquiez de moi !
CM – Mon ami, quel est l’homme normal qui accepterait que l’on se moqua de lui ? Allons voir ce carré. À propos, es-tu capable de voir ce carré, là, dans ta tête ?
T – Oui.
CM – Tu va voir la bas si j’y suis et tu imagines, tu visualise un carré fait de quatre traits dorés sur un fond noir, c’est tout !
T – Bon, et après ?
CM – Après, tu reviens quand tu veux. Souviens-toi, quatre traits dorés sur un fond noir !
T – Drôle façon de travailler, drôle de Contre-Maître, allons-y. Ah ! Oui, je comprends, dés que le carré est mentalement conçu, il est pratiquement tracé. Faut y croire…
Le tailleur vit longtemps dans le ciel, mais dans quel ciel, quatre traits dorés, parallèles deux à deux, équidistants et s’intersectant en quatre angles droits. Il lui semblait même qu'un homme, vêtu d'une salopette blanche, voulait lui montrer le cercle…Enfin, il lui semblait que quelqu’un, quelque part…et il s’endormit.
P – personne ne s’est-il endormi ? A moins que ces yeux fermés n’exprimassent une méditation dont je ne saurai dire la profondeur !
T – Qui m’appelle ?
P – TOI ! , ne te sens-tu pas appelé ? Viens, vois, vis.
T – Qui est venu ? Qui a tracé ?
P – TOI, enfin, n’allons pas trop vite, regarde, dans le trait, c’est le Toi-Moi véritable, en dehors du trait, c’est le superflu, l’inutile, le futile, l’épuisant. Ouvre ta caisse à outils, trouves-y le fil à plomb, une massette et un ciseau. Regarde ma face qui est dans l’ombre, c’est cette face que tu vas amener à l’équerre de la table. Si tu sais travailler dans l’ombre, tu peux travailler à toutes les lumières, les yeux fermés. Puis tu feras de même à l’Occident, puis au Midi, puis à l’Orient car, tu devras, chaque fois, terminer une face, avant d’en commencer une autre et, chaque face devras être Table car, ce qui est en haut est comme ce qui est en bas et, pour ta réflexion, ce qui est dessous devra être comme ce qui est dessus……N’oublie pas, chaque fois que tu mordras dans le trait, c’est à nous deux, Toi et Moi, que tu feras mal. N’as-tu pas de question ?
T – Non.
P – Dommage…

Dans la nuit, (et même pendant le jour !) les lumières de la Grande Ours pénétraient subtilement l’Apprenti tailleur de pierre et la pierre elle même. Le tailleur parlait à la pierre et la pierre répondait au tailleur mais, comme personne n'entendait parler la pierre, il se disait que le tailleur était fou. En fait, c’était vrai mais, de quelle folie ?

DIALOGUE AVEC LA PIERRE
Troisième partie.

Et le Temps s’était écoulé vite, très vite, parfois, avec des lenteurs inexplicables mais, pour un Apprenti, les choses sont vite inexplicables. Le Tailleur pris le temps comme il passait, il le prit même quand il ne passait pas, si bien, que le jour vint où la face Nord de sa Pierre fut tel qu’un miroir en lequel se reflétait le Septentrion et, dans ce miroir, le Tailleur vit son reflet…N’est-ce pas normal de voir son image renvoyée par un miroir poli soi-même et ceci, avec une méritoire perfection ? Mais bien sûr, les chemins de la lumière ont leurs lois…leur LOI.
Donc, il se vit… et comme ça, pour bien se voir, il posa les outils sans regarder où il les posait, il ne les laissa pas tomber certes mais, ils s’échappèrent de ses mains entre les cailloux puis il commença de regarder ce reflet, ce simple reflet plus attentivement. Il y vit son tablier, disons le tablier car, déjà se n’était plus le sien et le laissa choir à terre, comme ça, sa main gauche s’est ouverte et le tablier à chu, d’où le mot chute…puis le Tailleur s’assit et se mis à dialoguer avec son reflet : Je suis bien-Tu es bien, quel brillant ! - Tu es brillant ! - Je vais leurs montrer- Tu vas leurs montrer- Je serais un Maître- Ils seront tes serviteurs- J’ai réussi ! - Tu es au sommet - etc.- etc.- etc. Mono-dialogue interrompu par l’arrivée d’une espèce de clochard venu dont on ne sait d’où. « Salut Tailleur…. Mais tu fais quoi comme ça en plein soleil ? Tu fais du yoga ? Tu as fait quoi de tes outils ? Non, mais tu aurais oublié ton tablier ! Ah ! Je vois, tu regarde ton miroir mais, je ne rêve pas, Monsieur s’admire, Monsieur se prend pour le Phénix, si j’étais toi, je continuerais de travailler
T – Tu n’es pas content clochard ? Non, mais regarde hein ! C’est du miroir ça !
CL – Oui….
T – Hein ! C’est un travail de Maître ! ?
CL – Oui…enfin ça dépend……
T – Pas content ?
CL – Non….. Après tout, oui. Content que ça arrive maintenant…Bon…Enfin, tu es libre. Je m’en vais, j’ai l’impression que le temps va se gâter, pas toi ? Tu sais, dans une carrière, enfin dans certain chantier, quand il y a des gars, comme toi, qui se promènent sans tablier et sans outil on dit qu’il va pleuvoir, tu devrais faire attention, mais tu es libre, adieu.
Et le clochard, aussi, parla tout seul « Seigneur Grand Architecte quelle époque vivons-nous ? On a plus besoin de les pousser, ils tombent tout seul. C’est dommage parce que c’est vrai que sa pierre et bien polie… »
Et les premières gouttes de pluie qui tombèrent cet après midi là, dans la carrière, furent des larmes de « clochard »
Mais le tailleur avait continué……. de s’arrêter. Il rêvait qu’il était reçu, éclairé par mille projecteurs, quelqu’un s’approchait pour le couronner, il élevait cette couronne et lui, le Tailleur, saisissait la couronne et se la posait sur la tête. Mille projecteurs éclatèrent et ce fut la nuit…le brûlant soleil disparu derrière les nuages d’où la pluie vint soulager l’inconsciente victime de son délire, d’elle même, de son propre reflet.
Quand le Tailleur revint à lui, mort de honte, cherchant à tâtons ses outils, saisissant son tablier au moment où celui ci allait être emporté par les eaux, apparut le Contre-Maître (chose étrange, ses salopettes étaient sèches)
CM – as-tu déjà vu la foudre, regarde
L’éclair fulgura, ils en sentirent la chaleur, un claquement sec, ce fut tout.
CM – regarde la pierre abandonnée la bas, le marteau de Thor, le trident de Jupiter vont….
Ses paroles se perdirent, il y eut un souffle, une lumière, un coup de canon, une pluie d’éclats, un Apprenti tailleur de pierre terrorisé, jeté par terre par le choc.
CM imperturbable – si cela suffit à te faire prendre conscience de ta faiblesse, c’est bien.
T effaré – qu’est devenu celui qui a abandonné la pierre ?
CM le regarda longuement – Tu le sais.
Le soleil revint, la chaleur faisait fumer les pierres et les vêtements. Alors, le Contre-Maître s’assit face à l’Apprenti à moins que l’Apprenti ne se soit assis face au Contre-Maître. C’était curieux, de loin, on eut dit qu’il n’y avait qu’un seul homme assis face  au soleil couchant.

Et cela avait duré trois ans comme ça…

DIALOGUE AVEC LA PIERRE.
Dernière partie. Enfin, peut être.

Pendant ces trois ans, ils s’en étaient passé des événements. Je vous en conte un au gré de mes souvenirs.
Voilà qu’un jour le Tailleur s’amène avec des copains ! Copain devrait dire, compagnon, mais en plus vulgaire évidemment. C’est les gars qui « devraient « manger le même pain que vous….. Ce fut du pain, mais si dur, que sa bouche en saigna. Il leur dit « pierre….. Chantier….. Fondation….. Jusque là tout se passa bien, c’est quand il lâcha le mot, Temple, que se fut la catastrophe. Entendez la richesse de vocabulaire du genre : il est dingue ce mec, où qu’i va chercher tout ça ? Et des pires…. Puis vinrent les coups de pied contre la pierre, les crachats, les mégots écrasés qui laissent affreuses traces noires et en plus, cette espèce de clochard qui fait fuir les « copains » du Tailleur puis qui s’assied à côté de lui en parlant doucement.
CL – vois-tu mon p’tit, c’est un gars qui connaît la vie qui te parle, crois en ma longue expérience, la vie est courte, les filles sont belles, toi-même t’es pas mal du tout, part de cette carrière, c’est pas ton job, non, mais regarde tes mains, le bon Dieu, il te les a pas faites pour que tu te les abîmes comme ça, hein ! Qu’est ce que t’en pense ?
T Après un long moment de silence... il s’étire puissamment, fixe le clochard dans ses yeux tellement bleus – « Je continue et adieu les « copains »
Le clochard s’en va en disant «  comme tu voudras, tu es libre » plus loin, dans le crépuscule, on aurait pu l’entendre marmonner « Seigneur Grand Architecte quel travail me fais-tu supporter ? Mais, c’est comme y en a un, qui a dit, ta volonté et non la mienne, et puis ce soir je suis heureux, merci à toi Seigneur Grand Architecte. D’autres disent qu’ils l'ont entendu prononcer des mots en latin, du genre « non nobis Domine » ou quelque chose ainsi……
Le Tailleur rentra chez lui, prit un bain en lequel il prit plaisir de s’immerger complètement pendant de longues secondes. En sortant de là, il vit ses jambes couvertes de bleus…c’est juste avant de s’endormir qu’il comprit…
Ah ! Oui… moi…la Pierre.
Mais d’autres épreuves allaient survenir car, loin d’être taillée la pierre était.


Terminé de transcrire et de corriger ce samedi 10 juin 2006 E\V\

P\ G\


DALOGUE AVEC LA PIERRE
Cinquième partie.
Revu ce 23 février 2011 E\V\

Car loin d’être parfaitement taillée la Pierre était.
Le contre-Maître arrive…bonjour. Le tailleur…bonjour. Es-tu sûr que c’est un bon jour ?...oui je pense……Parce que tu sais on pratique, on dit de ces automatismes qui n’ont plus de sens tient c’est comme « bonjour » bon assez parlé je t’ai apporté un levier, tu en auras besoin……ah oui je n’y avais pas pensé c’est gentil merci….je n’ai pas l’impression que tu vas me remercier longtemps parce que ta Pierre tu l’as remuée au moins avant de commencer le travail ?...non mais avec le levier je vais pouvoir le faire…sauf si la partie enterrée n’est pas plus grosse que la magnifique partie visible que tu nous montres. Allé je te quitte salut.
Le levier brille au soleil je m’en saisi, il est bouillant je me brûle presque la main. Je le reprends à travers mon tablier. Il est lourd, il mesure environ 1,5 m ou peut être bien trois coudées…je m’en saisis de nouveau, cherche à l’engager sous la pierre et j’appuie …Rien…pas un millimètre !  Je ré essaye …Rien. Alors je me dis «  cette Pierre c’est le sommet d’une montagne ou d’une
Pyramide voire d’un obélisque ou plutôt d’un Menhir » J’ai peur…tout ce travail pour rien ?
Non ce n’est pas possible !
Alors je creuse sous la pierre, assez profond. Je sens que ce n’est pas le sommet de quelque chose. Je dégage tout un côté, trouve in point d’appui, engage le levier et appuie. La pierre bouge un peu…
J’entends la Pierre : Il y en a un qui va se faire très mal…Je m’interroge. La Pierre continue…es-tu déjà tombé sur des éclats de pierre ?...bien sûr que non…c’est ce qui va t’arriver n’oublie jamais si je tombe tu tombes et dans le mot tombe il y a tombeau !  Ça y est, j’ai compris. Je me mets en quête de sacs que je rempli de sable ainsi, le renversement de la Pierre sera doux. Je reprends le levier, l’engage et appuie mais, la Pierre ne bouge que faiblement. Tu vois comme il est difficile de se séparer de la matière, n’éprouves-tu pas cette même énorme difficulté ? Tu n’es pas le seul d’ailleurs, de nombreuses pierres n’ont jamais pu être retournée.
Elle a raison cette Pierre, il y a des fois je voudrais tout débarrasser. Plus de livres, plus de classeur, plus de tableaux, plus d’ordinateur, plus d’imprimante, plus de meuble, plus de portable plus de radio enfin le confort minimum. Pas de télévision à écran plat à trois dimensions qui vous implante virtuellement les publicités dans le cerveau dans une sorte de chirurgie sans narcose car vous dormez déjà.
Bon la Pierre ne se soulève pas, je reste là à ne savoir que faire.
Peut-être me suis-je trompé de levier j’ai choisi un levier matérielle mais il en est un autre. Je me lave les mains, ré ajuste mon tablier, pose mes mains sur le bord de la pierre en croisant les trois premiers doigts de la main gauche sous les trois premiers doigts de la main droite. Je ferme les yeux en comptant lentement jusqu’à 15
(15 !), en prenant conscience qu’une énergie descend par mes bras, mes mains, dans la pierre. Puis désenlace mes mains, appuie doucement contre la Pierre qui se renverse sans brutalité aucune, silencieusement sur son lit de sable.
Seigneur Mon Dieu ! Quelle horreur une population de toutes sortes de vers et autres chenilles, cloportes mis en déroute par la brusque apparition de la lumière s’enfuie tandis que d’autre s’enfouissent précipitamment.
Alors le processus recommence: purification par l’eau, deuxième renversement, et là, inondé de soleil, apparaît le dessous des choses qui maintenant sont dessus. Ainsi les erreurs cachées de l’humanité finiront bien par revenir à la surface et ce sera l’hécatombe.
Le dessus de ma Pierre ressemble à une énorme racine de dent elle dépasse des côtés. Je ne me vois pas enlevez pareille quantité de matière.
Apparaît le CM- alors on réfléchit ?
T- oui bien sûr c’est toi qui m’as appris que la réflexion et la première étape de la quête.
CM- mais tu es loin du début de cette quête.
Arrive le clochard-. Tu as raison CM il en a fait un sacré bout c’est vrai ce n’est pas de sa faute si cette pierre était comme ça dessous hein ? mais, je trouve qu’il a bien travaillé et puis voilà.
Le clochard s’en va en marmonnant  J’espère qu’il ne va pas tomber maintenant…
CM- tu vas pouvoir tailler une pierre cubique à pointe il y a assez de matière pour l’achever qu’en penses-tu ? Mais, réfléchi bien….
C’est là que je me rends compte que la quête ne fait que commencer.

Loin d’être taillée, la Pierre était.

Pour le moment J’ai dit

P
\ G\

3004-V L'EDIFICE  -  contact@ledifice.net \