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Le Silence

Avant d'initier un néophyte aux arcanes de son enseignement occulte, Pythagore le sou­mettait à diverses épreuves qui trempaient son caractère et permettaient de le juger. C'est ainsi que le nouveau venu parmi les sages de Crotone écoutait, mais n'interrogeait pas. Pendant des mois et des mois, il était soumis à la discipline du silence. Si bien que lorsqu'enfin la parole lui était accordée il n'en usait qu'avec circonspection, avec respect. Il avait alors appris, en son for intérieur, par expérience personnelle, que le silence est une force quasi divine, mère de toutes les vertus.
Hélas, que ne sommes-nous encore sous la paternelle autorité de Pythagore !

C'est de l'absence de silence que souffre essentielle­ment le monde actuel. Non seulement la so­ciété contemporaine est littéralement empoi­sonnée par le tumulte des machines (dont les machines «parlantes»), mais encore, mais surtout elle est abreuvée de mots, de mots so­nores et vides. C'est à Qui parlera le plus, fera le plus de déclarations, se racontera avec le plus de détails oiseux.

Comme il avait raison, Kirkegaard, le grand penseur scandinave, quand il écrivait : « Le monde dans son état présent, la vie entière sont malades. Si j'étais médecin, si l'on me deman­dait ce que je conseille, je répondrais :  faites le silence ! ».
Oui, le véritable Rosicrucien se reconnaît, entre autres vertus, à ce qu'il donne l'exem-ple, sinon du silence, au moins de la tempé­rance verbale. Il ne parle qu'à bon escient, c'est-à-dire rarement, et les paroles qu'il pro­nonce sont riches d'un sens profond. Il fait sien ce conseil d'un instructeur soufi : « Si le mot que tu vas prononcer n'est pas plus beau que le silence, ne le dis pas ! ».

Ce n'est pas seulement vis-à-vis des autres qu'il faut rester silencieux quand on postule à l'initiation, mais aussi envers soi-même. Qu'on nous comprenne bien : c'est dans le silence que le Cosmique, le Divin se commu­nique à nous. Il faut, pour entendre les conseils de Dieu, pour recevoir les intuitions vivifiantes, savoir faire taire en soi toutes les voix profanes. La Bible nous l'apprend sous une forme symbolique, au Premier Livre des Rois, quand elle nous montre le prophète Elle, réfugié dans le désert et attendant un message de l'Eternel :
« Dieu lui dit : Sors, tiens-toi sur la monta­gne, devant l'Eternel. Et voici que l'Etemel passait. Un vent fort et violent déchirait les montagnes et brisait les rochers devant l'Eter­nel. Mais l'Eternel n'était pas dans ce vent. Après le vent, il y eut un tremblement de terre. Mais l'Eternel n'était pas dans ce tremblement de terre. Après le tremblement de terre, un feu. Mais l'Eternel n'était pas dans ce feu. Et après le feu, un souffle doux et subtil...» Et c'est alors que l'Eternel se manifesta à Elie... Sous une forme différente, le mystique Attar exprime la même vérité dans son fameux traité:  « Le langage des oiseaux ». Aussi long­temps qu'ils marchaient, ils discouraient ; mais quand ils furent arrivés, tout discours cessa. II n'y eut plus ni guide ni voyageur. Le che­min même cessa d'exister».

Le plus grand des mystiques français, Louis Claude de Saint-Martin mérita d'être nommé par ses disciples le Silencieux Inconnu. II a, plus que tous les autres, exalté la vertu du si­lence, lui qui écrivait :  « Les grandes vérités ne s'enseignent bien que par le silence». Et mieux encore, cette constatation un peu dé­sabusée qui s'applique si bien, malheureuse­ment, à notre époque : « Quelle plus grande preuve de la faiblesse de l'homme que la mul­tiplicité de ses paroles ! »

Il est bien vrai que le silence est une ré­elle épreuve pour celui qui, par habitude ou par inclination, ne sait pas l'observer. La tradition nous dit que les anciens en avaient fait une divinité, masculine chez les Grecs qui la nommèrent Harpocrate, et féminine chez les Romains par lesquels elle fut appelée Tacita ; la bien nommée puisque son nom venait du verbe latin tacere, se taire. C'est dire à quel point nos ancêtres vénéraient cette vertu. Et aussi que les Romains ne considé­raient pas le bavardage comme une faiblesse du sexe faible !

Comme nous le dit ce message, la discipline du silence est une force ; elle nous permet de garder en nous un influx vital qui est trop gas­pillé par le bruit inutile des mots. Essayez, lorsque vous allez parler, d'évaluer rapide­ment si ce que vous avez l'intention de dire en vaut la peine ; si cela peut faire quelque bien, et, surtout, si vous n'allez pas faire du mal. Vous constaterez que l'effort, pour réfréner une parole inutile, provoque en vous une sor­te de réaction, une lutte entre la tentation et ce qui est bien, et chaque victoire vous donne­ra une force nouvelle ; c'est victoire il est bon de suivre le conseil du soufi, et si ce que vous alliez dire n'est pas plus beau que le si­lence, abstenez-vous !

Méditez, méditez ce message, pensez-y sou­vent et nous espérons qu'il vous aidera à gravir un échelon sur la voie de la spiritualité.

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\ T\ (Par)

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