GLDF Loge : NP - O\ de Paris 21/11/2006
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La pierre brute ou
Le coq à deux pattes sans plume

 
Préambule
 
A l’exposé de ma précédente planche, le vénérable du jour m’a fait remarquer qu’il n’était pas nécessaire d’aller autant puiser dans la vaste bibliographie Maçonnique.
Cette planche là devait s’en ressentir.
Mais comment faire, quand on est apprentis pour rédiger un texte qui se tient ?
Surtout que les thèmes que vous nous imposez vous sont très largement plus familiers qu’à nous, appentis qui ne savons ni lire ni écrire.
 
Cette fois, point d’extrait de livres de Grands Maîtres.
Je me suis, comme les galets sur la plage, frotté à vous. J’ai écouté dans diverses loges, Maîtres et apprentis: Donc, simplement une attention à vos manières de voir et de penser.
Nos tenues ici et ces voyages là sont formateurs  
 
Voilà donc mon morceau d’architecture.
 
Alors, la pierre brute c’est quoi ?
 
Je ne tomberais pas dans des approches telles la pierre philosophale, les menhirs, les pierres de pluie, la pierre d’amour, l’omphalos pour terminer par dire que la pierre cesse d’être brute quand elle est taillée.

Dans notre temple, la pierre brute est constamment visible sur les colonnes du nord, là où sont les apprentis.
Elle est aussi placée sur la première marche qui même à l’orient.
Sa position n’est pas le fruit du hasard.
Elle aurait pu être placée sur la colonne Boaz, comme la grenade. Non
Sa place nous montre ce que nous sommes et vers quelle destination cheminer.

La pierre brute est le symbole du rudimentaire, le premier dont les maîtres vous parlent.
Et, comme s’il ne nous suffisait pas d’être nouvel initié, vous en remettez souvent en insistant bien sur le fait que nous sommes brutes.
 
L’apprenti doit comprendre qu’il est à la fois :
-         La pierre et l’ouvrier qui taille cette pierre,
-         L’objet et le sujet
-         L’élève qui doit devenir son propre maître.
Pourrais-je toutefois m’enhardie à affirmer que la pierre brute est comme l’apprenti, elle est muette et qu’il convient de la tailler pour lui donner de l’expression.
 
C’est pour ces raisons que c’est sur MA pierre que je dois exercer mon application.
Que cette image poétique symbolise mon MOI perfectible.
Ceci n’a de sens que si je le comprends comme un cheminement initiatique.
C’est au cours de ce cheminement que je rencontrerais, en loge, tous les autres symboles qui vont jalonner mon chemin. 
Ce matériau de construction symbolise à la fois, sans les dissocier, le Maçon et l’apport du Maçon à la construction commune, ce qu’il est, mais aussi ce à quoi il sert pour l’accomplissement du projet humain : Au sein de la loge et à l’extérieur.
                       
Il faut beaucoup d’humilité pour s’accepter pierre brute.
Il me faudra beaucoup d’ambition pour aller sur un chemin qui me conduira à la connaissance de moi-même, puis, plus tard, découvrir peut-être un jour, à quoi je sers.
 
Il en découle que ma pierre est brute, non pas parce qu’elle n’est pas taillée selon un plan que certains ici ou ailleurs détiendraient, mais parce que je ne sais dans quel édifice elle entrera.
Je vais donc tailler ma pierre sans savoir à quoi j’œuvre, parcequ’aujourd’hui, je ne sais ni lire ni écrire.
Je sais seulement que je vais travailler à la réalisation d’un édifice important.
 
Quelles sont donc les outils dont je dispose pour tailler ma pierre ?

Bien sur et en loge c’est sur le tableau de loge, donc sous les yeux de tous, que l’on peut voir le maillet et le ciseau.
Image à la fois simple et forte.
Ces deux outils sont, pour le Maçon, des plus symboliques.
Sans ces outils rudimentaires, je ne devrais pas devenir un pierre taillée.
De cela, je ne suis pas sur. Je dirai même que je n’en suis pas convaincu. Car seul, on arrive à rien.

Pour m’en expliquer, je vais conter une histoire.

Au début, il n’y avait rien, l’univers était un grand vide.
Puis le GADLU à crée l’univers avec tout ce qu’il comporte :
-         Le Ciel,
-         La terre avec ses étendues plates et ses montagnes,
-         La mer,
-         La lumière,
-         L’homme.

Puis, le temps a passé : Des années, des lustres, des siècles. Tout s’est arrondi : La terre, les montagnes.
Et nous en étions arrivés, rappelez-vous, c’était un soir d’hiver.
Le calendrier indiquait : 17 janvier 6005.

Mais, approchez-vous plus près de cette terre,
Pas au hasard tout de même. Regardez, là.
Une plage, avec le bruit de la mer et de son ressac et un autre bruit.
Ah ! Ce sont des galets, que la mer vient rouler les uns sur les autres.

Mais dites-moi, ils ont une vie ces galets : Ils bougent et ils parlent un langage que les profanes ne comprennent pas ni même n’entendent d’ailleurs.

Vous étiez dèja là vous, à regarder, dèja habitués aux décors, quand l’orage est arrivé.
Il fut violent, si violent, qu’un pan de la falaise est tombé.
Ce qui est tombé état un mélange :
-         De terre,
-         De sable,
-         Et de pierres brutes bien sur. Souvenez-vous, elles étaient deux.

La mer en furie a dissout et emporté la terre au plus profond d’elle-même.
La place de cette terre n’était pas sur cette plage de beaux galets bien ronds.

Puis elle a emporté le sable pour le déposer sur la plage à côté.

Seuls sont restés ces deux pierres brutes, bien anguleuses.
Pour elles, l’enfermement dans le tréfonds de la terre, comme dans l’obscur du caveau de réflexion, venait de se terminer.

La lumière est apparue.

La mer les avait laissés là, à desseins.
Au fil des jours, ces deux pierres brutes ont échangé leurs impressions.
Elles se comparaient à ces galets qui les entouraient.
Combien faudrait’ il de temps pour leurs ressembler ?
Pourraient’ elles seulement un jour leurs ressembler ?

Pour l’instant, ces galets leurs semblaient se mêler mécaniquement sous l’effet de forces extérieures.
Les deux pierres brutes, tout à leur apprentissage, comprirent qu’il leurs manquait de comprendre, faute de connaître, qu’il leurs faudrait beaucoup travailler, beaucoup se frotter pour assumer un jour cette forme qui semblait naturelle.
Elles pourraient un jour passer de la brute solitude à une identité partagée et fraternelle.
Mais on en était encore loin.

Fallait’ il solliciter ses voisins qui les laissaient se débrouiller et qui disaient que c’est par soi-même que l’on apprend car l’écoute passive n’apporte que des illusions ?
Non, il fallait se frotter, s’user, se faire au contact des autres en utilisant les outils de tradition.

Outils de tradition ? Ca y est, nous avons fait le tour de cette histoire et revenu aux outils de tradition du départ : Le ciseau et le maillet.

Vous avez bien sur, vu les parallèles de mon historiette.

C’est ainsi que nous sommes, nous, apprentis d’aujourd’hui, parcourus par le désir d’être des galets ronds et bien polis.
Dèja, après une année et demi, nos pointes aiguës, déchiquetées, commencent à disparaître. Nos arrêtes s’émoussent et nous prenons une forme plus conforme à ceux qui nous entourent.
Vous nous prêtez une écoute plus attentive, comme un encouragement fraternel.

Nous comprenons que, connaître mieux les autres, va nous aider à mieux nous connaître nous même et que pour devenir des pierres taillées ou polies, nous devons nous frotter aux autres.

Mais quittons cette plage couverte de galets bien lisses et bien ronds.

Allons voir sur la plage de sable d’à côté.

Autres décors. autre ambiance, autre environnement, autres lieux autres mœurs.
Hier encore, avant la tempête il n’y avait que du sable.
Là aussi, la tempête à fait tomber des pierres brutes de la falaise.
Un promeneur y a aussi transporté et jeté un galet venant de la plage d’à côté.

Jamais, ces éléments ne s’intégreront dans cet environnement là.
Les pierres brutes ne seront jamais polies et avec le galet ils seront montrés du doigt par les promeneurs.
Leur place n’est pas ici.

Ces pierres et galets, auront beau faire, beau dire, crier bien fort, rien n’y fera. Ils resteront galet et pierres brutes sur une plage de sable fin.

Hors de leur environnement, se sont, selon la phrase de Platon, des coqs à deux pattes sans plume. Ils essayent  d’amener les autres à leur manière d’être et de penser, mais rien n’y fera.
Autant, la pierre brute restera brute sur ce sable.
Autant ce galet, arrivé dans son environnement à se fondre parmis les siens, autant ici, il est déplacé et n’apportera rien à l’ensemble.
Ce sable bien sur ne deviendra jamais galets.

A l’entrée de la rue Puteaux

A l’entrée de cette rue, un panneau de la ville de Paris décrit ce que cette rue était au siècle dernier.
Il y est dit que c’était un cimetière et que les pierres tombales de l’époque ont disparus.
Pourtant s’étaient des pierres taillées, honorables, représentatives du lieu, mémoire humaine.   
Que sont devenues ces pierres ? Nul ne sait. Le panneau indique qu’elles ont certainement été réemployées dans la construction des maisons de cette rue.
Peut’ être certaines forment elles le sol de ce temple ?
De pierres brutes, devenues pierres taillées, elles sont redevenues brutes.

Nous nous insérons dans les ensembles de notre époque en essayant de porter à l’extérieur ce que nous apprenons dans le temple.

Que deviendrons-nous ? Que seront-nous dans le monde qui vient, dans un monde changé ?
Ne seront nous pas à nouveau des pierres brutes ?

J’ai dit V.·.M.·.
 
Bibliographie :
Aucune.
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